La Charte urbaine européenne révisée - CPL (11) 7 Partie II

Rapporteur:
Carlos Alberto PINTO, Portugal,
Chambre des pouvoirs locaux
Groupe politique : PPE/DC

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EXPOSE DES MOTIFS

INTRODUCTION – LA CHARTE URBAINE EUROPÉENNE

1. La Charte urbaine européenne a été adoptée par le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l’Europe en 1992.

La Charte :

était fondée sur le travail du Conseil de l’Europe en matière de politiques urbaines, et s’inspirait de la Campagne européenne pour la renaissance de la cité (1980-1982). Elle a donné lieu à un vaste programme de travail couvrant différents aspects du développement urbain : santé, modernisation de l’industrie, insécurité, prévention de la criminalité et toxicomanie, protection du patrimoine architectural et historique, entraide et développement communautaire, logement, transports et mobilité, culture, finances, développement économique, ressources naturelles, environnement physique, planification urbaine, distribution des installations et équipements.

tenait compte de l’importance traditionnellement accordée aux Droits de l’homme dans les activités du Conseil de l’Europe, en formulant une série de recommandations relatives aux Droits de l’homme dans l’environnement social et physique des villes.

respectait la pratique en vigueur dans de nombreux pays membres selon laquelle les décisions touchant la vie des collectivités urbaines appartiennent principalement aux administrations locales ;

soulignait l’importance de l’autonomie locale, de la participation des citoyens et du processus démocratique dans les questions relatives à l’aménagement du territoire, comme le prévoit la Charte européenne de l’autonomie locale du Conseil de l’Europe ;

insistait sur le fait que la ville a toujours été considérée comme un lieu de rencontre idéal, creuset des communautés et du tissu social ; sans elles, comme le disait Thomas Hobbes, la vie serait « désagréable, pauvre, solitaire, abrutissante et courte ». La ville est une communauté d’individus politiquement organisés pour l’accomplissement de buts communs ;

connaissait l’existence de nombreux exemples de villes qui fonctionnent bien et fournissent à leurs habitants une qualité et un mode de vie satisfaisants ; qui ont trouvé le point d’équilibre entre développement économique, utilisation raisonnée des ressources, et préservation d’un environnement de qualité ; où le niveau de participation est élevé, où le bon voisinage et la vie communicative sont en expansion, où existent un sens et une fierté de l’appartenance ;

rejetait les maux des villes tels que le mauvais entretien et le délabrement des quartiers centraux, la création d’un environnement aliénant et de qualité inférieure, les différentes formes de pollution, l’apparition d’attitudes discriminatoires, la dégradation de l’infrastructure, l’insécurité, les problèmes sociaux et sanitaires, la dégradation des centres historiques, l’engorgement dû au trafic automobile.

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En attirant l’attention du public européen sur ces questions, en particulier par des activités d’information et de sensibilisation à l’intention des pouvoirs locaux et régionaux, le Conseil de l’Europe et le Congrès ont montré quelles sont les voies d’avenir pour la gouvernance locale : d’une part, la commune est à la fois le fondement d’une Europe unie et le niveau d’administration le plus proche du citoyen, celui avec lequel les habitants peuvent s’identifier le plus facilement ; d’autre part, l’aménagement urbain requiert une volonté politique clairvoyante à l’échelon local afin d’améliorer l’environnement social et physique.

2. OBJECTIFS DE LA CHARTE

La Charte, qui réunit en un seul texte un ensemble de principes relatifs à la bonne gestion urbaine à l’échelon local, a les objectifs suivants :

- offrir aux administrations locales et aux habitants des conseils pratiques en matière de gestion urbaine ;

- recenser les principaux éléments nécessaires en vue d’une future Recommandation du Conseil de l’Europe sur les villes en Europe ;

- présenter le point de vue du Conseil de l’Europe sur les questions relatives à l’environnement bâti.

3. DECLARATION EUROPEENNE SUR LE DROIT A LA VILLE

Lors de son adoption en 1992, la Charte fut introduite par une Déclaration européenne sur le droit à la ville qui soulignait l’engagement du Congrès à la démocratie participative.

Cette Déclaration, comme c’est le cas pour la Charte elle-même, sera mise à jour et publiée séparément sous une forme révisée vers la fin de l’année 2004.

4. POURQUOI UNE NOUVELLE CHARTE ?

Dix ans après l’adoption de la Charte, le Bureau du Congrès a décidé de la réviser.

Le Congrès attache une grande importance à cette révision ; il estime que l’amélioration de la qualité de vie dans les villes demeure un facteur clé de la stabilité et voit dans la lutte contre le déclin des villes et dans l’amélioration de l’environnement social et physique des zones urbaines des moyens de réduire la violence et les conflits qui traversent la société.

La révision de la Charte urbaine a permis de vérifier sa portée, sa signification actuelle, ses limites et sa pertinence. Les villes, a-t-on ainsi reconnu, sont des entités complexes. Elles varient considérablement en termes de développement, de taille, d’environnement et de géographie. Si les racines de leur identité plongent dans l’histoire, elles sont toutefois en constante évolution. Elles doivent rester en phase avec l’évolution de la société et s’ouvrir à sa diversité, satisfaire les impératifs environnementaux et les besoins culturels en veillant à leur équilibre, et répondre à l’évolution des modes de vie ainsi qu’à l’élévation générale du niveau de vie.

Après 10 ans, la Charte doit prendre en compte le nouveau contexte politique, institutionnel, social et économique en Europe, qui diffère considérablement de la situation en vigueur lors de la rédaction de la première version.

C’est pourquoi le Congrès a tenu une conférence pour la révision de la Charte, en 2002 à Sofia. Cette rencontre avait pour objectif d’identifier les facteurs qui influencent actuellement la société urbaine et qui n’ont peut-être pas été suffisamment pris en compte dans la première version de la Charte.

Les principaux thèmes proposés par la conférence sont les suivants :

- l’élargissement de l’Union européenne, avec l’ouverture aux pays d’Europe centrale et orientale ;

- -la concurrence, la liberté de mouvement, la monnaie unique ;

- la mondialisation, l’évolution démographique et la migration ;

- la prise de conscience du public et son désir de participer au processus décisionnel ;

- la reconnaissance croissante, par les Nations Unies, de l’importance de la ville au niveau mondial ;

- la coopération et les échanges croissants entre grandes villes européennes ;

- les politiques de l’emploi et notamment le renforcement des programmes d’enseignement et de formation professionnelle pour mettre davantage en adéquation les emplois disponibles et les compétences en présence ;

- la nécessité de traiter avec une plus grande efficacité le problème de l’exclusion sociale, et de réduire les inégalités ;

- la nécessité de renforcer la notion de responsabilité et de devoir, parallèlement à celle des droits urbains ;

- la nécessité de concilier l’impératif d’une politique générale cohérente et efficace avec les besoins de la décentralisation et de la démocratie locale dans les zones urbaines ;

- l’appui aux pouvoirs locaux en veillant à ce que leurs ressources financières soient à la hauteur de leurs responsabilités telles que définies par la Constitution et la législation ;

- l’impact des nouvelles technologies de l’information et les méthodes de participation directe des citoyens dans le cadre des politiques de bonne gouvernance, de transparence et de responsabilité ;

- le contrôle démocratique des services publics assurés par les administrations locales, tels que la distribution de gaz, d’électricité, d’eau ;

- le renforcement de la notion de développement durable et les attentes croissantes de la population en matière de qualité de l’environnement ;

- les nouvelles approches en matière de sécurité urbaine et le traitement des différentes formes de violence ;

- l’amélioration du dialogue social ; l’encouragement des partenariats entre communautés, citoyens et groupes ethniques ; l’encouragement des organisations non gouvernementales ; la mise en valeur des aspects positifs de la société multiculturelle.

Ces considérations ont été une source d’inspiration pour la nouvelle Charte.

5. LA NOUVELLE CHARTE, UN PROJET D’AVENIR

La nouvelle Charte pose les jalons de la ville du futur.

a. Viabilité

En 1987, la Commission Brundtland définissait le développement durable comme un « développement permettant de répondre aux besoins actuels sans compromettre l’aptitude des générations futures à répondre à leurs propres besoins ». Cette définition est encore pleinement valable aujourd’hui.

Des stratégies diverses ont été annoncées par nombre de pays, qui toutes restent largement en deçà des recommandations de la Commission Brundtland. La nécessité de parvenir à un accord au niveau mondial pour mettre en équilibre l’amélioration de l’environnement, la justice sociale et le développement économique n’a rien perdu de son acuité.

De nouvelles approches de l’aménagement urbain ont émergé au cours de la décennie écoulée, dans lesquelles la viabilité joue un rôle clé. L’accent est mis notamment sur la conservation des sols, la mobilité et l’élimination des déchets, ainsi que sur les incidences environnementales du développement sur la population, la nature et le patrimoine. Le développement durable d’une ville doit s’appuyer sur des interconnections efficaces entre la ville et sa région, entre l’occupation des sols et les moyens de transport, et entre l’environnement bâti et l’environnement naturel.

L’aménagement urbain doit tenir compte des interactions entre les activités des habitants et l’utilisation des terres, y compris des facteurs qui sont à l’origine de la pollution et du stress. Cette approche doit mettre l’accent sur des politiques durables axées sur des objectifs environnementaux, sociaux et économiques clairement définis.

On est en droit de se demander si les villes seront jamais des « centres de la civilisation » aux conditions idéales. Car les villes sont des lieux où s’expriment toutes les aspirations de l’homme, pour le meilleur et pour le pire. Comme le souligne N. Myers dans le Grand atlas de l’environnement (éditions Gaïa), toute communauté humaine engendre ses propres problèmes et contrastes – pauvreté et richesse, crime et justice, maladie et médecine.

b. Le village urbain

Les villes d’Europe ne cessent de se rapprocher du fait du déploiement des liaisons ferroviaires à grande vitesse et des lignes aériennes à bas prix ainsi que de l’amélioration des grands axes routiers. Si nous pouvions redessiner la carte de l’Europe en fonction de la durée des trajets plutôt que des distances, nous constaterions des changements spectaculaires. En conséquence, les collectivités urbaines ne peuvent plus se concevoir comme des entités indépendantes. Les villes devront apprendre à se positionner dans le village urbain virtuel.

c. Caractères distinctifs

L’accès aux centres urbains devenant de plus en plus facile, chaque ville devra afficher ses atouts par rapport aux autres centres situés à une heure de route, de train ou d’avion. A cet effet, les villes devront identifier leurs rôles distinctifs et mettre en valeur leurs points forts, dans les domaines du tourisme, des finances, de la culture ou de la politique par exemple. Cela inclut également la promotion du patrimoine architectural et des éléments distinctifs qui font le caractère d’une ville.

d. Comment satisfaire et concilier des impératifs différents

La ville idéale est une ville durable, agréable et saine qui parvient à concilier de multiples secteurs et activités ; à garantir les droits civils ; à assurer des conditions de vie optimales ; à être le reflet des divers modes de vie et attitudes de ses habitants ; à prendre pleinement en compte tous ses usagers : ceux qui y travaillent et ceux qui s’y rendent pour les commerces, le tourisme, la distraction, la culture, l’information, l’érudition, les études.

La ville est le lieu où doivent jouer les droits et les obligations des citadins, où doit s’établir l’équilibre entre les impératifs économiques et écologiques, où doivent être conciliés les intérêts de l’individus et ceux de la communauté, où doit s’effacer l’opposition entre le secteur public et le secteur privé, où doivent être célébrées la différence et la diversité.

e. Mettre l’avenir au diapason de l’histoire

La ville doit aussi savoir équilibrer les nouvelles tendances et la reconnaissance du patrimoine ; intégrer le nouveau sans détruire l’ancien. Une ville sans passé est comme un homme sans mémoire. La ville porte les traces de la vie privée et professionnelle de ses habitants, dans les quartiers, l’architecture, la végétation, les édifices religieux, les bibliothèques. Ces traces sont l’héritage collectif du passé ; elles donnent aux habitants un sentiment de continuité dans le présent.

f. Solidarité

La notion de solidarité tient une place importante dans toutes les sections de la nouvelle Charte :

- entre les collectivités locales, afin d’améliorer la qualité de vie en milieu urbain et de veiller au développement durable des villes, en reconnaissant les avantages, les responsabilités et les perspectives liés à la participation des pays d’Europe centrale et orientale ;

- entre les pouvoirs nationaux et locaux, pour garantir et renforcer par un engagement tant politique que financier la décentralisation au bénéfice des villes et de leurs communautés ;

- entre les administrations locales et les habitants, afin d’étudier les besoins des villes et de faire participer les habitants à la prise de décision ;

g. Responsabilités

La nouvelle Charte souligne qu’il incombe aux administrations des communautés urbaines de faire en sorte que les villes disposent de certains éléments clés, mais aussi que, symétriquement, les habitants ont la responsabilité de préserver et d’enrichir l’attrait collectif de la ville, d’apporter une contribution individuelle à la qualité de vie dans la cité.

Faire reculer autant que possible l’agression, la pollution, les environnements hostiles et perturbateurs, est une responsabilité commune de tous les membres de la communauté, des administrations comme des habitants.

Une équivalence et symétrie analogue s’applique aux principes suivants : contrôle démocratique de la communauté locale ; conditions décentes de logement, de santé ; perspectives culturelles et mobilité ; espaces verts et végétation ; équipements de sports et de loisirs ; équilibre harmonieux entre tous les usagers de la rue ; création d’installations publiques ; mesures de lutte contre la pauvreté ; aide spécifique aux personnes défavorisées ; exploitation mesurée des ressources naturelles ; réduction de l’émission de gaz à effet de serre.

La nouvelle Charte affirme que ces droits et responsabilités concernent l’ensemble des habitants des villes indépendamment de leur âge, origine, croyance, capacités physiques ou mentales, et situation sociale, économique ou politique.

h. La dépendance mutuelle de la ville et de sa région.

Le territoire de la société urbaine dépasse toujours les frontières de la ville. La ville a besoin de sa région pour faire face à des besoins qui requièrent souvent des surfaces considérables, comme par exemple les loisirs de plein air.

Inversement, la région a besoin de la ville pour les services, la santé, la culture, les commerces, les emplois et la création de richesses.

Une gestion globale de la ville et de sa couronne est essentielle afin d’éviter d’accroître le coût et l’inégalité des services, de déséquilibrer les flux de circulation, de surexploiter les ressources environnementales de la région, et de perdre le contrôle de la pollution et de l’élimination des déchets.

i. Volonté politique et compétences professionnelles, éléments déterminants de la politique urbaine

La vie urbaine est affectée par de nombreux facteurs exigeant une approche globale. Toute action entreprise ici suppose une large part d’analyse, d’étude, d’information et de responsabilité.

Une politique urbaine rationnelle doit conjuguer volonté politique et compétences techniques en matière d’aménagement.

La politique urbaine intéresse à la fois la collectivité dans son ensemble et l’individu dans divers aspects de sa vie professionnelle et privée. Outil essentiel d’intervention dans les mains des pouvoirs publics, elle doit s’appuyer sur un contrôle permanent et des consultations régulières avec les élus, les spécialistes de l’aménagement, les architectes, les paysagistes, les urbanistes et le public.

j. Coopération entre les villes

Étant donné le rôle clé joué par les villes dans le développement régional, national, européen et mondial, il est essentiel qu’elles participent aux réseaux de coopération et d’échanges à ces différents niveaux, par le biais de jumelages, d’accords, et d’adhésions aux associations internationales et aux organisations non gouvernementales.

5. PLAN DE LA CHARTE

La Charte comporte cinq CHAPITRES principaux : Écologie, Économie, Équité, Forme et Gouvernance. Chaque chapitre débute par une introduction explicative.

L’introduction est suivie d’un certain nombre de THÈMES, également expliqués.

Pour chaque thème, plusieurs PRINCIPES sont énoncés, qui sont autant d’options stratégiques.

A. GOUVERNANCE

Les collectivités locales ont une responsabilité déterminante dans l’orientation et le contrôle du développement urbain et la protection de l’environnement et du tissu des zones urbaines et de leurs périphéries rurales.

Il s’agit là d’un rôle créatif qui suppose de veiller à la bonne utilisation des sols, au développement d’un patrimoine architectural de grande qualité et à la pleine participation des citoyens.

Le Conseil de l’Europe et l’Union européenne ont tous deux définis des objectifs de progrès pour l’Europe en matière de durabilité, de compétitivité et de stratégies sociales.

En premier lieu, les villes doivent collaborer afin d’éviter de se livrer une concurrence dommageable et afin de favoriser l’émergence d’un système « polycentrique », dans lequel chaque ville soit en mesure de jouer un rôle particulier, adapté à sa taille et à sa situation. Les villes de petite et moyenne importance ne doivent pas subir la domination excessive des grandes zones métropolitaines.

En second lieu, la collaboration au sein même d’une ville doit être renforcée. Il n'est pas rare que différentes administrations et secteurs, tels que la santé, l’éducation, les transports, l’environnement, le développement économique et l’aménagement du territoire suivent chacun leur propre politique. Ainsi, des hôpitaux sont transférés des centres-ville dans des locaux modernes situés en périphérie, ce qui peut nuire au dynamisme économique du centre, générer une augmentation du trafic automobile et compliquer les efforts de coordination des plans et services des différents secteurs administratifs, nécessaires à la réalisation d’objectifs communs.

Ce point met en évidence une troisième dimension de la collaboration urbaine.

La Charte place à juste titre les collectivités locales au centre de la politique urbaine. Leurs dirigeants sont les représentants élus de la population locale. Ils doivent cependant exercer leurs responsabilités en collaboration avec d’autres partenaires essentiels.

Enfin, et ce point est peut-être le plus important, la gouvernance des collectivités locales passe nécessairement par la participation des citoyens.

THÈME : DÉMOCRATIE LOCALE ET PARTICIPATION

La Charte européenne de l'autonomie locale définit les principes de l'autonomie et des finances locales tels qu'ils peuvent réalistement être appliqués. Les pouvoirs locaux devraient s’appuyer sur ce texte pour définir leur approche de la démocratie locale, de la participation des citoyens et de la subsidiarité.

Ils devraient veiller à ce que tous les groupes de population participent à la démocratie locale.
Tous les groupes doivent avoir les mêmes droits dans les procédures de consultation et pour la participation à la vie publique et politique. En contrepartie, tous les citoyens doivent faire preuve de responsabilité dans l’exercice de leurs droits. En conséquence, les pouvoirs locaux doivent s’efforcer d’améliorer la planification participative, les activités de communication et les autres processus participatifs.

Principes

1. La participation des citoyens à la vie politique locale doit être garantie par l'exercice libre, démocratique et responsable du droit d’élire leurs représentants.

Les assemblées des pouvoirs locaux sont élues démocratiquement et sont au centre de la collectivité, devant laquelle elles sont directement responsables. Un plus grand engagement des assemblées locales envers les citoyens qu’elles servent permettra de garantir l’efficacité des solutions durables apportées aux problèmes locaux et de redynamiser la vie politique locale. L'exercice des droits et responsabilités des citoyens à l’échelon local est garanti, en premier lieu, par la délégation de leurs pouvoirs décisionnels à leurs représentants élus, qui ont, en conséquence, le pouvoir d'exercer ces droits pour mettre en oeuvre des politiques, programmes et projets visant au bien-être des citoyens vivant dans la collectivité locale concernée.

Les villes doivent être incitées à appliquer les principes de la Convention européenne sur la participation des étrangers à la vie publique au niveau local. Celle-ci reconnaît le droit des étrangers qui résident légalement dans le pays depuis un nombre d’années déterminé à voter et à se présenter aux élections.

Les libertés locales et la flexibilité sont la clé de l’amélioration de la gestion des collectivités locales et un gage de qualité des services publics. A cette fin, il faut favoriser l'émergence et la vitalité des partis politiques en garantissant le droit de tous les résidents à participer à l'élection des représentants politiques locaux, sans discrimination liée à leur origine, à leur statut social ou économique. Pour être effectifs, ces droits doivent être exercés de façon responsable.

2. La participation des citoyens à la vie politique locale doit être effective à tous les niveaux politiques et administratifs.

Par leur élection, les élus locaux ne reçoivent pas un mandat détaillé visant tous les enjeux locaux pour toute la durée de leur mandat ; il convient donc qu’ils procèdent à des consultations pour certains problèmes particuliers. Dans certains cas, le recours au référendum peut être utile, par exemple lorsque la décision à prendre concerne un problème nouveau ou qu’elle est particulièrement controversée.

En outre, les agents des administrations locales étant généralement en poste pour de longues durées et jouissant de la sécurité de l’emploi, ils tendent à acquérir une certaine autonomie par rapport aux responsables politiques élus ; il convient donc que les électeurs aient un droit de regard sur l'appareil administratif et son fonctionnement. Il faut, pour ce faire, reconnaître les associations et groupes locaux, et institutionnaliser la participation des citoyens à la vie politique locale, par exemple en leur permettant de siéger dans les commissions directement rattachées à l'exécutif et de participer au fonctionnement de l'appareil administratif (commissions de contrôle, services des recours, médiateurs).

3. Les citoyens doivent être consultés sur tous les grands projets affectant le devenir de la collectivité.

Les citoyens sont le fondement de la démocratie locale ; ils doivent être informés de tous les grands projets conçus par les élus et les agents de l’administration locale. Un moyen d’y parvenir est de mettre en place des procédures formelles de consultation pour combler le fossé entre les pouvoirs locaux et le public. Le résultat de ces consultations doit être soumis au public.

Les autorités locales doivent fournir toutes les garanties d'impartialité lors des consultations en permettant le libre accès à tous les documents publics, en affichant sur place des informations sur les projets, en publiant un bulletin d’information local et en reconnaissant et favorisant le rôle des organisations bénévoles. Il est important d’impliquer le grand public et les groupes privés dans ce processus le plus tôt possible, de manière à ce qu’ils se sentent concernés et soumettent leurs suggestions Une participation étendue peut certes entraîner des retards, mais ses effets ne peuvent qu’être positifs, car elle permet d’aboutir à des décisions plus compréhensibles et acceptables par tous. Il convient de choisir avec soins les modes de communication. Dans les cas où des langues minoritaires et des cultures différentes sont fortement représentées, elles doivent être prises en compte.

Les enfants sont les futurs citoyens de nos villes ; ils doivent donc être impliqués dans la gouvernance urbaine dès leurs jeunes années. Leur connaissance de la citoyenneté et l’intérêt qu’ils lui portent sont des éléments clés de la gouvernance future.

THÈME : LES FINANCES LOCALES

La politique économique nationale doit assurer aux collectivités locales des ressources financières propres suffisantes, dont elles puissent disposer librement dans le cadre de leurs attributions. Il existe de grandes disparités économiques entres les collectivités locales, notamment en ce qui concerne l’assiette fiscale dont elles disposent et les conditions structurelles auxquelles elles sont soumises. En conséquence, il est essentiel d’avoir un système de péréquation de manière à ce que les municipalités puissent mener à bien leur mission dans des conditions économiques équivalentes.

Elles ont, en effet, des compétences dont l’impact sur la qualité de vie des citoyens est important et doivent pouvoir créer des conditions de vie décentes pour leurs administrés.

Principes

1. Les collectivités locales doivent disposer de ressources financières correspondant à leurs attributions.

Les responsabilités définies par la constitution et la loi doivent être assorties des ressources financières correspondantes.

Une partie, au moins, de ces ressources doit provenir des taxes et impôts locaux, dont elles ont le pouvoir de fixer le taux, dans les limites arrêtées par la loi.

Les systèmes financiers dont les collectivités locales tirent leurs ressources doivent être suffisamment diversifiés et dynamiques pour leur permettre, dans toute la mesure du possible, de suivre la croissance réelle des coûts inhérents à l’exercice de leurs fonctions. Ils incluent des ressources autres que les recettes fiscales, notamment les droits et redevances payés par les usagers des services publics locaux et les loyers perçus sur le patrimoine immobilier communal. Pour augmenter leurs revenus, les municipalités peuvent aussi vendre à profit leurs biens immobiliers.

La manière dont les collectivités locales lèvent et dépensent leurs recettes doit être dictée par les priorités locales. Les assemblées locales doivent pouvoir décider librement de l’affectation de leurs ressources plutôt que de devoir s’efforcer de couvrir les besoins locaux avec des niveaux de dépense fixés par le gouvernement central.

2. Il doit y avoir un système de péréquation.

La protection des collectivités locales les plus faibles impose la mise en place de mesures de péréquation financière qui peuvent, en fonction des circonstances et du degré d’autonomie financière des collectivités territoriales, reposer sur la péréquation verticale (dotations du gouvernement central) et/ou horizontale (entre collectivités locales). Ce système doit être conçu de manière à être stable et viable à long terme, aussi bien dabs ses effets que dans son financement.

3. La planification stratégique et une gouvernance qualifiée améliorent l’économie à long terme.

La réussite économique à long terme peut être atteinte grâce à des partenariats sur les questions de planification et de développement urbains. Des modèles de partenariats et d’investissements mixtes sont nécessaires à la réalisation de projets et à la stabilité future du développement urbain.

Les Systèmes d’information géographique (SIG) peuvent apporter une aide à la prise de décision en permettant de recouper un volume plus important d’informations. Les données sociales, économiques et écologiques peuvent être combinées afin de dresser plus précisément et plus rapidement un état général de la situation.

THÈME : GESTION ET PLANIFICATION URBAINE

La gestion de la ville doit être conduite de manière à garantir que toute personne dont les droits et les biens sont susceptibles d’être affectés de façon significative par des actes et décisions de l’administration en soit informée. Chacun doit pouvoir faire valoir son point de vue et participer ainsi activement au processus décisionnel.

Il doit y avoir un système qui permette d’éviter qu’aucune décision ne puisse être prise, à quelque échelon administratif que ce soit, si ses conséquences vont au-delà des personnes ou du niveau qu’elle vise. Si tel est le cas, l’affaire doit être portée devant le niveau administratif immédiatement supérieur. De cette manière, les décisions nécessaires peuvent être prises dans un cadre plus global.

Cette approche devrait se substituer au système vertical de gestion urbaine, toujours appliqué, qui se traduit par la juxtaposition de secteurs publics isolés les uns des autres et par une bureaucratie opaque.

Pour les citoyens, ce système est souvent incompréhensible, lent et peu rationnel du point de vue économique. Les choses doivent changer ; d’ailleurs, on assiste actuellement à une évolution vers des systèmes davantage axés sur le consommateur.

Principes

1. La gestion et la planification urbaine doivent reposer sur une connaissance précise et actuelle des caractéristiques et des aspects particuliers de la ville.

Aucune profession ni aucune administration ne peut, à elle seule, fixer les priorités et formuler des propositions en matière d’aménagement urbain, lequel ne peut non plus être laissé au hasard. Toute décision en la matière doit se fonder sur une analyse régulièrement actualisée des caractéristiques de la ville, de son potentiel, de ses activités, de ses capacités de développement et de ses ressources. La conception des modèles de développement et des politiques urbaines sera d’autant plus fiable et crédible que le domaine qu’ils couvrent aura été exploré en profondeur et que leur capacité d’adaptation aura été définie.

Cette analyse doit inclure une étude des potentialités démographiques et environnementales, des caractéristiques géographiques et topographiques et des aspirations de la population. Grâce à cette démarche, il sera plus aisé de parvenir à un équilibre entre, d’une part, les libertés individuelles, les projets bénéficiant à la collectivité, la santé, la sécurité, l’amélioration du niveau culturel et artistique et, d’autre part, les objectifs de croissance et de développement.

2. Les décisions politiques locales doivent reposer sur une planification urbaine et régionale menée par des équipes de professionnels.

Les décisions politiques locales doivent reposer sur des données complètes et à jour et sur un choix d'options cohérentes, proposées par des équipes de professionnels de la planification urbaine et régionale.

La planification urbaine nécessite une expertise professionnelle des projets, programmes, stratégies et plans qui modèlent le développement physique, social, économique et écologique d'une ville. L’enjeu est de parvenir à un équilibre entre la croissance et la préservation des acquis, à un développement durable et à la résolution des conflits.

Cette planification doit s'accompagner d'une évaluation de l’intérêt des mesures proposées et se conclure par une appréciation du bien-fondé des prévisions et des décisions prises. L’évaluation doit porter sur la faisabilité, l’acceptabilité politique et la compatibilité avec les politiques menées aux échelons supérieurs.

3. Toutes les villes devraient avoir un schéma directeur.

Un schéma directeur permet d’ordonner les projets et d’établir les priorités pour la ville ; il devrait être établi en concertation avec la population et les principaux organismes locaux (chambres de commerce, grandes entreprises, organismes publics, associations, etc.).

L’élaboration de projets est un processus cyclique, qui commence par l’analyse d’une situation avant de déboucher sur la conception d’un plan d’action. Les derniers stades sont la concrétisation du projet et l’évaluation des résultats obtenus.

Il est nécessaire d’analyser la situation de départ pour identifier les éléments positifs à conserver et ce qui doit manifestement être changé. Il convient de déterminer les risques et les enjeux futurs. On pourra recourir ici à une analyse de type AFOM (atouts–faiblesses–ouvertures–menaces), qui a fait ses preuves dans la sphère économique.

La formulation d’un plan d’action se fait à différents niveaux. Elle englobe la planification stratégique et la planification opérationnelle. Un plan stratégique peut, par exemple, porter sur une période de cinq à vingt ans. La planification opérationnelle couvre, pour sa part, une période plus courte, de l’ordre d’un à trois ans. L’échelonnement d’un plan stratégique en différentes phases opérationnelles permet « d’apprendre sur le tas » et d’affiner les aspects opérationnels d’année en année. La budgétisation, inscrite dans le plan de financement stratégique à long terme, doit se faire sur une base annuelle.

THÈME : LA GOUVERNANCE ÉLECTRONIQUE

En très peu de temps, l’utilisation croissante d’Internet a permis à un très grand nombre de personnes d’accéder à toute une série de services et d’informations qui influencent la prise de décisions. On peut parler à ce propos de « démocratie en ligne » (e-democracy). Depuis quelques années, les services interactifs sont utilisés par de nombreuses personnes, par exemple pour effectuer leurs transactions bancaires. Cette évolution ouvre aux collectivités locales des possibilités entièrement nouvelles pour améliorer les services aux administrés, grâce à une démocratie en ligne plus large.

L’objectif doit être d’améliorer le dialogue et de renforcer la communication entre les responsables politiques, le personnel administratif et les citoyens, par l’intermédiaire de points de rencontre électroniques et d’accroître la transparence des processus décisionnels démocratiques au sein des différentes administrations et entre elles. Un autre objectif doit être de multiplier les services aux administrés et d’en améliorer l’efficacité.

Le développement des pratiques de gouvernance électronique doit contribuer à renforcer les droits et responsabilités des citoyens, en particulier pour l’expression, la recherche, la réception et la diffusion d’informations et d’idées. Cette évolution ne peut qu'être bénéfique, aussi bien pour chaque personne prise individuellement, que pour la culture démocratique de nos sociétés.

Pour mettre en place des services « en ligne » et parvenir ainsi à la « démocratie en ligne», les villes doivent développer une « stratégie électronique ». Cette stratégie doit avoir pour but de garantir à chacun l'accès à ces services, indépendamment de ses connaissances techniques et de ses revenus. Il faut également que les informations mises à disposition soient facilement compréhensibles et, éventuellement, qu’elles soient données dans différentes langues. L’objectif global est d’apporter une réponse satisfaisante à toutes les requêtes.

Il est clair que le succès de stratégies cohérentes pour la mise en place des services et de la démocratie en ligne suppose une autorité politique et exécutive forte et inscrite dans la durée. Parallèlement, les procédures administratives devront, elles aussi, être adaptées à l’environnement électronique (administration en ligne).

Principes

1. Les citoyens devraient disposer d’un site web municipal.

L’idée générale doit être de rendre les institutions démocratiques, quel qu'en soit le niveau, plus ouvertes, transparentes, réactives et redevables devant les citoyens. L’approche adoptée doit être inclusive et non discriminatoire.

Avec un site web bien conçu, les citoyens devraient pourvoir se procurer aisément les informations dont ils ont besoin, au moment même où ils en ont besoin. Une « banque de connaissances » rassemblant les données factuelles relatives aux services et activités de la municipalité devrait être constituée. Les informations présentées sur support électronique sont plus faciles à mettre à jour que les imprimés. Cependant, l’une des grandes faiblesses de ce système est que de nombreux pauvres seront privés de cet accès électronique, sans compter les personnes qui n’ont pas la formation et les compétences de base nécessaires pour utiliser ces systèmes. Il convient d’adopter une approche axée sur l'universalité et l'égalité de l'accès à ces systèmes, sans discrimination.

2. Les citoyens doivent avoir accès à des services en ligne permettant une communication interactive

La mise en place d’un système de communication interactive avec des points de rencontre électroniques permettrait aux citoyens de contacter les responsables politiques et les agents administratifs et de dialoguer avec eux. Ils pourraient par exemple donner leur avis sur des sujets tels que les plans de développement urbains, les chantiers de construction, les modifications des plans de circulation, etc. Des « salons de clavardage » (chat rooms) pourraient être ouverts pour leur permettre de débattre des questions qui les intéressent avec d’autres personnes. Les questions les plus fréquentes pourraient être mise sur l’internet, avec un service interactif de questions-réponses. Les services en ligne leur offriraient la possibilité de passer des annonces et de faire des demandes et réclamations à différents sujets. Ils devraient être accessibles 24 heures sur 24, de manière à améliorer la qualité et l’accessibilité des services.

Une gouvernance en ligne effective offre la possibilité de renforcer la surveillance du processus décisionnel des administrations en améliorant l’accès à l’information et la communication au sein des administrations et entre elles. De cette manière, tout le monde aurait la possibilité de participer à la prise de décisions, ce qui contribuerait à une démocratie plus dynamique et inclusive.

3. Il faut parvenir à une administration en ligne efficace.

Il faut créer une administration en ligne accessible et efficace pour gérer les services en ligne et traiter les informations et les avis reçus. Un service de mauvaise qualité pourrait avoir des conséquences désastreuses.

Il faut bien voir que la qualité des services publics et leur accessibilité dépendent de la maîtrise que les prestataires de services et les utilisateurs ont de l’environnement électronique. En conséquence, les Etats membres devraient prévoir une formation adaptée pour les agents administratifs.

Il convient de fixer clairement les délais dans lesquels les administrations sont tenues de répondre aux demandes des citoyens. Ces réponses doivent avoir la même valeur que les réponses par écrit, signées et postées. A cette fin, il faut favoriser le développement de normes strictes de sécurité pour les communications et la signature électroniques.

Le cadre juridique de la gouvernance électronique doit garantir le respect des normes internationales relatives à la protection de la vie privée et des données à caractère personnel traitées et échangées par les administrations. Une infrastructure adaptée doit être mise en place à cette fin.

THÈME : LES PARTENARIATS

Les collectivités locales ont pour mission première d’assurer et de gérer les services publics, d’orienter et de contrôler le développement des zones urbaines, de protéger l’environnement et la structure des zones urbaines et de leurs périphéries rurales. Il s’agit là d’un rôle créatif qui suppose de veiller à la bonne utilisation des sols, au développement d’un patrimoine architectural de grande qualité, à la pleine participation des citoyens et à la satisfaction de leurs aspirations.

La réalisation des objectifs communs que l’Europe s’est fixés en termes de développement durable, de compétitivité et de cohésion sociale et économique suppose des stratégies de collaboration entre les collectivités locales.

Principes

1. Les villes doivent collaborer.

Les villes doivent collaborer afin d’éviter de se livrer une concurrence dommageable et afin de favoriser l’émergence d’un système « polycentrique », dans lequel chacune soit en mesure de jouer un rôle particulier, adapté à sa taille et à sa situation. Les villes de petite et moyenne importance ne doivent pas subir la domination excessive des grandes villes et des zones métropolitaines.

2. La collaboration au sein de chaque municipalité doit être renforcée.

Il n'est pas rares que différentes administrations et secteurs, tels que la santé, l’éducation, les transports, l’environnement, le développement économique, les services d’urgence, les services d’approvisionnement collectifs et l’aménagement du territoire suivent chacun leur propre politique. Ainsi, des hôpitaux sont transférés des centres-villes dans des locaux modernes situés en périphérie, ce qui peut nuire au dynamisme économique du centre, générer une augmentation du trafic automobile et pénaliser les personnes qui dépendent des transports en commun. Le concept « d’aménagement de l’espace » encourage ces administrations à coordonner leurs plans et services pour atteindre leurs objectifs communs.

Les municipalités devraient identifier des thèmes transversaux autour desquels organiser leur action. Le but est de renforcer la ville dans sa dimension globale et d’aider les groupes isolés au sein de la collectivité. L’un de ces thèmes transversaux pourrait porter sur l’inclusion sociale, l’installation des nouveaux résidents, le logement, le développement des entreprises, etc.

3. Les collectivités régionales doivent collaborer avec d’autres acteurs essentiels.

La Charte place à juste titre les collectivités locales et régionales au centre de la politique urbaine. Nous nous rendons cependant de plus en plus compte que les collectivités locales doivent jouer ce rôle moteur en collaboration avec d’autres acteurs essentiels. Seuls ces partenariats permettent une approche collective des objectifs communs. Ainsi, dans certaines villes, l’augmentation des prix du logement est telle qu’une partie importante de la population ne trouve plus à se loger ou se voit condamnée à vivre dans des ghettos où les conditions sont indécentes. Du coup, certains services sont menacés par le départ de personnes exerçant des professions essentielles, chassés de leur ville en raison du niveau trop élevé des prix du logement. Parallèlement, on assiste à une polarisation sociale entre les très riches et les très pauvres. Ce problème ne peut être résolu que par un partenariat entre les collectivités locales, les services du logement, le marché privé du logement et les employeurs, qui doivent définir ensemble les politiques d’aménagement du territoire, du logement, de développement économique et la politique financière.

B. ÉCOLOGIE

THÈME : VIABILITÉ

L’urbanisation pèse lourdement sur les ressources naturelles de la planète. À la fin du dernier millénaire, la population mondiale s’élevait à six milliards d’humains, soit le double de ce qu’elle était 40 ans auparavant. Elle pourrait atteindre ou dépasser neuf milliards d’individus avant 2050, les pays les moins développés étant les principaux bassins démographiques. Les zones urbaines ont tendance à croître plus rapidement que les zones rurales en raison des perspectives économiques et socioculturelles qu’elles offrent. Plus de 45 % de la population mondiale et 70 % de la population européenne vivent déjà en milieu urbain.

En raison de leurs besoins en aliments, eau, énergie et matériaux divers, les villes sont de grandes consommatrices de ressources naturelles. Elles dépendent fréquemment de ressources et de produits provenant de la région ou de l’étranger. La surexploitation des ressources peut entraîner la perte de la faculté de régénération de la nature. Ce risque est grave. Si le monde entier adoptait le mode de vie des citadins d’Europe occidentale, deux planètes Terre seraient nécessaires à l’approvisionnement de l’humanité en aliments, en bois de construction, en produits miniers et en énergie.

Aujourd’hui, les villes situées dans les pays à faibles revenus ne consomment qu’un cinquième du volume de carburants fossiles utilisés en Europe ; leur consommation alimentaire et de matières premières est également inférieure aux taux européens. Cette situation soulève la question de l’équité et de la viabilité à long terme des villes. Dans l’état actuel du commerce, des flux monétaires, de la production et de la consommation, seul un nombre limité de villes sont en mesure d’accroître leur richesse. A l’avenir, les villes des pays non industrialisés exigeront de participer elles aussi à l’exploitation des ressources mondiales. Si le monde développé ne parvient pas à réduire sa consommation, l’augmentation de la demande entraînera des tensions à l’échelle mondiale.

Le réchauffement de la planète est une réalité. Les inondations, la dégradation des nappes aquifères, le recul des glaciers, le manque d’eau, les périodes de canicule font désormais partie de notre quotidien. Les effets sur l’économie, la santé, le tourisme et le transport sont évidents. Le volume de gaz à effet de serre émis par les villes européennes, exprimé en mètres cube par habitant, est l’un des plus élevés au monde. Or les villes et régions urbaines d’Europe ont les moyens de limiter leurs émissions de gaz à effet de serre en réduisant leur consommation d’énergie et leur production de déchets.

C’est dans ce contexte que les villes européennes doivent faire face à leurs responsabilités en matière de viabilité et de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Principes

1. Pour un engagement ferme et durable en faveur de la viabilité.

L’approche urbanistique doit mettre l’accent sur des politiques durables axées sur des objectifs environnementaux, sociaux et économiques clairement définis.

Il faut donc s’efforcer de : bâtir de manière compacte pour réduire la consommation d’énergie ; implanter localement les équipements et les emplois pour réduire les besoins en transport ; veiller à la commodité, à la coordination et au confort des transports en commun ; améliorer la qualité de vie urbaine pour réduire la tendance à l’empiètement sur les régions rurales ; protéger l’environnement naturel et créer davantage de zones vertes ; concevoir les bâtiments et infrastructures de manière à réduire la consommation de ressources ; réduire autant que possible la production de polluants et de déchets ; développer autant que possible le recyclage.

Une telle approche nécessite également d’informer le public sur les politiques durables.

Les administrations locales doivent sensibiliser le public aux mesures individuelles qui sont à la portée de chacun, et encourager les entreprises à agir de manière responsable sur le plan social et environnemental. Ils doivent en outre adopter une politique de réduction des gaz à effet de serre dans le cadre de la gestion de la flotte de véhicules, des activités de bâtiment et des achats de locaux administratifs.

2. Les pouvoirs publics sont responsables de la gestion économe, cohérente et rationnelle des ressources naturelles et énergétiques.

Le principe du développement durable exige que les collectivités locales et régionales endossent pleinement leurs responsabilités dans la réduction de la consommation de ressources non renouvelables et dans l’utilisation accrue de produits issus de déchets recyclés et de ressources renouvelables.

Dans la mesure du possible, ces ressources sont à rechercher sur place, en considérant la ville comme un écosystème, en s’appuyant sur des améliorations techniques et des mesures innovantes telles que jardins familiaux, aires de compostage, micro-centrales thermiques ou électriques, ainsi que sur l’utilisation de l’énergie éolienne et solaire. La mise en service de petites centrales de cogénération et l’utilisation de l’énergie résiduelle pour le chauffage urbain peuvent également y contribuer.

3. Les collectivités locales doivent adopter des politiques de prévention de la pollution.

Les villes souffrent des émissions produites par l’industrie, la circulation et les activités domestiques telles que le chauffage. Les mesures à court terme comme le déversement de déchets et effluents dans les cours d’eau et les lacs, ou l’incinération des déchets, sont à remplacer par une réduction des émissions à la source, l’emploi de technologies propres, l’utilisation de sources d’énergie renouvelables, le recours à des combustibles et des systèmes de transport plus appropriés, et le recyclage des déchets.

Les collectivités locales doivent demander aux entreprises d’éviter certains matériaux, de réutiliser les emballages, et d’avoir recours à des sources d’énergie alternatives. La législation du bâtiment doit encourager les entrepreneurs locaux à utiliser des matériaux sains et à respecter les principes du développement durable lors de toute nouvelle construction.

L’information du public est d’une importance fondamentale. Cela signifie qu’il faut également informer les entreprises locales sur les technologies propres, créer un réseau de centres d’information et de conseil, explorer de nouvelles approches. De même, il faut que les consommateurs soient informés sur les possibilités de réduction des émissions, l’utilisation de matériaux compatibles avec la qualité de l’air à l’intérieur des habitations, et les emballages ou produits d’entretien à éviter.

4. Les villes doivent adopter des politiques visant à une occupation des sols mixte et compacte.

Encore récemment, les urbanistes voyaient dans le zonage des villes et dans la séparation géographique des fonctions de logement, d’activité industrielle et de transport une solution idéale. On sait aujourd’hui que la séparation des activités en zones distinctes accroît les flux de trafic et la consommation d’espace. Plus de trafic signifie plus de pollution, et l’étalement des agglomérations se fait aux dépens de l’agriculture, des zones de captage d’eau, de la sylviculture et des milieux naturels.

Les collectivités locales doivent concevoir des plans d’aménagement prévoyant un développement urbain plus dense et ramassé dans l’espace, ainsi qu’un mélange des fonctions. Les grands terrains désaffectés, les friches industrielles offrent des possibilités de régénération après décontamination de l’eau et du sol. L’utilisation de friches industrielles à des fins de développement urbain permet de réduire la consommation d’espace « vert ». C’est aussi un moyen de limiter les émissions de bruit et de polluants aériens par les entreprises, les activités domestiques et les transports.

THÈME : L’ENVIRONNEMENT ET LA NATURE DANS LES VILLES

Trop souvent, les villes sont des assemblages de pierre, de béton, d’acier, de verre et d’asphalte avec, éventuellement, des parcelles de gazon ou des terrains vagues de faible utilité récréative. Leur atmosphère et leur sol sont pollués par les émissions et rejets toxiques de l’industrie, des centrales électriques, de la circulation et des activités domestiques. La faune et la flore ont été refoulées hors des villes et des quartiers résidentiels.

Or les villes doivent disposer d’espaces verts. Les espaces verts et les plans et cours d’eau remplissent une fonction essentielle dans le microclimat d’une ville. Ils permettent la ventilation, absorbent les particules de poussière et régulent le taux d’humidité et la température de l’air ambiant. Les villes doivent également disposer de zones habitées par une flore naturelle et une faune diversifiée.

Les zones de protection de la nature, les espaces verts et les plans et cours d’eau contribuent au caractère d’une ville en la meublant d’éléments qui captent l’intérêt ; ils sont bénéfiques à la flore et à la faune, et ont un impact décisif, clairement identifiable, sur le paysage urbain.

Les espaces verts permettent aux citadins de quitter l’environnement bâti et de faire l’expérience de la nature. La faune et la flore sont nécessaires à l’épanouissement personnel, et permettent aux enfants des villes d’entrer en contact avec la nature.

Nature et urbanisation ne sont pas des notions contradictoires.

Principes

1. Les collectivités locales ont le devoir de protéger la nature et les espaces verts.

Il appartient aux collectivités locales d’entretenir leur patrimoine naturel. Leur responsabilité est engagée à plusieurs titres : améliorer autant que possible la qualité de l’environnement, maîtriser le microclimat, protéger les écosystèmes et encourager la biodiversité à travers des mesures en faveur de modes de production alimentaire, de transport et de consommation propres et salubres à l’échelon local.

Les programmes relatifs aux espaces verts, à la protection de la nature et des paysages sont des éléments clé dans les zones urbaines ; ils contribuent à la qualité de l’air et à l’amélioration du climat dans la ville. Les cours d’eau non pollués, les plantes sauvages, le jardinage biologique et le choix d’espèces appropriées, l’utilisation de certains sites comme les terrains vagues, les anciens cimetières, les berges des cours d’eau, les talus de chemin de fer, etc., offrent autant d’habitats à un grand nombre d’espèces animales et végétales, capables de recréer leur propre environnement et d’enrichir la biodiversité locale. La protection de « couloirs verts » et l’entretien de jardins d’agrément sont également des mesures importantes pour la faune et la flore locales.

Les villes doivent être attrayantes, meublées de bâtiments, espaces, bois et zones vertes à taille humaine. L’accès des véhicules automobiles doit être maîtrisé. La création d’espaces verts doit être suivie de mesures de protection et d’entretien. L’activité paysagère ne saurait se résumer à des mesures cosmétiques prises après coup. C’est une activité qui s’inscrit dans la durée et qui, à terme, contribue à améliorer l’image de la ville en offrant de nombreux avantages. Elle a ainsi des retombées positives dans le domaine social, économique et environnemental.

Les zones de conservation de la nature doivent être sélectionnées à partir d’une analyse et d’un suivi régulier des conditions locales (cartographie des biotopes). L’introduction du végétal dans les espaces publics doit être encouragé, et refléter le contexte historique et naturel local.

2. La protection de la nature peut favoriser la mobilisation et la fierté de la collectivité.

L’élément végétal peut être utilisé afin d’encourager la fierté individuelle et collective et développer le sentiment d’appartenance au quartier. Cela peut se faire dans le cadre de la création ou de l’entretien de surfaces boisées, parcs, ensembles de jardins, jardins suspendus, jardins couverts, terrains d’aventure, et de la conversion écologique des espaces semi-publics autour des blocs d’habitation, coulées vertes, jardins naturels, jardins éducatifs, etc. Le verdissement des toits, façades, cours intérieures, etc., peut créer une grande variété d’environnements accueillants pour la faune et la flore, ce qui se révèle essentiel pour développer une attitude responsable vis-à-vis du milieu et des ressources naturelles.

Fermes urbaines et jardins éducatifs favorisent le contact direct des enfants avec la nature.

THÈME : LES SERVICES PUBLICS ET L’ENVIRONNEMENT

La consommation de matières premières, d’eau et d’énergie ainsi que la production de déchets doivent être maîtrisées au moyen d’une gestion efficace. Les services publics responsables de l’approvisionnement en eau, de la gestion des déchets et de la production d’énergie sont des acteurs essentiels de toute ville saine, viable et prospère. On peut citer à titre d’exemples l’adduction, au moyen de méthodes efficaces et efficientes, d’eau potable provenant de sources renouvelables et ayant subi un traitement adéquat, le ramassage et l’élimination des ordures ménagères, et le recyclage des eaux usées. Les calories produites par les installations industrielles et les centrales thermiques peuvent être récupérées et utilisées pour le chauffage urbain. La densité des villes peut être mise à profit pour une utilisation efficace de la cogénération d’électricité et de chaleur dans les quartiers résidentiels.

Principes

1. Les citoyens doivent avoir accès à des sources d’eau potable et d’eau pour usages domestiques ou liés aux loisirs.

Les villes doivent fournir à leurs habitants de l’eau provenant de sources durables. La gestion de l’eau selon des critères de viabilité à long terme couvre plusieurs aspects : utilisation efficiente de l’eau potable ; décontamination et prévention de la contamination des réseaux hydrographiques naturels ; prise en compte du cycle de l’eau dans la conception de l’environnement bâti, par exemple en limitant les surfaces couvertes de matériaux imperméables.

Il est nécessaire d’établir un plan général de gestion de l’eau qui prenne en considération les besoins en eau de la ville en les plaçant dans le contexte de la gestion des bassins versants à l’échelle régionale. Un volet important du plan local de gestion de l’eau est la conception des canalisations, égouts, bassins, et des ouvrages de rétention, notamment des eaux de pluie.

2. Tous les habitants doivent disposer, à un coût abordable, d’énergie pour le chauffage, la réfrigération et d’autres utilisations domestiques.

Toute stratégie pour une gestion de l’énergie selon des critères de viabilité à long terme peut inclure : l’utilisation de sources d’énergie renouvelables (biogaz, énergie hydroélectrique, éolienne, géothermique, solaire) ; la réduction de la consommation de carburants fossiles ; des modes d’aménagement et de construction ramassés dans l’espace ; des méthodes efficientes de distribution de l’énergie.

La réglementation nationale et locale doit établir des normes obligatoires en ce qui concerne les caractéristiques énergétiques des différents types de constructions. Il convient d’introduire des bonnes pratiques climatiques, tenant compte de l’orientation par rapport au soleil, dans les principes de conception architecturale. Les fluctuations de la température intérieure, et par conséquent la consommation d’énergie, sont plus faibles dans les bâtiments compacts et abrités.

3. Les collectivités locales doivent se doter d’une gestion durable et efficace des déchets.

Dans toutes ses activités de construction, d’habitation et de travail, l’homme produit des déchets. Une grande partie des déchets sont préjudiciables à l’environnement et à la santé publique. Lorsque, du fait d’une infrastructure insuffisante, les déchets ne sont pas triés, ils ne peuvent être recyclés et doivent être mis en décharge ou incinérés.

Les collectivités locales doivent encourager l’utilisation de produits recyclables, organiser de manière efficace le ramassage, le recyclage et l’élimination des déchets, et installer des équipements collectifs pour l’entreposage et le recyclage des déchets triés. Elles pourraient également gérer les flux de déchets et recycler les déchets solides pour la production de nouveaux matériaux, de compost ou d’énergie.

Les villes doivent en outre mettre au point un système d’information et d’éducation visant à sensibiliser les consommateurs aux principes du développement durable et aux problèmes liés aux déchets.

C. ÉCONOMIE

THÈME : LA VILLE, À LA FOIS PRODUIT ET PRODUCTEUR

Les centres urbains et leurs conurbations sont d’importants pôles de production, de distribution, d’échange et de consommation, et jouent à ce titre un rôle de premier plan dans les économies locales et dans l’économie mondiale. Le développement économique d’une ville est un facteur essentiel pour le niveau de vie de l’ensemble de ses utilisateurs : résidents, travailleurs, visiteurs extérieurs, touristes étrangers.
Toute mesure en faveur du développement économique doit tenir compte du développement social, de la protection de l’environnement et d’autres mesures visant à l’amélioration de la qualité de vie dans les zones urbaines.

Principes

1. Les villes doivent d’efforcer de demeurer des moteurs du développement économique.

Les villes européennes ont perdu la plus grande partie de leurs industries manufacturières du fait du déplacement de ces activités, à l’échelle mondiale, vers des régions où la main-d’œuvre est moins coûteuse. Elles ont alors transformé la plupart de ces industries en des activités commerciales et des services du secteur tertiaire, qui sont aujourd’hui le vecteur principal du développement économique.

Les collectivités locales doivent s’efforcer de stimuler la croissance économique et la création d’emplois en tenant compte de l’importance des villes en tant que pôles économiques qui concentrent les services, le commerce, l’investissement et la consommation. Le développement économique doit tenir compte des qualités et potentiels propres à une ville dans son contexte régional, en mettant l’accent sur des programmes intégrés spécialement conçus. Ceux-ci doivent d’une part valoriser les points forts afin de saisir les possibilités en présence, et d’autre part combler les déficits.

2. Concurrence mondiale et spécialisation locale, deux éléments importants du développement économique.

A mesure que l’économie se mondialise et que la distribution des produits et services prend une dimension planétaire, les villes doivent s’efforcer d’accroître leur compétitivité en mettant en valeur leurs qualités particulières ainsi que les produits et services locaux. Elles doivent donc prendre des mesures visant à développer et valoriser les différences, spécificités et qualités locales. Ces éléments sont la clé d’un développement économique et d’un marché local de l’emploi en bonne santé.

Les villes doivent s’efforcer de créer un environnement agréable et de qualité, facteur contribuant à retenir les activités économiques existantes et à en attirer de nouvelles. Toutefois, les villes doivent veiller à ce que les activités qu’elles attirent en valorisant leurs avantages concurrentiels ne nuisent pas à la qualité de vie et à l’environnement.

3. Le développement économique dépend d’une infrastructure adéquate.

Toute croissance suppose une infrastructure performante : transports, télécommunications, services publics, équipements sociaux et collectifs, etc. Cette responsabilité majeure incombe traditionnellement aux collectivités locales, qui fournissent une grande partie des infrastructures indispensables à la vie d’un territoire urbain.

L’une des principales tâches des administrations publiques consiste à identifier les éventuelles déficiences de l’infrastructure existante et les éventuelles possibilités offertes par d’autres infrastructures dans le but d’en tirer le meilleur parti possible. Il convient d’en tenir compte dans l’ensemble des programmes de développement socioéconomique en y incluant les politiques, propositions, stratégies et programmes qui s’y rattachent.

THÈME : PARTENARIAT ET COOPÉRATION

Les villes ne sont pas des entités isolées, elles font partie d’un tissu de collectivités confrontées à des problèmes et défis communs. Dans ce cadre, les administrations locales ont pour tâche d’impliquer toutes les parties intéressées à la recherche et à la mise en œuvre de solutions aux problèmes communs. Le développement économique d’une ville dépend étroitement des partenariats et de la coopération qu’elle entretient avec d’autres acteurs. Chaque ville doit nouer des relations étroites avec sa région proche et lointaine afin de stimuler le développement économique et de s’assurer l’appui d’autres villes, acteurs et organismes dans une perspective de partage des tâches et de spécialisation.

Principes

1. Toute ville s’inscrit dans le système économique de sa région.

Lorsqu’elles élaborent les projets, politiques, stratégies et programmes applicables à leur territoire administratif, les administrations locales doivent étudier les interactions entre la ville, sa région et la conurbation dont elle fait partie. Il convient de distinguer dans ce cadre les différents secteurs géographiques et économiques, en tenant compte des besoins et des possibilités propres à chacun. Cela est nécessaire pour tenir compte des projets concurrents ou complémentaires d’autres municipalités, pour prévoir des investissements et encourager d’éventuelles collaborations.

Les villes doivent chercher à s’associer avec leur région pour mettre en commun les infrastructures et autres éléments fonctionnels dans le but d’atteindre une masse critique en termes de population, d’activités économiques, de services et d’emplois. Toute ville s’inscrit dans un réseau qui fonctionne par coopération et appui mutuel. Parallèlement, les activités économiques doivent être respectueuses des zones sensibles et promouvoir les modes d’utilisation du territoire qui ne portent pas atteinte à l’environnement. Cela implique l’établissement d’une coopération avec les autres collectivités locales ainsi qu’avec les administrations qui détiennent une responsabilité en matière de planification à une échelle plus vaste.

2. Les villes doivent améliorer leurs relations avec les zones rurales.

Les relations traditionnelles entre les villes et les campagnes se caractérisent par le cloisonnement économique et par la dépendance hiérarchique des secondes par rapport aux premières ; en conséquence, les villes exercent une dominance sur les zones rurales qui les entourent. Or ces deux milieux sont liés par des liens économiques qu’il importe de développer. La stabilité socioéconomique et la croissance durable dépendent également du bon fonctionnement des villes. Il convient à cet égard de promouvoir un développement régional stratégique et des rapports équilibrés entre la ville et la campagne, mais aussi de prévenir l’étalement incontrôlé de la ville.

La marginalisation économique des zones rurales doit trouver compensation dans le cadre d’un nouveau processus d’intégration dans les systèmes urbains. Celui-ci doit être fondé non seulement sur des politiques agricoles mais aussi sur des programmes intégrés de soutien à l’économie et d’aménagement du territoire tenant compte des politiques de développement à l’échelle régionale.

3. La collaboration entre secteur public et secteur privé est un atout important de la croissance et du développement économique de la ville.

Étant donné que la mise à disposition d’infrastructures et de services est essentielle à l’ensemble des secteurs économiques, et que les pouvoirs publics ne sont pas toujours en mesure de financer l’amélioration de ces infrastructures requise par le développement économique de la ville, un nouveau partage des responsabilités doit pouvoir être envisagé dans ce domaine. Des efforts considérables doivent être déployés par les pouvoirs publics et les investisseurs et autres parties intéressées du secteur privé pour utiliser les ressources disponibles de manière efficiente et s’attaquer aux difficultés les plus pressantes, qui sont parfois interconnectées.

La collaboration avec le secteur privé est donc essentielle. En s’efforçant d’associer le secteur privé à la poursuite d’objectifs publics, on peut stimuler son activité et élaborer des propositions pouvant conduire à des solutions plus innovantes et efficaces. La collaboration entre les deux secteurs est un moyen de conjuguer efficacité privée et contrôle public.

THÈME : LE MARCHÉ DE L’EMPLOI DANS LES VILLES

L’exercice d’une profession est un droit de toute personne en âge de travailler. C’est pourquoi les habitants attendent des administrations locales, en association avec les autres pouvoirs publics et le secteur privé, qu’elles soutiennent et stimulent la création d’emplois, notamment en faveur des jeunes à la recherche d’un premier emploi. Les pouvoirs locaux ont un rôle à jouer à cet égard en facilitant le développement économique, en aidant les entreprises et en créant des conditions favorables au développement économique.

Principes

1. Les pouvoirs publics doivent veiller à l’égalité d’accès à l’emploi.

Parmi les mesures visant à garantir l’égalité d’accès à l’emploi, il convient d’encourager la création d’entreprises et d’activités économiques, ainsi que l’accès des jeunes, particulièrement parmi les femmes et les groupes défavorisés, à des emplois dans les secteurs public et semi-public. Il faut en particulier mettre l’accent sur la lutte contre le travail clandestin en renforçant la législation, en multipliant les contrôles et en incitant les employeurs à créer des emplois dans le respect de la légalité.

Les politiques de l’emploi doivent permettre le renforcement des mesures de formation professionnelle pour mettre davantage en adéquation les emplois disponibles et les compétences en présence.

Le principe de l’égalité de traitement des communautés immigrées en matière de conditions de travail est inscrit dans la Convention européenne relative au statut juridique du travailleur migrant. Cette égalité doit être un objectif constant de tous les pouvoirs publics et les employeurs.

2. Les politiques de l’emploi doivent être liées au développement des villes.

Les villes européennes doivent s’efforcer de mettre en œuvre des politiques de l’emploi visant à instaurer une plus grande équité dans la distribution de l’emploi et dans le développement économique des villes. Ces politiques doivent tenir compte de la main-d’œuvre non qualifiée comme du personnel hautement qualifié, et faire en sorte que la distribution géographique de l’emploi ne crée pas de zones de marginalisation.

Les mesures locales en faveur de la formation et de l’emploi doivent être liées aux initiatives et aux principes de développement de la ville afin de préserver l’emploi à long terme et de maîtriser l’urbanisation du territoire.

3. Les villes doivent promouvoir l’innovation et la créativité.

Une grande partie des innovations économiques actuelles ont trait aux technologies de l’information. Le contexte connaît lui aussi des changements. L’innovation et la créativité sont liées à la présence simultanée d’activités économiques, sociales et culturelles qui attirent des habitants nouveaux et différents : étudiants, jeunes travailleurs, experts étrangers.

Les villes doivent s’efforcer d’identifier un secteur d’activité précis, complémentaire de leurs caractéristiques locales et régionales, afin d’accroître leurs atouts matériels et socioculturels dans le but d’attirer de nouvelles activités et compétences. Il convient de mettre l’accent sur les qualités géographiques et culturelles qui contribuent à donner une image distinctive d’une ville et à souligner ses potentialités en matière d’activités créatives et innovantes.

THÈME : LA MOBILITÉ DANS LES VILLES

Mobilité et liberté de mouvement sont des conditions clés du développement de l’économie et des marchés, de la mise en valeur des ressources et du bien-être des habitants. Tout encombrement est source d’inefficacité économique, pour les résidents mais aussi pour les investisseurs, incitant ceux-ci à déplacer leurs activités. Il faut s’efforcer de réduire les trajets nécessaires et d’améliorer la mobilité en utilisant des moyens de transport urbain plus respectueux de l’environnement et en conjuguant les différents moyens de transport. Il convient en outre d’accroître la couverture des nouvelles technologies d’information et de communication pour donner aux habitants la possibilité de se connecter à l’Internet depuis tout lieu public.

Principes

1. La mobilité est un facteur clé du développement économique.

Le développement de l’activité économique engendre de nouveaux flux de trafic qui sont fréquemment la cause d’encombrements, réduisant ainsi l’efficience des villes et la qualité de l’espace public. Lors de la planification et de la programmation des infrastructures de transport, les collectivités locales doivent veiller à bien desservir les quartiers et les activités dans une double perspective de croissance économique et de développement durable. Il convient de mettre au point, de concert avec les régions et villes voisines, une approche cohérente et mutuellement complémentaire de la planification et des programmes relatifs aux transports. Elle sera soutenue par des investissements mûrement réfléchis et attachera une attention particulière à la protection de l’environnement naturel et urbain.

2. Utiliser les politiques de marché pour réduire les trajets.

La majeure partie des services et des activités de production d’une ville se concentrent souvent dans des secteurs géographiques précis, ce qui entraîne de graves problèmes d’engorgement, en particulier aux heures de pointe, ainsi qu’une augmentation du trafic, du bruit et de la pollution.

En conséquence, il faut rechercher un équilibre dans la distribution géographique de l’emploi afin d’éviter la concentration et l’encombrement dans un petit nombre de secteurs. Pour y parvenir, les pouvoirs locaux s’appuieront sur des décisions d’aménagement du territoire et sur des politiques d’implantation visant à encourager les formes de travail à domicile et à assouplir les horaires de travail.

3. Les nouvelles technologies d’information et de communication doivent être accessibles à tous.

L’accès à l’information devient de nos jours un facteur important de développement socioéconomique, qui offre de vastes possibilités de communication. Le commerce électronique remplacera probablement, dans un proche avenir, les modèles commerciaux traditionnels, notamment dans le secteur des biens, des produits et des services commercialisés à l’échelle mondiale.

Les villes doivent offrir à tous un large accès aux nouveaux modes de communication et d’information. Dans tous les lieux publics tels que les bâtiments administratifs, les écoles, les bibliothèques et les gares, il doit être possible de se connecter gratuitement à l’Internet.

D. ÉQUITÉ

THÈME : LA COHÉSION SOCIALE DANS LES VILLES

Les villes européennes deviennent des lieux de vie et de travail polyethniques et multiculturels. À cet égard, les sociétés urbaines doivent être exemptes de toute discrimination fondée sur la situation sociale, l’âge, la culture, la religion, le sexe ou l’incapacité physique ou mentale.

Pourtant ce principe n’est pas toujours respecté. Les communautés d’immigrants et les minorités dont la tradition, la culture, la langue ou la religion diffèrent de celles de la société d’accueil n’y sont pas toujours acceptées, ce qui aggrave leur exclusion sociale, leur isolement et leurs craintes, et porte préjudice à leurs conditions de vie. Pour d’autres groupes de personnes défavorisées, comme les personnes âgées, handicapées ou souffrantes, l’exercice des droits individuels fondamentaux n’est possible que grâce à la compréhension et l’assistance d’autrui.

Dans toute ville coexistent différents groupes de personnes, aux revendications différentes en matière d’environnement bâti et d’équipements, de services et d’emplois. Des politiques en faveur de la mixité culturelle et ethnique ainsi que des programmes s’adressant aux différents groupes en présence sont la clé de l’amélioration des conditions de vie et de la cohésion sociale dans les villes. Elles peuvent contribuer à l’enrichissement culturel et économique des villes, mais aussi à la gestion de la coexistence de groupes issus de cultures et de contextes sociaux différents. Elles peuvent également encourager la coopération, dans l’intérêt de la collectivité tout entière. La notion de citoyenneté européenne est ainsi fondée sur la démocratie active, le sentiment d’appartenance à une communauté, et la libre expression de croyances différentes.

Principes

1. La non-discrimination est un aspect fondamental de la vie urbaine.

Toute société urbaine équitable est fondée sur la tolérance et l’acceptation des différences. Il convient d’accorder à tous les groupes en présence le droit de protéger leurs intérêts et de préserver leur identité sociale et culturelle. Cependant, aucun groupe ne saurait prévaloir sur d’autres, ni imposer ses coutumes, croyances ou traditions. Tous les citoyens ont droit au respect dû à tout être humain. Les pouvoirs locaux doivent veiller au respect de l’identité urbaine européenne. Cela implique la mise en place de politiques et de mesures de sensibilisation qui traitent plus efficacement le problème de l’exclusion sociale et réduisent les inégalités en tenant compte des disparités culturelles des groupes en présence et en encourageant le dialogue et l’échange entre les cultures et les religions.

Les pouvoirs locaux doivent lutter contre toute forme de discrimination pour garantir à tous les habitants, sans distinction de race, origine ethnique, âge, situation ou contexte social, l’égalité d’accès aux lieux publics, à l’emploi, à la formation, à l’enseignement, au logement, aux activités culturelles et autres éléments de la vie dans les sociétés urbaines.

2. La coopération avec et entre les différents groupes sociaux est essentielle.

Il convient d’instaurer une concertation et une coopération étroites et régulières entre les groupes en présence, ainsi qu’entre ceux-ci et les services responsables de la planification urbaine et des activités et politiques socioculturelles. Cela permettra de prendre en compte les besoins particuliers des différents groupes sociaux dans le développement des villes.

Si la concertation intervient au stade de la préparation d’un projet, c’est-à-dire avant sa mise en œuvre et son application, elle permettra d’améliorer la qualité des services et l’efficacité des mesures d’intégration. Cette consultation doit s’insérer dans le cadre général des plans d’urbanisme, et concerner les projets d’aménagement urbain, les espaces, équipements et transports publics, les règlements de construction et permis de construire.

3. La ville doit être accessible à tous les citoyens.

Tout lieu de la ville doit être accessible à toute personne, indépendamment de tout handicap ou infirmité. Des équipements ou des horaires spéciaux doivent être instaurés si nécessaire. Cependant, l’accessibilité des bâtiments et équipements publics ne doit pas être réalisée au prix d’inconvénients abusifs pour les autres usagers ou de mesures disproportionnées ou trop onéreuses.

Il n’est pas souhaitable de concevoir et d’équiper la ville de manière à l’adapter totalement aux besoins des personnes en situation de handicap. Il faut éviter de créer un milieu surprotégé, et favoriser des conditions facilitant l’adaptation des enfants, des femmes et des personnes âgées ou handicapées à leur environnement, ainsi que leur pleine participation à la vie quotidienne de la collectivité.

THÈME : LA SÉCURITÉ ET LA SANTÉ DANS LES VILLES

Un environnement sûr et salubre est un facteur fondamental de la perception de la qualité de vie dans les villes.

La sécurité d’une ville peut être menacée par des catastrophes naturelles, notamment lorsque le besoin d’espace lié à la croissance a conduit à construire dans des zones à risque : risque d’inondation, de glissement de terrain, de tremblement de terre, etc. Les villes sont en outre exposées aux accidents pouvant survenir dans le cadre de certaines activités humaines dangereuses.
Les villes ont un potentiel unique et un rôle irremplaçable à jouer dans la promotion et le maintien de la santé publique. Les collectivités locales doivent se fixer pour but de promouvoir et mettre en œuvre des politiques de santé publique dans tous les domaines de la vie de la collectivité. Il est en outre particulièrement important de créer des conditions sociales permettant aux habitants de s’entraider sur le plan individuel et collectif et d’apporter les soins nécessaires en cas de maladie ou d’accident.

Principes

1. Les villes doivent être protégées des catastrophes d’origine naturelle ou humaine.

Les menaces qui pèsent sur les citoyens et les espaces urbains sont nombreuses : inondations, glissements de terrain, tremblements de terre, sécheresses et autres catastrophes naturelles imprévisibles par exemple, mais aussi catastrophes prévisibles qui se produisent lorsque des écosystèmes subissent une pression constante ou lorsque des mesures d’aménagement ont été prises sans tenir compte des risques liés au site. Il faut y ajouter les risques et accidents causés par certaines activités humaines d’une grande dangerosité et par certaines infrastructures telles que les aéroports et le réseau ferroviaire et routier : accidents nucléaires, pollutions industrielles, contamination du sol, de l’air et de l’eau, etc.

Les collectivités locales doivent s’efforcer de renforcer la protection de l’environnement et d’améliorer la gestion des ressources en se concentrant en premier lieu sur les aspects suivants : amélioration de la qualité de l’environnement, élimination des principales sources de pollution, réhabilitation des secteurs dégradés. Il convient en outre de mener des études d’évaluation des risques et d’élaborer des plans de protection, ainsi que de concevoir des programmes de coopération interrégionale visant à préserver globalement la qualité et la sécurité de l’environnement. Toute décision d’implantation dans le cadre d’un plan d’urbanisme doit être précédée d’une évaluation des risques.

2. L’environnement urbain doit être favorable à la bonne santé de tous.

Les administrations locales doivent s’efforcer de rendre les villes salubres. La mise en œuvre de ce principe passe par une politique globale de protection de l’environnement urbain, la gestion des déchets, la lutte contre la pollution de l’air, de l’eau, du sol et du sous-sol, et la neutralisation totale des menaces les plus graves qui pèsent sur l’environnement.

En outre, les pouvoirs publics doivent placer les zones urbaines les plus sensibles sous une surveillance constante, et prévoir des équipements spéciaux pour la petite enfance et les personnes âgées ou handicapées, et plus généralement en œuvrant en faveur du développement communautaire et de la rénovation sociale.

3. La santé en milieu urbain implique la coordination de l’action locale avec les programmes internationaux.

Les échanges internationaux entre villes visent principalement à aider les villes participantes à mettre au point de nouveaux programme de santé publique en s’appuyant sur l’échange d’information et d’expérience, à définir des actions communes, à accorder une légitimité aux initiatives de santé, et à favoriser un engagement politique explicite.

En conséquence, il convient d’encourager les villes à participer aux activités internationales en matière d’environnement et de santé, et en particulier à mettre en œuvre les principes de la Déclaration d’Athènes sur les Villes-Santé de l’Organisation Mondiale de la Santé.

THÈME : SÉCURITÉ URBAINE ET LUTTE CONTRE LA CRIMINALITÉ

La sécurité est l’affaire de tous. La vie en ville perd une partie de son intérêt lorsque la sécurité des habitants ne jouit pas de la plus haute priorité et lorsque la crainte du crime s’installe. Cela est valable à l’échelle de la ville, mais aussi dans les lieux publics ou privés. Différentes stratégies peuvent être employées pour créer un environnement sûr.

La perception de la sécurité dépend de différents facteurs qui influencent les habitants dans le choix d’un lieu d’habitation. Les quartiers ressentis comme peu sûrs ou insalubres sont évités, ce qui entraîne leur marginalisation et déclenche le cercle vicieux de l’exclusion et de l’insécurité. En encourageant des commerces, des cafés, des espaces de loisirs ou des secteurs résidentiels à occuper l’espace public au moyen de mesures d’aménagement, d’architecture ou de gestion, on encourage aussi la protection de ces lieux par leurs propriétaires officiels ou informels. Un lieu dont la haute qualité peut être facilement préservée sera plus rarement le théâtre d’actes de vandalisme ou de délinquance.

Principes

1. La lutte contre la criminalité nécessite une bonne connaissance du contexte économique et social.

L’exclusion économique et sociale (fondée sur des aspects religieux, ethniques, culturels, économiques ou raciaux), la « nouvelle pauvreté » et les problèmes des sans-abri menacent la stabilité et la qualité de vie des villes. La sécurité urbaine doit être considérée dans sa double dimension de la sécurité objective et de sa perception subjective. En matière de sécurité, les besoins varient selon les groupes de population ; ceux des immigrants, par exemple, diffèrent de ceux de la population d’accueil. Il peut même y avoir conflit dans la mesure où la sécurité d’un groupe peut être une source d’insécurité pour les autres.

Les pouvoirs locaux sont les mieux placés pour lutter contre les causes profondes de la violence et de la criminalité. Il leur incombe d’examiner les causes de l’instabilité sociale, d’élaborer et de mettre en œuvre des politiques de développement social, de rétablir des liens de solidarité, d’organiser des structures d’entraide, et de mettre sur pied des programmes d’action fondés sur le partenariat.

2. Les pouvoirs locaux doivent être conscients du rapport entre hostilité de l’environnement et insécurité.

Les lieux bien entretenus et habités par un sentiment d’appartenance tangible sont plus rarement touchés par la criminalité et le vandalisme. A l’inverse, les lieux anonymes et sans marque d’appartenance à une entité reconnue et respectée ont tendance à attirer des occupants indésirables qui en revendiquent l’espace. En conséquence, il convient d’encourager le sentiment d’appartenance et de fierté au sein de la population locale. Il faut également définir un dispositif de surveillance locale sur une base participative, en particulier pour les lieux isolés ou sans issue, où les risques sont plus élevés. Les autorités et les habitants doivent recevoir des informations concerter les techniques de prévention du vol et de protection des biens ainsi que sur les systèmes de surveillance du voisinage.
L’urbanisme et l’aménagement doivent prêter une attention particulière aux aspects suivants : le renouvellement des espaces dans une perspective d’amélioration de la sécurité et de la vitalité des sites urbains, à travers des actions combinées visant à en intégrer les différentes fonctions ; l’amélioration de la qualité des sites en agissant également sur l’éclairage et l’entretien ; l’amélioration des choix esthétiques et architecturaux ; et le renforcement des transports publics conjugué à une optimisation des horaires. La planification des espaces et services publics doit répondre à des besoins de vitalité, d’accessibilité, de flexibilité et de diversité, et toujours viser à accroître la sécurité. Les interventions des acteurs publics ou privés doivent s’inscrire dans le cadre de l’entretien et du renouvellement du tissu urbain pour en empêcher la dégradation.

3. La politique de sécurité et de prévention doit s’appuyer sur une coopération étroite entre tous les pouvoirs publics et la population locale.

Parmi les principales causes de la criminalité figurent l’absence d’insertion sociale et les difficultés rencontrées, surtout par les jeunes, pour s’identifier à une culture, une famille, l’école ou la société dans son ensemble. La toxicomanie est une source de criminalité dès lors qu’elle donne lieu à un trafic illégal et qu’elle pousse les toxicomanes à commettre des délits pour se procurer de la drogue. Si la répression du trafic est essentiellement du ressort de services spécialisés, policiers et judiciaires, la communauté locale doit s’organiser pour prévenir la demande.

Cela nécessite la mise en place de programmes de formation à l’intention des acteurs de terrain, travailleurs de rue, enseignants et travailleurs sociaux qui sont en contact avec les intéressés, mais aussi de programmes de surveillance. Une attention particulière doit être accordée aux groupes en difficulté, pour lesquels il ne faut pas créer de filières spécialisées mais adopter une approche globale en insistant sur l’insertion économique, les établissements de traitement et la qualité du logement. Pour renforcer son efficacité, la police doit maintenir le dialogue avec les habitants et leurs délégués, afin de coordonner son action avec celle des autres acteurs de la vie sociale.

THÈME : LOGEMENT

L’habitat est l’espace personnel et le lieu avec lequel chacun s’identifie. L’accès et le droit au logement sont garantis par l’article 25 de la Déclaration universelle des Droits de l’homme. Les villes ont un rôle déterminant à jouer dans la mise à disposition de logements. Or les besoins en logements ne cessent d’augmenter dans toute l’Europe.

C’est dans le secteur de l’habitat que la diversité des villes européenne est la plus grande.

Un nombre considérable d’Européens habitent des immeubles sans âme, précocement dégradés, qui sont mal équipés, mal conçus et situés dans des environnements dépourvus des qualités de sécurité, d’intimité et d’agrément que tout individu est en droit d’attendre. C’est généralement dans les quartiers centraux et à la périphérie des villes que les conditions de logement sont les plus mauvaises. Le problème est particulièrement grave dans de nombreux pays d’Europe centrale et orientale.

Dans les villes prospères en revanche, de nombreux habitants sont forcés au départ par la hausse des prix. Ce phénomène engendre une ségrégation sociale, avec émergence de pôles rassemblant les meilleurs services et établissements scolaires et de santé, mais aussi avec la disparition de certaines activités.

En Europe, bien que les taux de natalité soient généralement stables, la demande de logements continue d’augmenter du fait de l’accroissement du nombre de ménages. On observe un changement des structures familiales mû par une augmentation du nombre de divorces, de familles monoparentales, de jeunes quittant le domicile familial et de personnes âgées, ce qui se traduit par une forte tendance à la diminution du nombre de personnes par ménage et, en conséquence, par une forte augmentation des besoins en logement. Au problème des mauvaises conditions de logement s’ajoute celui de l’approvisionnement du marché, face à une demande en constante augmentation. L’expérience montre que les stratégies en faveur du logement doivent inclure trois éléments.

Première exigence : la diversité. Les programmes couronnés de succès se caractérisent généralement par la diversité des modes d’occupation (régime social ou privé), des styles d’habitation et des superficies des logements. On a ainsi pu sauver jusqu’à des tours d’habitation en procédant à des démolitions et des réhabilitations sélectives, et en variant la hauteur et la forme des bâtiments ainsi que les modes d’occupation. Ces mesures s’accompagnent souvent de l’implantation d’activités diverses, y compris de petites et moyennes entreprises du secteur de l’industrie et des services, et de l’amélioration, en termes de quantité, de qualité et de sécurité, de l’offre en espaces publics et en équipements pour les jeunes.

Deuxième exigence : les programmes de logement doivent être conçus en collaboration avec d’autres organismes. La réhabilitation de logements insalubres, par exemple, a plus de chances de réussir lorsqu’elle s’accompagne d’une amélioration des possibilités de formation et d’emploi offertes aux habitants. Un logement de qualité doit conjuguer architecture attrayante et stabilité économique et sociale.

Troisième exigence : mettre davantage l’accent sur la viabilité à long terme. Il s’agit en partie d’appliquer les principes du développement durable, dans une beaucoup plus grande mesure que ce n’est le cas jusqu’à présent, à l’architecture et au bâtiment. Cela devrait permettre, par exemple, de faire un meilleur usage des matériaux et ressources énergétiques disponibles. Il s’agit d’autre part de rendre les villes plus compactes afin de réduire autant que possible les problèmes liés au développement tentaculaire des banlieues ainsi que les pertes irrémédiables subies par l’espace rural et agricole.

Principes

1. Assurer la diversité, le choix et la mobilité dans le secteur du logement.

Toute personne doit avoir droit à un logement adéquat. L’offre de logements doit correspondre aux besoins des individus et des familles, besoins qui évoluent en fonction des modes de vie et du cadre socioéconomique.

Les collectivités locales doivent veiller à la diversité des types, modes d’occupation et sites des logements, et pallier les carences du marché par des interventions ciblées. Il convient de stimuler la mobilité résidentielle pour assouplir le marché du logement. Les collectivités locales doivent utiliser leurs compétences en matière d’aménagement pour assurer la diversité du parc résidentiel en termes de style, de superficie et de catégorie, de manière à répondre à l’ensemble des besoins et à accueillir une communauté diversifiée.

Parallèlement, les collectivités locales doivent veiller à accompagner les programmes de logement fondés sur des opérations de réhabilitation par des dispositions financières et fiscales permettant, dans toute la mesure du possible, aux habitants du quartier de bénéficier des améliorations qui lui sont apportées et de n’être pas contraints de déménager en raison d’une augmentation afférente des coûts et des loyers. De même, la mise à disposition de nouveaux quartiers résidentiels doit garantir la mixité sociale pour éviter la formation de ghettos.

2. Il convient de faciliter l’achat de logements et de renforcer la sécurité des locations.

Le droit au logement implique le droit de devenir membre d’une communauté locale, droit souvent illusoire en l’absence d’une garantie suffisante d’occupation à long terme.
Les collectivités locales doivent veiller à l’existence de possibilités d’acquérir des logements à un coût raisonnable et promouvoir toute solution pouvant contribuer à l’accès à la propriété ou à la location. Le droit au logement doit s’exercer dans discrimination de groupes particuliers tels que les personnes âgées ou handicapées, les chômeurs, les familles monoparentales ou les immigrants.
La responsabilité de la politique du logement doit incomber aux collectivités locales ; celles-ci doivent être en mesure d’intervenir directement afin d’atteindre leurs objectifs sociaux, et d’encourager le secteur privé à faire de même, dans des dimensions identiques. Lorsque la législation permet aux locataires de logements sociaux d’en devenir propriétaires, les collectivités locales doivent remplacer les logements vendus par un nombre équivalent de logements aux mains du secteur public. Le droit des locataires à la sécurité d’occupation est tout aussi important.

3. Toute personne a droit à un logement sûr et agréable et au respect de sa vie privée à domicile.

Le logement est l’espace personnel de tout individu ; il doit offrir le plus haut niveau de sécurité, de tranquillité et de protection de la vie privée et des biens personnels.

La législation en vigueur à l’échelon local doit permettre à autant d’individus et de familles que possible de disposer d’un logement adéquat et d’un niveau de vie raisonnable. Cela implique l’adoption et l’application contrôlée de normes de sécurité dans le bâtiment, et la mise en œuvre de programmes visant à remplacer ou à réhabiliter les habitations insalubres. Ces mesures doivent s’accompagner de l’implantation, dans les quartiers concernés, d’une variété d’équipements et d’entreprises, y compris de petites et moyennes entreprises du secteur de l’industrie et des services, et de l’amélioration, en termes de quantité, de qualité et de sécurité, de l’offre en espaces publics et en équipements pour les jeunes et les personnes âgées.

Cela implique également que les logements soient entourés d’espaces verts, espaces de jeu sûrs et ensembles de jardins, compléments naturels d’un logement adéquat. Les collectivités locales doivent également veiller à la qualité générale de l’environnement bâti et résidentiel en encourageant la disponibilité d’infrastructures, services et équipements de base.

4. Les citoyens ont droit à des logements et des quartiers résidentiels plus respectueux du principe de développement durable.

Il est essentiel de comprendre que la question de la viabilité à long terme des logements et des quartiers concerne tous les habitants. La forme physique de la ville, et en particulier la forme de l’habitat considéré dans le contexte plus vaste du quartier, sont déterminantes pour la réalisation d’un environnement urbain de qualité. Il s’agit en partie de rendre les villes plus compactes afin de réduire autant que possible les problèmes liés au développement tentaculaire des banlieues ainsi que les pertes irrémédiables subies par l’espace rural et agricole. Il s’agit également d’appliquer les principes du développement durable, dans une beaucoup plus grande mesure que ce n’est le cas jusqu’à présent, à l’architecture et au bâtiment, dans le but de faire un meilleur usage des matériaux et ressources énergétiques disponibles.

Les collectivités locales doivent porter une attention particulière à la protection des quartiers résidentiels contre la pollution, à la création de zones de protection environnementale, de zones tampon, de parcs et d’ensembles de jardins, à la déviation des flux de circulation sources de nuisances, et à l’installation d’équipements variés accessibles à tous. Les consultations publiques et la participation des groupes locaux doivent être encouragées ; les habitants doivent avoir la possibilité d’exprimer leurs idées et de participer aux décisions lorsqu’il s’agit de l’aménagement de leur quartier et de l’application de critères innovants dans le cadre d’un aménagement durable.

THÈME : DÉVELOPPEMENT CULTUREL

Les villes jouent également un rôle essentiel dans la création d’autres infrastructures et dans la promotion d’activités culturelles et éducatives qui s’inspirent de la tradition culturelle propre à chaque ville ainsi que de l’identité de sa population.

Chaque ville doit veiller à préserver et renforcer son patrimoine culturel et sa mémoire collective, et à les transmettre aux jeunes générations au moyen d’initiatives et de programmes éducatifs traitant de la création architecturale, de la langue, des arts, de la musique, de la littérature et de toutes les formes d’expression traditionnelles inscrites dans son histoire. Les politiques menées dans les domaines de la culture et de l’éducation peuvent en outre contribuer au développement économique et social en aidant les habitants de chaque ville à comprendre, identifier et reconnaître leur rôle et leurs objectifs particuliers à l’intérieur d’un réseau européen de villes.

Principes

1. Le développement culturel des villes contribue à leur essor économique et social.

Le caractère général de la démocratie culturelle est consacré par l’article 27 de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme.

La politique culturelle doit apporter une contribution importante au développement économique et à l’émergence d’un sentiment d’appartenance à la collectivité. La richesse culturelle des sociétés multiethniques représente un atout dans la perspective de leur développement général. La culture est un élément fondamental de l’éducation à tous les niveaux ; à travers la réhabilitation sociale des groupes défavorisés, elle peut largement contribuer à la participation de la population. La stratégie culturelle doit jouer un rôle clé dans une politique urbaine d’ensemble, et s’inscrire dans une stratégie globale d’amélioration de la qualité de vie en milieu urbain et de renforcement de l’identité urbaine.

Les collectivités locales doivent prendre conscience du rôle capital des échanges d’expériences culturelles entre les villes pour la promotion de la compréhension et du respect mutuels. L’action culturelle ne relève pas de la seule responsabilité des collectivités locales. Celles-ci doivent s’efforcer par divers moyens d’inciter les entreprises à s’impliquer davantage dans le parrainage des arts et de la culture.

2. Le pluralisme culturel requiert l’expérimentation et le soutien à l’innovation.

La richesse de l’activité culturelle tient en partie à son caractère spontané, innovant et créatif. L’activité culturelle doit également s’intéresser à certains groupes de population, en particulier les jeunes et les communautés immigrées, reconnaître leurs besoins et leurs apports spécifiques.
Les collectivités locales doivent tenir compte de l’importance de la diversité et du pluralisme culturel en allouant des subventions suffisantes aux activités culturelles et en créant des espaces d’expression artistique adaptés aux arts marginaux comme la danse de rue ou les spectacles de rue, voire le graffiti dans un cadre maîtrisé.

3. Une promotion judicieuse du tourisme culturel peut avoir un effet bénéfique pour la collectivité.

Le tourisme culturel est en plein essor dans toute l’Europe ; les villes historiques, les manifestations culturelles et artistiques attirent de plus en plus de visiteurs.

Pour les villes, les avantages sont évidents : prospérité accrue, amélioration des perspectives d’emploi au niveau local, développement des équipements à la disposition des habitants. D’autres retombées positives concernent les secteurs du bâtiment et de l’artisanat, mais aussi la connaissance et le respect mutuels des diverses cultures et communautés.

Les collectivités locales doivent s’efforcer d’élaborer et de mettre en œuvre un plan de gestion touristique et culturelle impliquant étroitement la population, le secteur privé, les représentants de l’industrie touristique et les administrations locales, de manière à conforter les résultats positifs et à éviter le développement d’effets négatifs. Les programmes de développement touristique doivent respecter les traditions locales ainsi que l’environnement urbain et naturel.

THÈME : ÉGALITÉ D’ACCÈS À L’ÉDUCATION, AU SPORT, AUX LOISIRS ET AUX TRANSPORTS

Les infrastructures d’éducation, de sport, de loisirs et de transport doivent être accessibles à tous. Le sport, notamment, a un rôle fondamental à jouer en tant que moyen de communication et de rapprochement entre les individus et les groupes. Il peut aider à trouver une motivation, à échapper au sentiment d’aliénation sociale. C’est aussi un outil de lutte contre l’exclusion. Chacun a le droit de participer à des activités d’éducation, de sport et de loisirs selon ses aptitudes, et d’enrichir ainsi son existence à travers le bien-être social et physique.

Principes

1. Les pouvoirs publics doivent s’efforcer de garantir l’égalité d’accès à l’éducation.

Les pouvoirs publics doivent prendre les mesures nécessaires pour garantir l’égalité d’accès à l’éducation et aux moyens d’éducation. Il convient de promouvoir par des activités spéciales l’accès des groupes défavorisés à l’éducation.

Les politiques en matière d’éducation doivent permettre le renforcement des mesures d’enseignement et de formation professionnelle pour mettre davantage en adéquation les emplois disponibles et les compétences en présence.

2. Tout individu a le droit de pratiquer des activités sportives et de loisir.

Selon les dispositions de la Charte « Sport pour tous », les collectivités locales sont tenues d’améliorer, directement ou par délégation de pouvoirs, l’accès aux équipements sportifs et de loisirs pour tous les habitants quel que soit leur âge ou leur contexte social, économique ou ethnique.

Les principaux moyens d’y parvenir sont d’élaborer des stratégies spéciales et des programmes pour le développement du sport et l’encadrement sportif afin d’encourager la pratique du sport, y compris par les personnes présentant des besoins particuliers ; de créer un réseau d’équipements sportifs et de loisirs, couvrant toute la ville et facilement accessibles depuis les quartiers résidentiels ; et d’offrir aux habitants des occasions de pratiquer les sports traditionnels aussi bien que modernes.

Les mesures d’aménagement qui s’insèrent dans le tissu urbain existant doivent être l’occasion d’y intégrer des espaces libres, des surfaces boisées, des aires de jeux, des plans d’eau et des pistes cyclables afin de favoriser et de stimuler les activités de loisirs et d’accroître l’accessibilité de ces sites pour tous, notamment les enfants, les jeunes et les personnes âgées. Les installations de sport et de loisirs doivent s’inscrire dans le cadre architectural et le paysage urbain, et contribuer à l’harmonie du lieu ; leur emplacement doit être choisi en veillant à ne pas créer de nuisances sonores à proximité de lieux sensibles tels que les hôpitaux et les écoles. L’architecture et les matériaux employés doivent permettre à tous une participation saine et sans danger aux activités offertes.

3. Les déplacements et les transports publics doivent être accessibles à tous.

Le droit de se déplacer librement est un droit fondamental ; pour certains groupes de personnes toutefois, tout déplacement pose un problème. Les équipements de transports publics doivent être soigneusement conçus et les horaires établis de manière à permettre à tous une fréquentation maximale.

Ce droit doit être également acquis aux groupes défavorisés du fait de l’âge, d’une incapacité physique ou mentale, ou de la méconnaissance de la langue ou des coutumes locales. Il convient d’aider les personnes concernées à utiliser les ressources et équipements disponibles au moyen de pictogrammes universels, de traductions, d’une signalisation appropriée des voies piétonnes et pistes cyclables, d’une information et formation linguistique accélérée des minorités ethniques, de l’utilisation de systèmes d’information conviviaux et interactifs, et de la prise en compte du principe d’accessibilité dans la conception architecturale.

E. FORME

THÈME : AMÉNAGEMENT URBAIN

L’aspect d’une ville, qu’il s’agisse de quartiers anciens ou modernes, est fortement influencé par le climat et la topographie du lieu. Ce cadre naturel, la culture nationale et les besoins des habitants sont les éléments fondamentaux qui sont à la base de toute décision relative au développement d’une ville, à son environnement bâti et à son infrastructure. Face au changement, les villes européennes doivent formuler, à travers l’aménagement urbain, des réponses créatives et intelligentes, respectueuses de leur site géographique, de leur caractère et de leur patrimoine historique.

Principes

1. L’aménagement urbain doit veiller à ce que le développement des villes tienne compte des conditions climatiques et topographiques, du contexte culturel et historique, et de l’infrastructure, dans le respect du principe de viabilité.

Les villes européennes, qu’il s’agisse de cités anciennes ou de villes nouvelles, sont profondément influencées par leur climat et leur topographie. Des rives méditerranéennes aux régions nordiques, le climat européen est d’une grande diversité. Il en résulte une grande diversité de paysages et, en conséquence, d’approches en matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire. La topographie est également un facteur crucial. La présence d’une vallée fluviale, de collines ou d’un front de mer est un paramètre fondamental. Enfin, les villes reflètent, à travers leur structure, leur plan général et leur aspect, des traits caractéristiques de la culture du pays et de la région.

On peut clairement reconnaître l’empreinte laissée par ces différents facteurs dans le patrimoine historique – architecture, espaces publics, infrastructures – des villes européennes. Il convient de les prendre en compte lors de tout projet d’urbanisation ou de réhabilitation, en mettant l’accent sur le principe de viabilité.

2. Les collectivités locales doivent appliquer des politiques d’aménagement et d’urbanisme qui tiennent compte des orientations nationales et stratégiques.

La gestion d’une ville nécessite un système et des politiques permettant d’en maîtriser le développement pour répondre aux attentes des habitants, protéger son patrimoine et susciter de nouvelles propositions. Il est essentiel que les habitants et les entreprises participent à l’élaboration, la mise en œuvre et la mise à jour continuelle des politiques urbaines.

Ces politiques doivent reprendre l’ensemble des principes énoncés dans les autres parties de la Charte urbaine afin que les villes se développent, dans le respect du principe de viabilité, conformément aux objectifs écologiques, économiques et sociaux de leurs habitants. Les pouvoirs locaux veilleront à les mettre en œuvre au moyen d’une bonne gouvernance et de décisions mûrement réfléchies.

3. Tout projet d’urbanisme doit être sensible au caractère et au contexte historique d’une ville.

Le visage d’une ville est façonné par ses habitants, à travers leur culture et leurs activités, et par son histoire et son environnement. Il est d’une importance vitale de protéger le caractère d’une ville. Les administrations locales doivent aspirer, avec l’aide de spécialistes, à créer des lieux qui mettent en harmonie l’ancien et le nouveau. Toute implantation d’un nouveau projet d’urbanisme dans un contexte historique implique la recherche d’un équilibre réfléchi entre le caractère traditionnel des lieux et les exigences de la modernité. Il est essentiel de bien connaître le contexte historique et son apport au caractère et à l’aspect du site.

La silhouette (ou skyline) d’une ville est souvent l’une de ses caractéristiques les plus appréciées, et peut même en tenir lieu de symbole. Lorsque l’on envisage de construire des bâtiments de grande hauteur, il est essentiel de les placer de manière à mettre en valeur la silhouette de la ville, à ne pas gâcher les vues historiques ou l’environnement immédiat, et à assurer une bonne desserte par les transports en commun.

4. Les centres des villes doivent être préservés en tant que symboles de la culture et du patrimoine européens.

Les quartiers centraux sont généralement les plus chargés d’histoire ; ils recèlent fréquemment de précieux éléments du patrimoine architectural. Ils peuvent susciter un sentiment d’identité partagé par les générations actuelles et futures ; de même, ils jouent un rôle considérable dans la création d’un sentiment de communauté et de solidarité entre les peuples d’Europe.

L’aspect et l’atmosphère des quartiers centraux d’une ville peuvent être des indices révélateurs de la qualité de l’environnement dans les autres parties de la ville. Un centre attrayant, animé et accueillant est un appel aux visiteurs et aux clients qui perçoivent que l’endroit vaut une visite. La présence de résidents revêt une importance particulière, particulièrement lorsqu’ils habitent au-dessus des commerces, car ils contribuent à surveiller l’espace public et à établir un sentiment d’appartenance et d’animation locale.

Les quartiers centraux font fréquemment l’objet de grands projets d’urbanisme. Dans de nombreuses villes européennes, ils sont en train de changer de vocation principale : de centres commerciaux et administratifs, ils deviennent des lieux de loisirs et de tourisme. Il est essentiel de maintenir la diversité sociale en encourageant un développement diversifié et en préservant l’utilisation résidentielle.

Pour atténuer les pressions qui pèsent sur les centres historiques, un équilibre réfléchi doit être trouvé entre leur caractère traditionnel de milieux denses et diversifiés, et les nouveaux grands projets, plus exigeants en termes d’espace, d’accès et de rapidité de changement.

THÈME : LA CONCEPTION DE L’ESPACE URBAIN

La qualité de l’environnement bâti d’une ville est le fruit d’une conception sensible et créative, définie comme l’art de créer des espaces pour les citadins. La conception doit être d'une grande qualité, à tout point de vue. Elle doit s’intéresser aux besoins de la population, aux questions d’accessibilité et à la manière dont une ville fonctionne. Elle doit aussi protéger et conserver l’environnement architectural historique, tout en favorisant de nouvelles créations de qualité.

Les villes sont jugées non seulement en fonction de leur vitalité et de la qualité de leurs services, mais aussi en fonction de la qualité de leur environnement, de leur patrimoine historique, de leur accessibilité, de la sécurité et de l’état d’entretien dans lequel elles sont. Le niveau de performance atteint pour chacun de ces critères et les rapports entre eux sont déterminants pour juger de la réussite d’une ville.

Principes

1. La conception des villes européennes doit être axée sur leur fonctionnement et sur leur physionomie.

La conception de l’espace urbain doit répondre aux besoins des habitants en matière de logement, de travail, de loisirs et de déplacements ; elle doit donc être axée tout autant sur la manière dont une ville fonctionne que sur son aspect visuel. La qualité de l’architecture urbaine est l'une des clés d’un développement durable et se caractérise par des zones résidentielles et d’activité économique agréables, des réseaux de transport fonctionnels et confortables et un environnement physique attrayant et sûr. La sécurité est aujourd’hui une préoccupation essentielle des citadins, qui a amené tous les responsables de la sécurité à s'intéresser de très près aux techniques de « prévention de la criminalité par la conception environnementale ». Tous ces facteurs contribuent à créer les conditions favorables à l’épanouissement de la vie économique et sociale des villes.

Les environnements urbains les plus agréables sont ceux où se mêlent de manière attrayante édifices de toutes époques, parcs, rues, espaces et perspectives bouillonnant du flot des passants, ce qui crée une ambiance plaisante de jour comme de nuit et par tous les temps. Un bel environnement bâti, dans lequel des réalisations architecturales et techniques imaginatives s’intègrent au patrimoine historique et sont adaptées aux fonctions de la ville, améliore la vie de toutes les personnes qui la fréquentent. Les considérations esthétiques sont un aspect essentiel de la qualité de vie. L'architecture de qualité n’est pas nécessairement coûteuse et contribue grandement à la renommée globale des villes. La qualité et la beauté à un coût raisonnable sont affaire d’imagination et de créativité.

2. La conception de l’espace urbain ne peut être réussie que si elle répond à des critères de qualité exigeants.

Qu’il s’agisse d’immeubles, de rues, de mobilier urbain ou d’aménagement paysager, la qualité de la conception et l’entretien sont des aspects déterminants. L’utilisation créative de terrains désaffectés et d’anciens immeubles, la préservation des sites et la conception d’immeubles éconergétiques et faciles d’entretien sont autant d’éléments de la conception qui contribuent à la durabilité du tissu urbain. La qualité est un gage d’abaissement des coûts dans la mesure où un bâtiment rutilant lors de sa mise en service, puis mal entretenu, grèvera à terme le budget de ses propriétaires et sera rejeté par le public.

Le développement harmonieux d’une ville passe par un urbanisme éclairé, une architecture et une construction de qualité, l’emploi de matériaux durables et un entretien attentif. Le développement doit se faire dans le respect du contexte historique. Les plus belles réussites allient souvent une architecture moderne à la conservation et à la restauration d’édifices existants. Il n’y a pas deux lieux identiques et l’urbanisme doit constamment s’efforcer d’exploiter les atouts naturels de chaque site. La qualité ne concerne pas seulement les réalisations architecturales mais tous les détails d’une ville, des rues aux espaces dégagés en passant par le mobilier urbain.

Les concours d’architecture et d’aménagement peuvent être une source précieuse d’idées nouvelles, tout particulièrement dans les vieilles villes où il est impératif d’avoir une architecture de grande qualité. Les concepts appliqués doivent laisser la porte ouverte à l’innovation et à l'imagination et pouvoir s’adapter aux évolutions de la démographie et de l’utilisation de l’espace.

3. Une attention particulière doit être portée aux places et espaces publics accessibles à tous et à leur sécurité.

Dans toutes les villes, grandes ou petites, les habitants ont besoin, pour leurs activités et leur bien-être, de lieux où se promener et se rencontrer. En conséquence, les espaces libres, ruelles, trottoirs, avenues arborées, parcs, terrains de jeux, berges, halls de gare, zones piétonnes et jardins font partie intégrante du caractère et de l’aspect des villes.

Dans les grandes villes européennes, l’espace public se transforme sous l’effet d’une privatisation accrue de lieux auparavant ouverts à tous, de la surveillance et des contrôles d’accès et d’interventions architecturales massives qui rompent avec l'histoire et la géographie locales. Ce phénomène peut être contré en préservant et recréant des réseaux piétonniers reliant les principales zones d’intérêt public. Ces cheminements doivent être agréables à emprunter ; pour cela il faut veiller à leur continuité, les aménager, les paver, en assurer l’éclairage et la signalétique et les entretenir.

Des espaces publics bien conçus, entretenus et largement fréquentés augmentent l’attrait d’une ville et contribuent à la prospérité de sa vie économique et sociale. On n’insistera jamais assez sur l’importance des parcs, avec leurs caractéristiques naturelles, leur faune et leur flore. Ils doivent constituer un environnement sûr et attrayant, ce qui passe par la qualité de leur conception, aussi bien pour ce qui est de leur caractère, de leur sécurité, des activités qui y sont proposées, de leur éclairage, de leur entretien, de leur surveillance où encore des oeuvres d’art qui y sont exposées.

THÈME : LE PATRIMOINE ARCHITECTURAL URBAIN ET SA GESTION

Notre patrimoine urbain est une composante importante et irremplaçable du tissu urbain, capital pour l'identité d'une ville et de ses habitants. Il transmet aux générations futures des repères culturels qui constituent la conscience de l’histoire et de l’avenir communs de l’Europe. Ce patrimoine se compose de monuments, d’ensembles architecturaux, de structures, places, espaces et sites, comme l’indique l’article 1 de la Convention européenne pour la sauvegarde du patrimoine architectural de l'Europe.

Ce sont les collectivités locales qui sont le mieux placé, avec les organismes spécialisés dans la protection du patrimoine, pour gérer et mettre en valeur ce patrimoine urbain. Leurs compétences en matière de développement les placent dans une position déterminante pour veiller à ce que la régénération de ce patrimoine soit utile et de bonne qualité.

Principes

1. Le patrimoine bâti est généralement l’un des éléments les plus précieux du patrimoine d’une ville ; à ce titre, il doit être protégé et entretenu.

Les villes européennes historiques, avec leurs édifices, leurs espaces, leurs activités et le tracé de leurs rues, constituent un lien important entre le passé, le présent et l’avenir. Les meilleurs éléments du patrimoine architectural, garants de la mémoire et de l’identité de la ville, doivent être mis en valeur par une démarche urbanistique moderne et de grande qualité. Le tissu urbain est un organisme vivant, qu’il convient non seulement de préserver mais aussi de mettre en valeur.

Le patrimoine architectural, composé d’édifices et d’espaces libres et de leur association historique et culturelle, donne à chaque ville son caractère distinctif. Les bâtiments anciens, qu’ils aient ou non une valeur historique, se prêtent fréquemment à des utilisations très diverses. La meilleure solution est généralement de conserver aux édifices historiques leur vocation première, mais, lorsque c’est impossible, ils pourront trouver une nouvelle vie grâce à une reconversion. Les collectivités locales doivent comprendre que la conservation du patrimoine peut aller de pair avec la revitalisation économique de la ville. Les exemples sont nombreux de réutilisation ingénieuse d’anciens immeubles des plus insignifiants. Les sites et édifices historiques ont un cachet particulier et peuvent, pour peu qu’on perçoive les possibilités de mise en valeur qu’ils offrent, servir de catalyseur à une régénération du tissu urbain. L’un des avantages souvent ignorés de la conservation est qu’elle constitue une forme de développement extrêmement durable de par les économies d’énergie, de matériaux et d’infrastructure qu’elle permet de réaliser.

2. La gestion du patrimoine historique suppose la mise en place d’un solide cadre juridique et d’un encadrement attentif.

Si les pouvoirs publics sont responsables de la conservation du patrimoine, la plupart des édifices appartiennent à des particuliers. Il est donc capital de définir le cadre juridique du développement urbain pour garantir la protection du patrimoine bâti. Les pouvoirs publics doivent élaborer des procédures de surveillance adaptées et définir des modalités de gestion et d’encadrement pour protéger les édifices individuels et les ensembles architecturaux, de manière à permettre les modifications et agrandissements souhaitables. Ils doivent également empêcher les démolitions qui ne s’imposent pas. La législation doit permettre une évolution raisonnée des quartiers historiques et de leur environnement, sans porter atteinte aux structures et caractéristiques qui revêtent une importance architecturale, historique ou culturelle.

Elle ne doit néanmoins pas être utilisée pour exercer un contrôle négatif mais pour encourager l’introduction de nouvelles utilisations et de nouvelles formes architecturales. Conservation ne signifie pas préservation.

La législation doit également prévoir la constitution d'un registre ou d'un inventaire complet du patrimoine urbain. Établi à partir d'une analyse approfondie des structures historiques d’une ville, cet inventaire doit identifier les éléments qui présentent un intérêt particulier, y compris dans l’optique d’une reconversion, et inclure les éléments pouvant constituer un nouveau patrimoine. Cet inventaire doit être rendu public et constamment mis à jour.

Il convient de prévoir la création de zones protégées, en tenant compte du domaine public (pavage des rues, éclairage public, espaces découverts, etc.). Les collectivités locales doivent contrôler et encadrer les opérations de conservation en publiant des documents d’information, contenant notamment des listes de spécialistes, d’artisans et de matériaux traditionnels.

3. La population locale doit être pleinement impliquée dans la conservation du patrimoine historique.

Le respect de la dimension historique d’un site passe nécessairement par une plus grande sensibilité de la population à la valeur intrinsèque du patrimoine bâti et des traditions et coutumes historiques. L’information et l’éducation du public ont donc un rôle essentiel à jouer.

La connaissance de l’environnement historique pourrait être diffusée dans le cadre de forums de travail ou par d’autres moyens. Toutes les personnes appelées à intervenir dans le domaine de l’environnement urbain devraient avoir des connaissances dans ce domaine, et pas seulement les spécialistes. Les programmes scolaires devraient comprendre l’étude de l’histoire sociale et urbaine. Les associations de conservation et de protection du patrimoine ont aussi un rôle vital à jouer lors des phases de consultation préalables aux opérations de développement.

La formation aux métiers et techniques spécialisés est essentielle. Elle peut être un moyen intéressant de former des apprentis et des ouvriers spécialisés et qualifiés. Les responsables de la réglementation ainsi que toutes les autres personnes qui ont affaire aux projets liés au patrimoine doivent aussi recevoir une formation spécifique.

4. Les montages et partenariats financiers sont déterminants pour le succès des interventions en matière d’aménagement urbain et doivent pouvoir être largement utilisés.

La conservation du patrimoine urbain implique un engagement financier substantiel, tant pour les édifices eux-mêmes que pour l’organisation des services administratifs nécessaires à la réalisation des politiques nationales, régionales et locales de protection du patrimoine. Comme le budget du secteur public n'y suffit généralement pas, le financement de ces activités nécessite la participation du secteur privé ainsi que des incitations en direction des particuliers. Il peut notamment s’agir de mesures fiscales visant à favoriser la rénovation des bâtiments et éviter leur démolition, de la vente de biens historiques à prix réduit à condition qu’il soit entièrement restaurés et entretenus, de prêts à long terme, de la création de fondations chargées de la restauration, du développement de fonds renouvelables et du recours accru au parrainage et au sponsoring. Le subventionnement de projets de conservation peut avoir un effet régulateur lorsqu’il couvre un vaste domaine.

THÈME : TRANSPORT ET MOBILITÉ

L’augmentation du trafic routier (essentiellement due aux véhicules personnels et aux poids lourds) fait peser de lourdes contraintes sur les réseaux autoroutiers urbains et a un effet destructeur sur le tissu urbain et la qualité de l’environnement. L’utilisation de la voiture particulière doit donc être contrôlée et encadrée et l’utilisation des transports en commun encouragée.

Il convient d’adopter une stratégie d’aménagement du territoire plus acceptable à terme, qui favorise l’accessibilité à un modèle de ville « compacte » alliant diverses fonctions, du logement à l’emploi, au moyen de systèmes de transport innovants.

Principes

1. Il faut impérativement réduire le volume des déplacements et, plus particulièrement, l'usage de la voiture privée, et adopter de nouvelles approches des déplacements urbains.

Au cours du siècle dernier, la politique des transports a été axée essentiellement sur le véhicule privé, au détriment des transports publics, du tissu urbain et de la campagne environnante. Les voitures agressent les villes par le bruit, l'insécurité physique et psychologique, la dégradation et la perte d'espaces publics et la pollution atmosphérique. Moins perceptibles sont les contraintes que le trafic routier fait peser sur l’espace et sur la cohérence et la forme des zones urbaines, en raison d’un développement non maîtrisé – qui ne peut être viable à terme – et l’aggravation des problèmes que rencontrent ceux qui ne peuvent avoir de voiture. La dernière décennie a été marquée par une augmentation rapide du nombre de véhicules en circulation et tout porte à croire que les villes d’Europe centrale et orientale seront soumises à des pressions pour « rattraper leur retard » en la matière.

La plupart des villes reculent devant les risques politiques et techniques qu’entraînerait une restriction de la circulation automobile. Il existe pourtant de bons exemples, en Europe, de mise en place d’excellents réseaux de transport en commun, intégrés au développement, ce qui encourage l’implantation de nouvelles activités dans les lieux accessibles le plus facilement par train, tram et bus. Une autre solution pourrait être de généraliser les péages urbains dans les zones les plus congestionnées.

La voiture présente cependant de nombreux avantages immédiats car son aspect pratique et la flexibilité qu’elle offre permettent de se déplacer plus facilement. Ces avantages concernent surtout les personnes les plus riches. L’usage de la voiture entraîne cependant de lourds investissements pour la réalisation de réseaux routiers périurbains et la mise en place de transports en commun économiquement viables dans les zones suburbaines qui ne cessent de s’étendre du fait de l’utilisation de la voiture personnelle. Pour l’environnement, cette évolution n’est pas tenable à long terme.

Il n’y aura pas de réel changement sans une évolution des comportements. La conscience écologique croissante ne s’accompagne pas toujours d'une modification parallèle des habitudes de transport bien ancrées, tout particulièrement en ce qui concerne l’usage de la voiture. L’utilisation des transports en commun, la marche et le vélo, qui sont des modes de déplacement naturels, sains et tenables à long terme, devraient être la norme. Il est manifestement de la responsabilité des collectivités locales de lancer des campagnes de sensibilisation et de prendre des mesures à cet égard, en partenariat avec d’autres instances.

2. Les technologies de l’information et les moyens de communication électroniques devraient être utilisés pour réduire les besoins de déplacement.

Les espoirs fondés initialement sur les technologies de l’information pour alléger les contraintes de localisation qui pèsent sur le développement ne se sont pas complètement concrétisés. S’il y a eu un effet, il a plutôt pris la forme d’une concentration du développement dans le centre des grandes villes, qui sont, de plus en plus, les seuls lieux capables d’offrir la masse critique de compétences dont ont besoin les sièges des grandes entreprises mondiales.

Parallèlement aux avantages indéniables de la révolution de l’information, en termes d’accès aux services et à l’apprentissage, on peut craindre qu’elle creuse encore davantage le fossé entre les métropoles d’importance mondiale et les autres villes et entre ceux qui peuvent bénéficier de ses avantages et les autres. Il est de la responsabilité des collectivités locales de veiller à ce que ces avantages bénéficient à tous et qu’ils soient mis à profit pour améliorer la qualité des services publics et se traduisent, en pratique, par une plus grande participation des citoyens aux affaires de la ville.

De plus, bien que le télétravail à domicile puisse contribuer à une approche plus viable des communications, il est peu probable qu’il fournisse à lui seul la solution, en raison de son effet désocialisant.

3. L’inefficacité du contrôle de l’utilisation des sols et la séparation des fonctions provoquent de nombreux problèmes d’accessibilité. Les usagers des sols doivent être pris en compte dans les systèmes de transport.

Certaines pratiques d’aménagement du territoire appliquées au cours des cinquante dernières années ont mené à l’impasse actuelle. L’insuffisance du contrôle de l’utilisation des sols et la séparation de fonctions essentielles sont tout particulièrement en cause. Elles ont abouti à la congestion des villes, que les classes moyennes se sont mises à déserter, et au développement anarchique des zones suburbaines, dans lesquelles il est pratiquement impossible de mettre en place des réseaux de transport en commun économiquement viables. Dans les cas les plus fragrants, cette situation impose des navettes incessantes aux personnes qui vivent à un endroit, travaillent dans un autre, doivent se rendre ailleurs pour se procurer les biens et services dont elles ont besoin et emmener et récupérer leurs enfants à l’école, située encore dans un autre lieu. Il convient d’appliquer des politiques de transport et d'utilisation des sols intégrées, surtout dans les zones urbaines les plus menacées de congestion. Les collectivités locales devraient mettre en place des plans visant à réduire l’utilisation du véhicule privé et à améliorer la qualité des transports publics et de l’environnement.

Cet effort passe notamment par la création de plateformes intermodales efficaces entre le train, le bus, le tram et la voiture. En périphérie des villes, les zones à plus fort développement devraient être à proximité des gares, arrêts de bus et autres stations de correspondance. Dans les grandes villes, cela suppose que les lieux de travail soient à proximité des centres de transport et que ceux-ci soient intégrés aux réseaux piétonniers, de manière à inciter les voyageurs à rejoindre leur destination finale à pied.

4. La mobilité doit être organisée de manière à ce que la ville reste vivable et à permettre la coexistence de divers modes de déplacement.

Il est impossible d’éliminer les déplacements, mais il doit néanmoins être possible de réorganiser les différents modes de transport en fonction, non plus d'objectifs sectoriels, mais du but global à atteindre : avoir une ville où il fasse bon vivre. Il faut pour cela accorder la priorité aux transports publics, aux piétons et aux cyclistes pour le transport individuel des personnes et des biens. Cela implique la mise en place de restrictions lorsque la circulation est dense, même pour la livraison de marchandises. Il faut, en conséquence, envisager des mesures novatrices pour réguler l'utilisation de la voie publique, dont certaines zones pourraient par exemple être réservées à certains usages (piétonnier notamment) à des heures, jours, périodes de la semaine ou de l’année donnés ou dont l’accès pourrait être soumis à péage. Cela suppose la création de pistes cyclables, de zones piétonnières judicieusement délimitées, de parcs de stationnement situés en périphérie des villes et couplés à des transports en commun sûrs, fréquents et économiques pour relier les centres ville.

5. Redonner la rue aux piétons

Un moyen très efficace d’améliorer l’environnement urbain est de créer des réseaux d’itinéraires piétonniers attrayants et sûrs. De nombreuses villes ont mis en place des itinéraires touristiques reliant les principaux points de vue et sites historiques, mais peu ont étendu ces réseaux à d’autres lieux et d’autres activités.

La disparition de la rue en tant qu’espace de vie et lieu de rencontre contribue au déclin des villes et à la montée de l’insécurité. Des mesures telles que l’élargissement des trottoirs, la création de zones piétonnières, le contrôle de la densité du trafic par la mise en place d’un plan de circulation adapté, l’utilisation judicieuse de voies à sens unique ainsi qu’une approche envisageant la rue comme un espace multi-usage permettront d’en faire un espace plus sûr et plus agréable. Tous ces éléments devraient être inclus dans un réseau de voies piétonnes. Ces réseaux devraient relier les principaux points de concentration des activités et des personnes, en particulier les stations de transport en commun, et inclure des itinéraires sûrs pour les écoliers. Ils doivent répondre avant tout à des impératifs de sécurité, de qualité – tant pour ce qui est de leur conception que des matériaux utilisés –, d’aménagement paysager et d’éclairage.