Le rôle des collectivités territoriales dans la fourniture des services sociaux - CG (6) 19 Partie II

Rapporteur: Markku ANDERSSON (Finlande)

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EXPOSE DES MOTIFS

1. INTRODUCTION

Les systèmes européens d'administration locale sont divers et donc difficiles à classer par catégorie. On les répartit parfois en deux grands groupes : les systèmes du Sud de l'Europe (basés sur les traditions napoléoniennes) et les systèmes du Nord de l'Europe. La tradition du Nord prévaut dans les pays nordiques, mais elle s'est aussi imposée ailleurs, par exemple, aux Pays-Bas, en Australie, en Suisse et dans certaines parties de l'Allemagne. Bien que le Royaume-Uni soit souvent classé dans ce groupe, l'administration locale britannique ne jouit pas d'une autonomie qui lui soit garantie par la Constitution et les pouvoirs locaux n'ont pas de mandat général.

Le groupe du Sud de l'Europe comprend la France, l'Italie, l'Espagne, le Portugal, la Belgique, le Luxembourg et la Grèce. Bien que ce qui distingue les municipalités de ce groupe par rapport à celles du groupe du Nord ne soit pas nécessairement l'absence de protection constitutionnelle, elles peuvent dans l'ensemble être considérées plutôt comme des organes politiques que comme des entités chargées de pouvoir aux besoins sociaux.

Les municipalités nordiques, en revanche, notamment les municipalités finlandaises, ont essentiellement pour mission d'organiser et de produire les services sociaux. C'est pourquoi le Groupe de travail du CPLRE sur les services sociaux a demandé à l'Association des autorités locales et régionales finlandaises (AALRF) de préparer un rapport sur les principaux traits de la "municipalité providence" et sur son rôle en matière de services sociaux et de santé.

Le présent rapport se fonde largement sur cette étude. Il décrit en détail le système nordique de services sociaux en se basant sur le cas de la Finlande, qui se caractérise par l'importance du rôle que jouent les autorités locales dans la fourniture de services sociaux, de santé et d'éducation. Il examine aussi brièvement les principaux traits du modèle du Sud de l'Europe en se référant aux cas de l'Italie et de la France et se sert par ailleurs des exemples de la Russie et de la Lituanie pour illustrer les problèmes spécifiques des pays en transition.

Il convient d'être prudent lorsque l'on compare les systèmes de protection sociale et les services sociaux. Les systèmes de sécurité sociale et les services sociaux reposent sur des concepts très divers, d'où les différences d'interprétation et de dimension de leur contenu. De ce fait, il est difficile de comparer les systèmes de sécurité sociale et services sociaux des différents pays. L'information sur l'organisation des services sociaux dans les différents pays peut être introductive, mais il faut se garder lorsqu'on les évalue de perdre de vue les facteurs historiques, culturels et politiques.

1.1 Les modèles de protection sociale en Europe

Les modèles de protection sociale sont souvent classés comme suit : universels (connus aussi comme modèles nordiques), libéraux, corporatifs et latins. Bien que cette classification présente aussi ses propres risques, certains traits fondamentaux peuvent néanmoins être identifiés et nous aider à comprendre les particularités de fonctionnement des différents systèmes.

Dans tous les modèles, les municipalités, les familles, les églises, les différentes organisations et le marché du travail sont fournisseurs de services sociaux. Toute la question est de savoir à qui incombe principalement la responsabilité de fournir les services. Sous ce rapport, il existe de très grandes différences entre les systèmes européens.

Modèles de protection sociale et rôle des municipalités

MODELE

UNIVERSEL (NORDIQUE)

LIBERAL

CORPORATIF/LATIN

TYPE DE MUNICIPALITE

- service

- politique/service

- politique

PRINCIPES

- universalité
- égalité des résultats
- basé sur l'emploi

- marchés
- basé sur l'emploi
- égalité des groupes

- basé sur l'emploi
- marchés
- égalité des groupes

REGLES

- régi par la municipalité

- régi par le marché

- régi par l'Etat/l'éthique catholique

PRATIQUE

- municipalité
- famille
- assurance
- org. bénévoles
- Eglise
- secteur privé

- assurance
- famille
- secteur privé
- municipalité
- org. bénévoles
- Eglise

- assurance
- famille
- Eglise
- org. bénévoles
- secteur privé
- municipalité

Dans le système nordique (Finlande, Suède, Norvège, Danemark et Islande), la responsabilité d'organiser et de produire les services sociaux incombe essentiellement aux municipalités : nous pouvons donc parler de "municipalités de service". Dans ce modèle, le marché du travail, l'assurance, l'Eglise et autres organisations ne feront que compléter le système de protection sociale. Le modèle nordique n'exige pas que les intéressés aient un emploi ou qu'ils soient mariés à une personne qui travaille ou qu'ils aient antérieurement travaillé ou qu'ils soient assurés pour pouvoir bénéficier des services. En vertu du principe d'universalité des prestations, le système municipal garantit des chances égales à tous les groupes de la population.
La responsabilité des municipalités, notamment en ce qui concerne les services sociaux, est beaucoup plus large en Finlande que dans la plupart des autres parties de l'Europe. En Europe centrale et dans le Sud de l'Europe, la protection sociale repose essentiellement sur les principaux facteurs suivants : emploi, assurance, famille, Eglises et organisations non gouvernementales. La famille joue un rôle capital, car la protection sociale des membres de la famille dépend des droits auxquels peut prétendre celui des membres de la famille qui travaille. Les Eglises et autres organisations non gouvernementales jouent également un rôle important en matière de protection sociale. Dans de nombreux pays il existe en outre, à côté de la protection sociale liée à l'emploi, une possibilité d'assurance sociale privée.

Dans les pays où se pratique le système libéral, par exemple en Grande-Bretagne, et dans les pays pratiquant le modèle corporatif, tels que l'Allemagne, l'Autriche et la Hollande, les municipalités ne sont pas les principaux fournisseurs de services sociaux. Cela est également vrai pour certains pays latins, tels que l'Italie, l'Espagne et la France. Pour ces pays, nous pouvons parler de "municipalités politiques".

Quand nous voulons évaluer les différents systèmes, il ne faut pas perdre de vue que les modèles sont purement théoriques et que les différents pays s'en écartent tous à des degrés divers.

Quant aux pays en transition de l'Europe centrale et orientale, leur situation sous ce rapport est tellement variée qu'il est impossible de les classer dans l'une ou l'autre de ces catégories pourtant larges et simplifiées. Un des grands problèmes auxquels sont confrontés ces pays est de savoir comment édifier un système de sécurité sociale solide et efficace compatible avec une économie de marché moderne. Face aux graves problèmes sociaux, en partie hérités du passé et en partie générés par le processus de transformation économique et politique, il y a urgence à trouver des solutions. Sans aucun doute, les enseignements à tirer de l'exemple des économies de marché avancées aideront ces pays à mettre au point leurs propres systèmes de protection sociale et à trouver le rôle approprié à impartir aux municipalités dans le processus.

Les différences entre les systèmes sociaux européens s'expliquent dans une large mesure par les différences de conceptions et de traditions quant au rôle de l'Etat et des municipalités. Le système nordique reflète de toute évidence le principe de subsidiarité, c'est-à-dire l'idée que plus le niveau auquel les problèmes sont traités est proche des intéressés, mieux leurs besoins sont satisfaits. C'est pourquoi dans le système nordique la tâche de fournir les prestations sociales incombe principalement aux autorités locales.

Les fournisseurs de services selon les différents modèles

1.2 Le modèle nordique de protection sociale
Le système nordique vise à améliorer le bien-être des citoyens, leur sécurité et leurs propres activités par un système de protection sociale dont les principaux traits sont d'être ouverts à tous et d'offrir une large gamme de prestations, et à réduire les inégalités entre les citoyens en matière de revenu. Les services sociaux, sanitaires et éducatifs sont fournis par les municipalités, financés principalement par les revenus fiscaux des municipalités et accessibles de façon égale à toute la population.

Les structures sociales des pays européens présentent de nombreuses similitudes. Néanmoins les pays nordiques se distinguent du reste de l'Europe par certains traits particuliers. Dans ces pays les principaux fournisseurs de services sociaux et de santé sont les autorités locales. Tandis que le gouvernement central a, d'une manière générale, compétence pour décider de la politique nationale de santé, des nouvelles mesures législatives à prendre et du financement qui incombera à l'Etat ; les autorités locales quant à elles sont chargées de fournir la majeure partie des services de santé à leurs administrés, soit en les organisant elles-mêmes ou en les achetant.

La Finlande est peut-être le meilleur exemple pour illustrer le rôle que peuvent jouer les autorités locales dans la fourniture de services de santé et de services sociaux. Sous ce rapport, le système finlandais est une quintessence du système social nordique.

Pour quelles raisons les pays nordiques ont-ils développé un modèle de société providence différent des autres modèles européens ? Peut-être à cause des différences de structures de leur population et de leur économie.

Les pays nordiques ne se sont industrialisés et urbanisés que relativement tard par rapport aux autres pays. Pendant très longtemps, la Finlande est restée une société agricole, ce qui s'est reflété dans l'organisation des services sociaux. Dans le système finlandais d'allocations familiales, adopté en 1942, et dans la Réforme du régime national de retraite, adoptée en 1956, par exemple, les prestations sont accordées à "tous les enfants" et à "toute la population". Si ces systèmes n'avaient été fondés que sur les droits des personnes assurées du fait de leur activité professionnelle, toute une partie de la population agricole serait restée sans aucune protection sociale. Il était dans l'intérêt commun des uns et des autres de créer un système d'avantages sociaux s'adressant à l'ensemble de la population.

2. LA MUNICIPALITE PROVIDENCE FINLANDAISE

2.1 La base juridique de la société providence finlandaise

La société finlandaise de protection sociale est "créée par la loi". Les dispositions réglementaires se sont multipliées durant les années 60 et au début des années 70, mais il n'en demeure pas moins que la loi demeure le principal instrument de réglementation de la société. Au début des années 1990, le nombre de lois et d'arrêtés réglementaires adoptés annuellement tournait autour de 1 700.
La Constitution finlandaise garantit l'autonomie locale en accordant à la population locale le droit fondamental d'influencer les décisions des pouvoirs publics et de participer au processus de décision. La Constitution donne aux autorités locales une assez large indépendance par rapport au pouvoir central.

En juillet 1995, une nouvelle Loi sur l'Administration locale est entrée en vigueur en Finlande. Elle garantit, entre autres choses, l'application d'un processus de décision démocratique et ouvert dans les municipalités. Les dispositions relatives aux municipalités leur octroient une compétence générale assez large et les chargent de promouvoir le bien-être de leurs administrés et de leur offrir la possibilité de participer à la gestion de la collectivité et d'exercer une influence sur les décisions.

Les municipalités sont également autorisées à créer des sociétés pour assurer l'exécution de presque toutes les tâches qui leur incombent et elles peuvent aussi acheter des services à des fournisseurs privés. La législation qui couvre ces droits fondamentaux est de toute évidence plus large en Finlande et dans les autres pays nordiques que partout ailleurs en Europe. La Constitution présuppose que les services sociaux et autres prestations sociales s'adressent à tous (c'est le principe d'universalité).

Plusieurs lois spéciales chargent les municipalités de la responsabilité légale d'organiser pour leurs administrés les services publics à caractère social, par exemple, les services sociaux, les services de santé, de formation et d'enseignement, de bibliothèques, les services culturels, et également la protection des consommateurs. Certains services sociaux et médicaux sont reconnus comme des droits subjectifs des citoyens, en ce sens que les citoyens ont le droit d'exiger que les municipalités leur fournissent ces services.

Les municipalités ont aussi la possibilité d'organiser les services sociaux et de santé en les achetant à des fournisseurs privés. Dans la pratique, les services sociaux privés, basés sur l'assurance ou sur le marché, viennent en complément des services incombant aux autorités publiques. Les parents, par exemple, peuvent choisir de confier leurs enfants à des services de crèche ou de garderie partiellement subventionnés par la municipalité, plutôt qu'à des services municipaux.

Le système de santé finlandais dispose d'un large réseau de médecins privés. La consultation de médecins privés est aidée, entre autres, par une indemnisation versée sur les fonds publics pour les honoraires du médecin, le traitement médical et les soins (en 1997, environ 840 millions de MFI). Les frais de médicaments sont également remboursés sur les fonds publics (en 1997, environ 3.3 milliards de MFI).
Certains services privés sont également réglementés et surveillés comme le sont les services publics. Toutes les unités produisant des services sociaux et médicaux sont soumises au contrôle des autorités publiques. Quand une municipalité organise ses services sociaux et de santé en les achetant à des producteurs privés, ces services doivent répondre aux mêmes exigences de qualité, de qualification du personnel et de coûts etc. que les services organisés par la municipalité elle-même.

Bien que l'autonomie accordée aux municipalités par la Constitution leur assure une indépendance assez large, l'Etat exerce son autorité sur les municipalités par la législation et autres dispositions réglementaires. Par ailleurs, la Finlande est membre de l'UE, ce qui signifie que la réglementation de l'UE fait partie intégrante de la législation finlandaise.

La direction générale et la supervision des services sociaux et sanitaires municipaux relèvent de la compétence du ministère des Affaires sociales et de la santé et des Directions provinciales de l'administration publique. Principalement, les Directions provinciales ont le droit d'intervenir dans les opérations municipales quand un citoyen ou une quelconque autorité publique considère que la municipalité a violé la loi.

Le gouvernement finlandais exerce son contrôle sur les services sociaux et de santé municipaux en approuvant un plan quadriennal et un programme d'action concernant les services de santé. Ce programme d'action contient des directives pour le fonctionnement des services sociaux et de santé. En outre, le gouvernement décide annuellement du montant des subventions publiques que l'Etat versera aux municipalités pour leur permettre d'organiser leurs services sociaux et de santé. La loi stipule le droit des municipalités à recevoir ces subventions de l'Etat et les motifs justifiant l'octroi des subventions.

Le Comité de base de la protection sociale, qui relève du ministère des Affaires sociales et de la santé, a été créé pour surveiller les fonctions essentielles des services de base dans les municipalités. Il est composé de représentants de l'Etat, des municipalités et des associations de consommateurs. Si les services de base sont insuffisants dans une municipalité, le Comité peut exiger que la municipalité rectifie la situation. S'il arrive qu'une municipalité néglige clairement ses obligations légales, la Direction provinciale peut lui ordonner de rectifier sa position et même lui infliger une amende.

2.2 L'organisation des services sociaux

Les principes régissant un Etat constitutionnel et le principe de la démocratie locale ont fortement influencé le développement de la société providence en Finlande, de même que dans les autres pays nordiques. La législation a joué un rôle capital dans la création des systèmes de protection sociale. Les services sociaux sont principalement financés par les revenus fiscaux et les redevances à payer par les usagers pour les services sont largement subventionnées.

Le principe le plus important dans le modèle nordique est que les pouvoirs publics, notamment les municipalités, doivent jouer un rôle majeur dans l'organisation, la production et le financement des services sociaux. Les municipalités nordiques sont des "municipalités de service" qui produisent elles-mêmes leurs services. Les pouvoirs publics assurent aux citoyens les services essentiels et la sécurité matérielle élémentaire durant toute leur vie ("du berceau à la tombe").

Au début de 1999, la population de la Finlande comptait environ 5.12 millions de personnes. Le pays est divisé en 452 municipalités, dont la plus petite compte 131 administrés et la plus grande 540 000. Il existe aussi 290 communautés de communes et le secteur municipal dans son ensemble emploie environ 420 000 personnes, dont 80 pour cent approximativement travaillent dans les services sociaux, y compris le domaine culturel.
En 1997, le personnel des services sociaux et de santé municipaux comptait près de 230 000 personnes. Par ailleurs, les 1 800 producteurs privés de services sociaux employaient environ 15 400 personnes. (A titre de comparaison, l'Etat finlandais emploie 120 000 personnes).

Personnel des services sociaux et de santé municipaux par domaine d'activité, en 1997


L'importance des fonctions municipales est illustrée par les chiffres suivants pour l'année 1997 :

— 575 000 élèves dans les écoles primaires et 130 000 dans les écoles secondaires
— les centres de santé ont reçu 31 millions de patients extérieurs en consultation et les journées d'hospitalisation se sont chiffrées à 8 millions
— les polycliniques des districts hospitaliers ont reçu environ 6 millions de patients extérieurs en consultation et assuré 5.9 millions de journées d'hospitalisation
— environ 177 000 enfants ont été reçus en garderie et dans les crèches
— 132 000 familles, à peu près, ont bénéficié d'une allocation pour soins à domicile
— 100 millions de livres ont été empruntés dans les bibliothèques

En Finlande, environ 50 pour cent des dépenses des municipalités et des communautés de communes sont financées par les revenus fiscaux des municipalités, tandis que le financement de leurs dépenses par l'Etat représente environ 15 pour cent. Le reste est couvert par les revenus de fonctionnement des services et les emprunts. Les revenus fiscaux des municipalités se composent de l'impôt local sur le revenu, l'impôt foncier et la part de l'impôt sur les sociétés (commerciales) qui revient aux municipalités.
La dépense totale du secteur municipal en 1998 s'est élevée à 142 milliards de MFI, soit à peu près 16 pour cent du PIB. Les services sociaux, c'est-à-dire services sociaux et aides sociales, services de santé et services culturels ont représenté approximativement 70 pour cent des dépenses municipales. Les dépenses d'investissement et de fonctionnement des services sociaux et de santé représentaient à elles seules la moitié du total.
Conformément au principe d'autonomie municipale, chaque municipalité s'occupe de ses propres administrés et a à charge de fournir les services sociaux et de santé. La fourniture de services sociaux est prévue par la loi et obligatoire, mais la municipalité peut dans une large mesure décider de la proportion dans laquelle elle fournira les différents services et du montant des ressources qu'elle consacrera aux différents services (sauf pour les services de "droit subjectif").

Les services de santé inclus dans le système national de santé font également partie des tâches légales et obligatoires des municipalités. La charge d'organiser les servies de santé est stipulée principalement dans la Loi sur la santé publique, la Loi sur les soins médicaux spécialisés et la Loi sur la santé mentale. Néanmoins, en matière de services de santé, la municipalité a également une assez large latitude d'appréciation quant au montant des ressources qu'elle décidera d'allouer aux différentes fonctions. La responsabilité des municipalités concernant la fourniture de services de santé est large et générale.

La plupart des services sociaux et de santé sont fournis dans les limites des ressources prévues pour eux dans le budget. Quels que soient les services sociaux ou de santé concernés, les clients ont un droit légal, subjectif, à recevoir les services adéquats. En vertu de ce droit, le client peut, au besoin, réclamer par voie judiciaire que le service soit exécuté.

Par exemple, le service de garderie pour les enfants de moins de 7 ans doit être fourni, si les parents le demandent. De même, pour les personnes lourdement handicapées, des services de logement, de transport et d'interprétation doivent être organisés, si les intéressés en font la demande à la municipalité. Chacun a droit aux soins médicaux d'urgence et autres services d'urgence, quand il en a besoin.

Les citoyens ont droit aux prestations suivantes :

1. Service adéquat pour une personne ayant un besoin urgent et crucial d'aide sociale ou médicale
2. Allocation d'entretien de l'enfant (justifiée par le défaut d'entretien)
3. Allocation de subsistance pour assurer les besoins minimaux de la vie
4. Transport pour les personnes handicapées, quand celui-ci est nécessaire pour qu'elles puissent recevoir les soins essentiels
5. Indemnité pour l'équipement spécial nécessaire du logement des personnes lourdement handicapées
6. Logement adapté et services de transport, y compris l'accompagnement, pour les personnes lourdement handicapées
7. Services d'interprétariat pour les personnes lourdement handicapées
8. Jardin d'enfant et garderie pour les enfants de moins de 7 ans
9. Crèche pour les enfants de moins de 4 ans ou, comme solution de rechange, allocation pour frais de garde de l'enfant à domicile
10. Logement, y compris les réparations, et moyens de subsister suffisants pour les familles recevant l'aide sociale à l'enfance
11. Allocations post-traitement pour les enfants et les jeunes bénéficiant des services d'aide sociale à l'enfance, y compris une allocation de substance suffisante et réparations du logement
12. Logement pour les jeunes bénéficiant des services d'aide à l'enfance.

En Finlande, les services sociaux et allocations sociales sont universels, c'est-à-dire "prévus pour tout le monde". "Chacun aura droit à" ou "la loi garantit à chacun le droit de" sont les maîtres-mots lorsqu'on veut définir les droits constitutionnels fondamentaux aux services sociaux, ainsi que les droits à l'assurance maladie et à la protection contre le chômage. Le revenu ou la propriété n'affectent en rien la possibilité d'utiliser les services sociaux, médicaux ou éducatifs.

Par exemple, les parents d'un enfant d'âge pré-scolaire ont droit, pour leur enfant, à une place dans les crèches ou les garderies municipales, indépendamment de leur situation en matière d'emploi. De même, la municipalité doit fournir les services de logement ou d'hébergement en établissement aux personnes âgées, en fonction de leurs besoins ; les enfants ne sont pas tenus de prendre en charge financièrement ou de quelque autre manière, l'entretien de leurs parents. Le concept d'universalité des services signifie aussi que la société veille à ce que personne ne soit abandonné.

Ce modèle de protection sociale, fondé sur le principe d'universalité, jouit d'un large soutien dans la population. D'après les études qui ont été faites, les citoyens étaient assez opposés à la réduction des services sociaux, même durant la récession économique qu'a connue la Finlande au début des années 1990.

Le système de protection sociale des pays nordiques, basé sur l'universalité des services, diffère des systèmes de presque tous les autres pays. La part des services sociaux dans le PIB est de façon constante supérieure à la moyenne de la plupart des autres pays européens. Un des traits qui caractérise le modèle social nordique est la part élevée des dépenses sociales et la part plus faible des dépenses de sécurité nationale dans le montant global de la dépense publique. D'après les statistiques de l'OCDE pour 1996, les dépenses de l'administration générale et les dépenses de sécurité nationale en Finlande s'élevaient à 4.6 pour cent du PIB. Dans le reste des pays nordiques, ce chiffre était de 5.5 pour cent ; dans les pays de l'Union européenne de 5.6 pour cent, et aux Etats-Unis de 8.5 pour cent. En Finlande, les dépenses sociales atteignaient 15.4 pour cent du PIB, dans les autres pays nordiques 16 pour cent, dans les pays de l'UE, 11.9 pour cent, et aux Etats-Unis 6.2 pour cent.

Le système d'organisations syndicales et de conventions collectives a joué un rôle important dans la politique sociale de la Finlande. Dans les négociations entre le gouvernement, les employeurs et les syndicats, lorsqu'il s'agit de formuler les politiques sociales, s'applique le concept de "coopération tripartite".

Bien que la politique de l'emploi ait traditionnellement visé au plein emploi, un système très large de sécurité sociale et de protection contre le chômage a également été développé. Dans ce système, un taux comparativement élevé d'imposition a dû être maintenu.
La récession, l'accroissement de la dette publique et une forte augmentation du chômage ont rendu difficile la poursuite d'une politique de plein emploi et de maintien du haut niveau de protection contre le chômage. Le taux de chômage en Finlande (environ 10 pour cent) est plus élevé que dans les autres pays nordiques et tourne autour de la moyenne des pays de l'Union européenne.

2.3 Le financement des dépenses de sécurité sociale

Il existe des différences considérables entre les pays en matière de financement de la sécurité sociale. En Finlande, au Danemark, en Norvège et en Suède, la part des municipalités dans le financement total des dépenses sociales est plus élevée que dans les autres pays. (L'Islande est le seul pays où la part de l'Etat dans le financement soit relativement élevée, avec un taux de 50 pour cent. En Finlande, la part de l'Etat n'est que de 28 pour cent).

En Finlande, la part des employeurs dans les cotisations de sécurité sociale correspond à la moyenne européenne, tandis que la part des ménages est exceptionnellement faible, tout comme dans les autres pays nordiques. Parmi les pays de l'UE, le Danemark finance sa sécurité sociale presque exclusivement par l'impôt.

Une très large majorité de citoyens finlandais est toujours favorable à l'utilisation des revenus de l'impôt, comme on le fait dans le modèle actuel, pour financer le système de protection sociale de base universel, soit au niveau présentement pratiqué, soit même à un niveau plus élevé. Bien que la récession économique du début des années 1990 ait suscité des attitudes plus réservées dans ce domaine, les enquêtes qui ont été faites en 1994 ont fait apparaître que la majorité des citoyens préfèrent encore maintenir le niveau actuel d'imposition pour financer la sécurité sociale. Dans les enquêtes les plus récentes, la récession s'étant estompée, les opinions favorables à la société providence se sont encore renforcées.
Les disparités en matière de revenu se sont sensiblement réduites en Finlande jusqu'au milieu des années 1980. Puis, comme dans la plupart des pays de l'OCDE, ces disparités se sont progressivement accentuées, jusqu'au milieu des années 1990.

Néanmoins, la répartition du revenu demeure encore aujourd'hui plus égalitaire dans les pays nordiques qu'en Europe en général. Les statistiques internationales montrent qu'en Finlande la proportion de personnes pauvres par rapport à l'ensemble de la population est la plus faible d'Europe. Dans tous les pays nordiques, la proportion de personnes pauvres est largement inférieure à 10 pour cent de la population totale.

Ces disparités plus faibles en matière de revenu tiennent dans une large mesure aux effets égalisateurs des prestations de sécurité sociale et au système fiscal. Les services offerts à tous à des prix inférieurs à leur valeur réelle ou gratuitement ont aussi contribué à l'atténuation de ces disparités de revenu. Les prix payés par le client pour les services sociaux et de santé couvrent approximativement 10 pour cent des coûts.
Le niveau de la dépense publique en pourcentage du PIB est un indicateur de la politique sociale d'un pays, même si le rapport entre les dépenses publiques et les dépenses sociales ne donne pas une idée précise du contenu de la politique sociale. Par exemple, le ratio dépense sociale/PIB n'indique pas le niveau de protection assuré par le système de sécurité sociale, ni les groupes plus particulièrement ciblés au sein de la population par les mesures sociales.

Néanmoins, il est de pratique courante d'étudier le ratio dépense sociale/PIB lorsqu'on compare les systèmes de protection sociale des différents pays. Même imprécis, l'indicateur peut tout de même être utilisé pour les comparaisons à long terme.
Dans les années 1980, en particulier, la croissance de l'économie et celle du ratio de la dépense publique par rapport au PIB a été en Finlande une des plus rapides d'Europe. La croissance du ratio de la dépense publique peut s'expliquer par le développement des services sociaux.
Dans les années 1990, du fait de la récession économique et de la réduction de la production totale, le rapport de la dépense sociale et publique finlandaise au PIB a augmenté et se situait au-dessus de la moyenne européenne. Mais avec l'amélioration récente des performances de l'économie et grâce à la réduction des dépenses publiques, la Finlande tend maintenant à se rapprocher du niveau moyen des pays de l'UE (ratios de la dépense sociale en 1996 : Finlande 32  %, Suède 35  %, Danemark 31  %, Norvège 26  %, Islande 19  %, moyenne des pays de l'UE 28  %).

2.4 La viabilité de la municipalité providence

Dans le modèle nordique, l'individu attend de l'Etat ou de la municipalité des services sociaux et la possibilité d'exercer ses autres droits fondamentaux, et la loi fait à l'Etat et à la municipalité obligation de fournir les prestations. Les droits sociaux assurent aux citoyens la sécurité et accroissent leurs libertés et leurs possibilités d'action dans la société.

Par contre, le système libéral et le système corporatif se fondent sur la conviction que l'Etat et les municipalités ne doivent pas s'ingérer dans la vie des citoyens autrement qu'en protégeant leur intégrité personnelle et la sphère de leur liberté. Cela est un autre aspect du principe de subsidiarité, qui veut que la société évite de réglementer les activités des familles, des individus et le marché. D'après ce principe, l'Etat ne doit pas étendre le secteur public aux politiques sociales, car cela est considéré comme une ingérence dans la sphère protégée de la personne. Ces services sont fournis principalement par les familles et autres acteurs privés et non par les pouvoirs publics.

Dans les pays nordiques, le fait que la responsabilité des fonctionnaires publics, le principe de transparence, la protection juridique et autres exigences découlant du rôle des autorités publiques ne soient pas automatiquement respectés dans un contexte régi par le marché, où les acteurs privés produisent les services, a souvent été considéré comme un problème. Il est d'une importance fondamentale que les fournisseurs publics et privés de services soient soumis aux mêmes impératifs.

Les obligations et le rôle des municipalités dans la société diffèrent considérablement dans les diverses parties de l'Europe. D'une manière générale, plus on va vers le Nord de l'Europe, et plus le rôle des municipalités est grand. Les municipalités des pays nordiques ont une compétence très étendue et c'est à elles qu'incombe dans une très large mesure la production des services publics.
A propos de la municipalité providence nordique, on peut légitimement se demander quelle est la valeur ajoutée par un système où les problèmes "locaux" communs sont traités en recourant à la démocratie directe locale.

Pourquoi la société providence repose-t-elle sur les municipalités ? Les services sociaux peuvent-ils être assurés sans les municipalités ? Les municipalités doivent-elles nécessairement s'occuper des services sociaux et les produire elles-mêmes ? Les services sociaux peuvent-ils être produits d'autres manières, pourvu que la municipalité garantisse leur disponibilité ? Savons-nous nous servir de la valeur ajoutée municipale ?
Les habitants tirent-ils avantage du fait que les écoles, les activités de santé et d'aide sociale, l'urbanisme et la construction fassent partie de la même "organisation municipale" ? La démocratie locale ajoute-t-elle un nouveau contenu aux services municipaux ? La base fiscale de la municipalité assure-t-elle mieux les ressources nécessaires pour les services sociaux que le financement par l'Etat ou l'assurance et autres mécanismes financiers ?

Avons-nous besoin de la municipalité dans son acception nordique actuelle ? La famille, les Eglises, d'autres organisations et le marché pourraient-ils être plus efficaces en tant qu'organisateurs et producteurs de services sociaux et de santé, comme ils le sont dans les modèles libéraux et corporatifs d'action sociale ?

En faveur de la municipalité providence nordique nous pouvons faire les observations suivantes : les services universels favorisent l'égalité entre les hommes et les femmes, entre ceux qui ont un emploi et ceux qui n'en ont pas, entre les malades et les bien portants. Comme le fait d'avoir un emploi, ou d'être le conjoint d'une personne qui a un emploi, ou d'avoir eu par le passé un emploi, ou d'être assuré ne sont pas des conditions requises pour bénéficier des services sociaux, le point de départ du système est que les services soient accessibles à tous.

Les services universels ont aussi permis de répondre aux besoins de certaines catégories de personnes. En Finlande, l'égalité a également été assurée par les droits subjectifs, prévus par la loi pour certains groupes spécifiques et destinés à compléter les services universels. Comme les services sont offerts à tous, la responsabilité conjointe s'est développée et la base du soutien au système s'est renforcée.

L'argument le plus fort en faveur de la municipalité providence est peut-être son objectif d'offrir des services sociaux à tous, ainsi que sa compétence générale pour promouvoir le bien-être des citoyens au niveau local. Les besoins locaux doivent être évalués et les décisions relatives à l'allocation des ressources doivent être prises à un quelconque niveau. En Finlande, étant donné l'autonomie relativement grande accordée aux municipalités, on pense que le niveau local est plus approprié que le niveau national pour prendre les décisions adéquates. La centralisation et la compétence générale présentent aussi des avantages en matière d'efficacité.

D'un point de vue nordique, le plus grand défaut du système libéral et du système corporatif est peut-être l'absence de compétence générale et de responsabilité conjointe. Les familles, les organisations, les Eglises, les systèmes d'assurance et le marché sont d'importants acteurs, mais ils n'ont pas de compétence générale pour assurer le bien-être des citoyens. Quand il n'y a pas universalité des prestations de service, la notion de responsabilité conjointe peut également être plus limitée.

Dans la démocratie locale, les habitants peuvent participer au processus de décision et l'influencer. Les besoins et les souhaits des habitants sont traduits aux décideurs, dont les actions sont supervisées par les habitants de la commune. Un trait essentiel de la démocratie est d'être entre les mains des habitants, auxquels est donnée la possibilité de suivre, d'influencer et de réagir aux décisions.
Dans une situation idéale, tout citoyen obtient des services de qualité, conçus pour répondre aux besoins des citoyens et correspondants à ce qu'ils souhaitent. La démocratie locale est propice à ce type de décision. Plus le niveau auquel sont traitées les questions est proche des citoyens, mieux leurs besoins sont identifiés et servis.

Une question que l'on se pose aujourd'hui en Finlande est de savoir si une partie des services fournis par les municipalités pourraient être remplacés par des services produits par une autre méthode de production. Il a été proposé, entre autres, de faire évoluer le système vers des services de santé reposant sur l'assistance privée. Un élargissement possible de la participation des familles à la charge que représentent les soins apportés aux enfants dans les crèches et les garderies et le soin à apporter aux personnes âgées a aussi été discuté. Le développement de services privés a également été envisagé.

Dans quelle mesure ces méthodes de production des services, se substituant aux services municipaux, affecteraient-elles l'égalité et les transferts de revenu. Par exemple, les objectifs d'égalité et d'équité dans la répartition du revenu seraient-ils mis en danger ? La qualité du service serait-elle améliorée ? Les coûts globaux en seraient-ils réduits ? Comment serait garanti l'accès à l'information concernant les décisions et le financement ? Comment la protection légale serait-elle assurée ?

Les deux alternatives extrêmes sont, d'une part, un monopole municipal et, d'autre part, un système essentiellement fondé sur le marché. Les modèles où la municipalité joue le rôle dirigeant sont en général justifiés en évoquant les objectifs socio-politiques du système, tels que décrits plus haut. Mais le système a son côté négatif, à savoir le manque de souplesse des services municipaux, le manque d'alternatives pour l'usager et l'ignorance des coûts. En général, les fonctionnaires ne sont pas considérés comme particulièrement animés par l'esprit de service : la responsabilité générale de l'Etat en ce qui concerne le bien des citoyens estompe leur propre responsabilité.

Les systèmes qui remplacent les services municipaux sont souvent justifiés en invoquant la nécessité d'améliorer la qualité des services et les effets incitatifs de la concurrence et de la flexibilité. Une des conditions de l'efficacité de ces modèles est que les citoyens soient suffisamment informés pour pouvoir faire des choix rationnels et que le marché offre réellement la possibilité de choisir entre plusieurs producteurs. En matière d'éducation, par exemple, ceux qui critiquent ces systèmes soutiennent que l'individu est trop précieux pour être exposé au risque d'être victime de la faillite éventuelle de sociétés obligées de déposer leur bilan faute de rentabilité, un risque caractéristique de l'économie de marché. La même critique peut être adressée aux services sociaux et de santé basés sur le marché.

3. EXEMPLES DU MODELE DU SUD DE L'EUROPE

3.1 Italie

En Italie, un débat est en cours au Parlement sur le fédéralisme en matière de financement de la santé publique, une formule susceptible d'impliquer :
— L'abolition du système actuel de transferts de fonds de l'Etat aux régions, qui serait remplacé par l'attribution aux municipalités d'une part plus importante du prélèvement direct des taxes sur l'essence, sur le revenu annuel des habitants et sur les transactions et les prestations de services ;
— La suppression du Fonds national de santé.
De 1945 à aujourd'hui, la dépense publique de santé a évolué comme suit :

1. Le remboursement par les fonds de la sécurité sociale a abouti à une médiocre efficacité des services fournisseurs de prestations de santé, à une dépense excessive et à l'accroissement des services privés ;
2. Le financement par le budget de l'Etat (avec la création du Service national de santé) ; là encore, une médiocre efficacité des gestionnaires, trop d'hospitalisations, la croissance des dépenses et un personnel technique surabondant, l'insouciance quant à la qualité et à la quantité des services fournis.
3. Le paiement des prestations dans la mesure où elles entrent dans la catégorie des GLD (Groupes liés au diagnostic). Ce choix a été fait par le gouvernement italien en 1992, en s'inspirant du modèle des pays industrialisés et a conduit à une meilleure efficacité opérationnelle et une réduction des hospitalisations. Mais la remise à l'échelle du système hospitalier italien n'a pas été faite et le bilan fait apparaître un nombre assez important d'hôpitaux en faillite. Il faut reconnaître que le système des GLD est complexe et que les exécutants ne s'adaptent pas toujours très bien aux nouvelles règles professionnelles et éthiques.

L'adoption, en Italie, de dispositions visant à rationner les services sociaux et de santé et à contenir la dépense publique a des effets socio-politiques et devrait être gérée de manière à éviter les tensions parmi les citoyens.
Par domaine de l'aide sociale il faut entendre, très schématiquement, un ensemble de fonctions administratives, distinctes de la sécurité sociale et de la protection sociale, visant à fournir des services et des prestations pécuniaires pour faire face à des situations de détresse sociale. Il relève à la fois du gouvernement central, des provinces et des municipalités, qui se partagent la tâche.

Cette répartition des compétences ne se fonde sur aucune séparation claire des fonctions d'élaboration des politiques et de programmation et des fonctions administratives. Bien que la section 9 de la Loi 142/90 impartisse "principalement" aux municipalités "toutes les fonctions administratives" concernant les "services sociaux", l'Etat et les provinces en ont néanmoins gardé quelques-unes en raison de l'échec de la tentative de réforme institutionnelle du secteur. A cela il faut ajouter que dans l'exercice de leur propre pouvoir de réglementation les régions, au lieu de s'en tenir strictement à leur activité de programmation, se sont attribué un pouvoir de "financement des programmes" qui leur fait jouer un rôle ressemblant fort à la gestion directe.

En ce qui concerne plus particulièrement l'Etat, il faut attirer l'attention sur le fait que le Fonds pour les mesures sociales, qui met à la disposition du ministère des Affaires sociales les ressources approuvées par des lois spéciales et gérées par divers autres ministères, est une création tout à fait récente (il a été institué par la Loi du 27décembre 1997 et les dispositions financières ont été prises en 1998). Néanmoins, vue à la lumière de l'ajournement explicite de la réforme institutionnelle du secteur de l'aide sociale et compte tenu des proportions modestes de l'engagement financier, toute cette structure n'apparaît encore que comme l'embryon d'un futur ministère dont la fonction sera non pas de programmer et de coordonner, mais de promouvoir et de mettre à l'épreuve des mesures réelles.

En ce qui concerne les régions, on peut rappeler qu'aux termes de l'Article 117 de la Constitution, elles sont investies d'un pouvoir réglementaire dans ce domaine et qu'en vertu des décrets d'application qui ont suivi (Décret présidentiel 616/77, section 11), elles sont chargées des fonctions suivantes :
— Contribuer à la définition des objectifs de la planification économique ;
— Elaborer des programmes de développement régional cadrant avec les objectifs de la planification économique nationale, avec l'assistance des autorités locales, en application des dispositions stipulées dans les statuts régionaux ;
— Coordonner l'action relevant de leur domaine de compétences avec celle des autorités étatiques et des autorités locales de leur ressort.
Les régions ont à mettre en œuvre les politiques de protection et aides sociales en coordonnant l'activité d'un grand nombre d'entités, tant du secteur public (provinces, communautés montagnardes, municipalités, entreprises publiques, services publics d'assistance et organisations bénévoles - Ipab), que du secteur privé (associations bénévoles, coopératives, fondations, etc.). De ce fait, elles ont pris certaines mesures de restructuration en ce qui concerne les unions intercommunales et les fusions de services sociaux et médicaux.
Bien que les solutions apportées aux problèmes institutionnels ne soient pas toujours cohérentes, les régions se sont dans l'ensemble efforcées, en se servant des méthodes de programmation, de faire le lien entre les nombreuses initiatives des différentes entités et de saisir la spécificité de leur propre espace territorial, les besoins à satisfaire, les problèmes à résoudre et les objectifs à atteindre.
Cela a été fait principalement au moyen du plan de développement régional, approuvé à la fois en tant que bilans annuels et pluriannuels et comprenant :
— Une analyse de la situation économique et sociale dans la région ;
— Une stratégie générale (objectifs généraux, projets ciblés, mesures programmées et actions) et le contenu de l'action officielle dans la région, à mettre en œuvre dans un laps de temps défini.

Les objectifs du plan régional sont réalisés au moyen de plans sectoriaux et, pour le sujet qui nous intéresse ici, du plan relatif à l'aide sociale.
La région de Toscane, dont nous citons ici l'expérience de planification à titre d'exemple, appliquant la Loi 72/97 sur la restructuration des services intégrés d'aide sociale et de médecine sociale, a identifié les organismes institutionnellement nécessaires pour créer un réseau de protection sociale capable d'assurer l'organisation et la mise en œuvre des droits de protection sociale (région, province, municipalité et communauté montagnarde), ainsi que les instruments et procédures de planification, et a défini les règles d'organisation territoriale des mesures en question, en précisant les fournisseurs de services.

C'est à la région qu'il incombe d'approuver le Plan social intégré, un instrument de programmation sectorielle, grâce auquel, tout en tenant compte des priorités définies par le plan de développement, elle élabore, coordonne et rationalise les politiques d'aide sociale. Les objectifs fixés par la région dans le Plan social prévoient une certaine autonomie d'action pour les autorités locales, groupées en "Zones d'action sociale et de santé" définies par l'autorité régionale et agissant aussi en application du Plan d'aide sociale établi et approuvé par la Conférence des maires administrant ces zones.
L'autorité régionale est chargée de la répartition des ressources du Fonds régional d'aide sociale, dont 50 pour cent sont alloués aux municipalités pour les dépenses de gestion courante, sur la base principalement de critères démographiques, tandis que 10 pour cent sont réservés pour les projets d'importance régionale présentant un caractère supra-zonal. Le reste est alloué aux projets mis sur pied par les Zones et approuvés par la Conférence des maires, en tant que contribution aux dépenses qui ne sont pas assumées par les organismes chargés des projets.
L'autorité régionale coordonne et supervise aussi la mise en œuvre du Plan social régional, soutient, oriente et coordonne le système d'information et exécute les projets d'importance régionale en utilisant les 10 pour cent de ressources du Fonds social régional réservés.
Mais, laissons maintenant la Toscane et tournons-nous vers le schéma général. Il convient de garder à l'esprit que la mise en œuvre des plans sectoriaux incombe aux autorités locales. Pour être plus précis, les provinces assument les fonctions de planification pour les services à base large, tandis qu'elles n'exercent que des pouvoirs résiduels en ce qui concerne les services spécifiques, tels que les services s'adressant aux personnes non voyantes, aux personnes atteintes de surdité et aux enfants non reconnus par leur père.

La municipalité, par contre, qui est la principale entité investie des fonctions d'aide sociale, applique les mesures dans ce domaine en vertu de la compétence qui lui est reconnue par la section 9 de la Loi 142 et conformément aux procédures spécifiées, c'est-à-dire directement, ou conjointement avec une ou plusieurs municipalités situées dans la même zone de santé et d'action sociale, soit avec l'autorisation qui lui est donnée par l'organisme de santé concerné, soit sous contrat avec cet organisme ou avec les communautés montagnardes, en application d'un accord de programme avec la province pour certains services particuliers.

Les municipalités participent à la programmation régionale par la préparation et l'approbation des programmes sociaux comportant les mesures d'aide sociale définies par les projets entrant dans le cadre des plans généraux des Zones de santé et d'action sociale, financés par la région dans des proportions variables dans les limites des pourcentages déjà mentionnés de ressources du Fonds social régional. Ces mesures sont également appliquées par les municipalités.

Pour la mise en œuvre des actions et services, les municipalités peuvent passer des contrats avec des organismes privés ou publics (Ipab, coopératives sociales, associations locales, services auxiliaires, secteur bénévole, etc.).
Les municipalités doivent promouvoir les pactes locaux réunissant les syndicats, les coopératives et les mouvements communautaires pour créer des réseaux de solidarité sociale.

Il importe cependant de souligner que dans l'administration de l'aide sociale, les municipalités doivent utiliser surtout les ressources financières indirectes, qui leur sont allouées suivant des paramètres démographiques et compte tenu de leurs dépenses passées, en sorte que le cadre financier limite beaucoup leur indépendance. Par conséquent, il est difficile d'adapter la planification des mesures aux besoins qui doivent être satisfaits de temps en temps, par exemple, les phénomènes de type immigration, qui n'entrent pas dans le champ habituel de l'action, parce qu'ils soulèvent de nouveaux défis auxquels il faut répondre par une planification innovante.

Le problème tient, du moins en partie, au fait que la réforme fédérale est incomplète, ce qui limite l'autonomie des régions et le rôle majeur que pourraient jouer les organes de l'administration locale, et qu'un système réformé d'autonomie fiscale leur garantirait.


3.2 France

Les principes généraux d'organisation en France, tels que la décentralisation les a instaurés :

— répartition des compétences entre les différentes collectivités : Etat (qui conserve le pouvoir législatif et réglementaire) - Régions - Départements - Communes, sans liens de tutelle entre elles. Mais les domaines s'interpénètrent souvent et beaucoup d'interventions se font en partenariat entre les différentes institutions.

— contrôle a posteriori par l'Etat, de la légalité des délibérations des collectivités locales.

— ressources des collectivités locales reposant sur la fiscalité locale directe et sur des dotations de l'Etat.

I. La répartition des compétences dans les domaines : social, sanitaire, du logement, de l'emploi et de la formation

Social

Etat

Département

La commune

La commune participe aux dépenses d'aide sociale (contingent communal), peut exercer des compétences du département par convention avec lui, instruit les dossiers d'aide sociale.

La région

pas de compétences attribuées en matière sociale.

Sanitaire

Etat: secteur hospitalier, planification, subventions d'équipement santé scolaire, hygiène mentale, lutte contre l'alcoolisme, la toxicomanie et le SIDA.

Département: prévention (du cancer notamment), vaccinations, dispensaires, lutte contre les "maladies sociales" (tuberculose, MST).

Communes: bureaux municipaux d'hygiène et de désinfection.

Logement

L'Etat a gardé la compétence principale.

Les départements ont un conseil départemental de l'Habitat, les aides sociales au logement (le fonds de solidarité logement étant co-financé par l'Etat et le Conseil Général) et un avis sur la répartition des aides à l'habitat, qu'il peut abonder.

Les communes peuvent avoir un programme local de l'habitat et une action en faveur des mal logés.

La Région définit les priorités de l'habitat, complète les aides de l'Etat, encourage à l'innovation, à la qualité et à l'économie d'énergie.

L'Emploi et la Formation

L'Etat : service public de l'emploi

La Région : finance et met en œuvre l'apprentissage et la formation professionnelle.

II. Quelques éléments concernant l'application en Loire-Atlantique

Le Conseil Général gère en direct quasiment tous les services qui relèvent de sa compétence, en particulier en matière de protection maternelle et infantile et de service social. Il y a eu par le passé des conventions avec des organismes privés pour la mise en œuvre de ces services sur certains secteurs géographiques, mais elles ont progressivement été supprimées. Il n'en reste plus qu'une avec la Caisse d'Allocations Familiales de Loire-Atlantique pour une partie du personnel d'une circonscription.

En revanche, il existe avec les communes notamment des ententes d'organisation, qui se réfèrent aux grands domaines de compétences mais relèvent des accords locaux : avec les villes de Nantes et Saint-Nazaire en particulier, les publics sont répartis entre la commune et le département pour les dossiers RMI ou la permanence sociale (pour les personnes ayant besoin du service social mais ne relevant pas d'un secteur géographique déterminé), les services départementaux suivant plutôt les familles, les services municipaux les isolés sans enfants.

L'organisation actuelle des services sociaux départementaux repose sur 17 circonscriptions d'action sociale, animées par des cadres sans responsabilité hiérarchique sur les professionnels. le Conseil Général a fait le choix d'un encadrement de proximité en référence au métier et au service (exemple des puéricultrices-encadrantes).

Le Conseil Général met en œuvre un service social de polyvalence assez généraliste et a peu développé de services spécialisés (ex : il n'a pas créé de service social spécialisé pour l'instruction des dossiers RMI).

De manière générale, l'association des communes est recherchée en Loire-Atlantique dans les différents dispositifs, notamment sociaux, même quand les textes ne prévoient qu'une intervention facultative desdites communes (ex : fonds de solidarité logement, fonds d'aide aux jeunes ... ) ; il paraît en effet important que les communes s'impliquent pour une bonne approche des besoins et une synergie des interventions (l'action sociale souffre déjà d'un morcellement en multiples dispositifs, il s'agit de ne pas le renforcer d'un cloisonnement entre les collectivités).

Sur le fond : le Conseil Général de Loire-Atlantique a axé sa politique sociale sur :

— la prévention : son intervention globale auprès de la population permet en effet d'agir en amont de l'apparition de processus négatifs pour l'individu ou la collectivité, notamment aux moments où l'enfant se structure ;

— le développement local, pour contribuer à créer des conditions permettant à chacun, fut-il en difficultés, d'être un acteur social à part entière.

Ce deuxième axe, le développement local, plus nouveau dans les pratiques des services d'action sociale départementaux, a été traduit dans l'organisation par la création d'une sous-direction spécifique.

Ainsi, l'organisation est-elle mise au service de priorités de la politique sociale et la forme au service du fond.

4. PAYS EN TRANSITION

4.1 Russie

La situation sociale

En raison de la baisse considérable des niveaux de production, le chômage augmente et le niveau de sous-emploi est élevé. Le chômage, qui a atteint 11.3 pour cent en 1997 est passé en 1998 à 12.3 pour cent. D'après les statistiques officielles, le sous-emploi touchait, à la fin de 1997, 10 pour cent des travailleurs ayant un emploi dans les grandes et moyennes entreprises.
Les arriérés de salaires et de pensions dans le secteur public, apurés à la fin de l'année 1997, se sont de nouveau accumulés en 1998. La croissance du revenu individuel par habitant est erratique : le revenu a augmenté de 3.5 pour cent en 1997, par rapport aux baisses de -13 pour cent en 1995 et -1 pour cent en 1996, et a de nouveau chuté de 18.5 pour cent en 1998 par rapport à l'année précédente. Le revenu minimum vital a été estimé par le gouvernement russe en 1997 à 415 roubles par mois. En 1997, le salaire mensuel minimum de 83.5 roubles (qui sert de référence pour les salaires et les prestations sociales) et les retraites minimum mensuelles de 222 roubles représentaient 20 pour cent et 53 pour cent, respectivement, du minimum vital. En 1998, le niveau minimum de subsistance est passé à 493 roubles par mois, tandis que le salaire minimum mensuel restait inchangé. Avec de tels chiffres, le niveau du revenu est insatisfaisant et l'on a estimé que 20.8 pour cent de la population ont vécu au-dessous du niveau minimum vital en 1997 et 23.8 pour cent en 1998. L'inégalité des revenus a augmenté.

Le financement social

Il n'est pas tenu, en Russie, de comptabilité précise des dépenses sociales dans leur ensemble. Les postes de dépenses sociales sont définis dans les budgets fédéraux et régionaux, qui sont loin d'être les seules sources de financement social, lesquelles comportent aussi divers programmes non sociaux, les ressources allouées pour soutenir certaines industries spécifiques (par exemple, l'industrie charbonnière et l'agriculture) dans les régions du Nord, ainsi que les ressources allouées par le Fonds fédéral pour l'aide régionale, etc. Ces dernières années, la situation sociale difficile qui règne dans la Fédération de Russie a entraîné des besoins de financement social accrus. Mais les ressources fédérales pour répondre pleinement à ces besoins étaient limitées, comme le montre le tableau suivant 

Budget de 1995 réel

Budget de 1996 projeté

Budget de 1996 réel

Budget de 1997 projeté

Budget de 1997 réel

Ensemble du domaine social

5.4

6.5

4.9

7.4

6.1

Santé

1.3

1.7

1.2

2.2

1.9

Education

3.1

3.6

3.2

3.5

3.6

Culture et mass media

1

1.2

0.5

1.7

0.6

Le tableau suivant donne la dépense sociale en pourcentage du PIB entre 1993 et 1995

Dépenses sociales (% du PIB)

 

1992

1993

1994

1995

Education

3.58

4.03

4.36

3.40

Culture, arts et mass media

0.61

0.61

0.73

0.42

Santé et sports

2.45

3.58

4.09

3.41

Service des pensions

4.83

6.06

5.92

5.33

Emploi et chômage

0.06

0.22

0.38

0.33

Autres dépenses sociales

1.16

1.51

2.39

2.25

 

12.69

16.01

17.87

15.14

Contribution des pouvoirs locaux

La majeure partie des dépenses budgétaires pour le domaine social est à la charge des administrations locales. La part de ces dépenses dans les budgets locaux dépasse 60 pour cent.

Les autorités locales doivent couvrir 100 % des dépenses d'enseignement secondaire, 85  % des dépenses de santé, 60 % des dépenses afférentes aux crèches et garderies d'enfants, 80 % des dépenses des services communaux, 60 % des dépenses de maintenance du parc de logements. En même temps, le niveau de leurs ressources propres est extrêmement bas. Il ne représente que le quart des revenus régionaux. Le déséquilibre actuel entre les revenus et les dépenses des différents niveaux du système budgétaire est caractérisé par les chiffres suivants :

 

Revenus

Dépenses

Budget fédéral

52.1

47.6

Budgets consolidés des Etats Sujets de la Fédération

47.9

52.4

Comprenant :

   

Les budgets régionaux
Les budgets locaux

23.4
24.5

20.3
32.1


Résumé des principaux problèmes sociaux

Le nombre de personnes ayant besoin de l'aide de l'Etat a considérablement augmenté. Le déclin de l'activité économique a entraîné l'apparition d'une classe de "nouveaux pauvres" et une aggravation de la situation des personnes "très pauvres".

Le système de protection sociale du pays et son système de services sociaux souffrent d'un sous-financement important par l'Etat (à tous les niveaux) et d'un manque général de capacité financière de la population.

Les pouvoirs locaux ont à assumer la majeure partie des coûts des services sociaux, ce qui explique la grave crise financière à laquelle sont confrontées les municipalités russes. Les difficultés financières des collectivités locales ont été aggravées par la municipalisation d'énormes actifs sociaux, c'est-à-dire le transfert aux municipalités, sans aucune compensation budgétaire, des actifs sociaux appartenant autrefois aux entreprises d'Etat qui ont été privatisées.

L'efficacité du système de services sociaux et d'aide sociale a considérablement diminué : d'une part, la fourniture de services et d'assistance est confrontée à une réduction des niveaux et de la qualité des prestations, d'autre part, le système est vicié par un considérable gaspillage. Le problème aujourd'hui est donc d'assurer les prestations à ceux qui en ont vraiment besoin.

Le cadre légal sur lequel repose le système n'est pas adéquat et gène toutes les tentatives de réforme du système. Les nouvelles lois ne sont pas appliquées faute de ressources et/ou de mécanismes d'application. Enfin, la législation sociale ne tient pas compte de la nécessité de décentraliser la prise de décision en matière de politique sociale pour la rapprocher de la base du système. Il n'y a pas de répartition nette des compétences en matière de droits sociaux entre l'échelon étatique (organes fédéraux et régionaux) et celui des autorités locales.

Politique

Deux conceptions principales ont influencé le processus d'élaboration de la politique sociale. La première met l'accent sur les transformations économiques. Les avocats de cette conception soutenaient que les réformes économiques devaient, à long terme, entraîner une évolution positive de la situation sociale dans le pays et faciliter les efforts visant à améliorer le sort de la population.

L'autre conception, au contraire, soulignait l'importance d'une amélioration radicale et rapide des indicateurs sociaux de développement. Les réformes économiques, soutenaient les responsables politiques plus axés sur les aspects sociaux, devaient viser à répondre aux besoins sociaux et s'accompagner toujours d'une amélioration du niveau de vie de la population.

Dans la phase initiale des réformes, la première conception l'a emporté et les problèmes sociaux sont passés au second plan. Priorité absolue a été donnée à la transformation économique, sans accorder toute l'attention souhaitable aux éventuelles pertes sociales.

En fait, il n'existait aucun programme d'action cohérent en matière sociale pour tenter tout au moins de neutraliser certaines conséquences sociales négatives des réformes économiques. Des mesures d'urgence ont été prises, mais ce n'était que des mesures d'intervention immédiate. Elles reflétaient une réaction du gouvernement à un certain nombre de problèmes sociaux devenus si aigus qu'ils exigeaient une action rapide.
La première tentative d'élaboration d'une politique sociale a été entreprise six mois après le début de la libération des prix. A ce moment là, les coûts sociaux de la réforme économique étaient devenus si lourds qu'ils menaçaient l'existence même de la transformation économique. En conséquence, la deuxième conception s'est imposée durant la période 1992-1994.

Les mesures adoptées par le gouvernement russe durant la période de restructuration ont été prises surtout pour atténuer l'impact négatif de la restructuration entraînant une forte baisse du niveau de vie. De nombreuses aides sociales, subventions et allocations qui avaient été créées dans un contexte économique totalement différent sont encore versées à la population. Dans les conditions actuelles, la plupart de ces prestations ne sont pas liées à des conditions de ressources ni à une réelle appréciation de la capacité des bénéficiaires de subvenir eux-mêmes à leurs besoins vitaux et à leur protection sociale. D'où les difficultés des organes d'exécution à fournir l'aide sociale à ceux qui en ont le plus besoin.

Les prestations, allocations et subventions sociales

En Russie, il n'existe pas moins de 150 sortes de prestations, allocations et subventions sociales. Elles sont fournies soit en argent, soit en nature (sous forme de services) à plus de 200 catégories de personnes (anciens militaires, enfants, personnes handicapées, étudiants, chômeurs, etc.). La valeur totale de l'ensemble des prestations en argent a été estimée à 350 milliards de roubles (depuis 1998). En se basant sur les critères actuels d'éligibilité, la proportion du nombre d'ayants-droits à ces avantages sociaux représente 68 pour cent environ de la population, c'est-à-dire approximativement 100 millions de personnes. Les prestations sociales fournies au niveau fédéral (par exemple les allocations familiales, les allocations aux anciens combattants et invalides de guerre, etc.) sont complétées par des avantages fournis par certaines régions à diverses catégories de la population de la région et couvrent plus des deux-tiers de la population.

Les problèmes

Si l'on considère que, d'une part, la proportion du nombre de personnes vivant au-dessous du seuil de pauvreté représente 24 % de la population et que, d'autre part, 70 % de la population bénéficie de l'aide sociale, il faut bien en conclure qu'une part considérable des avantages sociaux est versée à des catégories de la population dont les revenus sont supérieurs au minimum vital.

L'insuffisance évidente du ciblage des prestations tient au fait qu'elles sont prévues pour des catégories de personnes et non accordées individuellement aux bénéficiaires en fonction de leurs besoins réels. Une seule sorte de prestation, fournie au niveau fédéral (l'allocation logement), est accordée après vérification du besoin réel du demandeur de recevoir l'allocation.

Bien qu'il n'y ait pas d'approche systématique du ciblage, des tentatives ont été faites dans les régions de procéder systématiquement à une vérification du besoin réel des familles remplissant les conditions d'éligibilité pour percevoir les prestations et de choisir parmi les familles dont les revenus sont inférieurs au minimum vital celles qui se trouvent dans le plus grand besoin. Mais ces tentatives sont freinées par l'absence de base législative appropriée.

Le stock d'actifs municipaux a énormément augmenté, mais les ressources budgétaires locales se sont réduites. C'est une des principales raisons des déficits des budgets locaux et de la croissance rapide de la dépendance des subventions publiques dans laquelle se trouvent les Sujets de la Fédération et les administrations locales. Outre les actifs sociaux relevant désormais de leur compétence, les autorités locales doivent maintenant prendre en charge le financement de prestations telles que les allocations familiales, les subventions aux collectivités et le logement des fonctionnaires de l'Etat (Procureurs, juges et fonctionnaires de police).

L'accès aux services sociaux

La diminution des crédits budgétaires pour le financement des services sociaux subventionnés et l'entretien des actifs sociaux (tels que les équipements de santé, les établissements d'enseignement, les transports, les équipements sportifs et culturels) a entraîné une détérioration marquée et reconnue des biens sociaux eux-mêmes et une diminution de la qualité et de l'accessibilité des services. Au cours des cinq dernières années, toute la gamme de services sociaux subventionnés s'est manifestement dégradée (le secteur des transports en est un exemple spectaculaire).
Dans d'autres secteurs sociaux, tels que la santé, et dans une certaine mesure l'éducation, l'accès aux services s'est réduit pour les personnes les moins aisées, par suite du développement de la pratique consistant à exiger de l'usager une rétribution informelle du service. Ces paiements semblent garantir non seulement l'accès aux services mais même la qualité des services.

4.2 Lituanie

En Lituanie, aujourd'hui, la réforme des services publics de santé et des services sociaux se met en place. En 1991, le Seimas de la République de Lituanie (l'organe suprême de gouvernement de la République) a adopté le Concept de Santé Publique Nationale et reconnu que la santé des citoyens était la valeur sociale et économique majeure et qu'elle inclut aussi bien l'absence de maladie et de handicap physique, que la bonne santé spirituelle et sociale de la population.

Le Concept précise que la condition nécessaire d'un état de santé optimal de la population est le développement général et harmonieux du système de santé publique, comportant le maintien et l'amélioration de la santé publique, la prévention des maladies, la détection des maladies en temps utile, le traitement approprié des maladies et la réadaptation des malades. Le maintien et l'amélioration de la santé publique, ainsi que la priorité accordée à la prévention des maladies doivent être les deux axes stratégiques du développement du système national de santé publique. Le gouvernement a à charge d'assurer le fonctionnement efficace de ce système en engageant dans l'exécution de cette tâche toutes les structures socio-économiques et de créer ainsi au bénéfice de la société et de chacun de ses membres les conditions nécessaires d'une vie saine.
Sur le plan pratique, le fonctionnement de ce système de santé publique est coordonné par le ministère de la Santé publique de la République de Lituanie, tandis que les exécutants sont les établissements d'Etat et municipaux, chargés de veiller à la santé individuelle et publique.
Le Système national lituanien de santé publique comporte trois niveaux :

— Les activités primaires de santé publique. Elles couvrent les entités territoriales administratives de la municipalité. Ces activités sont mises en œuvre par les municipalités et s'exercent dans les établissements publics de base : centres primaires de santé publique, cliniques et hôpitaux municipaux pour les malades non hospitalisés, centres de santé mentale, centres de médecine générale et de stomatologie, antennes médicales municipales, postes municipaux d'assistance médicale d'urgence, dispensaires municipaux et hôpitaux municipaux.
— Les activités secondaires de santé publique : elles couvrent les entités administratives du district. Elles sont mises en œuvre par le district et s'exercent dans les établissements médicaux chargés du contrôle de la santé de la population : hôpitaux de district, hôpitaux spécialisés et établissements pour les donneurs de sang.
— Les activités de santé publique tertiaire. Elles sont mises en œuvre par le ministère de la Santé et s'exercent dans les cliniques des universités et des académies, et dans les autres établissements médicaux spécialisés soignant les malades indépendamment de leur lieu de résidence.
Les piliers du Système national de santé lituanien et des services qui en font partie sont le gouvernement de la République de Lituanie, les institutions gouvernementales, les administrations de district, les municipalités, ainsi que les fonds d'Etat des collectivités territoriales pour la santé (malades).
Les services publics de santé fournis gratuitement à la population et financés par les municipalités comprennent : l'assistance médicale obligatoire fournie au premier niveau du système de santé, les soins aux femmes enceintes et aux mères jusqu'à ce que leur enfant ait atteint l'âge d'un an, les soins aux personnes handicapées dont la famille est au chômage, les enfants jusqu'à l'âge de 16 ans, les personnes dont le revenu est inférieur au montant donnant droit à l'aide publique au revenu, les orphelins jusqu’à l'âge de 18 ans, les invalides de première catégorie et la pose de prothèses dentaires pour les personnes appartenant à certaines catégories définies.

Les municipalités sont autorisées légalement à étendre le champ des services publics de santé et de soins aux personnes bénéficiant de l'aide municipale.

Jusqu'en 1990, le système de santé publique était financé à 100 pour cent sur les crédits du budget de l'Etat.
Le système d'assurance maladie obligatoire est entré en vigueur en 1997. Le budget de ce système est constitué par un prélèvement de 3 pour cent sur le salaire des personnes qui ont un emploi et d'un prélèvement d'au moins 30 pour cent sur le montant total de l'impôt sur le revenu des personnes physiques qui perçoivent un revenu lié aux relations de travail.
Pour le moment, l'assurance maladie obligatoire fournit 70-80 pour cent du financement du système public de santé, tandis que les 20-30 pour cent restants sont fournis par les budgets de l'Etat et des municipalités.
Sur leurs crédits budgétaires, les municipalités font fonctionner les centres médico-sportifs municipaux et les foyers pour très jeunes enfants présentant des défauts de développement ; elles financent les programmes municipaux obligatoires de santé, et allouent une partie de leurs crédits au fonds municipal de santé publique.

Pour coordonner les activités des services publics de santé, des directions municipales de la santé publique, composées de membres des professions médicales et d'hommes politiques, ont été instaurées dans chaque municipalité. Ces directions sont des institutions indépendantes, placées sous le contrôle des municipalités, qui coordonnent les activités publiques de santé. Elles sont financées par des budgets municipaux et sont chargées de coordonner les activités des centres de santé, la lutte contre l'alcoolisme, le tabagisme et la toxicomanie sur le territoire de la commune, et approuvent les programmes de développement des activités et services primaires de santé publique.

Dans la première partie de ses "Remarques sur le programme de santé publique de la Lituanie", le Bureau régional européen de l'OMS déclare : "il est clair que depuis 1991, après l'adoption du Concept national de santé publique, la politique nationale de santé de la Lituanie qui a été mise en œuvre se fonde sur des efforts de longue haleine. Ces efforts à long terme pour la protection et la promotion de la santé publique impliquent souvent une action se prolongeant au-delà de la période d'exercice d'un unique gouvernement. Grâce aux efforts qu'elle a déployé pour obtenir le consensus social entre les principaux partis politiques, afin de mettre les questions de santé publique en tête des priorités de l'agenda politique, la Lituanie est devenue un pays dont l'expérience devrait être suivie par d'autres pays européens."

Néanmoins, bien des problèmes sont encore à résoudre en matière de santé publique dans les circonscriptions administratives des municipalités. En raison de l'insuffisance de leurs budgets, les municipalités n'arrivent pas à financer les dépenses spéciales des établissements publics et les offices municipaux de santé publique, qui devaient remplacer les centres de santé ou les antennes de ces centres et être financés sur les crédits budgétaires de l'Etat n'ont pas encore été créés ; les problèmes de prothèses dentaires et de traitement dans les hôpitaux des personnes non assurées au titre de l'assurance maladie obligatoire et donc sans protection sociale n'ont pas encore été réglés non plus.

D'autres services sociaux aux habitants sont rendus par les secteurs étatique, municipal, de district et non gouvernemental (organisations non gouvernementales, communautés religieuses, personnes privées et organismes privés).

En matière de services sociaux, les municipalités assument, d'une part, les fonctions qui leur sont imparties par la loi et, d'autre part, celles qui leur sont déléguées par le gouvernement. Dans le cadre de leur compétence propre, les municipalités organisent les soins aux personnes handicapées, aux malades, aux personnes âgées et répondent aux besoins de leurs administrés. Dans le cadre des compétences qui leur sont déléguées par le gouvernement, elles versent les allocations et différentes indemnités publiques.

Les municipalités sont les principaux organisateurs et fournisseurs des services sociaux fonctionnant de façon autonome sur leurs territoires respectifs. Elles planifient les différents types d'aide sociale et leur champ d'application et financent à 100 pour cent l'aide sociale sur les crédits des budgets municipaux. Elles coopèrent avec les organisations non gouvernementales, les communautés religieuses, les personnes privées et les organismes privés, et avec d'autres municipalités fournissant des services sociaux ; elles contrôlent la qualité des services sociaux et en sont responsables.

Les coûts des fonctions qui leur sont déléguées sont financés par l'Etat sur les crédits budgétaires de l'Etat.
Les services fournis par les municipalités sont généraux, tels que : les services d'information, de conseil, l'aide à domicile, les soins à domicile, les indemnités de garde etc.

Les municipalités fournissent aussi des services sociaux spécialisés et mettent sur pied les établissements suivants :
— Etablissements d'hébergement et de soins de longue durée : foyers généraux pour personnes âgées, services de soins de longue durée, maisons de santé, centres de garde des enfants en milieu familial.
— Les établissements d'hébergement temporaire : refuges de nuit, foyers de garde temporaire pour les enfants, foyers de refuge temporaire pour les mères avec enfants.
— Les établissements d'accueil et de soins pour : les adultes handicapés, l'occupation des personnes âgées, les personnes souffrant de maladies mentales, la rééducation des alcooliques et des toxicomanes, les enfants souffrant de déficiences psychiques et physiques, et les enfants des familles asociales.

Actuellement, 55 pour cent des services d'accueil de longue durée sont fournis par le secteur public et 45 pour cent par le secteur non gouvernemental.

Dans leurs circonscriptions territoriales respectives, les districts fournissent des services spécialisés et coûteux, qui ne peuvent pas être pris en charge par les municipalités. Les services sociaux fournis par les districts sont financés sur le budget de l'Etat.
La fourniture de services sociaux pose de nombreux problèmes.
Le nombre d'habitants recevant une aide sociale ne diminue pas dans les circonscriptions administratives, pour diverses raisons, tandis que les budgets insuffisants des municipalités ne permettent pas de satisfaire pleinement les besoins de ces personnes. Les coûts des fonctions déléguées par le gouvernement ne sont pas toujours indemnisés par les crédits budgétaires de l'Etat. Le Concept national de travail social n'a pas été mis au point, et 5 pour cent seulement des personnes employées dans les services sociaux sont des travailleurs socio-professionnels, le manque de crédits et diverses autres raisons ne permettent pas d'apporter une aide sociale suffisante aux personnes déshéritées.

5. CONCLUSIONS

Pour conclure, revenons au débat sur le système d'aide sociale finlandais, qui semble couvrir les principaux problèmes tant dans les pays nordiques que dans les autres pays européens. Les traits qui caractérisent les systèmes européens corporatistes et libéraux sont, par exemple, le débat relatif aux modalités de financement de la sécurité sociale, que l'on souhaite modifier ; l'accroissement de la responsabilité des familles ; l'extension de l'obligation d'entretien des parents proches ; "l'égalisation" avec le niveau européen des soins aux personnes âgées, aux personnes handicapées et aux enfants dans les crèches et garderies ; la réévaluation des avantages sociaux universels ; la fin du monopole des services publics et le développement délibéré de méthodes alternatives de production des services.

Dans le système nordique, le débat porte surtout sur l'obligation légale des autorités publiques d'organiser les services sociaux, en se basant à la fois sur le principe d'universalité des services et sur celui de "l'offre et de la demande" de services. Dans les autres systèmes européens, le fond du débat est plutôt une question de "demande et revenus".

Si les conceptions du reste de l'Europe emportent l'adhésion du public dans les pays nordiques, il deviendra plus difficile de maintenir le financement actuel de la sécurité sociale et d'assurer la protection sociale des personnes qui se trouvent hors du marché du travail (c'est-à-dire, les personnes lourdement handicapées, les personnes âgées et les chômeurs sans antécédents de travail). Il en résulterait une réduction de la responsabilité conjointe.

Le modèle nordique existe, à la fois en tant que modèle idéal, décrit par les chercheurs, et dans la pratique. Il n'est pas sans ambiguïtés, mais il a ses points forts, que tout le monde peut reconnaître. Nous résumons ci-après quelques-unes des lignes de force du modèle nordique.

Les pouvoirs publics sont expressément chargés par la Constitution d'assurer la protection sociale des citoyens. Les traits essentiels des dispositions de la Constitution sont la responsabilité qui incombe aux pouvoirs publics de faire fonctionner le système de protection sociale et d'aide sociale et le rôle majeur attribué aux municipalités dans l'organisation, la production, le financement et le contrôle des services (responsabilité conjointe et générale).

La société providence nordique est créée par la loi. Pour un certain nombre de services sociaux et de santé, les citoyens sont légalement en droit de les exiger de la municipalité. Bien que l'autonomie municipale prévue par la Constitution donne aux municipalités une assez large indépendance dans leurs rapports avec l'Etat, la législation n'en est pas moins un instrument essentiel de contrôle des municipalités.

Dans le modèle nordique, le principe de base de la municipalité providence est d'assurer à tous le bénéfice des services sociaux. Le modèle est assez efficace, il renforce l'égalité entre les citoyens et jouit du soutien de la population (universalité, légitimité).
Pour bien fonctionner, un système de protection sociale doit avoir l'approbation du public et une large base économique. Le système de protection sociale finlandais jouit d'un large soutien de la population, bien que des divergences de vues soient clairement discernables entre les différents groupes et à différentes époques.

Le maintien et l'amélioration de l'Etat providence exigent une économie stable, qui puisse servir de support au financement du système de protection sociale. Les services et prestations fournis par l'Etat providence demeurent à un bon niveau, même si le fort taux de chômage et la récession ont obligé les autorités publiques à maintenir des taux d'imposition et de cotisations sociales élevés pour pouvoir les sauvegarder.

L'analyse du modèle nordique offre également les enseignements suivants aux autres pays :
— Les tendances de l'emploi jouent un rôle déterminant pour l'avenir de la protection sociale : un accroissement du nombre de personnes ayant un emploi réduirait les besoins en matière d'aide sociale et les coûts qui y sont liés.
— De nouveaux aménagements du temps de travail, une meilleure assistance médicale dans le cadre de l'activité professionnelle et le partage du travail d'une manière ou d'une autre devraient être essayés.
— La protection sociale pourrait être restructurée, afin de favoriser les activités indépendantes. La sécurité sociale devrait encourager les gens à travailler et à acquérir une formation.
— L'efficacité de la production des services et la structure des services pourraient encore être améliorées et les services pourraient être mieux ciblés. Toute une variété de soins de proximité et diverses formes intermédiaires de services devraient être organisés pour remplacer les services en établissements.

Néanmoins, le message le plus important est que les autorités locales peuvent jouer un rôle essentiel dans la fourniture de services sociaux. En Finlande, la dépense des autorités locales et des autorités municipales conjointes représente près des deux-tiers des dépenses publiques totales pour la consommation et les investissements. La majeure partie de leurs dépenses sont occasionnées par la fourniture de services de proximité, en particulier les services sociaux et les services de santé.

Ce rôle très important des autorités locales dans la fourniture de services sociaux tient de toute évidence à leur autonomie en matière fiscale : les autorités locales finlandaises financent près de la moitié de leurs opérations avec leurs propres revenus fiscaux. Chaque autorité locale décide de façon indépendante de son taux d'imposition sur le revenu, pour lequel il n'existe pas de limite supérieure, alors qu'en ce qui concerne l'impôt foncier, la loi prévoit un plafond et un plancher.

Le système finlandais est fondé sur une évolution historique, dans laquelle le lien avec le modèle nordique a traditionnellement été fort. Si les principes de base du modèle nordique -- responsabilité conjointe et égalité -- sont maintenus, il gardera probablement ses caractéristiques fondamentales, malgré l'introduction contrôlée de méthodes appliquées ailleurs en Europe.