Recommandation Rec(2006)19
du Comité des Ministres aux Etats membres
relative aux politiques visant à soutenir une parentalité positive
(adoptée par le Comité des Ministres le 13 décembre 2006,
lors de la 983e réunion des Délégués des Ministres)
Le Comité des Ministres, en vertu de l’article 15.b du Statut du Conseil de l’Europe,
Considérant que l’objectif du Conseil de l’Europe est de réaliser une union plus étroite entre ses Etats membres, notamment en incitant à l’adoption de règles communes ;
Rappelant les travaux du Conseil de l’Europe en matière d’enfance et de famille, et réaffirmant de manière générale les contenus des textes juridiques suivants :
- la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales (STE n° 5), qui protège les droits de tout être humain, y compris l’enfant ;
- la Charte sociale européenne (STE n° 35) et la Charte sociale européenne révisée (STE n° 163) qui stipule que « La famille, en tant que cellule fondamentale de la société, a droit à une protection sociale, juridique et économique appropriée pour assurer son plein développement » (article16) ;
- la Convention européenne sur l’exercice des droits des enfants (STE n° 160) ;
- la Convention sur les relations personnelles concernant les enfants (STE n° 192) ;
- les Recommandations du Comité des Ministres aux Etats membres : n° R (84) 4 sur les responsabilités parentales ; n° R (85) 4 sur la violence au sein de la famille ; n° R (87) 6 sur les familles nourricières ; n° R (94) 14 concernant les politiques familiales cohérentes et intégrées ; n° R (96) 5 sur la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale ; n° R (97) 4 sur les moyens d'assurer et de promouvoir la santé de la famille monoparentale ; n° R (98) 8 sur la participation des enfants à la vie familiale et sociale ; Rec(2005)5 relative aux droits des enfants vivant en institution et Rec(2006)5 sur le Plan d’action du Conseil de l’Europe pour la promotion des droits et de la pleine participation des personnes handicapées à la société : améliorer la qualité des personnes handicapées en Europe 2006-2015 ;
Gardant à l’esprit la Stratégie révisée de cohésion sociale qui indique que c’est au sein des familles que la cohésion sociale s’expérimente et s’apprend pour la première fois, et que, tout en respectant pleinement l’autonomie de la sphère privée et de la société civile, une stratégie de cohésion sociale doit donc chercher à soutenir les familles ;
Se référant aux Recommandations suivantes de l’Assemblée parlementaire : 751 (1975) relative à la situation et aux responsabilités des parents dans la famille moderne et au rôle de la société à cet égard ; 1074 (1988) relative à la politique de la famille ; 1121 (1990) relative aux droits des enfants ; 1443 (2000) pour un respect des droits de l’enfant dans l’adoption internationale ; 1501 (2001) sur la responsabilité des parents et des enseignants dans l’éducation des enfants ; 1551 (2002) « Construire au XXIe siècle une société avec et pour les enfants : suivi de la Stratégie européenne pour les enfants (Recommandation 1286 (1996)) » ; 1639 (2003) relative à la médiation familiale et à l’égalité des sexes ; 1666 (2004) « Interdire le châtiment corporel des enfants en Europe » ; 1698 (2005) relative aux droits des enfants en institution : un suivi à la Recommandation 1601 (2003) de l’Assemblée parlementaire ;
Soulignant l’importance de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, dont sont Parties tous les Etats membres du Conseil de l’Europe et dont les principes de base doivent toujours guider l’éducation des enfants ;
Rappelant le Troisième Sommet des Chefs d’Etat et de Gouvernement du Conseil de l’Europe (Varsovie, Pologne, mai 2005) et l’engagement pris par ces derniers à se conformer pleinement aux obligations de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, à promouvoir de manière effective ces droits et à prendre des mesures spéciales pour éradiquer toutes les formes de violence à l’égard des enfants, ainsi que le programme « Construire une Europe pour et avec les enfants », lancé à Monaco, les 4 et 5 avril 2006 ;
Se référant au Communiqué final et à la Déclaration politique des Ministres européens chargés des Affaires familiales lors de leur 28e session (Lisbonne, Portugal, 16 - 17 mai 2006), en particulier :
- en reconnaissant que la parentalité, tout en restant liée à l’intimité familiale, devrait être considérée comme un domaine relevant aussi de politiques publiques et que toutes les mesures nécessaires devraient être adoptées pour soutenir la parentalité et créer les conditions nécessaires à l’exercice d’une parentalité positive ;
- en rappelant leur engagement à promouvoir et à poursuivre une politique commune européenne dans le domaine des affaires familiales et des droits de l’enfant au sein du Conseil de l’Europe ;
Reconnaissant l’enfant comme une personne ayant des droits, dont le droit à être protégé, à la participation, à exprimer ses points de vue et à être écouté et entendu ;
Rappelant que les pouvoirs publics ont un rôle essentiel à jouer dans le soutien aux familles en général et aux parents en particulier, qui s’exprime à travers trois éléments majeurs de la politique familiale : aides publiques et fiscalité, mesures visant une meilleure conciliation de la vie familiale et professionnelle, accueil des enfants et autres services aux familles ;
Considérant que la famille est la cellule fondamentale de la société et que la parentalité est une fonction essentielle pour nos sociétés et leur avenir ;
Conscient des nombreux changements et défis auxquels sont confrontés les familles aujourd’hui et qui nécessitent de valoriser davantage et de mieux soutenir la parentalité, car ce soutien est essentiel aux enfants, aux parents et à la société en général ;
Reconnaissant que tous les niveaux de la société ont un rôle à jouer pour soutenir les enfants, les parents et les familles ;
Considérant que les pouvoirs publics, en lien avec les acteurs économiques et sociaux et la société civile, peuvent, en mettant en œuvre des actions de soutien à la parentalité, permettre d’œuvrer en faveur d’un avenir plus sain et plus prospère, et d’une amélioration de la qualité de la vie familiale ;
Constatant la nécessité d’une approche transversale et coordonnée ;
Désireux de promouvoir une parentalité positive comme élément essentiel du soutien à la parentalité et comme moyen d’assurer le respect et la mise en œuvre des droits de l’enfant,
Recommande aux gouvernements des Etats membres :
- de reconnaître le caractère essentiel des familles et de la fonction parentale, de créer les conditions nécessaires à une parentalité positive qui tienne compte des droits et de l’intérêt supérieur de l’enfant ;
- de prendre toutes les mesures appropriées, législatives, administratives, financières et autres, conformes aux principes énoncés dans l’annexe à la présente recommandation.
Annexe à la Recommandation Rec(2006)19
1. Définitions
Aux fins de la présente recommandation, le terme :
« Parents » désigne les personnes titulaires de l’autorité ou de la responsabilité parentale ;
« Parentalité » comprend l’ensemble des fonctions dévolues aux parents pour prendre soin des enfants et les éduquer. La parentalité est centrée sur la relation parent-enfant et comprend des droits et des devoirs pour le développement et l’épanouissement de l’enfant ;
« Parentalité positive » se réfère à un comportement parental fondé sur l’intérêt supérieur de l’enfant qui vise à l’élever et à le responsabiliser, qui est non violent et lui fournit reconnaissance et assistance, en établissant un ensemble de repères favorisant son plein développement.
2. Principes fondamentaux des politiques et mesures
Les politiques et les mesures en matière de soutien à la parentalité devraient :
i. se fonder sur les droits, c’est-à-dire considérer les enfants et les parents comme titulaires de droits et soumis à des obligations ;
ii. reposer sur un choix volontaire des personnes intéressées, exception faite des cas où les autorités publiques doivent intervenir pour protéger l’enfant ;
iii. reconnaître aux parents la responsabilité principale de l’enfant et la respecter sous réserve de l’intérêt supérieur de ce dernier ;
iv. associer les parents et les enfants, lorsque c'est approprié, à l’élaboration et à la mise en œuvre des mesures les concernant ;
v. promouvoir une implication égale des parents dans le respect de leur complémentarité ;
vi. garantir l’égalité des chances pour les enfants quel que soit leur sexe, leur statut, leurs aptitudes ou leur situation familiale ;
vii. prendre en compte l’importance d’un niveau de vie suffisant pour pouvoir exercer une parentalité positive ;
viii. se fonder sur un concept de parentalité positive clairement exprimé ;
ix. s’adresser aux parents et aux autres personnes ayant des responsabilités sociales, sanitaires et éducatives vis-à-vis de l’enfant, et tenues également de respecter les principes de la parentalité positive ;
x. prendre en compte les différents types de parentalité ou de situations parentales à travers une approche pluraliste ;
xi. adopter une approche positive du potentiel des parents, en particulier en favorisant les dispositifs incitatifs ;
xii. agir à long terme afin de garantir la stabilité et la continuité dans la mise en œuvre des politiques ;
xiii. garantir un minimum de règles de principe communes au niveau national ou fédéral pour assurer au niveau local des critères équivalents et un réseau suffisant de services permettant d’accéder aux mesures d’aide à la parentalité ;
xiv. assurer une coopération interministérielle en suscitant et coordonnant dans ce domaine les actions des différents ministères, services et organismes concernés, afin de mettre en œuvre une politique globale et cohérente ;
xv. faire l’objet d’une coordination sur le plan international en facilitant les échanges de connaissances, d’expériences et de bonnes pratiques en matière de parentalité positive.
3. Objectifs
Les gouvernements devraient organiser leurs politiques et leurs programmes en matière de parentalité positive de manière à aboutir à trois types de résultats :
i. créer les conditions nécessaires pour une parentalité positive, en s’assurant que tous ceux qui élèvent des enfants ont accès à des ressources adéquates et diversifiées (matérielles, psychologiques, sociales et culturelles), et que les besoins des enfants et des parents sont pris en compte dans les modèles de vie et les attitudes sociales ;
ii. supprimer les obstacles à une parentalité positive, quelle que soit leur origine. Les politiques de l’emploi, en particulier, devraient permettre une meilleure conciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle ;
iii. promouvoir la parentalité positive, en en développant la connaissance et en prenant toutes les mesures nécessaires pour la rendre concrète. Pour que les politiques de soutien à la parentalité soient efficaces, il appartient aux autorités publiques de promouvoir des initiatives visant la prise de conscience de la valeur et de l’intérêt d’une parentalité positive. Les gouvernements devraient avoir un rôle incitatif pour promouvoir la prise de conscience sur les questions de parentalité et pour régulariser la participation aux programmes sur ce sujet. L’information dans ce domaine devrait présenter des images variées de la parentalité afin d’éviter que les différences soient stigmatisées.
Les politiques et mesures devraient viser le développement harmonieux (dans toutes ses dimensions) et la bientraitance de l’enfant dans le respect de ses droits fondamentaux et de sa dignité. En priorité, des mesures devraient être prises pour éliminer toute négligence et toute violence physique ou psychologique (telles que l’humiliation, les traitements dégradants et le châtiment corporel).
Il conviendrait aussi de mettre en œuvre et de renforcer une politique adéquate visant un changement des comportements et des mentalités de la société en vue d’une meilleure prise en compte des besoins des enfants, des parents et des familles. Un effort particulier devrait être fourni afin de promouvoir des conditions d’exercice de l’activité professionnelle dans un cadre de travail et des services favorables aux familles.
4. Incorporer les droits de l’enfant dans les politiques publiques
Les politiques publiques de soutien à la parentalité devraient inclure les questions liées à l’enfance, en prenant en compte les besoins et les intérêts de tous les enfants, en portant une attention particulière aux besoins spécifiques liés à leur âge, leurs capacités et leur niveau de maturité. Dans ce but, les principes inscrits dans la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant devraient être respectés par tout un chacun, quel que soit le contexte, et servir d’orientation aux activités de tous les organismes, publics comme privés, travaillant dans ce domaine, en particulier pour les droits et principes généraux suivants :
i. droit à la non-discrimination ;
ii. respect de l’intérêt supérieur de l’enfant, qui devrait être primordial ;
iii. droit de l’enfant à la vie et au développement ;
iv. droit à la participation, à l’expression de son opinion, d’être entendu et considéré, de recevoir des informations et d’adhérer à des associations et autres organisations ;
v. droit à la protection et aux soins.
Pour la réalisation des droits de l’enfant, il est important qu’il grandisse dans un milieu familial favorable et dans un climat positif.
5. Prise en compte des responsabilités, des droits et des obligations des parents
Dans l’intérêt supérieur de l’enfant, les droits des parents devraient être également pris en compte de manière satisfaisante, y compris le droit à recevoir un soutien approprié des autorités publiques dans l’exercice des fonctions parentales. La responsabilité des parents – égale et partagée – est une contribution majeure à l’épanouissement harmonieux de la personnalité de l’enfant.
Une attention particulière devrait être portée au rôle important des pères dans la prise en charge et l’éducation de leurs enfants, en tenant compte du principe d’égalité des sexes, de l’impact sur les familles de la conciliation de la vie professionnelle et familiale ainsi que des ruptures familiales qui conduisent souvent les pères à vivre séparés de leurs enfants.
6. Composantes essentielles des politiques et mesures
Pour être efficaces, les politiques en faveur d’une parentalité positive devraient reposer sur le dialogue et la consultation avec les parents et sur leur participation volontaire afin d’aboutir à un véritable partenariat. En plus des éléments énoncés aux points 4 et 5 de cette recommandation, les composantes essentielles sont les suivantes :
6.1. Le soutien aux parents
i. à côté des mesures proposées par les autorités publiques pour offrir une aide aux parents, le soutien par d’autres entités (telles que les collectivités locales, les caisses d’allocations familiales et les associations) devrait également être reconnu et encouragé ;
ii. les politiques devraient chercher à développer trois grands types de soutien à la parentalité :
- informel : création et renforcement des liens sociaux existants et promotion de nouveaux liens entre les parents, leur famille et d’autres personnes de leur entourage ;
- semi-formel : fourniture des moyens aux associations et ONG travaillant avec les parents et les enfants, et aide au fonctionnement de groupes d’entraide ou de services de proximité ;
- formel : faciliter l’accès aux services publics.
6.2. La promotion d’une éducation aux droits de l’enfant et à une parentalité positive
i. il faudrait fournir aux parents les moyens de mieux connaître la nature de leur rôle (et son évolution), les droits de l’enfant, leurs responsabilités et les obligations qui en découlent, et leurs propres droits ;
ii. les gouvernements devraient également élaborer des lignes directrices globales et des actions d’accompagnement spécifiques pour les assister dans des situations de vie éprouvantes, dans la résolution de conflits et la gestion de la colère, en recourant à des approches non violentes et à des techniques de médiation ;
iii. des programmes de prévention des différentes formes de maltraitances infantiles devraient être promus, et les parents devraient être sensibilisés à cette grave problématique et à ses conséquences sur le développement de l’enfant ;
iv. il faudrait également fournir aux enfants une éducation à leurs droits et devoirs afin de les sensibiliser à la parentalité positive et à leur rôle en tant qu’enfant au sein d’une famille et de la société.
6.3. La conciliation vie familiale et professionnelle
i. les autorités publiques devraient créer les conditions nécessaires – et les employeurs devraient être encouragés – à mettre en œuvre une meilleure conciliation de la vie familiale et professionnelle (comme la flexibilité du temps du travail, l’aménagement des horaires de travail et scolaires, les politiques en matière de congés, les services d’accueil de l’enfant, les mesures pour pouvoir s’occuper d’un enfant handicapé ainsi que d’un enfant malade, etc.) ;
ii. les partenaires sociaux devraient être encouragés à négocier et à développer des politiques sur mesure adaptées aux besoins spécifiques de chaque entreprise et de ses employés ;
iii. les bonnes pratiques prouvent aux employeurs qu’une politique globale d’équilibre entre travail et vie familiale crée une situation de « gagnant-gagnant » au sein de leurs entreprises.
6.4. Les politiques au niveau local
Il est particulièrement important d’agir sur le plan local afin de répondre au mieux aux besoins et aux caractéristiques des populations concernées. La coopération et la coordination au niveau national ou fédéral et au niveau local, ainsi qu'entre ces niveaux, est nécessaire afin d’offrir un meilleur service aux familles et d’optimiser les moyens existants et leur utilisation. Les procédures administratives pour la fourniture de services devraient être suffisamment souples pour permettre un traitement équitable pour toutes les familles.
7. Adaptation ciblée des politiques et mesures
Une attention particulière devrait être portée aux situations sociales et économiques difficiles ainsi qu’aux cas de crise au sein de la famille, nécessitant un soutien plus spécifique.
Il est également essentiel de compléter les politiques générales par une approche plus ciblée. Il est en effet plus éprouvant d’être parent dans certaines situations où à certaines périodes de la vie. Malgré les variations d’un pays à l’autre, il convient de répondre en particulier aux besoins :
i. des parents pour la première fois ;
ii. des parents adolescents ;
iii. des familles confrontées à des besoins particuliers ;
iv. des familles en situation socio-économique difficile.
Dans le cas de parents séparés, les politiques de soutien devraient viser en particulier à maintenir les liens entre les enfants et leurs deux parents, sous réserve de l’intérêt supérieur de l’enfant. L’accès à une aide professionnelle devrait être fourni et une attention particulière devrait être portée au cas où les parents proviennent de milieux culturels différents ou sont de nationalités différentes.
Les pouvoirs publics devraient stimuler et faciliter la création de réseaux d’associations d’entraide des familles, et mettre à disposition des parents des lieux où ils pourraient se rencontrer pour discuter – avec des professionnels, si nécessaire – de la parentalité et fournir aux parents des services de soutien adéquats tels qu’une ligne d’aide téléphonique gratuite et des services-conseils.
8. Parentalité en situation d’exclusion sociale
La parentalité dans des conditions d’exclusion sociale, ou de risque d’exclusion sociale, peut s’avérer particulièrement difficile et une attention particulière devrait être portée aux besoins des enfants et des familles dans cette situation, spécialement pour ce qui est :
i. de développer des initiatives à long terme pour un soutien adapté qui donne aux enfants et aux parents les mêmes chances qu’aux autres familles ; ce soutien devrait leur être fourni dans leurs milieux de vie, domicile ou autres lieux qu’ils fréquentent, et prendre en considération les peurs – notamment la peur du retrait de leurs enfants – que peuvent avoir des parents en situation d’exclusion sociale vis-à-vis des services sociaux ;
ii. de mettre en place des moyens suffisants pour soutenir les parents et leur permettre d’acquérir les compétences nécessaires à l’exercice de leurs responsabilités vis-à-vis de leurs enfants ;
iii. d'assurer l’accès aux droits sociaux (y compris le droit à un revenu suffisant, à la santé, à l’éducation, au logement et à l’emploi) et la même qualité de services ciblés que ceux dont jouissent les autres familles ;
iv. de veiller à ce que les familles et les enfants en situation d’exclusion soient considérés dans leur contexte social (incluant la famille élargie, la communauté environnante et leurs réseaux de relation) et bénéficient de services, y compris de proximité, en accord avec leurs besoins et de la même qualité que les autres familles ;
v. de bâtir une relation de confiance avec les familles et permettre aux parents de reprendre la maîtrise de leur vie ;
vi. d'organiser des formations conjointes pour les parents et les professionnels afin d’arriver à une meilleure connaissance et compréhension mutuelle, de bâtir un projet commun dans l’intérêt supérieur de l’enfant, et de permettre aux intervenants de mieux appréhender le vécu des familles et de mieux comprendre leur projet familial afin de fonder sur lui leurs pratiques ;
vii. d'assurer un soutien personnel et collectif aux professionnels pour qu’ils puissent mieux accompagner les personnes en très grande difficulté et prendre les initiatives nécessaires afin de mettre en place de nouvelles manières de faire ;
viii. de prendre des mesures ad hoc pour éviter le risque de grande marginalisation des familles migrantes ;
ix. d'éviter les mesures et pratiques administratives stigmatisantes afin que les enfants et les parents ne se sentent pas traités différemment parce que leur famille est moins aisée que d’autres ;
x. de prendre des mesures pour prévenir le décrochage scolaire, un moyen efficace de contrecarrer la détresse familiale.
9. Orientations qualitatives pour les professionnels
Pour l’application des droits et principes énoncés, il est nécessaire de définir des normes et des critères de référence. Des lignes directrices définissant l’orientation de leurs prestations – telles celles du Conseil de l’Europe sur la parentalité positive – devraient être adressées aux professionnels et aux praticiens (y compris ceux ne travaillant pas directement avec des enfants, mais dont le travail peut avoir des conséquences sur leurs droits). Une attention particulière devrait être portée :
i. au principe d’équité et d’accessibilité qui devrait guider toute action ;
ii. à l’importance de responsabiliser les parents et de les considérer comme des partenaires. Le partenariat implique une reconnaissance des savoirs et de l’expérience des parents, et la connaissance de leurs enfants ;
iii. à appliquer la notion de partenariat à la coopération et à la coordination interdisciplinaires entre organismes en précisant les domaines d’intervention spécifiques à chaque service et en prévoyant un partage des ressources disponibles et un travail en réseau multidisciplinaire ;
iv. à la mise en œuvre de prestations élargies en termes de soutien et d’assistance, en encourageant l’initiative des familles sans créer une dépendance excessive. Les points forts et les ressources des familles devraient par conséquent être aidés financièrement. Cela implique également que les professionnels devraient épauler les parents, dans une approche non stigmatisante et non porteuse de jugement ;
v. au renforcement de la confiance en soi des parents, à la mise en valeur de leurs compétences et de leur potentiel, et à l’éveil de l’intérêt des parents à s’informer et à se former ;
vi. à l’importance de donner la possibilité d’exprimer leurs sentiments et leurs besoins aux enfants, en particulier ceux en bas âge et ceux ayant des problèmes de communication ;
vii. aux prestations de services et aux pratiques professionnelles, en garantissant :
- une formation rigoureuse des professionnels concernés ;
- une évaluation constante, externe comme interne (autoévaluation) ;
- la continuité des actions ;
- des réponses fondées sur la compréhension de l’enfant et des familles dans leur contexte ;
viii. à l’élaboration et la diffusion de méthodes visant à repérer les facteurs de risque en ce qui concerne le défaut de soins parentaux à l’intention des services sociaux et des professionnels de la santé, de la jeunesse, des enseignants et des personnes chargées de l’accueil d’enfants, afin de les aider à identifier et à accompagner les familles présentant de tels problèmes. Une meilleure coordination entre les services d’aide aux familles devrait être constamment recherchée ;
ix. dans le cas où des mesures sont nécessaires pour séparer l’enfant des parents, à la coordination entre leur mise en œuvre et le travail avec la famille d’origine (particulièrement en partenariat avec les parents), afin que cette séparation soit préparée, ou mieux préparée, et assumée par chacun comme un outil dans l’intérêt supérieur de l’enfant; l’objectif étant, dans la mesure du possible, le retour de l’enfant dans son milieu familial.
10. Milieu scolaire et accueil des enfants
L’aide à la scolarisation et l’aide à la parentalité devraient parfois aller de pair (en particulier lorsque les enfants manquent de racines stables ou n’ont pas de domicile permanent – par exemple les enfants roms ou tsiganes, les enfants de migrants) ; l’insertion scolaire et l’accueil d'enfants ainsi que le dialogue avec les parents devraient être favorisés, avec une attention particulière pour les familles en situation difficile et pour celles qui ont des besoins particuliers.
11. Messages clés à l’attention des parents et de ceux qui sont impliqués dans la prise en charge et l’éducation d’enfants
Des messages clés sur un comportement éducatif positif devraient être délivrés aux parents et à toute personne impliquée quotidiennement dans la prise en charge et l’éducation des enfants (telles que les assistantes maternelles ou les enseignants). Ces messages devraient préciser les attitudes à adopter pour respecter l’enfant en tant que personne, encourager sa participation, et tenir compte des droits et des devoirs des parents. Ils devraient être élaborées en concertation avec les différents acteurs concernés, en particulier les parents, les prestataires de services et les enfants, et s’accompagner d’un suivi afin de veiller à ce qu’ils soient efficaces et respectés.
12. Coopération internationale
Des mesures devraient être mises en place de façon à améliorer la coopération internationale et les échanges de bonnes pratiques en matière de parentalité.