13e session/ Session de printemps du Congrès, 27 mars 2007
Strasbourg, 27-28 March 2007
Allocution de M. Alfred Müller, Maire de Schiltigheim
Monsieur le Président, Monsieur le Rapporteur, Mesdames, Messieurs,
Permettez-moi tout d’abord de vous remercier de votre invitation à prendre la parole devant votre assemblée, au nom de la Ville de Schiltigheim, dans le cadre de cette réflexion consacrée à la coopération intergénérationnelle et la démocratie participative.
Il est clair que chacun mesure les enjeux citoyens d’une telle réflexion, soulignés par votre rapporteur, ainsi que ceux du Manifeste et des recommandations, que vous devriez adopter à l’issue de ce débat.
Pour ma part, je voudrais en quelques mots vous présenter très concrètement l’état de l’expérience qui est en train de se développer dans notre cité actuellement, sous mon impulsion et celle de notre adjoint à l’enfance-jeunesse.
Laissez-moi tout d’abord vous donner deux ou trois éléments forts du contexte « civique » dans lequel nous avons abordé cette expérience.
Ville de plus de 30 0000 habitants, située au nord immédiat de Strasbourg, Schiltigheim est une cité active, où industries traditionnelles (comme la brasserie) et activités innovantes de pointe et de haute technologie forment le cadre où depuis toujours s’est ancrée une large palette d’activités, culturelles, associatives, sportives et festives.
C’est dans ce contexte que depuis plus d’un quart de siècle nous avons impulsé bon nombre d’initiatives citoyennes, à l’image dès 1979, de la création du premier Conseil municipal des enfants de France qui, depuis a largement essaimé en France et en Europe.
C’est sur la base de ces expériences, qui se sont très largement développées et enrichies durant tout ce temps, qu‘est née la volonté de poursuivre nos actions pour tenter de trouver des réponses originales aux mutations qui se produisent dans notre société, confrontée au « fractionnement et à l’éclatement des structures traditionnelles et à l’isolement et au « repli sur elles-mêmes » des différentes catégories qui la composent.
Car il apparaît essentiel que, dans la ville de demain, chacun trouve sa place et son rôle.
Il est tout aussi important que cette cité que l’on partage reste le point de rencontre entre la vie de chacun et l’histoire et le savoir des autres.
C’est ainsi que nous nous sommes fixé comme priorités de décloisonner la ville, notamment en rapprochant les différentes générations qui la composent et trop souvent ne se comprennent plus.
Cela est apparu d’autant plus nécessaire que :
* compte tenu de l’allongement de la vie et de la baisse de la natalité, depuis le recensement de 1999 et pour la première fois de notre histoire, les plus de 60 ans sont plus nombreux que les 20 ans et moins
* et que coexistent aujourd’hui 3 générations : nos seniors qui ont connu la guerre et ses privations, la génération d’après-guerre qui a connu les « 30 glorieuses » et qui arrive à l’âge de la retraite et la jeunesse d’après 70 qui connaît la crise, le chômage, la pollution et la peur de l’avenir…
C’est dans ce cadre là que s’est créé un Groupe de réflexion intergénérationnel qui est actuellement au travail !
Ce Groupe rassemble une quinzaine de jeunes de 10 à 14 ans et une dizaine de seniors de 65 à 85 ans.
Ce groupe est stable et travaille dans la durée. Il est composé pour les jeunes, pour la plupart de membres de nos Conseils enfants et de jeunes mais aussi de jeunes qui se sont engagés dans la vaste concertation qui a réfléchi à l’aménagement d’un grand projet urbain, visant à la vitalisation d’une importante friche industrielle au cœur de notre centre-ville : le site Adelshoffen.
D’ores et déjà ce Groupe s’est réuni lors de trois sessions de travail, dans une démarche très volontaire et très concrète.
C’est ainsi que lors de sa première session, le Groupe a décidé de partir de constats simples : comme celui par exemple que aujourd’hui « plus personne, ne communique » et tout simplement que peu de gens se disent tout simplement… bonjour, dans l’espace public.
D’ores et déjà, une première initiative a été décidée et va se dérouler prochainement sous le « label » de la Semaine du Bonjour, portée par une campagne de communication et d’action sous ce thème.
Lors d’une deuxième séance les participants ont travaillé séparément pour faire part de façon spontanée et « à chaud » de leurs visions « a priori » de l’autre groupe et de pointer ainsi un certain nombre de points d’incompréhension, mais aussi de pistes d’avenir.
C’est ainsi que pour les jeunes spontanément, les seniors évoquent des images aussi connotées que : maison de retraite, soupe, dentiers et… accent alsacien, mais aussi tartes, grand-mère, recherche de racines et moments agréables.
Dans le même élan spontané on s’est rendu compte que pour les seniors, les jeunes évoquaient parfois : la délinquance, l’abandon d’une certaine culture et tradition régionale…
C’est sur la base de ce travail assez « décapant » que lors d’une troisième session, le dialogue s’est encore renforcé.
Chaque groupe à tour de rôle a évoqué sa jeunesse et mesuré ainsi les grandes différences entre leurs expériences concrètes vécues, dans des « mondes » bien différents : celui de la guerre et des solidarités traditionnelles pour les seniors, celui de la consommation, de l’Internet et du chômage et d’un certain isolement pour les plus jeunes…
Aujourd’hui ce travail va se poursuivre par des journées qui vont permettre d’approfondir très réellement sur le « terrain » de la vie de chacun ce dialogue et ces échanges.
C’est ainsi que les jeunes devraient passer une journée en compagnie des seniors, par exemple dans une maison de retraite.
De façon complémentaire, les seniors devraient accompagner leurs jeunes interlocuteurs dans les collèges, pour voir aussi concrètement ce que être leur vie au quotidien, et finir ces journées en leur compagnie… dans un fast-food.
Bien évidemment, nous voila aujourd’hui certainement « au milieu d’un gué », dans le cadre d’une expérience, comme je le soulignais.
Une expérience que nous voulons laisser « éclore » dans un grand esprit de liberté et sans « directivité », pour qu’elle puisse aller le plus loin possible, sans « a priori ».
Ce qui est clair aujourd’hui, c’est que cette démarche est réellement mobilisatrice et qu’elle ouvre de réels nouveaux espaces de dialogue et de rencontres entre des acteurs de la cité qui se connaissent mal et pourtant doivent cheminer ensemble.
Ce qui est clair également, c’est qu’en impulsant cette démarche, notre collectivité municipale joue un rôle mobilisateur et qui répond réellement aux attentes des uns et des autres.
On le constate actuellement dans la démarche engagée où chacun des acteurs jeunes, comme seniors, montre sa volonté d’aller de l’avant et sans doute de redécouvrir un besoin qu’ils avaient peut-être oublié : celui de retrouver une vraie place dans la ville !
Je vous remercie de votre attention !