La promotion de la coopération transfrontalière dans la région de Kaliningrad : Un enjeu pour la cohésion sociale - CG (9) 27 Partie II Révisé

Rapporteur :
M. Halvdan SKARD (Norvège, L)

EXPOSE DES MOTIFS

1. Introduction

Le CPLRE a effectué une mission exploratoire à Kaliningrad les 2 et 3 décembre 2002 dont l’objectif consistait à se renseigner sur la situation à Kaliningrad en général et en particulier sur la coopération transfrontalière entre l’enclave et ses pays voisins, la Lituanie et la Pologne. La mission faisait suite au débat que le groupe de travail sur Kaliningrad du Bureau du CPLRE a consacré à l’instauration prochaine du régime de visas Schengen en Pologne et en Lituanie et à ses effets sur la coopération transfrontalière dans la région de Kaliningrad. La délégation du CPLRE était composée des membres suivants :

M. SKARD (Président, Norvège)
M. GRZELAK (Pologne)
M. SALTYKOV (Russie)
M. ZAVECKAS (Lituanie)
M. LINDBERG (Secrétariat du CPLRE)

De plus, Mme Elita CAKULE de l’association norvégienne des pouvoirs locaux et régionaux s’est jointe à la mission pour assister M. SKARD.

La délégation du CPLRE s’est entretenue avec :

Suite au rapport préliminaire de M. Skard sur les résultats de la mission, présenté au Bureau du Congrès le 16 décembre, le Bureau a chargé M. Skard de rédiger un rapport sur la façon de promouvoir la coopération transfrontalière dans la région de Kaliningrad.

Le Bureau a également invité M. Hans Martin Tschudi, Suisse, rapporteur général du Congrès sur la coopération transfrontalière, à aider le rapporteur.

Ce projet de rapport doit être envoyé à la Commission de la cohésion sociale du Congrès en vue de le soumettre à la session de printemps du Congrès. Il a également été décidé que la question de Kaliningrad figurerait parmi les points à l’ordre du jour de la Conférence de Saint-Pétersbourg (6-7 octobre 2003).

La question des visas et du transit des citoyens russes

Les rapporteurs ne souhaitent pas se prononcer sur l’instauration du régime de visas Schengen en Lituanie et en Pologne en tant que telle, mais ils reconnaissent ses effets sur la coopération transfrontalière dans la région et ils prennent note de l’accord conclu par l’Union européenne et la Fédération de Russie concernant la question du transit entre Kaliningrad et le reste de la Russie. Le point 5 du Sommet UE-Russie du 11 novembre 2002 stipule notamment que :

“L’Union européenne mettra en place la législation nécessaire pour établir avant le 1er juillet 2003 un système de document facilitant le transit (FTD), permettant le transit par route des citoyens russes seulement entre Kaliningrad et d’autres parties de la Russie. Le FTD sera valable pour une durée limitée pour le transit direct par route d’un pays tiers vers une autre partie du territoire du même pays et sera délivré gratuitement ou à très peu de frais”.
Il convient également de noter que l’Assemblée parlementaire a adopté le 25 septembre 2002 la recommandation 1569 (2002), rappelant que (paragraphe 1) :

“Le but statutaire du Conseil de l’Europe est de réaliser une union plus étroite entre ses Etats membres, ce qui implique aussi de favoriser et de faciliter les contacts entre tous les Européens, y compris par la circulation des personnes par-delà les frontières internationales en Europe. L’Assemblée rappelle dans ce contexte les mesures prises pour faciliter la circulation des personnes, en vertu de l’Accord européen sur le régime de la circulation des personnes entre les pays membres du Conseil de l’Europe, de 1957.”1

Au paragraphe 11 de la recommandation susvisée, l’Assemblée parlementaire invite en outre le Comité des Ministres à

i. offrir aux Etats membres le conseil et l’expertise juridiques du Conseil de l’Europe en ce qui concerne leurs systèmes de visas bilatéraux et multilatéraux ;

ii. charger ses comités directeurs compétents d’étudier dans quelle mesure l’Accord européen sur le régime de la circulation des personnes entre les pays membres du Conseil de l’Europe doit être complété par des dispositions additionnelles sur la normalisation de documents de voyage lisibles par machine, la transcription entre les alphabets cyrillique et latin, l’échange d’informations entre les parties signataires en matière d’ordre et de sécurité publics et la réadmission de migrants illégaux.

Le Comité des Ministres examine actuellement cette question. Le Congrès soutient les efforts de l'Assemblée parlementaire et du Comité des Ministres et encourage les autorités nationales de la Fédération de Russie, de la Lituanie et de la Pologne à trouver des moyens d'accroître la liberté de circulation de la population vivant à la frontière entre les trois pays précités, compte tenu notamment de l'extension prochaine du régime de visa de Schengen à la Pologne et à la Lituanie.

2. Action du Conseil de l’Europe pour Promouvoir la Cooperation Transfrontalière

Il convient de rappeler que le Conseil de l’Europe a déjà contribué à la promotion de la coopération transfrontalière dans la région de Kaliningrad. Ainsi, outre la recommandation susmentionnée de l’Assemblée parlementaire, la Direction générale des affaires juridiques a notamment organisé un séminaire d’étude sur la coopération transfrontalière dans la région de Kaliningrad les 11 et 12 octobre 2001 et une réunion mixte des commissions bilatérales (Lituanie, Pologne, Russie) pour la coopération transfrontalière les 17 et 18 octobre 2002.

Suite aux événements cités ci-dessus, le Comité directeur sur la coopération transfrontalière a lancé une étude sur "les mesures visant à résoudre certains problèmes de la région de Kaliningrad". L’étude devrait être publiée au printemps 2003.

En outre, le Programme des mesures de confiance a financé un projet intitulé “Conscience historique des jeunes dans le district de Kaliningrad, en Lituanie occidentale et à Warmia-Mazury” en 1996.

Enfin, l'Accord européen de 1957 sur le régime de la circulation des personnes entre les pays membres du Conseil de l'Europe développe par définition, comme indiqué précédemment, les contacts et la coopération transfrontalière entre les Etats membres.

3. Mécanismes de Coopération Transfrontalière en Vigueur dans la Région de Kaliningrad

3.1. Mécanismes de coopération transfrontalière dans la région de Kaliningrad

Il existe déjà plusieurs mécanismes de coopération transfrontalière dans la région de Kaliningrad bien qu’il soit possible de la développer encore davantage. La liste ci-dessous inclut les principaux cadres mais pas nécessairement tous les cadres existants.

3.2. les conseils intergouvernementaux de coopération bilatérale sur la coopération transfrontalière

Des conseils intergouvernementaux de coopération bilatérale sur la coopération transfrontalière, assortis de commissions spécialisées, ont déjà été mis en place entre Kaliningrad et la Pologne et entre Kaliningrad et la Lituanie. Ils sont déjà bien établis et opérationnels. Il convient de trouver des solutions pour développer la coopération transfrontalière au moyen de ces conseils.

3.1.2. les eurorégions

La coopération existant dans le cadre des trois eurorégions de Neman, Saule et Baltique, dont Kaliningrad est membre, constitue une contribution importante à la coopération transfrontalière générale. Les eurorégions ont notamment pour mandat de renforcer la coopération entre les régions transfrontalières dans divers domaines (économie, développement des infrastructures, aménagement du territoire, éducation, santé publique, culture, tourisme et protection de l’environnement), d’élever le niveau de vie, d’intensifier les liens entre municipalités, de coopérer dans le domaine de l’aménagement du territoire et d’améliorer les liaisons de transport. Les eurorégions sont des structures qui se prêtent bien à une coopération encore plus large.

3.1.3 La dimension nordique – Plan d’action sur la dimension septentrionale de l’UE (NDAP)

En décembre 1998, à la réunion du Conseil européen tenue à Vienne, la Commission européenne a présenté une communication sur la dimension septentrionale qui expose les politiques et instruments pertinents de l'Union européenne ainsi que des recommandations pratiques sur la dimension septentrionale des politiques de l'Union européenne. Les premières lignes directrices pour la mise en œuvre d'une dimension septentrionale ont été adoptées par le Conseil européen en juin 1999.
Les lignes directrices ont été suivies de l'actuel plan d'action sur la dimension septentrionale de l'Union européenne, qui a été approuvé par le Conseil européen, réuni à Feira, en juin 2000.
Le plan d'action couvre les domaines ci-après:

– les infrastructures
– l'environnement et la sûreté nucléaire
– la santé publique
– le commerce, la coopération économique et la promotion des investissements
– la recherche et le développement technologique
– la justice et les affaires intérieures
– la coopération transfrontalière.

Le plan d'action fait de nombreuses références explicites à la situation de Kaliningrad, concernant en particulier la santé (propagation de maladies contagieuses et lutte contre la toxicomanie et l'alcoolisme), l'énergie, la justice et les affaires intérieures, etc.
Sous le chapitre «Commerce, Coopération économique et, promotion des investissements», notamment, il est indiqué qu’un «soutien particulier devrait être apporté à la promotion de la coopération transfrontalière entre entreprises, plus précisément entre l'oblast de Kaliningrad et ses voisins». En outre, sous le chapitre intitulé «Justice et affaires intérieures», il est précisé qu'«une politique commune en matière de visas, telle que définie dans l'acquis de Schengen, sera étendue aux nouveaux Etats membres de l'Union européenne. Une attention particulière est actuellement accordée à cette question dans le cadre de l’APC, tout particulièrement en ce qui concerne Kaliningrad. Afin d'assurer une coopération transfrontalière harmonieuse, il faudrait réfléchir aux moyens de faciliter la délivrance des visas et envisager un soutien dans le cadre d’instruments appropriés».
3.2 Organisations soutenant la coopération transfrontalière dans la région de la mer Baltique
En outre, plusieurs organisations soutiennent activement la coopération transfrontalière dans la région de la mer Baltique, incluant Kaliningrad. Parmi ces organisations figurent :

3.2.1 Le CEMB et la BSSSC
Le Conseil des Etats de la mer Baltique (CEMB) et sa structure sous-régionale appelée Coopération subrégionale des Etats de la mer Baltique (BSSSC), qui englobe aussi Kaliningrad dans ses activités, constituent l'une des principales structures actives dans la zone de la mer Baltique. Par exemple, le CEMB a lancé un projet éducatif d'Eurofaculté à l'Université d'Etat de Kaliningrad en 2000. Actuellement, le CEMB met en œuvre notamment des projets destinés à améliorer la qualité de l'administration, à encourager l'entreprenariat national ainsi que les investissements étrangers.

3.2.2 l’Union des villes baltes (UBC)

Le rapporteur n’a connaissance d’aucun projet particulier de l’UBC à Kaliningrad, à l’heure actuelle; cependant, l’UBC suit de près l’évolution de la situation à Kaliningrad. Il convient, cependant, de noter que les villes de Kaliningrad et de Baltijsk sont membres de l’UBC.
3.2.3 le Conseil nordique des ministres

Le Conseil nordique des ministres mène un projet sur la coopération transfrontalière régionale dans les régions limitrophes (ce terme définit le territoire des trois Etats baltes et le Nord-Ouest de la Russie). La coopération vise notamment à permettre la création d’un réseau de régions participant à la coopération transfrontalière (eurorégions) dans les régions limitrophes, qui puisse être lié à un réseau de coopération transfrontalière déjà en place dans les pays nordiques.

3.3 Projets bilatéraux
Enfin, il faut signaler qu’au moins la Finlande, le Danemark, l’Allemagne, la Lituanie, la Norvège, la Pologne et la Suède sont engagés dans de nombreux projets bilatéraux à Kaliningrad.

4. Mesures Concrètes Visant a Développer la Coopération Transfrontalière dans Divers Domaines d’Action

4.1. Domaines d’action pouvant faire l’objet d’une coopération

On considère que différents domaines pourraient être adaptés à la coopération transfrontalière aux niveaux local et régional. Parmi ces domaines figurent :

4.1. Coopération dans le domaine de la santé

Le traitement des patients ayant besoin de soins d’urgence pourrait être réalisé de part et d’autre de la frontière, là où se trouvent les services médicaux les mieux adaptés. En outre, une coopération, des échanges et une formation commune dans le domaine de la formation professionnelle du personnel à tous les niveaux, y compris au niveau de la direction, pourraient être envisagés. Par ailleurs, des projets communs visant à lutter contre les maladies transmissibles comme le VIH/SIDA et la tuberculose présenteraient un intérêt pour toutes les parties, car ces maladies, tout comme les problèmes environnementaux, ne respectent pas les frontières.

4.1.2 Coopération dans le domaine de l’éducation et de la formation professionnelle

Les échanges et la coopération à divers niveaux d’éducation constituent un moyen mutuellement bénéfique de mener la coopération transfrontalière. Il existe de très nombreux exemples provenant d’autres pays européens sur les formes que peuvent prendre les échanges dans le domaine de l’éducation.

La création d’une eurofaculté à l’Université d’Etat de Kaliningrad doit être considérée comme une étape encourageante et constitue déjà un bon exemple.

De plus, le développement de l’enseignement des langues des pays voisins permet incontestablement de renforcer la coopération et les contacts transfrontaliers et doit être encouragé.

Il serait souhaitable de mettre au point des programmes scolaires communs par exemple sur les questions environnementales afin de lier deux domaines d’action importants particulièrement adaptés à la coopération transfrontalière.

4.1.3. Echanges de jeunes

La promotion des échanges de jeunes de part et d’autre des frontières reste un moyen fructueux d’établir les bases d’une future coopération dans tous les domaines entre de futurs décideurs.

Bien que des échanges de jeunes soient déjà organisés, ils pourraient être étendus et développés, en utilisant des modèles issus d’autres parties de l’Europe. La Direction de la jeunesse du Conseil de l’Europe a acquis une vaste expérience dans ce domaine et pourrait fournir ces modèles.

4.1.4 Environnement

Les problèmes environnementaux ignorent les frontières et la coopération transfrontalière dans le domaine de l’environnement revêt donc une importance particulière pour répondre aux préoccupations environnementales. Ainsi, le classement en zone commune protégée pourrait être envisagé pour la région du Curonian Spit à la frontière entre Kaliningrad et la Lituanie.

De même, un projet commun de recherche et de protection pour l’environnement marin pourrait être envisagé pour la zone côtière à la frontière de la Pologne et de Kaliningrad.

En outre, la mise sur pied d’un projet commun de gestion et/ou de recyclage des déchets pourrait être bénéfique aux trois parties.

4.1.5. Emploi et formation

Des stages de recyclage, notamment à l’intention de l’ancien personnel militaire dans la région de Kaliningrad, pourraient être menés par les pouvoirs locaux et régionaux. L’ancien personnel militaire pourrait par exemple être employé dans les services de contrôle des frontières. La formation de la police de l’air et des frontières et du personnel des douanes pourrait contribuer à améliorer l’efficacité de la gestion des frontières. En effet, des professionnels plus qualifiés aux frontières encourageraient le commerce et les contacts légaux entre Kaliningrad et ses pays voisins. Le financement de TACIS est disponible pour la formation des agents des douanes et la Pologne a également proposé de former les douaniers de Kaliningrad2.

4.1.6. Transports

De nouveaux liens logistiques tels que les liaisons ferroviaires et de bus amélioreraient considérablement la coopération transfrontalière. La modernisation des routes existantes et la construction de nouvelles routes dans les régions frontalières contribueraient réellement à promouvoir la coopération transfrontalière.

En outre, les ports et les voies ferrées doivent être développés dans le cadre d’un projet intégré pour assurer une interaction efficace entre ces deux formes de transport. Des terminaux ferroviaires intermodaux visant à assurer le trafic ferroviaire sur des voies à écartements différents pourraient être mis en place à Kaliningrad.

4.1.7. Contrôle des frontières et douanes

La modernisation des postes de contrôle aux frontières ainsi que la formation du personnel des douanes doivent être considérées comme une priorité et une condition préalable au développement de la coopération et des contacts transfrontaliers. Le Président de la Commission européenne a déjà promis l’important soutien de l’UE pour la modernisation des points de passage de frontière afin de faciliter la circulation des biens et des personnes entre Kaliningrad et le reste de la Russie après l’élargissement3. Il est évident que tous les contacts transfrontaliers entre Kaliningrad et la Lituanie bénéficieront de la modernisation des points de passage.

4.1.9. Accords réciproques visant à réduire le coût des visas

Les visas délivrés par les nouveaux Etats membres de l’UE après leur adhésion seront des visas nationaux jusqu’à la suppression des contrôles aux frontières intérieures.

Il faut souligner que le Président polonais M. Kwasniewski et le Président ukrainien M. Kuczma ont tenu une réunion à Ivano-Frankowsk le 13 février 2003 à l'issue de laquelle ils ont publié une déclaration commune concernant l'accord qu'ils ont conclu sur la réglementation des visas entre les deux pays. L'accord précise que les polonais devraient continuer à pouvoir voyager sans visa en Ukraine, tandis que les ukrainiens auront besoin de visas pour entrer en Pologne à partir du 1er juillet 2003, mais ces visas seraient accordés gratuitement. Des négociations entre la Russie, la Pologne et la Lituanie visant à réduire les coûts des visas seraient bénéfiques pour la coopération transfrontalière.

4.10 Augmentation des activités et de la présence consulaires

La présence consulaire accrue de la Lituanie et de la Pologne à Kaliningrad et vice versa, par le biais d’attachés responsables de la coopération dans divers domaines d’action tels que les transports, l’environnement, la jeunesse, l’éducation, la culture, le système judiciaire, etc., serait susceptible de favoriser la coopération transfrontalière d’un point de vue qualitatif et quantitatif.

5. Instruments et Modèles visant a Développent la Coopération Transfrontalière

5.1. Modèles institutionnels de coopération

5.1.1 Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales

La Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales prévoit des modèles d’accord pour la coopération transfrontalière. Ces modèles pourraient être utilisés comme point de départ pour le développement de la coopération transfrontalière entre Kaliningrad et ses pays voisins. La Fédération de Russie, la Lituanie et la Pologne ont signé et ratifié la Convention qui est entrée en vigueur dans ces trois pays.

Toutefois, la Lituanie est le seul des trois Etats à avoir ratifié le protocole n°1 de la Convention précitée, qui s’inscrit dans une perspective plus concrète que la Convention elle-même

5.1.2. Mise en place d’un organe de coopération composé de représentants au niveau régional

En dépit des travaux menés dans le cadre de la coopération subrégionale des Etats de la mer Baltique (BSSSC), il n’existe à l’heure actuelle aucun organe doté d’une représentation régionale directe pour la coopération entre l’oblast de Kaliningrad et ses régions voisines. Cette coopération institutionnalisée pourrait s’inspirer des structures et des expériences de coopération du Conseil euro-arctique de Barents (BEAC). Le BEAC est un exemple particulièrement pertinent, car il comprend des représentants des régions, comme les oblasts russes. La présence de ces représentants, qui connaissent mieux les régions que les autorités centrales mais ont une vue d’ensemble plus large que les autorités municipales, s’est révélée extrêmement efficace pour déterminer les besoins réels de la région de Barents et y répondre. Par ailleurs, une structure analogue à l’intention des acteurs autour de la région de Kaliningrad pourrait établir un cadre de coopération régionale fructueuse. Le point de départ pour la coopération au sein du BEAC était similaire à la situation actuelle de Kaliningrad, ce qui rend ce modèle particulièrement utile.

Le BEAC est un organe intéressant qui peut être utilisé comme modèle pour une autre raison : il compte à la fois des pays appartenant à l’Union européenne et des pays qui n’en sont pas membres. En outre, le BEAC a son propre secrétariat, qui lui assure cohérence et continuité.

La Conférence du Rhin supérieur4 est une autre structure qui fonctionne bien et qui pourrait être utilisée comme modèle. Il s’agit d’un organe de coopération interétatique pour les régions frontalières entre la France, l’Allemagne et la Suisse. Enfin, le modèle d’accord interétatique sur la concertation régionale transfrontalière, (modèle d’accord 1.2 de la Convention) constitue un modèle perfectionné de cette coopération transfrontalière interétatique.
5.2. Mesures juridiques

Mesures juridiques autres que les modèles d’accord de la Convention de Madrid

Un accord multilatéral régional sur la promotion de la coopération transfrontalière pourrait être envisagé comme base légale pour un organe régional en faveur de la coopération transfrontalière, comme suggéré ci-dessus. Les services juridiques compétents du Conseil de l’Europe pourraient être invités à contribuer à l’élaboration de cet instrument. Il existe un certain nombre d’exemples de ces accords, comme celui conclu entre les pays du Bénélux, l’accord de Karlsruhe entre la France, l’Allemagne, la Suisse et Luxembourg ainsi que les accords respectifs entre la France et l’Espagne et la France et la Belgique.

6. Activités Visant a Promouvoir la Coopération Transfrontalière

Les divers acteurs et organisations intervenant dans la promotion de la coopération transfrontalière dans la région de Kaliningrad devraient garantir dans la mesure du possible la coordination des activités afin d’éviter les chevauchements et de créer des synergies.

En raison de sa situation géographique, Kaliningrad et de son statut de zone économique spéciale, est exceptionnellement bien placée au sein de la Fédération de Russie pour s’engager dans une coopération fructueuse avec les pays de l’Union européenne et pour devenir une vitrine du développement russe. Toutefois, pour profiter pleinement de cette position avantageuse, les autorités russes devraient donner à Kaliningrad le statut adapté à cet objectif.
L’instauration de partenariats entre les eurorégions auxquelles participe Kaliningrad et d’autres eurorégions dans d’autres parties de l’Europe – mais peut-être en tout premier lieu celles qui sont actives dans la mer Baltique – serait apparemment une façon naturelle de trouver de nouveaux moyens de poursuivre la coopération transfrontalière.

Les séminaires de sensibilisation à l’intention de la société civile permettent également de renforcer la coopération transfrontalière. Ainsi, un séminaire pourrait être consacré à la promotion du programme des mesures de confiance en tant qu’instrument pour les ONG et les projets transfrontaliers locaux.

7. Moyens de Financer Les Activités de Coopération Transfrontalière

Compte tenu de l’élargissement de l’Union européenne en 2004, Kaliningrad aura une frontière avec l’Union européenne, ce qui devrait permettre d’employer pleinement les crédits disponibles sur le budget d’Interreg pour lancer des projets transfrontaliers avec Kaliningrad. Outre les fonds d’Interreg, ceux de PHARE et de TACIS se prêtent aussi à la promotion de projets transfrontaliers. Pour engendrer le maximum de synergies, l’utilisation de ces fonds devrait être bien coordonnée.

L’Union européenne a proposé la création d’un nouveau Fonds pour Kaliningrad. Bien que la principale contribution provienne de la Commission européenne, ce Fonds serait également ouvert aux contributions volontaires des différents Etats membres de l’UE et d’autres parties intéressées.

En outre, le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe a établi, à l’issue de sa réunion à Vilnius, un Compte spécial pour la coopération régionale qui se prêterait au développement de la coopération régionale dans la région de Kaliningrad.

ANNEXE 1

· La Commission intergouvernementale pour le Rhin supérieur se compose de trois délégations, comportant chacune au maximum huit membres, nommés par leur gouvernement respectif. La ligne de conduite de chaque délégation est déterminée par les représentants des ministères des Affaires étrangères des trois pays. La Commission, qui se réunit annuellement ou semestriellement, traite en priorité les questions relatives à la coopération transfrontalière qui ne peuvent pas être résolues par la Conférence du Rhin supérieur. Elle formule des recommandations à l’intention des Parties et éventuellement prépare des projets d’accord.

· La seconde structure, certainement la plus importante aujourd’hui, est la Conférence franco-germano-suisse du Rhin supérieur. Cette Conférence tient ses réunions plénières deux fois par an dans le pays qui assure la présidence tournante. Chaque délégation se compose de 25 membres. L’ordre du jour est établi par les chefs de délégation sur proposition du/de la Président/e en exercice. La Conférence du Rhin supérieur est compétente pour les affaires à portée régionale d’intérêt transfrontalier, qui concernent en principe les trois parties contractantes. En tant qu’institution d’information et de coordination des exécutifs pour l’espace frontalier, elle peut se saisir elle-même de certaines questions, ou encore, à la demande de la Commission intergouvernementale, lui présenter des propositions ou lui soumettre des projets d’accord. Les résolutions de la Conférence du Rhin supérieur sont adoptées à l’unanimité. Toutefois, l’abstention de l’une des délégations n’empêche pas l’adoption d’une résolution. La Conférence du Rhin supérieur peut constituer des groupes de travail, dont la tâche est définie par un mandat. De leur côté, ces groupes peuvent mettre sur pied des groupes d’experts (ils sont actuellement une vingtaine) ou des groupes de travail ad hoc sur des sujets d’actualité. Les groupes de travail actuels couvrent les domaines thématiques suivants : politique économique, politique des transports, environnement, culture, aménagement du territoire, éducation et formation, drogues, santé et jeunesse. Au total, environ 500 membres au niveau du gouvernement national, régional et local participent aux travaux de la Conférence du Rhin supérieur à ses divers niveaux. Depuis 1996, par le biais de l’assistance du programme INTERREG de l’UE, un secrétariat commun a été mis en place à Kehl (ville allemande située juste de l’autre côté de la frontière, en face de Strasbourg). Ce secrétariat est le seul à rassembler des fonctionnaires français, allemands et suisses, qui travaillent sous le même toit avec un assistant : ils sont chargés de soutenir le/la Président/e en exercice dans son travail et de coordonner les activités des différents groupes de travail ou groupes d’experts.

1 La Fédération de Russie, la Pologne et la Lituanie n’ont ni signé ni ratifié cet Accord.

2 Annexe à la lettre en date du 23 mai 2002, adressée par le Président de la Commission européenne au Président de la Fédération de Russie.

3 Lettre en date du 23 mai 2002, adressée par le Président de la Commission européenne au Président de la Fédération de Russie.

4 voir annexe 1