Délégués des Ministres

Ordre du jour annoté

CM/Del/OJ/DH(2008)1028 Rubrique 4.2 PUBLIC    27 juin 2008

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1028e réunion (DH), 3-5 juin 2008

- Ordre du jour annoté[1]

- Décisions

Rubrique 4.2

Version destinée à l’information publique

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RUBRIQUE 4 - AFFAIRES SOULEVANT DES QUESTIONS SPÉCIALES (MESURES DE CARACTÈRE INDIVIDUEL NON ENCORE DÉFINIES OU PROBLÈMES SPÉCIAUX)

(Addendum 4 pour tout ou partie de ces affaires)

Action

Les Délégués sont invités à procéder au contrôle des mesures d’exécution dans les affaires suivantes, lesquelles soulèvent de multiples problèmes. Des informations supplémentaires sur tout ou partie des affaires énumérées ci-dessous paraîtront à l’Addendum 4. Les Délégués sont invités à décider au cas par cas de la reprise de l’examen de ces affaires.


SOUS-RUBRIQUE 4.2 – MESURES DE CARACTÈRE INDIVIDUEL ET/OU PROBLÈMES GÉNÉRAUX

- 3 affaires contre l’Albanie

35853/04          Bajrami, arrêt du 12/12/2006, définitif le 12/03/2007, révisé le 18/12/2007, définitif le 18/03/2008

Cette affaire concerne la violation du droit du requérant au respect de sa vie familiale en raison du manquement des autorités albanaises à leur obligation prendre les mesures nécessaires en vue du retour de sa fille (violation de l'article 8).

En janvier 2004, la fille du requérant fut emmenée par sa mère en Grèce sans son consentement. Le 4/02/2004, le tribunal du district de Vlora prononça le divorce du requérant et lui confia la garde de l'enfant. Bien que le requérant ait entrepris régulièrement des démarches pour obtenir le retour de sa fille, cet arrêt n'a jamais été exécuté. Selon l'huissier, son exécution demeurait impossible car l'enfant ne se trouvait pas en Albanie.

La Cour européenne a noté que l'Albanie n'avait pas ratifié les instruments internationaux pertinents visant à assurer la réunification des parents avec leurs enfants, notamment la Convention de la Haye sur les aspects civils de l'enlèvement international des enfants de 1980. Toutefois, indépendamment de cela, la Cour a constaté que le système juridique albanais ne constituait pas un cadre offrant au requérant la protection pratique et effective requise par l'obligation positive de l'Etat consacrée par l'article 8.

Mesures de caractère individuel : En juin 2007, les autorités albanaises ont déposé une demande de révision de l’arrêt de la Cour européenne du fait du décès du requérant le 10/11/2006, soit avant que la Cour européenne n’ait rendu son arrêt. Par conséquent, le 18/12/2007 la Cour européenne a révisé son arrêt et a conclu que la satisfaction équitable (sommes dues au titre du préjudice moral et des frais et dépens) devait être versée au(x) héritier(s) du requérant, à identifier selon le testament de ce dernier ou, conformément à la législation nationale, en cas d’absence de testament.

Evaluation : dans ces circonstances, aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général : La Cour européenne a observé que la législation albanaise ne prévoyait aucun recours spécifique pour prévenir ou sanctionner les enlèvements d'enfants sur le territoire albanais. Elle a remarqué en particulier que l'Albanie n'était pas partie à la Convention de la Haye et n'avait pas encore mis en œuvre la Convention de l'ONU du 20/11/1989 sur les droits de l'enfant. A cet égard, la Cour a rappelé que, bien que la Convention n'oblige pas les Etats à ratifier les conventions internationales, elle leur fait obligation de prendre toutes les mesures nécessaires en vue de réunir parents et enfants en exécution d'un jugement définitif rendu par une juridiction interne.

• Informations fournies par les autorités albanaises : L’arrêt de la Cour européenne a été traduit en albanais et publié au Journal Officiel, n° Extra juillet 2007. Il a été demandé aux autorités du Bureau des huissiers de traiter avec une attention particulière toutes les affaires concernant l’exécution des décisions judiciaires sur la garde des enfants.

De surcroît, le 04/05/2007 l’Albanie a adhéré à la Convention à la Haye qui est entrée en vigueur à son égard le 01/08/2007 (pour plus de détails voir le site Internet de la Conférence de la Haye sur le droit international privé : www.hcch.net).

Des informations sont attendues sur la question de savoir si d’autres mesures ont été envisagées et/ou adoptées en vue d'assurer une protection efficace des droits des parents à être réunis avec leurs enfants. De plus, une confirmation par écrit de la diffusion de l’arrêt de la Cour européenne (aux huissiers, magistrats et à la police) est attendue.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations complémentaires à fournir sur les mesures générales.

7352/03            Beshiri et autres, arrêt du 22/08/2006, définitif le 12/02/2007

Cette affaire concerne le défaut d'exécution d'une décision judiciaire définitive du 11/04/2001 concernant le droit du requérant à une compensation pour des terrains qui avaient été nationalisés (violation de l'article 6§1 et de l'article 1 du Protocole 1).


La Cour européenne a observé que l'exécution du jugement en question a tardé pendant plus de cinq ans, situation au sujet de laquelle le gouvernement albanais n'a fourni aucune justification plausible. Invoquer - comme le fait le Gouvernement - le manque de fonds publics ne suffit pas pour justifier cet état de choses. En outre, en omettant d'exécuter le jugement du 11/04/2001, les autorités ont laissé les requérants dans une situation d'incertitude quant à leur possibilité de se voir réaccorder leurs droits de propriété et, pendant une période considérable, les ont empêchés d'obtenir le paiement de la compensation et de jouir de la possession de leur argent.

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé aux requérants une somme globale à titre de satisfaction équitable pour le dommage matériel et moral subi, y inclus une somme correspondant à la valeur actuelle des parcelles.

Evaluation: dans ces circonstances, aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général :

1) Violation de l'article 6§1: cette affaire à rapprocher de l'affaire Qufaj (rubrique 4.2).

2) Violation de l'article 1 du Protocole n° 1: La Cour européenne a noté que la législation albanaise à l'époque des faits laissait le droit de déterminer les formes appropriées d'indemnisation à la discrétion des autorités administratives, lorsque la restitution du bien original était impossible. Dans la présente affaire, le jugement de la cour d'appel de Tirana pouvait être interprété comme ordonnant aux autorités de proposer aux requérants une forme d'indemnisation autre que la restitution de leurs droits de propriété (§ 62).

Un projet d'amendement à la loi sur la restitution des biens et l'indemnisation était pendant devant le Parlement lorsque la Cour européenne a rendu son arrêt (§ 29).

• Informations fournies par les autorités albanaises (lettres des 08/06/2007 et 25/10/2007) :

a) Publication et diffusion de l’arrêt : L’arrêt de la Cour européenne a été traduit en albanais et publié au Journal Officiel, N°-Extra juillet 2007. L’Agent du Gouvernement l’a également diffusé auprès des autorités judiciaires, législatives et exécutives compétentes.

La confirmation écrite de la diffusion de l’arrêt est attendue.

b) Amendements législatifs: Le gouvernement est en train d’évaluer les amendements à la loi sur la restitution des biens et l’indemnisation adoptés au cours des 12 derniers mois et devait préparer un document à cet égard avant la fin de l’année 2007.

c) Autres mesures visant à améliorer et accélérer le processus de restitution des biens et d’indemnisation: L’Agent du Gouvernement coordonne les travaux d’un groupe d’experts provenant de différentes institutions impliquées dans le processus de la restitution des biens et de l’indemnisation. Ce groupe a été établi en vue de discuter des problèmes de coordination identifiés lors de sa mise en œuvre ainsi que de faire des suggestions au Gouvernement afin de faciliter et d’accélérer ce processus. Il a préparé un document de travail qui servira de base pour les propositions faites à cet égard au Gouvernement. Ces propositions devaient être soumises au gouvernement avant fin mars 2008.

Par arrêté du 18/03/2007, le Premier Ministre a convoqué un panel composé des principaux décideurs ; ce panel a pour mandat de discuter de la position du Gouvernement sur les affaires pendantes devant la Cour européenne concernant le droit de propriété.

• Les 23-25/01/2008, des consultations bilatérales ont eu lieu à Tirana entre le Secrétariat et les autorités albanaises en vue de discuter des mesures envisagées et adoptées pour prévenir de nouvelles violations similaires.

Des informations sont attendues sur :

- les suites données au projet d'amendement de la loi sur la restitution des biens et l'indemnisation,

- les résultats du travail du groupe d’experts et du panel mentionnés ci-dessus,

- toute autre mesure éventuellement envisagée ou adoptée en vue de prévenir de nouvelles violations similaires.

54268/00          Qufaj Co. Sh.p.k., arrêt du 18/11/2005, définitif le 30/03/2005

Cette affaire concerne une atteinte au droit de la société requérante à un procès équitable en raison de l’inexécution par les autorités albanaises d’une décision judiciaire définitive (violation de l’article 6§1).

Par un arrêt du 23/02/1996, la cour d’appel de Tirana avait condamné la commune de Tirana à verser une indemnisation à la société requérante pour le préjudice résultant d’un refus de délivrer un permis de construire. Toutefois, cet arrêt n’a pas été exécuté sous prétexte d’un manque de ressources financières de l’Etat, malgré diverses démarches entreprises par la société requérante.


La société requérante a donc saisi la Cour constitutionnelle mais celle-ci a déclaré que l’exécution des décisions judiciaires ne relevait pas de sa compétence.

La Cour européenne a rappelé que l’exécution d’une décision judiciaire doit être considérée comme faisant partie intégrante du « procès » au sens de l’article 6 et que le retard dans l’exécution peut avoir pour conséquence une atteinte à la substance même du droit à un procès équitable.

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a accordé une satisfaction équitable à la requérante au titre du préjudice moral et matériel, couvrant les sommes en jeu dans la décision inexécutée.

Evaluation : aucune mesure complémentaire ne semble requise.

Mesures de caractère général : Le 02/06/2005, le Secrétariat a adressé une lettre à la délégation albanaise en vue de la présentation d’un plan d’action pour l’exécution de cet arrêt. Des clarifications ont été demandées sur les causes de la violation constatée et sur la question de savoir quelles mesures étaient envisagées en vue d’assurer la mise en œuvre des décisions judiciaires internes.

Le Secrétariat a également fait référence à l’arrêt de la Cour européenne qui a indiqué que le recours devant la Cour constitutionnelle en cas de non-exécution d’une décision judiciaire n’était que théorique. Selon la Cour européenne, les règles du droit albanais concernant le droit à un procès équitable devraient être interprétées de manière à assurer un recours effectif en cas de violation alléguée de l’article 6§1 de la Convention (§§ 40-42).

Lors de la 1007e réunion (octobre 2007), les autorités albanaises ont annoncé certaines mesures générales envisagées et/ou prises. Elles se sont également engagées à présenter un calendrier pour l’exécution de cet arrêt.

• Informations fournies par les autorités (lors de la 1007e réunion et par lettre du 25/10/2007) :

            1) Origine de la violation : la violation constatée dans cette affaire résulte essentiellement du défaut de fonds de la municipalité de Tirana. Cela n’est pas dû à la division des compétences des institutions budgétaires : selon une décision du Conseil des Ministres du 02/06/1998, les institutions budgétaires de l’Etat sont tenues de s’acquitter de leurs obligations financières au titre de l’exécution des décisions judiciaires en ayant recours à leurs propres ressources budgétaires.

            2) Publication et diffusion : L’arrêt de la Cour européenne a été traduit en albanais et publié au Journal officiel, n° supplémentaire de juillet 2007. Il a également été envoyé, par lettre officielle du 22/11/2004, au Premier Ministre, au Président de la Haute Cour de justice, au Président de la Cour constitutionnelle, au Ministre de la Justice, au Ministre des Finances, au Ministre de l’intégration européenne et à la municipalité de Tirana.

De plus l’Agent du gouvernement a traduit et transmis les Conclusions de la Table ronde (Strasbourg 21-22/06/2007 sur « Non-exécution de décisions judiciaires internes dans les Etats membres : mesures générales visant à l'exécution des arrêts de la Cour européenne » CM/Inf/DH(2007)33)) au Ministre de la Justice (Département général de la codification, Bureau des huissiers, Commission des réformes de la loi), au Parlement, au Barreau et à la société civile.

            3) Mesures relatives au problème de l’insuffisance de fonds budgétaires : Un groupe de travail a été mis en place par un ordre du Premier Ministre du 14/07/2003 en vue de faire un bilan de la situation s’agissant de l’inexécution des décisions judiciaires. La mise en œuvre de ses recommandations sera accélérée.

Des fonds spéciaux seront également attribués au budget de l’Etat et aux institutions budgétaires en vue du paiement des dettes résultant de l’exécution de décisions judiciaires définitives.

            4) Réforme de l’organisation des huissiers et autres réformes législatives :

Certaines mesures sont prévues pour améliorer l’organisation et le fonctionnement du Bureau des huissiers par le biais de l’amélioration de certaines lois nationales :

-          amendement aux dispositions du Code du procédure civile relatives à l’exécution des décisions judiciaires nationales ;

-          amendement à la loi sur l’organisation et le fonctionnement du Bureau général des huissiers ;

-          projet d’ordre sur l’application de tarifs uniformisés concernant le service des huissiers ;

-          amendement à la réglementation sur le fonctionnement du Conseil des huissiers (règlement interne du service des huissiers).

Les experts du Ministère de la Justice sont en train de travailler sur l’harmonisation des procédures actuelles en matière d’exécution forcée avec les exigences de l’article 6§1 de la Convention. Les premiers projets d’amendements devaient être prêts début 2008.

            5) Changement de la pratique constitutionnelle : Dans sa décision n° 6 du 31/03/2006 dans l’affaire Memishaj, la Cour constitutionnelle a estimé que la non-exécution d’une décision judiciaire pouvait être constitutive d’une violation du droit à un procès équitable.


Le 26-27/09/2007, un séminaire a eu lieu à Tirana portant sur l’amélioration de la mise en œuvre de la jurisprudence de la Cour européenne par le biais du renforcement de la coopération entre l’Agent du gouvernement et les autorités nationales. Lors de ce séminaire, le président de la Cour constitutionnelle a déclaré que la pratique de la Cour constitutionnelle devait être changée en vue de se conformer à l’arrêt de la Cour européenne rendu dans cette affaire.

Par conséquent, la Cour constitutionnelle est désormais compétente en matière de recours portant sur l’inexécution de décisions judiciaires nationales.

                6) Groupe de travail sur l’exécution des arrêts de la Cour européenne : En 2007, les autorités ont décidé de procéder à un examen de la législation nationale en vue d’améliorer la procédure d’exécution des arrêts de la Cour européenne. Dans ce contexte, un groupe de travail, composé de représentants du Ministère de la Justice, du Ministère des Finances et de la municipalité de Tirana, devait être mis en place pour clarifier la division des compétences dans des situations similaires à la présente affaire. L’exécution des décisions judiciaires nationales constitue une des priorités du programme du gouvernement.

Le 23-25/01/2008 des consultations bilatérales ont eu lieu à Tirana entre le Secrétariat et les autorités albanaises en vue de discuter des mesures envisagées et prises pour éviter de nouvelles violations similaires.

Evaluation : Le Secrétariat note que bien que les autorités albanaises examinent la question de la non-exécution des décisions judiciaires nationales, jusqu’à présent aucun calendrier n’a été fourni pour la mise en œuvre des mesures annoncées.

Des informations sont attendues sur le suivi donné aux réformes annoncées par les autorités (et en particulier sur les mesures annoncées aux points 3, 4 et 6 ci-dessus).

Les Délégués,

1.             notent avec préoccupation que le problème de la non-exécution des décisions judiciaires définitives en Albanie revêt un caractère structurel ;

2.             relèvent avec intérêt à cet égard que les autorités albanaises envisagent l’adoption de mesures législatives visant à assurer l'exécution des décisions judiciaires internes, et notamment une réforme du service des huissiers ;

3.             notent que des informations ont également été fournies sur les autres mesures générales visant à remédier à la violation de l’article 1 du Protocole n° 1 constatée dans l’affaire Beshiri et autres ;

4.             encouragent les autorités à poursuivre leurs efforts en vue de définir et d’adopter le plus rapidement possible toutes les mesures requises dans ces affaires ;

5.             décident de reprendre l'examen ces affaires lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations complémentaires à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire, et au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière de l’évaluation du Secrétariat des informations fournies sur les mesures générales et d'informations complémentaires à fournir sur la suite donnée aux mesures déjà annoncées.

- 1 affaire contre l’Arménie

36549/03           Harutyunyan, arrêt du 28/06/2007, définitif le 28/09/2007

L’affaire concerne une atteinte au droit à un procès équitable du fait de l’utilisation, lors du procès du requérant, de ses propres déclarations et de celles de deux témoins qui avaient été obtenues sous la torture (violation de l’article 6§1).

En avril 1999 le requérant, à l’époque des faits enrôlé dans l’armée, fut accusé du meurtre d’un militaire et fut, par la suite déclaré coupable d’assassinat et condamné à une peine d’emprisonnement de 10 ans. La Cour européenne a relevé que les aveux du requérant et des deux témoins avaient été obtenus sous la contrainte, ce que les juridictions internes ont confirmé en déclarant les policiers mis en cause, coupables de mauvais traitements. La Cour a conclu que, indépendamment de l’influence que ces déclarations obtenues sous la torture avaient pu avoir sur l’issue de la procédure pénale contre le requérant, l’utilisation de telles preuves rendait l’ensemble de son procès inéquitable.

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a alloué au requérant une somme pour préjudice moral.

Le requérant a été déclaré coupable d’assassinat et condamné à une peine d’emprisonnement de 10 ans. Il a été détenu du 17/04/1999 au 22/12/2003 date à laquelle il a été placé en libération conditionnelle.

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées pour effacer les conséquences de la violation, en particulier des informations sur la possibilité pour le requérant d’obtenir la réouverture de la procédure incriminée.

Mesures de caractère général :

Informations fournies par les autorités arméniennes (23/01/2008) : l’arrêt de la Cour européenne a été traduit et publié au Journal officiel de la République d’Arménie n° 65 du 12/12/2007 (www.moj.am), sur le site officiel du bureau du Procureur de la République d’Arménie (www.genproc.am) ainsi que sur le site officiel de l’ordre judiciaire de la République d’Arménie (www.court.am).

Des informations sont attendues sur les autres mesures prises ou envisagées afin d’éviter la répétition de la violation constatée. Il est en outre rappelé que la diffusion de l’arrêt de la Cour européenne a été demandée afin que l’attention des tribunaux militaires et civils et des services de police soit attirée sur les exigences de la Convention.

 

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.


- 10 affaires contre l’Autriche

12643/02          Moser, arrêt du 21/09/2006, définitif le 21/12/2006[2]

23960/02          Zeman, arrêt du 29/06/2006, définitif le 29/09/2006 et of 10/01/2008 (article  41) - Règlement amiable[3]

                       - Affaire concernant le défaut d’audience orale

30003/02          Stojakovic, arrêt du 09/11/2006, définitif le 09/02/2007[4]

2884/04            Ortner, arrêt du 31/05/2007, définitif le 31/08/2007

L’affaire concerne la durée excessive d’une procédure de remembrement devant les autorités et la Cour administratives. La période prise en considération par la Cour européenne a débuté le 1/03/1999 et la procédure était toujours pendante devant les autorités administratives lorsque la Cour européenne a rendu son arrêt (plus de 12 ans) (violation de l’article 6§1).

Mesures de caractère individuel :

Des informations sont attendues sur l’état de la procédure interne ainsi que sur les mesures prises pour son accélération le cas échéant.

Mesures de caractère général : Cette affaire est à rapprocher de l’affaire G.S. (Résolution finale CM/ResDH (2004)77) pour laquelle le Parlement autrichien a adopté la loi de 2001 sur la réforme administrative (entrée en vigueur le 20/04/2002)) visant à alléger la charge de travail de la Cour administrative et à accélérer les procédures administratives. Elle est également à rapprocher de l’affaire Alge (Résolution finale CM/ResDH(2007)110 qui a fait le bilan des mesures générales additionnelles prises depuis l’adoption de la Résolution finale CM/ResDH (2004)77 en vue de réduire l’arriéré de la Cour administrative.

• Des informations ont été reçues en avril 2008, démontrant une tendance positive en matière de durée de procédures et indiquant les mesures prises récemment pour diminuer l’arriéré d’affaires à traiter devant la Cour administrative. Pour une évaluation détaillée de ces informations, voir le groupe Jancikova (rubrique 4.2).

Cependant étant donné que la violation s’est produite dans cette affaire après l’adoption de la Résolution CM/ResDH (2004)77, des informations sont attendues sur toute autre mesures prise ou envisagée pour éviter des durées de procédures excessives devant les autorités administratives. Sont également attendues la publication et la diffusion de l’arrêt de la Cour européenne à l’attention des juridictions et autorités concernées afin de les sensibiliser sur les exigences de la Convention découlant de cette affaire.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

- Affaires de durée de procédures judiciaires concernant le bien-fondé d’accusations pénales devant les juridictions administratives

56483/00          Jancikova, arrêt du 07/04/2005, définitif le 07/07/2005

32407/04          Donner, arrêt du 22/02/2007, définitif le 22/05/2007

37301/03          Hauser-Sporn, arrêt du 07/12/2006, définitif le 23/05/2007

18015/03          Schütte, arrêt du 26/07/2007, définitif le 26/10/2007

18294/03          Stempfer, arrêt du 26/07/2007, définitif le 26/10/2007

8140/04            Vitzthum, arrêt du 26/07/2007, définitif le 26/10/2007

Ces affaires concernent la durée excessive d'une procédure relative au bien fondé d'une accusation pénale devant les autorités et juridictions administratives (violations de l’article 6§1) et l’absence d’un recours effectif (violations de l’article 13).

Dans l’affaire Jancikova, la procédure a commencé en février 1993 et s'est terminée en septembre 1999 (soit plus de 6 ans), avec des périodes d'inactivités de deux ans pour ce qui est des autorités et d'un an et presque quatre mois pour ce qui est de Cour Administrative.


De plus, la requérante n'a pas bénéficié d'un recours effectif contre la durée excessive de procédure. A cet égard, l'article 51§7 du code des infractions administratives qui garantit une décision en appel dans les 15 mois, n'était pas applicable en l'espèce car plus d'une partie avait le droit de faire appel. En outre, l'article 31§3 du code des infractions administratives n'assure pas la notification par écrit la décision du panel administratif indépendant dans le délai de trois ans prévu car en vertu de la loi autrichienne, seul le prononcé public doit être fait dans ce délai.

Dans l’affaire Hauser-Sporn la procédure a commencé en Mars 1995 devant le tribunal d’instance. Le requérant a fait appel devant la Cour Constitutionnelle et finalement devant la Cour Administrative qui a rejeté son recours. La décision finale a été notifiée à l’avocat du requérant le 6/11/2003. L’affaire est restée pendante pendant plus que cinq ans devant les cours supérieures.

Dans l’affaire Donner la procédure a commencé en automne 1989 avec l’ouverture d’une enquête par l’administration fiscale de Salzburg, suivie d’une enquête pénale ouverte par le Parquet. L’affaire est restée pendante dans son ensemble plus de 6 ans devant les autorités d’enquêtes. De plus, alors que l’affaire était pendante devant un tribunal, l’affaire n’a pas été traitée entre la fin de l’année 2000 et 2002. La décision finale a été rendue en 2004. Alors que l’affaire était pendante devant la cour régionale, le requérant aurait pu se prévaloir de la procédure prévue par l’article 91 de la loi sur les tribunaux laquelle pouvait être considérée comme un recours effectif. La Cour européenne a cependant basé son constat de violation de l’article 6 au vu du retard substantiel qui avait eu lieu devant les autorités d’enquêtes. Le recours hiérarchique prévu à l’article 37 de la loi sur les poursuites pénales n’a pas été considéré comme un recours effectif par la Cour européenne.

Les affairesSchutte, Stempfer et Vitzthum concernent la durée de procédures pénales relatives à des infractions au code de la route. Dans l’affaire Schutte, la procédure a duré 5 ans, dans l’affaire Stempfer elle a duré 7 ans et 2 mois et demi, et dans l’affaire Vitzhum elle a duré 4 ans et 2 mois.

Mesures de caractère individuel : Aucune (les procédures sont terminées dans les 6 affaires).

Evaluation: aucune mesure additionnelle de caractère individuel n’est nécessaire.

Mesures de caractère général :

            1) Durée excessive des procédures devant la Cour administrative : Des mesures législatives ont été adoptées en 2002 (voir l'affaire G.S., arrêt du 21/12/1999, Résolution ResDH(2004)77) et d'autres mesures générales ont été adoptées dans les affaires Alge et Schluga, Résolution CM/ResDH(2007)110). Le rapport annuel de la Cour constitutionnelle fait état d’une tendance positive s’agissant de la durée moyenne des procédures. Le nombre total d’affaires pendantes devant la Cour administrative a diminué de manière significative au fil des dernières années. Cependant, le nombre important de plaintes récentes au titre de la durée excessive des procédures constitue toujours un problème (voir le rapport annuel de 2006 de la Cour administrative, p. 9). Pour réduire la charge de travail de la Cour administrative, une nouvelle cour a été créée pour traiter de questions en matière de droit d’asile. Ce type d’affaire constitue une part considérable de la surcharge de travail pour la Cour administrative.

Les arrêts dans les affaires Jancikova, Hauser-Sporn, Schutte, Stempfer et Vitzthum ont été transmis à la Présidence de la Cour administrative et constitutionnelle. En outre ces arrêts ont été transmis à un certain nombre d’autorités publiques, au niveau fédéral et régional, et publiés sur le site Internet du Service constitutionnel de la chancellerie autrichienne (www.bka.gv.at) ainsi que sur le site de l’Institut autrichien des droits de l’homme (www.menschenrechte.ac.at).

Des informations sont attendues sur les nouveaux développements relatifs à la durée des procédures devant la Cour administrative, en particulier après la mise en place en juillet 2008 de la nouvelle Cour compétente en matière de droit d’asile

            2) Violation de l'article 13 :

Des informations écrites sont attendues sur les mesures existantes ou envisagées afin de protéger les individus efficacement contre la durée excessive des procédures administratives pénales.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales.


- 2 affaires contre l’Azerbaïdjan

34445/04          Mammadov (Jalaloglu), arrêt du 11/01/2007, définitif le 11/04/2007

L'affaire concerne la torture infligée au requérant - secrétaire général du Parti démocratique azerbaïdjanais à l'époque des faits - lors d'une garde à vue en octobre 2003 (violation de l'article 3).

L'affaire concerne également l'absence d'enquête effective sur les allégations de mauvais traitements du requérant (violation de l'article 3) en particulier dans la mesure où les autorités n'ont pas procédé a une expertise médico-légale au moment opportun et dans la mesure où l'enquête pénale qui a suivi n'était pas satisfaisante (voir § 74 à 79 de l'arrêt de la Cour).

Enfin l'affaire concerne une atteinte au droit à un recours effectif (violation de l'article 13), les juridictions internes s'étant contentées d'entériner le résultat de l'enquête pénale, sans se livrer à une appréciation indépendante des faits de la cause

Mesures de caractère individuel : La Cour a alloué au requérant une satisfaction équitable au titre du préjudice moral. La position établie du Comité des ministres dans ce type d'affaire est qu'il existe une obligation continue de mener une enquête dans la mesure où une violation (procédurale) de l'article 3 a été constatée.

Informations fournies par les autorités azerbaïdjanaises (12/10/2007): « Conformément au « remède législatif pertinent » de la République d’Azerbaïdjan et sur la base d’une plainte du requérant, l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme a été présenté à la Cour Suprême de la République d’Azerbaïdjan pour qu’elle annule la décision prise par le Tribunal de district de Nasimi le 18 février 2004 et par la Cour d’appel d’Azerbaïdjan le 17 mars 2004 » (ces décisions concernent la plainte du requérant relative à l’illégalité du refus du ministère public d’engager des poursuites pénales à la suite de ses allégations de mauvais traitements).

Aucune information n’est parvenue au Secrétariat depuis le 12/10/2007.

Des informations sont attendues sur le sort réservé au recours introduit par le requérant devant la Cour suprême et sur la réouverture effective de l’enquête concernant les allégations de mauvais traitements du requérant. En outre des informations détaillées sont attendues sur le « remède législatif pertinent » mentionné dans les informations transmises par les autorités azerbaïdjanaises.

Mesures de caractère général :

Informations fournies par les autorités azerbaïdjanaises (12/10/2007): « L’arrêt de la Cour européenne a été traduit et transmis aux services de police, aux bureau des procureurs, aux corps judiciaires et aux tribunaux. En outre, une série de séminaires sur la Convention des droits de l’homme, sur les normes du Comité pour la prévention de la Torture ainsi que sur la jurisprudence de la Cour européenne a été organisée pour les employés des agences précitées. »

Evaluation : Des informations détaillées sont attendues sur la manière dont sont transmis les arrêts de la Cour européenne et sur les bénéficiaires de cette transmission ainsi que sur les contenus, dates et bénéficiaires des séminaires mentionnés dans ces informations.

En outre des informations sont attendues sur les mesures générales de prévention prises ou envisagées en vue d'assurer, d'une part, le respect de l'interdiction de la torture et des traitements inhumains ou dégradants et, d'autre part, des enquêtes approfondies en cas d'allégations de mauvais traitements. A cet égard, les autorités azerbaïdjanaises pourraient s'inspirer de l’expérience des Etats membres dans l'exécution d’arrêts semblables, sous le contrôle du Comité des Ministres, (voir les Résolutions intérimaires concernant la Turquie DH(99)434, ResDH(2002)98 et ResDH(2005)43, la Résolution intérimaire ResDH(2005)20 dans le groupe d'affaires McKerr, etc.), ainsi que des recommandations pertinentes du Comité pour la Prévention de la Torture.

Les Délégués,

1.             prennent note avec satisfaction de ce qu’une enquête relative aux tortures infligées au requérant a pu être ouverte à la suite de l’arrêt de la Cour européenne ;

2.             invitent les autorités azerbaïdjanaises à tenir le Comité des Ministres informé des développements de l’enquête dans cette affaire et rappellent à cet égard qu’afin de répondre aux exigences de la Convention, une telle enquête doit être effective, conduite avec la célérité voulue et avec des éléments adéquats de contrôle du public et susceptible de conduire à l’identification et la punition des responsables ;

3.             notent avec satisfaction que l’arrêt de la Cour a été publié et largement diffusé, et qu’un vaste programme de formations pour les forces de l’ordre ainsi que pour les procureurs et les juges est en cours ;

4.             invitent les autorités azerbaïdjanaises à informer rapidement le Comité de toutes autres mesures prises, y compris à la lumière des recommandations pertinentes du CPT, en vue d'assurer, d'une part, le respect de l'interdiction de la torture et des traitements ou peines inhumains ou dégradants et, d'autre part, des enquêtes efficaces en cas d'allégations de mauvais traitements,

5.             décident de reprendre l'examen de cette affaire lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire, et au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations supplémentaires, à fournir sur les mesures individuelles et générales.


44363/02           Ramazanova et autres, arrêt du 01/02/2007, définitif le 01/05/2007

L’affaire concerne une atteinte à la liberté d’association des requérants (violation de l’article 11) en raison des manquements répétés du ministère de la Justice à répondre de manière définitive à leurs demandes d’enregistrer leur association (près de quatre ans se sont écoulés entre la première demande d’enregistrement et l’enregistrement définitif).

La Cour européenne a noté que les importants retards constatés ne reposaient sur aucune base en droit interne et n’a pas jugé raisonnable l’excuse avancée par le Gouvernement selon laquelle ces retards résultaient de la charge de travail importante du ministère. La Cour a estimé qu’il était du devoir d’un Etat contractant d’organiser son système d’enregistrement national et de prendre les mesures nécessaires de telle sorte que les autorités compétentes puissent se conformer aux délais fixés par leur propre législation.

Elle a relevé en outre que le droit applicable à l’époque des faits ne prévoyait pas la possibilité d’un enregistrement automatique dans le cas où le ministère n’agirait pas en temps voulu et ne fixait pas non plus de limite au nombre de fois où le ministère pouvait retourner des documents sans émettre une décision définitive. La Cour a considéré par conséquent que le droit interne n’avait pas fourni aux requérants une protection juridique contre les actions arbitraires du ministère.

Mesures de caractère individuel : L’association a finalement été enregistrée le 18/02/2005. La Cour européenne a alloué aux requérants une satisfaction équitable au titre du préjudice moral.

Evaluation : aucune autre mesure ne semble donc nécessaire.

Mesures de caractère général: L’arrêt de la Cour européenne a été traduit en azerbaïdjanais et diffusé aux juges et autres professionnels du droit ; il a été inclus dans les programmes de formation des juges et des candidats à la fonction de juge. Il devrait être publié dans le prochain numéro de Qanunçuluk, le journal officiel du Ministère de la Justice.

La confirmation de la publication de l’arrêt de la Cour européenne est attendue.

Des informations sont attendues sur la législation actuellement en vigueur et sur la manière dont celle-ci remédie aux problèmes relevés par la Cour dans son arrêt.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard à leur 1043e réunion (2-4 décembre  2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

- 13 affaires contre la Belgique

13178/03          Mubilanzila Mayeka et Kaniki Mitunga, arrêt du 12/10/2006, définitif le 12/01/2007

L'affaire a trait au refus des autorités belges, fin 2002, d'autoriser la deuxième requérante, alors âgée de cinq ans, à se rendre en Belgique pour rejoindre sa mère au Canada. Cette dernière (la première requérante) y avait obtenu le statut de réfugiée en juillet 2001 et par la suite de résidente permanente. La deuxième requérante a été détenue pendant près de deux mois dans un centre fermé pour adultes et refoulée vers son pays d'origine.

La Cour européenne a estimé que les requérantes avaient subi un traitement contraire à l'article 3 au regard de la détention de la deuxième requérante. A cet égard, elle a souligné le caractère inadéquat et inhumain des conditions de détentions vu son très jeune âge (violations de l'article 3). De la même façon, elle a estimé que les requérantes avaient subi une violation de l'article 3 au regard des conditions du refoulement de la seconde requérante.

La Cour a en outre estimé que les requérantes avaient subi une atteinte au droit à la vie familiale du fait de la détention et du refoulement de la seconde requérante, l'Etat belge n'ayant pas pris toutes les mesures nécessaires pour faciliter la réunification familiale (violations de l'article 8).

La Cour a enfin conclu à l'irrégularité de la détention et à l'absence de recours effectif, notamment en raison du refoulement de la deuxième requérante le lendemain de l'introduction d'un recours en remise en liberté et avant même qu'il ne soit statué sur ce recours (violations des articles 5§1 et 5§4).

Fin octobre 2002, la deuxième requérante rejoignit sa mère au Canada après intervention du Premier ministre belge et de son homologue canadien.

Mesures de caractère individuel :la deuxième requérante n'est plus détenue et les deux requérantes résident maintenant régulièrement au Canada. En outre, la Cour a alloué 10 000 euros à la première requérante et 25 000 euros à la seconde pour préjudice moral.

Evaluation : aucune autre mesure ne semble donc nécessaire.

Mesures de caractère général :

1) Violations des articles 3 et 5§1 : A l'origine des violations de l'article 3 et de l'article 5§1 se trouve notamment le caractère inadapté des conditions de détention au très jeune âge de la seconde requérante. Il ressort de l'arrêt de la Cour que postérieurement aux faits de l'espèce, la loi-programme du 24/12/2002 prévoit la désignation d'un tuteur et une prise en charge du mineur et que le 19/05/2006, le comité des ministres de Belgique a approuvé le principe d'une mesure visant à mettre fin à la détention, dans des centres fermés, des mineurs étrangers non accompagnés appréhendés à la frontière.


Les autorité ont fourni des informations détaillées sur des mesures adoptées sur ce point, en particulier l’adoption d’une réglementation spécifique du 01/05/2004 relative à la prise en charge des mineurs étrangers non accompagnés appréhendés à la frontière (MENA) et l’adoption d’une loi du 12/01/2007 visant à mettre fin à la détention des MENA à la frontière.

Une analyse de ces informations est en cours.

2) Violation de l'article 5§4 et violation de l'article 8 : Les circonstances de l'espèce (programmation du refoulement de la seconde requérante par les autorités belges le lendemain de l'introduction du recours de remise en liberté par la première requérante auprès de la chambre du conseil et refoulement de la seconde requérante à la date préprogrammée, alors que le délai suspensif de vingt-quatre heures dont disposait le procureur du Roi pour faire appel de la décision de la chambre du conseil n'était pas écoulé)ont conduit à la violation de ces deux dispositions.

De même, dans cette affaire, les autorités belges n'ont pas tout entrepris pour faciliter la réunification familiale.

L’arrêt de la Cour européenne a été publié dans les trois langues officielles sur le site Internet du Service Public Fédéral de la Justice ; l’affaire a par ailleurs été fortement médiatisée et a connu une forte diffusion et discussion au sein des milieux académiques et professionnels concernés (notamment, plusieurs articles de doctrine ont été rédigés à son propos). L’arrêt a également été largement diffusé auprès des autorités concernées, en particulier : l’Office des étrangers - Service Public Fédéral Intérieur ; le Collège des Procureurs généraux, aux fins de diffusion à tous les arrondissements judiciaires de Belgique, plusieurs cours d’appel ayant au demeurant confirmé cette diffusion. Il a également été demandé Une demande de diffusion a également été adressée au Ministère des Affaires étrangères.

Il pourrait être utile de confirmer que les diffusions demandées ont bien été réalisées (notamment pour le Ministère des Affaires Etrangères).

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales.

50049/99          Da Luz Domingues Ferreira, arrêt du 24/05/2007, définitif le 24/08/2007

L'affaire concerne une atteinte au droit à un procès équitable (violation de l'article 6§1) en raison du refus par une cour d'appel de rouvrir une procédure qui s'était déroulée par défaut alors que des éléments montraient sans équivoque que l'accusé souhaitait faire valoir son droit de comparaître.

Le requérant a été condamné en février 1994, pour incitation à la débauche, proxénétisme, trafic de stupéfiants, menaces et vol, à une peine d'emprisonnement de quatre ans, portée en juin 1994 par la cour d'appel de Liège à six ans. Il s'est vu, par la suite, refusé le droit de former opposition.

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a dit que le constat d'une violation fournissait en soi une satisfaction équitable suffisante pour le dommage allégué. En réponse à une demande du requérant, la Cour a en outre indiqué qu'elle n'avait pas compétence pour demander à l'Etat belge qu'il s'engage à ne pas lui faire exécuter la peine de six ans d'emprisonnement que la cour d'appel de Liège lui a infligée.

Au stade de l’exécution de l’arrêt de la Cour européenne, le requérant a demandé et obtenu la réouverture de la procédure nationale litigieuse (arrêt de la Cour de cassation du 09/04/2008), en application de la nouvelle loi sur la réouverture de procédures entrée en vigueur le 01/12/2007 (voir également l’affaire Göktepe en rubrique 6.1). L’affaire a été renvoyée devant la cour d’appel de Mons pour être rejugée.

Evaluation : aucune autre mesure ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général : La Cour européenne a relevé que le requérant avait formé opposition à deux reprises (en août 1994 et en septembre 1998) et que dans les deux cas, son opposition fut déclarée irrecevable, pour non respect des formalités dans le premier cas et pour tardiveté dans le second. La Cour convient de l'importance de respecter la réglementation pour former un recours mais précise qu'en l'espèce, la réglementation en question, ou l'application qui en est faite, ne devrait pas empêcher le justiciable de se prévaloir d'une voie de recours disponible.

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées afin d'éviter, dans le futur, la répétition de la violation constatée.

Les Délégués,

1.             se félicitent de la réouverture de la procédure pénale en cause dans cette affaire, prononcée le 9 avril 2008 par la Cour de cassation, suite à l’arrêt de la Cour européenne et en application de la loi du 1er avril 2007 modifiant le Code d'instruction criminelle en vue de permettre la réouverture des procédures pénales ;

2.             estiment, eu égard à la nature de la violation constatée, que la réouverture de la procédure constitue en l'espèce un moyen approprié de remédier à la situation du requérant ;

3.             notent également avec intérêt les informations fournies lors de la réunion sur les mesures générales, qui nécessitent d’être évaluées plus en détail ;

4.             décident par conséquent de reprendre l’examen de cette affaire lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH) en vue d’examiner la possibilité de la clore.


46825/99+        Claes et autres, arrêt du 02/06/2005, définitif le 02/09/2005

Cette affaire concerne la légalité de poursuites pénales engagées contre les requérants, dont le bien fondé a été examiné par la Cour de cassation en décembre 1998, conformément à l'article 103 de la Constitution, du fait que deux d'entre eux, MM. Claes et Coëme, étaient ministres lorsque les faits reprochés furent commis.

La Cour européenne a rappelé que, dans son arrêt Coëme et autres du 22/06/2000, elle a considéré que si l'article 103 de la Constitution prévoyait à titre exceptionnel le jugement des ministres par la Cour de cassation, aucune disposition ne prévoyait la possibilité d'étendre la juridiction de celle-ci, pour des faits connexes, à des personnes qui n'ont jamais exercé les fonctions de ministres.

En l'absence de connexité prévue par la loi, la Cour a estimé que la Cour de cassation n'était pas, dans la présente affaire, un tribunal « établi par la loi » au sens de l'article 6 pour examiner les poursuites contre ces cinq autres requérants (violation de l'article 6§1).

Mesures de caractère individuel : En vertu de la loi du 01/04/2008 sur la réouverture de procédures pénales suite à des arrêts de la Cour européenne, entrée en vigueur le 1/12/2007, les requérants disposent de la possibilité de demander la réouverture des procédures litigieuses (voir également l’affaire Göktepe en rubrique 6.1).

Evaluation : aucune autre mesure ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général :Une législation spéciale a été adoptée le 25/06/1998 (entrée en vigueur le 01/07/1998) pour résoudre expressément la question litigieuse de la « connexité ». Cette loi ne s’est pas appliquée dans la procédure en cause dans la présente affaire, bien que celle-ci n’ait été tranchée qu’en décembre 1998 ; cela résultait expressément d’une disposition transitoire de la loi.

L'article 29, alinéa 1, de cette loi dispose que « les coauteurs et les complices de l'infraction pour laquelle le ministre est poursuivi et les auteurs des infractions connexes sont poursuivis et jugés en même temps que le ministre ». Il a été pris acte de cette évolution dans le présent arrêt (§27), dans l'arrêt Coëme et autres, précité, ainsi que dans la résolution finale concernant ce dernier arrêt (ResDH(2001)164).

Evaluation : aucune autre mesure ne semble nécessaire.

Les Délégués :

1.             décident de reprendre l'examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations complémentaires à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             notent qu’aucune autre mesure ne semble nécessaire pour l’exécution de cet arrêt.

                       - Affaires de durée de procédures judiciaires

49525/99          Dumont, arrêt du 28/04/2005, définitif le 28/07/2005

50575/99          De Landsheer, arrêt du 15/07/2005, définitif le 15/10/2005

27535/04          De Saedeleer, arrêt du 24/07/2007, définitif le 24/10/2007

51788/99          De Staerke, arrêt du 28/04/2005, définitif le 28/07/2005

18211/03          Lenardon, arrêt du 26/10/2006, définitif le 26/01/2007

52098/99          Leroy, arrêt du 15/07/2005, définitif le 15/10/2005

46046/99          Marien, arrêt du 03/11/2005, définitif le 03/02/2006

40628/04          Nagler et Nalimmo B.V.B.A., arrêt du 17/07/2007, définitif le 17/10/2007

52112/99          Reyntiens, arrêt du 28/04/2005, définitif le 28/07/2005

50236/99          Robyns de Schneidauer, arrêt du 28/04/2005, définitif le 28/07/2005

Ces affaires concernent la durée excessive de procédures civiles (De Landsheer, Reyntiens et Marien), ainsi que de procédures pénales dans lesquelles les requérants étaient accusés ou parties civiles (quatre autres affaires) (violations de l'article 6§1).

La plupart des procédures litigieuses se sont déroulées devant les juridictions de première instance du ressort de la cour d'appel de Bruxelles. Ces procédures ont débuté entre 1987 et 1997 et étaient toutes terminées lorsque la Cour européenne a rendu ses arrêts, à l'exception de l'affaire Leroy.

Mesures de caractère individuel : Dans l'affaire Leroy : accélération de la procédure pénale si elle est toujours pendante ;

Des informations sont attendues à cet égard.

Dans les autres affaires : aucune mesure nécessaire (procédures terminées).

Mesures de caractère général :

            1) Mesures tendant à éviter la durée excessive des procédures judiciaires.

- Concernant les juridictions du ressort de la cour d'appel de Bruxelles : Concernant tant la matière pénale que civile, il ressort des ces arrêts que la durée excessive des procédures devant les juridictions de première instance du ressort de la cour d'appel de Bruxelles résulte en particulier des difficultés de recrutement de magistrats, liées aux conditions de l'emploi des langues en matière judiciaire. Les autorités belges ont adopté des mesures tendant à rectifier cela (voir notamment les informations fournies par les autorités belges à la Commission de Venise, reflétées dans le document CDL(2006)026). En particulier, les lois des 16/07/2002 et 18/07/2002 ont amendé les dispositions concernant l'emploi des langues en matière judiciaire, afin d'alléger les exigences du bilinguisme et permettre de dégager davantage de moyens pour juger les affaires francophones qui sont majoritaires devant les juridictions bruxelloises.


De surcroît, il est rappelé que le Comité des Ministres a déjà été informé des mesures prises par les autorités belges afin d'éviter la durée excessive des procédures devant la cour d'appel de Bruxelles elle-même (affaire Oval S.P.R.L. - arrêt du 15/11/2002 - et autres affaires, en rubrique 6.2) et que les autorités belges avaient à cette occasion notamment déclaré que le problème de l'arriéré de la cour d'appel avait été résolu (voir l'ordre du jour de la 914e réunion, de février 2005, rubrique 6.1, Volume I).

Des contacts bilatéraux sont en cours afin d'évaluer la situation actuelle devant les juridictions de première instance du ressort de la cour d'appel de Bruxelles.

- Au niveau national :

En matière pénale,il ressort notamment d'informations fournies par les autorités belges à la Commission de Venise (document CDL(2006)026) que « la longueur de certaines procédures pénales constitue un réel problème en Belgique, sans pour autant qu'il soit généralisé ». Selon ce document, le problème se pose « tant au niveau des phases préliminaires du procès pénal (information par le parquet et instruction par le juge d'instruction)… » (sur ce point, voir l'affaire Stratégies et Communications et Dumoulin, rubrique 6.2) « …qu'au niveau des juridictions de jugement ».

En matière civile, il ressort du même document qu'hormis le cas particulier des juridictions bruxelloises (sur ce point, voir la situation décrite ci-dessus), il n'y a pas de problème structurel.

Un certain nombre de mesures prises au niveau national (par opposition à celles prises concernant spécifiquement Bruxelles) afin d'éviter la durée excessive des procédures judiciaires ont déjà été examinées dans le cadre de l'affaire Oval S.P.R.L. (en rubrique 6.2, voir ci-dessus) : notamment,  la mise en place d'un système temporaire de chambres supplémentaires et de magistrats suppléants, des mesures procédurales tendant notamment à rendre le juge plus actif au sein de la procédure et des embauches. Ces mesures s'inscrivent pour la plupart dans un plan d'ensemble appelé « Plan Thémis » et élaboré par le Ministre de la justice.

La loi du 26/04/2007 modifiant le Code judiciaire en vue de lutter contre l'arriéré judiciaire a été publiée au Moniteur belge le 12/06/2007. Cette loi contient de nombreuses dispositions enserrant différentes phases de la procédure dans des délais fixés par le juge, le plus souvent à la demande des parties. Elle contient en outre des dispositions visant à contrôler le respect des délais du délibéré, et à sanctionner les parties qui utilisent la procédure à des fins manifestement dilatoires. Cette loi fait actuellement l’objet d’un examen détaillé.

2) Recours permettant de se plaindre de la durée excessive des procédures judiciaires.

Bien que dans les présents arrêts aucun constat de violation n'ait été fait sur ce point, l'examen de cette question s'inscrit dans l'esprit de la Recommandation Rec(2004)6 du Comité des Ministres (amélioration des recours internes) et correspond à la pratique qui s'est développée au sein du Comité.

- En matière civile : dans sa décision sur la recevabilité dans l’affaire Depauw contre Belgique (requête n°2115/04, décision du 15/05/2007), la Cour européenne a jugé que depuis le 28/03/2007, il existe – sur la base d’une jurisprudence ayant acquis un degré de certitude juridique suffisant - un recours indemnitaire permettant de se plaindre et d’obtenir réparation de la durée excessive d’une procédure civile. Il est précisé que la loi du 21/04/2007 modifiant le Code judiciaire en vue de lutter contre l'arriéré judiciaire contient certaines dispositions permettant de demander l'accélération d'une procédure civile (voir ci-dessus) ; ces dispositions font actuellement l’objet d’un examen approfondi.

- En matière pénale : Il ressort notamment d'informations fournies par les autorités belges à la Commission de Venise (document CDL(2006)026) qu'aucune voie de recours spécifique ne permet de demander l'accélération d'une procédure pénale ou d'obtenir une indemnisation du fait de sa durée excessive. En revanche, une sanction est prévue à l'article 21 ter (entré en vigueur le 12/12/2000) du titre préliminaire du code de procédure pénale en cas de durée excessive d'une procédure pénale. Selon cet article, « si la durée des poursuites pénales dépasse le délai raisonnable, le juge peut prononcer la condamnation par simple déclaration de culpabilité ou prononcer une peine inférieure à la peine minimale prévue par la loi ». Entre autres dans sa décision sur la recevabilité dans l’affaire Hermanus c. Belgique (requête n° 49195/99, décision du 18/09/2001), la Cour européenne a dit qu’ « en Belgique, un accusé a, à l’occasion de l’examen du bien-fondé des poursuites dirigées contre lui, la possibilité de faire constater le dépassement du délai raisonnable et d’obtenir le redressement de pareille violation de l’article 6 ».

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ces points lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire, et sur les mesures individuelles, à savoir l’accélération de la procédure dans l’affaire Leroy, ainsi qu’en vue d’évaluer les mesures générales et, le cas échéant, d’examiner la possibilité d’en clore l’examen.


- 1 affaire contre la Bosnie-Herzégovine

41183/02          Jeličić, arrêt du 31/10/2006, définitif le 31/01/2007

L'affaire concerne la violation du droit d’accès de la requérante à un tribunal en raison de la non-exécution, par l’administration, de décisions judiciaires définitives. La décision judiciaire inexécutée, rendue en 1998 en faveur de la requérante ordonnait à sa banque la restitution de tous les « anciens » placements (les « anciens » placements en devises étrangères effectués auprès d'une banque d'Etat avant la dissolution de l'ancienne République socialiste fédérative de Yougoslavie, montants à majorer d'intérêts de retard, ainsi que des frais et dépens (violation de l'article 6§1).

En particulier, depuis 1996 de nombreuses dispositions statutaires ont été adoptées en droit interne, empêchant l’exécution de décisions judiciaires relatives à la restitution des « anciens » placements, en dernier lieu l’article 27 de la loi de 2006 sur les « anciens » placements (ci-après « la loi ») qui prévoit que ces décisions judiciaires doivent être vérifiées par les autorités administratives. Il convient en outre de noter que les « anciens » placements ont été convertis en 2002 dans la dette publique de la Republika Srpska (RS) et qu’en 2006, la Bosnie-Herzégovine a repris à son compte toutes les dettes résultant de ces « anciens » placements imputables à ses entités constitutives, y compris la RS.

La Cour EDH a également constaté que l’impossibilité d’obtenir l’exécution de la décision judiciaire définitive rendue en faveur de la requérante constituait une ingérence dans le droit au respect de ses biens (violation de l’article 1 du Protocole n° 1). La Cour européenne a indiqué que le manque de ressources budgétaires n'était pas un motif suffisant, de nature à permettre aux autorités de l'Etat de ne pas honorer une telle décision (voir §§ 39 et 42 de l'arrêt).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé à la requérante une satisfaction équitable au titre des préjudices moral et matériel subis par la requérante.

Evaluation : Aucune mesure individuelle supplémentaire ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général :

1) Contexte de cette affaire :

Environ 750 affaires concernant les « anciens » placements (soumises par plus de 4 600 requérants) sont actuellement pendantes devant la Cour européenne. Dans 10 de ces affaires, les requérants ont obtenu une décision judiciaire exécutoire ordonnant la restitution de ces placements (§43 de l’arrêt). La Cour constitutionnelle de Bosnie-Herzégovine et sa Commission des Droits de l’Homme se sont prononcées sur plus de 1 000 affaires. Des décisions judiciaires exécutoires n’ont été rendues que dans 5 de ces affaires (§43 de l’arrêt).

Cependant, le 10/07/2007, les autorités ont indiqué au Comité qu’il n’existait pas de données complètes et exactes sur les arrêts rendus à l’encontre des banques commerciales dans lesquelles des « anciens » placements avaient été déposés avant 1992. Les autorités ont informé le Comité des chiffres provisoires pour la Fédération de Bosnie et Herzégovine (la Fédération), selon les données du 31/12/2006, à savoir 139 décisions judiciaires exécutoires représentant une dette, au principal, d’un total de 102 millions de marks convertibles (BAM). De la même façon, pour la RS 70 décisions exécutoires ont été rendues avec une dette au principal d’approximativement 2,5 millions de BAM. Depuis le 01/03/2007, il y a au total 83 procédures judiciaires pendantes contre des banques commerciales concernant les «anciens» placements.

2) Mesures adoptées et en cours : L’article 27 de la loi disposait que toute décision judiciaire concernant ce type de placement devait être vérifiée par une autorité gouvernementale (§27 de l’arrêt). Les autorités ont indiqué que cette disposition avait été abrogée par le Parlement et publiée au Journal Officiel de la Bosnie-Herzégovine, n° 72 du 26/09/2007. Conformément à l’amendement adopté et en vigueur depuis le 27/09/2007, les décisions exécutoires ne feront plus l’objet de vérification mais seront transmises aux Ministères des Finances régionaux pour paiement. Un groupe de travail gouvernemental a ordonné aux trois entités d’adopter des textes d’application détaillant la procédure à suivre. Cependant, ce n’est que le 15/02/2008 que la RS a adopté une réglementation d’application, les autres entités n’ayant pas respecté cette obligation.

Des informations détaillées sont attendues sur la réglementation en matière d’enregistrement et sur les résultats dans les entités autres que la RS, y compris les délais relatifs à l’enregistrement de tous les arrêts définitifs concernant les « anciens placements ».

En dépit de l’introduction de l’obligation pour tous les tribunaux d’envoyer les arrêts définitifs concernant les « anciens placements » aux Ministères des Finances régionaux, les tribunaux n’ont pas respecté cette disposition. Le 19/02/2008, le Ministère des Finances de la Fédération a déclaré qu’aucun arrêt ne lui avait été envoyé en vertu de cette disposition. Ces informations sont apparemment contradictoires par rapport aux données déjà transmises sur le nombre d’arrêts concernés au sein de la Fédération. Cependant, par le biais de l’Agence bancaire de la Fédération, les autorités ont identifié 6 arrêts.


Le District de Brčko a seulement déclaré un arrêt, ce qui a été confirmé par la Cour européenne dans l’affaire Pejaković et autres (requête 337/04, arrêt du 18/12/2007). Le Ministère des Finances de la RS a confirmé 70 arrêts, dont 3 (y compris la présente affaire) ont été exécutés, et trois autres devraient être exécutés prochainement.

Des informations détaillées sont attendues sur les délais prévus ou établis en matière d’enregistrement des arrêts définitifs concernant les « vieux placements » ainsi le nombre final de tels arrêts et la dette totale. 

Les Budgets des régions de 2007 ont prévu, sous les titres correspondant, des fonds en vue du paiement des obligations découlant d’arrêts définitifs : dans la RS : 8 million BAM au total ; dans la Fédération : 12 million BAM et dans le District : 800 000 BAM. Le 14/04/2008, les autorités ont indiqué que les arrêts concernés seraient exécutés dans les deux ans. Cette évaluation est basée sur des informations disponibles selon lesquelles il y a 67 arrêts non exécutés représentant un montant total approximatif de 2 millions de BAM dans la RS et 6 arrêts représentant un montant total de 1 million de BAM dans la Fédération.

Des informations détaillées sont attendues sur les paiements effectués ou projetés au titre des arrêts définitifs concernant les « anciens placements » et sur les prévisions de fonds budgétaires pour 2009 à ce titre.

En vertu du Code pénal de 2003, l’inexécution de décisions judiciaires exécutoires rendues par la Cour constitutionnelle, la Cour européenne des droits de l’homme ou la Chambre des Droits de l’Homme de Bosnie‑Herzégovine constituent des infractions pénales (§30 de l’arrêt). Durant les cinq dernières années, le Procureur Général a été saisi de 64 affaires concernant la violation de cette disposition du Code pénal par des auteurs inconnus ; huit d’entre elles ont été terminées, et les autres affaires sont en cours. Quatre autres affaires ont été diligentées à l’encontre d’auteurs identifiés, et une mise en accusation contre deux personnes a abouti à des condamnations. Une condamnation a été infirmée en appel et l’autre condamnation est en pendante en appel.

Les autorités ont indiqué au Comité que le 20/09/2007, le gouvernement avait mis en place un groupe de travail, comprenant des représentants du ministère des Finances et du Trésor public, du Ministère de la Justice ainsi que du Ministère des droits de l’homme et des réfugiés pour préparer un plan d’action relatif au problème de l’inexécution des décisions judiciaires ordonnant la restitution des « anciens » placements. L’adoption d’un plan d’action est attendue depuis décembre 2007 mais n’a pas été présenté à ce jour.

Par conséquent des informations urgentes sont attendues concernant ce plan d'action qui devrait inclure des mesures effectives pour la prévention des violations similaires.

Enfin, l’arrêt de la Cour européenne a été publié au Journal officiel, n° 20/07. En juin 2008, l’Agent du gouvernement fera une présentation sur la mise en œuvre des mesures générales dans cette affaire lors d’une conférence nationale à l’attention des juges.

Des informations sont attendues sur une large diffusion de l’arrêt de la Cour à toutes les instances gouvernementales et judiciaires impliquées dans cette affaire.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales.

- 75 affaires contre la Bulgarie

50963/99          Al-Nashif et autres, arrêt du 20/06/02, définitif le 20/09/02

65028/01          Bashir et autres, arrêt du 14/06/2007, définitif le 14/09/2007

54323/00          Hasan, arrêt du 14/06/2007, définitif le 14/09/2007

61259/00          Musa et autres, arrêt du 11/01/2007, définitif le 09/07/2007

Ces affaires concernent la violation du droit des requérants au respect de leur vie familiale en raison de leur expulsion (Al-Nashif, Bashir et autres) ou du retrait de leur titre de séjour assortis d’une obligation de quitter le territoire (Musa et Hasan) (violations de l’article 8). Dans ces quatre affaires, la Cour européenne a estimé que les dispositions légales applicables ne satisfaisaient pas aux exigences de légalité.

La Cour a en outre estimé qu’aucun des requérants n'avait bénéficié d’un contrôle indépendant des mesures prises à leur encontre, étant donné qu’à l’époque des faits les mesures d’expulsion basées sur des considérations de sécurité nationale étaient exclues du contrôle judiciaire (violations de l'article 13).

Les affaires Al-Nashif et Bashir et autresconcernent par ailleurs l'impossibilité pour les requérants de contester la légalité de la mise en détention dans l'attente de leur expulsion ou reconduite à la frontière, en vertu du droit applicable (violations de l'article 5§4). L’affaire Bashir et autres concerne enfin le manquement des autorités à leur obligation d’informer à bref délai les requérants des motifs de leur arrestation (violation de l’article 5§2).


Mesures de caractère individuel :

            1) Affaire Al-Nashif : Les mesures prises à l'encontre de M. Al-Nashif trouvent leur origine dans trois ordonnances différentes - retirant son permis de séjour, ordonnant sa détention et son expulsion et interdisant son entrée sur le territoire pour une période de 10 ans. A l'époque des faits le requérant a fait appel devant les tribunaux contre deux de ces ordonnances, sans succès. A la suite de l'arrêt de la Cour européenne, la Cour suprême administrative a rouvert ces procédures et en 2004 et 2006, l'ordonnance retirant le permis de séjour ainsi que celle concernant sa détention et son expulsion ont été annulées par des arrêts définitifs des juridictions compétentes.

Informations fournies par les autorités bulgares (lettre du 14/12/2007) : L'interdiction d'entrée sur le territoire a été levée en octobre 2007.

Evaluation : Aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

2) Affaire Musa : M. Musa a dû quitter la Bulgarie en 2000, suite aux mesures qui lui ont été imposées et à l’interdiction d’entrée sur le territoire pendant une période de 10 ans.

Une demande de révocation de l’interdiction d’entrée sur le territoire a été déposée devant la Cour suprême de cassation et une procédure a été ouverte en conséquence.

            3) Affaires Hasan et Bashir et autres : Du fait des mesures prises par les autorités, M. Hasan a quitté la Bulgarie en octobre 1999 et M. Bashir a été expulsé en 2000.

Au 20/03/2008, les requérants dans l’affaire Bashir n’avaient pas déposé de demande devant la Cour suprême de cassation concernant l’annulation de l’interdiction d’entrée sur le territoire.

Des informations sont attendues sur le retrait des mesures prises à l’encontre des deux requérants.

Mesures de caractère général :

      1) Violations des articles 8 et 13 : l'attention des autorités bulgares a été attirée sur un certain nombre de problèmes dans la législation et la réglementation à l'origine des violations constatées par la Cour européenne dans la présente affaire. En effet, à l’époque des faits, le droit bulgare ne prévoyait pas de contrôle judiciaire de la légalité de la détention des étrangers frappés d'une mesure d'expulsion pour des raisons de sécurité nationale, ni de la décision d'expulsion elle-même lorsque de telles raisons sont évoquées (cf. l'article 47 de la loi sur les étrangers, en vigueur à l'époque des faits).

Les autorités bulgares ont donc été invitées à prendre des mesures à ce titre à la lumière éventuellement de l'expérience d'autres Etats membres en ce domaine (par ex. Chahal contre le Royaume-Uni, arrêt du 15/11/1996, Résolution ResDH(2001)119).

- Développement de la pratique de la Cour suprême administrative :

Il a été noté que dans sa pratique bien établie depuis l'arrêt Al-Nashif, la Cour suprême administrative indique aux tribunaux compétents qu'ils sont tenus d'appliquer directement la Convention, telle qu'interprétée par la Cour européenne et, par conséquent, d'examiner les recours contre les mesures d'expulsion basées sur des raisons de sécurité nationale (voir, par exemple, les décisions n°706 du 29/01/2004, n°4883 du 28/05/2004, n°8910 du 01/11/2004, n°3146 du 11/04/2005 et n°4675 du 25/05/2005).

       - Réforme législative :

Durant 2005 et 2006 plusieurs projets d'amendement de la loi sur les étrangers ont été élaborés par le Ministère de la justice et le Ministère de l'intérieur sans aboutir à la réforme législative requise.

Le 23/03/2007 un projet d'amendement à la loi sur les étrangers a été adopté. Cet amendement a introduit un contrôle juridictionnel par la Cour suprême administrative sur les mesures d'expulsion, de retrait de permis de séjour et d'interdiction du territoire, ordonnées sur la base de considérations de sécurité nationale. Cependant, il a été relevé que la loi ainsi modifiée interdit l'effet suspensif de l'appel contre ce type de mesures, lorsqu'elles sont basées sur des considérations de sécurité nationale. 

Par ailleurs, il convient de noter qu'une nouvelle loi sur l'entrée et le séjour sur le territoire bulgare ainsi que le départ du territoire bulgare, applicable aux citoyens de l'Union européenne et des membres de leurs familles, est entrée en vigueur le 01/01/2007. L'article 28 de cette loi prévoit que les décisions d'expulsion, retrait de permis de séjour et interdiction d'entrée sur le territoire peuvent être contestées selon la procédure prévue dans le Code de procédure administrative, ce qui implique un contrôle juridictionnel. De plus, selon l'article 30 de la loi, une personne qui s'est vue imposée une telle mesure, basée sur des considérations de sécurité nationale, peut également demander son annulation après l'expiration d'un délai de trois ans après son imposition. En même temps, cette loi interdit également l'effet suspensif de l'appel contre ce type de mesures, lorsqu'elles sont basées sur des considérations de sécurité nationale.


Les autorités ont été invitées à considérer la question de l'efficacité des recours judiciaires prévus par ces deux lois, étant donné que ces recours ne peuvent pas surseoir à l'exécution des mesures d'expulsion ordonnées sur la base de considérations de sécurité nationale, en contradiction avec les exigences de la Convention dans ce domaine. En réponse, elles ont indiqué que l'article 1§2 du Protocole n°7 à la Convention prévoit la possibilité d'expulser une personne avant qu'elle n'ait exercé ses droits prévus dans le §1 (à savoir le droit de faire valoir les raisons qui militent contre son expulsion, de faire examiner son cas et de se faire représenter devant l'autorité compétente) dans les cas ou l'expulsion est basée sur des raisons de sécurité nationale.

Des contacts bilatéraux sont en cours sur cette question.

      2) Violation de l'article 5§4 : des clarifications ont été demandées sur l'existence à l'heure actuelle en droit bulgare d'un contrôle judiciaire de la légalité du placement dans les centres spécialisés en vue d'une expulsion pour des raisons de sécurité nationale (voir l'article 44§6 combiné avec l'article 46§1 de la loi sur les étrangers). Les autorités bulgares ont indiqué que la légalité de la détention ordonnée en vertu de la loi sur les étrangers peut être contestée devant l'organe administratif et devant les tribunaux compétents conformément aux dispositions du Code de procédure administrative. Par ailleurs, les autorités sont d'avis qu'à la suite de l'arrêt Al-Nashif les tribunaux internes sont d'ores et déjà tenus d'offrir les garanties prévues par l'article 5§4.

Des contacts bilatéraux sont en cours sur cette question.

            3) Violation de l’article 5§2 (Affaire Bashir) :

Des informations sont nécessaires sur les mesures envisagées ou déjà adoptées.

            4) Publication : Les arrêts de la Cour européenne dans les affaires Al-Nashif, Musa et Hasan ont été publiés sur le site Internet du Ministère de la justice http://www.mjeli.government.bg.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles, en particulier l’annulation des mesures prises à l’encontre des requérants Musa, Hasan et Bashir, ainsi que sur les mesures générales, à la lumière d'une évaluation des mesures générales, concernant notamment la possibilité d'introduire un effet suspensif dans le cadre des recours prévus en cas d'expulsion pour des motifs de sécurité nationale.

- Affaires concernant principalement des décès ou mauvais traitements survenus sous la responsabilité des forces de l'ordre

Résolution intérimaire CM/Res/DH(2007)107

41488/98          Velikova, arrêt du 18/05/00, définitif le 04/10/00

38361/97          Anguelova, arrêt du 13/06/02, définitif le 13/09/02

53121/99          Iliev Stefan, arrêt du 10/05/2007, définitif le 10/08/2007

55061/00          Kazakova, arrêt du 22/06/2006, définitif le 22/09/2006

50222/99          Krastanov, arrêt du 30/09/2004, définitif le 30/12/2004

46317/99          Ognyanova et Choban, arrêt du 23/02/2006, définitif le 23/05/2006

43233/98          Osman, arrêt du 16/02/2006, définitif le 16/05/2006

47905/99           Rashid, arrêt du 18/01/2006, définitif le 18/04/2006

42027/98          Toteva, arrêt du 19/05/2004, définitif le 19/08/2004

45500/99          Tzekov, arrêt du 23/02/2006, définitif le 23/05/2006

48130/99          Vasilev Ivan, arrêt du 12/04/2007, définitif le 12/07/2007

Les affaires Ognyanova et Choban, Velikova et Angelova ont trait à des violations du droit à la vie et de l'interdiction des mauvais traitements, dans la mesure où les autorités n'ont pas donné d'explication suffisante des décès des proches des requérants entre 1993 et 1996, pendant leur garde à vue, ni des lésions qu'ils avaient subies aux mains de la police (violations des articles 2 et/ou 3).

Les autres affaires, à l'exception des affaires Kazakova et Stefan Iliev, concernent les mauvais traitements infligés aux requérants en 1995 et en 1996 par des policiers lors de différentes opérations de police et pendant une garde à vue (violations de l'article 3). La Cour européenne a noté, en particulier dans l'affaire Tzekov, que la loi sur la police nationale permettait l'usage d'armes à feu par les forces de police pour procéder à l'arrestation d'une personne dans des circonstances où une telle mesure n'est pas strictement nécessaire et proportionnée.


Toutes ces affaires concernent également l'absence d'enquêtes effectives par les autorités bulgares sur ces décès et sur les allégations défendables des requérants selon lesquelles ils auraient subi de mauvais traitements aux mains de la police (violations des articles 2, et 13 ou 3).

Les affaires Anguelova et Ognyanova et Choban concernent en outre l'illégalité de la détention des proches des requérants, dans la mesure où cette détention n'était pas en conformité avec le droit interne (violations de l'article 5§1).

L'affaire Anguelova a trait également au défaut d'assistance médicale rapide lors de la détention du fils de la requérante (violation de l'article 2).

L'affaire Krastanov a trait en outre à la durée excessive de la procédure civile en réparation intentée par le requérant en 1995 (violation de l'article 6§1).

L'affaire Osman concerne également la destruction illégale de certains biens des requérants lors de l'opération de police visant leur expulsion de la maison où ils habitaient (violation de l'article 1 du Protocole n°1).

Enfin, l'affaire Rashid concerne également la violation du droit du requérant d'être traduit devant un juge aussitôt après son arrestation (violation de l'article 5§3) et l'illégalité de son maintien en détention provisoire postérieurement à la décision du tribunal ordonnant son élargissement (violation de l'article 5§1).

Mesures de caractère individuel : Dans la Résolution intérimaire adoptée dans ces affaires en octobre 2007, le Comité en a appelé au Gouvernement bulgare pour qu’il adopte rapidement toutes les mesures individuelles requises (voir CM/ResDH(2007)107). Des informations ont été demandées en particulier sur le suivi donné aux arrêts de la Cour européenne par le Procureur Général (compétent pour demander la réouverture des enquêtes pénales insatisfaisantes dans ces affaires).

Selon les informations fournies par les autorités bulgares un examen de la possibilité d’une nouvelle enquête a eu lieu ou est en cours dans la majorité de ces affaires :

1) Affaire Velikova : un procureur du Parquet suprême de cassation a informé oralement les autorités de l’ouverture d’une enquête sur les circonstances du décès de M. Tsonchev.

Des informations sont attendues sur les résultats de cette enquête.

2) Affaire Anguelova : l’enquête pénale sur la mort du proche des requérants s’est soldée par un non-lieu prononcé en 2004 (soit postérieurement à l’arrêt de la Cour européenne dans cette affaire). Le Parquet suprême de cassation a exprimé l’avis que cette enquête ne pouvait être rouverte dans la mesure où les décisions de non-lieu ont été rendues par un procureur et non par un tribunal. Cependant, la décision de non-lieu a été examinée ex officio par le procureur d’appel compétent qui a estimé en 2008 que la décision initiale était légale et justifiée.

Evaluation : en cours. Des informations seraient utiles sur : 1) la question de savoir si des nouveaux actes d’enquête ont été entrepris entre 1997, lorsque l’enquête initiale a été suspendue, et 2004, lorsque la décision de non-lieu a été prise ; 2) une copie de la décision de 2004 de non-lieu.

3) Affaire Kazakova : le Parquet suprême de cassation a ordonné une vérification des circonstances de l’affaire et a indiqué un certain nombre de mesures à prendre à cet égard ; en particulier l’interrogation des officiers de police impliqués dans les faits ainsi que de la requérante (une copie de l’arrêt de la Cour européenne a été transmise avec cette décision). A l’issue de cette vérification, en 2007, le procureur militaire compétent a refusé d’ouvrir une enquête pénale sur les faits en cause. En 2008, cette décision a été confirmée par le procureur militaire d’appel. Ce dernier a indiqué en particulier que les faits étaient prescrits depuis neuf ans et que par conséquent il n’était pas possible d’ouvrir une nouvelle enquête.

Evaluation : dans ces circonstances, aucune autre mesure de caractère individuel ne semble nécessaire.

4) Affaire Ognyanova et Choban : le Parquet suprême de cassation a considéré que la réouverture de l’enquête pénale sur la mort du proche des requérants n’était pas nécessaire (lettre du 16/01/08). Cette conclusion a été faite sur la base d’une décision du procureur militaire d’appel de 2008 confirmant la décision initiale de non-lieu. Le procureur militaire d’appel a considéré notamment que les preuves rassemblées permettaient d’établir que la décision initiale de non-lieu rendue par le parquet était légale et justifiée. En outre, il a estimé que les autorités d’enquête avaient pris toutes les mesures pour établir les faits et que le procureur avait rendu sa décision après un examen objectif, exhaustif et détaillé des circonstances de l’affaire.

Evaluation : Il convient de noter que cet examen et cette analyse se réfèrent aux mêmes actes d’enquêtes déclarés insuffisants par la Cour européenne et constitutifs d’une violation procédurale de l’article 2.

Des informations complémentaires sont attendues sur la façon dont les autorités entendent conduire une enquête efficace conforme aux exigences énoncées par la Cour européenne.

5) Affaire Osman : Une copie a été fournie de la décision de 1997 refusant l’ouverture d’une enquête pénale au motif que les faits en question n’étaient pas constitutifs d’une infraction. Les autorités ont indiqué qu’elles ne disposaient pas d’information sur un appel déposé par les requérants contre cette décision.  


Des informations sont attendues sur l’examen par les autorités compétentes de la possibilité d’une nouvelle enquête sur les faits pertinents. Par ailleurs, il convient de noter que selon les informations contenues dans l’arrêt de la Cour européenne, les requérants ont fait appel de la décision de 1997 refusant l’ouverture d’une enquête pénale (voir §41 de l’arrêt).

6) Affaire Toteva : le Parquet suprême de cassation a exprimé l’avis que dans cette affaire il n’y avait pas lieu de rouvrir une enquête pénale dans la mesure où aucune décision formelle refusant l’ouverture d’une enquête pénale n’avait été rendue à l’époque des faits.

Des informations sont attendues sur la possibilité d’ouvrir une enquête pénale à l’égard des officiers de police qui auraient maltraité la requérante.

7) Affaire Tzekov : le Parquet suprême de cassation a exprimé l’avis que l’enquête pénale ne pouvait être rouverte dans la mesure où la décision de non-lieu avait été rendue par un procureur et non par un tribunal. Cependant, la décision de non-lieu a été examinée ex officio par le procureur d’appel compétent. En 2007, le procureur d’appel a confirmé la décision initiale de non-lieu comme légale et justifiée. En outre, il a été souligné qu’il y avait prescription des faits en question.

Evaluation : dans ces circonstances, aucune autre mesure de caractère individuel ne semble nécessaire.

Des informations sont attendues sur la situation concernant notamment les affaires plus récentes (Iliev Stefan, Rashid, Vasilev Ivan et Krastanov).

Mesures de caractère général :

1) Mesures adoptées : les mesures adoptées par les autorités bulgares ont été résumées dans la résolution intérimaire adoptée dans ces affaires en octobre 2007 (voir CM/ResDH(2007)107). Les plus importantes d’entre elles sont présentées ci-dessous :

a) Violations du droit à la vie et interdiction des mauvais traitements, y compris au titre de l’absence de soins médicaux : les informations principales ont trait à des mesures de sensibilisation et de formation de la police sur les exigences de la Convention : une formation obligatoire en la matière a été introduite et en 2000 une Commission spécialisée en matière de droits de l’homme a été créée au sein de la Direction nationale de la police. En outre, en 2002, un nouveau formulaire a été introduit. Il doit être signé par tous les détenus et contient des informations sur leurs droits essentiels. Par ailleurs, le Code d’éthique de la police, élaboré en coopération avec le Conseil de l’Europe, a été introduit en octobre 2003 par un ordre du Ministre de l’Intérieur.

La question particulière de l’insuffisance du cadre juridique sur l’usage des armes à feu par les agents de police est en cours d’examen dans le cadre des affaires Nachova et autres (1020e réunion, mars 2008, rubrique 4.2).

b) Violations ayant trait à l’absence d’enquêtes effectives : Un contrôle judiciaire a été instauré en 2001 concernant les décisions du parquet mettant fin aux poursuites, ainsi que la possibilité pour les tribunaux de renvoyer un dossier au parquet avec instruction d’accomplir des actes spécifiques d’enquête. L’efficacité de ce contrôle judiciaire se renforce constamment avec l’amélioration de l’effet direct de la Convention et de la jurisprudence de la Cour européenne.

c) Violations ayant trait à la détention illégale: Il a été relevé que, déjà au moment des faits, la détention d’une personne par la police nécessitait un ordre écrit ainsi que l’enregistrement dans un registre spécial. Par lettre circulaire du 13/03/2002, le Directeur de la Direction nationale de la police a rappelé à tous les chefs de directions régionales des services de police leur obligation de prendre toutes les mesures nécessaires afin d’assurer le strict respect de ces règles. De plus, l’article 12 de l’Instruction de 2006 sur la détention policière précise que la période de détention court à partir du moment de l’arrestation, qu’un mandat d’arrêt ait ou non été délivré.

d) Violation du droit au respect des biens : A la lumière des circonstances particulières de cette violation, la publication et la diffusion de l’arrêt Osman ont été jugées suffisantes aux fins de l’exécution.

e) Autres violations : Les mesures requises au titre de la violation résultant de la durée excessive des procédures civiles en indemnisation diligentées à l’encontre de l’Etat, sont examinées dans le contexte de l’affaire Djangozov (rubrique 4.2).

Les mesures requises par la violation du droit d’être traduit à bref délai devant un juge après l’arrestation ont été adoptées dans l’affaire Assenov dont l'examen a été clos par la résolution ResDH(2000)109, après une réforme de la procédure pénale qui a pris effet le 01/01/2000.

La question relative à l’Illégalité du maintien en détention provisoire postérieurement à la décision du tribunal ordonnant l’élargissement est examinée dans le cadre du groupe d'affaires Bojilov (1013e réunion, décembre 2007, rubrique 4.2). 

f) Publication et diffusion : Les principaux arrêts de la Cour européenne ont été traduits, publiés sur le site Internet du Ministère de la Justice et transmis aux autorités compétentes, dans certains cas accompagnés d’une lettre du Ministère de la Justice.


2) Mesures restant à prendre : Tout en notant avec intérêt les informations fournies jusqu’à présent par le Gouvernement au titre des mesures générales, le Comité a toutefois relevé dans la résolution intérimaire précitée que certaines mesures générales restaient a prendre, visant en particulier à :

- améliorer la formation de base et continue de tous les membres des forces de police, notamment en ce qui concerne la généralisation de la dimension droits de l’homme dans la formation ;

- améliorer les garanties procédurales pendant la garde à vue par la mise en œuvre effective des nouveaux règlements concernant l’obligation d’informer les personnes détenues de leurs droits et les formalités à suivre concernant l’enregistrement des arrestations ;

- garantir l’indépendance des enquêtes au sujet d’allégations de mauvais traitements infligés par la police, et plus particulièrement assurer l’impartialité des enquêteurs chargés de ce type d’affaires.

A la lumière de ce qui précède, le Comité en a appelé au Gouvernement de la Bulgarie pour qu’il adopte rapidement toutes les mesures restant à prendre et tienne le Comité régulièrement informé de l’impact pratique des mesures prises, notamment en fournissant des statistiques sur les enquêtes menées au sujet d’allégations de mauvais traitements infligés par la police. Le Comité a décidé de poursuivre le contrôle de l’exécution jusqu’à ce que toutes les mesures de caractère général nécessaires à la prévention de nouvelles violations semblables de la Convention soient adoptées et que leur efficacité ne suscite plus de doute.

Des informations sont toujours attendues sur les questions en suspens mentionnées ci-dessus. Confirmation est attendue de la diffusion des arrêts de la Cour européenne dans les affaires Ognyanova et Choban, Osman et Tzekov aux autorités d’enquête compétentes afin d’attirer leur attention sur les lacunes des enquêtes menées dans ces affaires.

Les Délégués,

1.             rappellent la Résolution intérimaire CM/ResDH(2007)107 adoptée lors de leur 1007e réunion (octobre 2007) (DH), dans laquelle le Comité en a appelé au gouvernement de l'Etat défendeur pour qu'il adopte rapidement toutes les mesures restant à prendre et l’en informe régulièrement ;

2.             notent avec intérêt les informations détaillées fournies par les autorités bulgares dans la majorité de ces affaires au sujet de l’examen par les organes d’enquête de la possibilité de mener de nouvelles enquêtes ;  

3.             invitent les autorités bulgares à fournir des informations complémentaires à cet égard, notamment en ce qui concerne les cas dans lesquels les organes d’enquête ont conclu qu’il n’était pas nécessaire de mener de nouvelles enquêtes, ainsi qu’à fournir des informations sur les affaires plus récentes ;

4.             invitent les autorités bulgares à fournir également des informations sur les mesures de caractère général, en particulier sur des mesures visant à améliorer la formation de la police en matière de droits de l'homme et à assurer l’indépendance des enquêtes et la mise en œuvre effective des garanties procédurales pendant la garde à vue ;

5.             décident de reprendre l’examen de ces points au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), pour l’examen de toutes les mesures nécessaires à l’exécution de ces arrêts.

- Affaires concernant les mauvaises conditions de détention des requérants et / ou le défaut d’enquête effective à ce titre

41035/98          Kehayov, arrêt du 18/01/2005, définitif le 18/04/2005

55389/00          Dobrev, arrêt du 10/08/2006, définitif le 10/11/2006

61507/00          Georgiev Andrei, arrêt du 26/07/2007, définitif le 26/10/2007

44082/98          I.I., arrêt du 09/06/2005, définitif le 09/09/2005

41211/98          Iovchev, arrêt du 02/02/2006, définitif le 02/05/2006

57830/00          Malechkov, arrêt du 28/06/2007, définitif le 28/09/2007

49438/99          Staykov, arrêt du 12/10/2006, définitif le 12/01/2007

50765/99          Todorov Todor, arrêt du 05/04/2007, définitif le 05/07/2007

56856/00          Yordanov, arrêt du 10/08/2006, définitif le 10/11/2006

Ces affaires concernent les mauvaises conditions de détention des requérants, entre 1996 et 2000, qualifiées de traitement dégradant, dans les différents locaux du Service d'investigation (de Plovdiv, de Shoumen Pazardjik et de Varna) et prisons (Pazardzhik et Varna) (violations de l'article 3). Les affaires Iovchev et Georgiev Andrei concernent également l'absence de recours effectif à cet égard (violation de l'article 13).

Ces affaires concernent également différentes violations liées à la détention provisoire des requérants (violations de l'article 5§§1, 3, 4 et 5).

Des affaires Dobrev et Yordanov ont trait en outre aux atteintes au droit des requérants au respect de leur domicile dans la mesure où leur domicile a été perquisitionné en 1999, en violation de la loi nationale (violations de l'article 8).

Enfin, l'affaire Iovchev a trait à la durée excessive de la procédure pénale engagée contre le requérant en 1996 (violation de l'article 6§1).

Mesures de caractère individuel : M. Kehayov n'est plus détenu dans les conditions critiquées dans cet arrêt. Les autres requérants ont été libérés. Suite à sa libération en 1999, le requérant dans l’affaire Todorov Todor a été condamné à une peine de prison mais la Cour a examiné uniquement les conditions de sa détention jusqu’en 1999. Le préjudice moral que les requérants ont subi en raison des violations de la Convention a été indemnisé par la Cour européenne.

La procédure pénale dans l'affaire Iovchev a été close le 12/02/2003. 


Mesures de caractère général :

• Les autorités bulgares ont fourni des informations complémentaires (lettre du 14/06/07). Le Secrétariat est en train de les examiner.

            1) Violation de l'article 3 (conditions de détention) :

• Informations fournies par les autorités bulgares : des plans d'action concernant l'exécution des arrêts Kehayov et I.I. ont été fournis en février 2006. Ils prévoient la publication et la diffusion des arrêts de la Cour européenne et indiquent que le Comité des Ministres sera informé de tous les changements et bonnes pratiques adoptés dans les services d'investigation pour garantir les droits des détenus.

Les arrêts Kehayov, I.I., Dobrev et Yordanov ont été publiés sur le site Internet du Ministère de la justice http://www.mjeli.government.bg. Par ailleurs, les autorités sont d'avis que les séminaires sur la Convention et la jurisprudence de la Cour européenne organisés par l'Institut national de la justice sont également des mesures pertinentes pour l'exécution des ces arrêts (plus de 23 séminaires pour plus de 798 participants - juges, procureurs, experts nationaux - ont eu lieu pour la période 2001-2006, dont 2 séminaires sur l'article 3). Des séminaires sont également prévus pour 2007, ils mettront l'accent sur les dispositions de la Convention dont la violation par la Bulgarie a été constatée dans les arrêts récents de la Cour européenne.

Les autorités bulgares ont également fourni des informations sur certaines mesures relatives à l'amélioration des conditions de détention à la prison de Pazardjik pour la période 1999-2002.

Informations demandées : sur les mesures visant l'amélioration des conditions de détention dans les services d'enquête (voir également les recommandations du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT), formulées dans son dernier rapport en date sur cette question, rapport de 2002, rendu public en 2004) et sur la diffusion des arrêts Kehayov et I.I.

            2) Violation de l'article 13 (recours effectif concernant les conditions de détention) : étant donné que cette violation est due en grande partie à l'approche trop formaliste des tribunaux concernant l'application de la loi sur la responsabilité délictuelle de l'Etat (selon cette approche l'existence d'un préjudice moral causé par de mauvaises conditions de détention ne peut être démontré qu'au moyen de preuve formelle, comme la déposition d'un témoin) et à la durée de la procédure en application de cette loi, la publication et la diffusion de l'arrêt de la Cour européenne dans l'affaire Iovchev aux juridictions compétentes semblent être des mesures suffisantes aux fins de l'exécution.

Informations demandées : sur les mesures concernant la violation de l'article 13. Des exemples démontrant les changements dans l'application de cette loi dans des cas similaires seraient appréciés.

            3) Violation de l'article 5§1 (illégalité de la détention du requérant en raison de l'absence d'une décision écrite, telle qu'exigée par le droit interne) : les affaires Dobrev et I.I. sont à rapprocher de l'affaire Anguelova (rubrique 4.2). Dans cette affaire les autorités ont indiqué notamment que dans une lettre circulaire du 13/03/2002 le Directeur de la Direction nationale de la police a rappelé à tous les chefs de directions régionales des services de police leur obligation de prendre toutes les mesures nécessaires afin d'assurer le strict respect des dispositions régissant la garde à vue.

            4) Violations de l'article 5§3 (droit d'être traduit devant un juge, durée excessive de la détention provisoire) et celle de l'article 5§4 dans les affaires Staykov et I.I. (absence de contrôle judiciaire effectif de la légalité de la détention du requérant) : ces affaires sont à rapprocher des affaires Assenov (arrêt du 28/10/1998) et Nikolova (arrêt du 25/03/1999), dont l'examen a été clos par les Résolutions ResDH(2000)109 et ResDH(2000)110 après une réforme de la procédure pénale qui a pris effet le 01/01/00.

            5) Violation de l'article 5§4 dans l'affaire Kehayov (refus opposé à l'avocat du requérant d'avoir accès au dossier) : l'affaire est à rapprocher de l'affaire Shishkov (arrêt du 09/01/2003) qui a été close à la suite de la diffusion de l'arrêt aux autorités compétentes avec une lettre circulaire attirant leur attention sur le fait que la pratique de refuser l'accès aux dossiers est contraire aux exigences de la Convention (Résolution CM/ResDH(2007)158).

6) Violation de l'article 5§4 (absence d'examen à bref délai des demandes de mise en liberté) : l'affaire Dobrev est à rapprocher de l'affaire Kolev (rubrique 4.2). 

            7) Violation de l'article 5§4 dans l'affaire Kehayov (du fait que l'avocat du requérant n'a pas été autorisé à le représenter à une des audiences) : la publication et la diffusion de l'arrêt de la Cour européenne aux juridictions pénales semblent être des mesures suffisantes pour prévenir de nouvelles violations similaires. En effet, la Cour a constaté que le défaut allégué dans le pouvoir de représentation ne justifiait pas la décision privant le requérant de sa défense, non seulement sous l'angle de l'article 5 de la Convention, mais également eu égard aux dispositions pertinentes du droit interne.

Informations fournies : Les arrêts Kehayov et I.I. ont été publiés sur le site Internet du Ministère de la justice http://www.mjeli.government.bg.

Des informations sont attendues: sur la diffusion de l'arrêt Kehayov.  

            8) Violation de l'article 5§5 (inexistence d'un droit à réparation pour une détention contraire à l'article 5) : l'affaire Dobrev est à rapprocher de l'affaire Yankov (1013e réunion, décembre 2007, rubrique 4.2). 


            9) Violation de l'article 6§1 (durée excessive de la procédure pénale) : l'affaire Iovchev est à rapprocher de l'affaire Kitov (rubrique 4.2). 

10) Violations de l'article 8 dans les affaires Dobrev et Yordanov (fouilles du domicile en violation du droit interne) : Compte tenu du développement de l'effet direct accordé par les juridictions bulgares à la Convention et à la jurisprudence de la Cour, la diffusion d’un de ces arrêts aux autorités compétentes semblent être des mesures suffisantes aux fins de l'exécution.

Des informations sont attendues à cet égard.  

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales, en particulier les améliorations des conditions de détention dans les locaux du service d'investigation, et d’une évaluation des informations déjà fournies.

57045/00           Zhechev, arrêt du 21/06/2007, définitif le 21/09/2007

L’affaire concerne le refus injustifié des autorités d’enregistrer une association en 1999 au motif que ses buts étaient « politique » et allaient à l’encontre de la Constitution (violation de l’article 11).

Concernant le caractère « politique » allégué de l’association, la Cour européenne a estimé que, étant donné que les associations n’étaient pas autorisées à participer aux élections nationales, locales ou européennes, il n’existait pas de besoin social impérieux pour exiger que chaque association poursuivant des buts politiques soit enregistrée comme un parti politique. En outre, le sens précis du terme « politique » semblait être assez vague selon la loi bulgare. Ainsi, dans cette affaire, les juridictions nationales ont considéré qu’une campagne menée en faveur de la restauration de la Constitution de 1879 et de la monarchie faisait partie de cette catégorie. Dans un autre cas, les juridictions ont déclaré que la tenue de réunions et d’autre types de campagnes publiques par une association en vue de réalisation des droits présumés des minorités représentaient également des objectifs politiques (voir l’arrêt dans l’affaire UMO Ilinden et autres, arrêt du 19/01/2006). La Cour Constitutionnelle a adopté, pour sa part, une définition différente du terme « politique » centrée sur « la participation dans le processus de formation des organes à travers desquels les personnes exercent leur pouvoir » (arrêt du 21/04/1992). Par conséquent, la Cour européenne a estimé qu’une classification fondée sur ce critère est susceptible de produire des résultats incohérents et d’engendrer une incertitude considérable parmi les personnes désireuse d’enregistrer une association.

Concernant l’incompatibilité alléguée des buts de l’association avec la Constitution de 1991, la Cour européenne a observé que prôner la restauration de la monarchie ou faire campagne pour un changement des structures légales ou constitutionnelles n’étaient pas en soi incompatibles avec les principes de la démocratie, car rien ne permettait non plus de suggérer que cette association aurait utilisé des moyens violents ou non démocratiques pour achever ses buts.

Mesures de caractère individuel : le requérant qui était l’un des fondateurs de l’association en question, a la possibilité de demander à nouveau l’enregistrement de l’association. Cependant, il semble que les mesures individuelles sont liées de près aux mesures de caractère général (voir ci-dessous).

Des informations seraient utiles sur la situation actuelle du requérant.

Mesures de caractère général:

1) Des buts « politiques » utilisés comme motif pour refuser l’enregistrement de l’association : l’interdiction pour les associations de poursuivre des buts politiques ou de s’engager dans des activités politiques propres uniquement aux partis politiques, sur laquelle était fondé le refus des cours nationales d’enregistrer l’association du requérant, est prévue à l’article 12§2 de la Constitution de 1991.

Les autorités bulgares sont invitées à fournir des informations sur les mesures envisagées ou déjà prises pour remédier aux lacunes identifiées dans cet arrêt par la Cour européenne.

2) Incompatibilité des buts de l’association avec la Constitution : les solutions à ce problème font partie des discussions dans le cadre de l’arrêt UMO Ilinden et autres (rubrique 4.2).

Des informations sont attendues sur la publication de cet arrêt et sa diffusion large aux autorités compétentes.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard à leur 1ère réunion DH en 2009, à la lumière d’un plan d’action à fournir par les autorités bulgares pour la mise en œuvre de cet arrêt.


- Affaires concernant la dissolution d'un parti politique et le refus d'enregistrement d'une association visant « la reconnaissance de la minorité macédonienne de Bulgarie »

59489/00          Organisation macédonienne unie Ilinden - Pirin et autres, arrêt du 20/10/2005, définitif le 20/01/2006

59491/00          Organisation macédonienne unie Ilinden et autres, arrêt du 19/01/2006, définitif le 19/04/2006

                       CM/Inf/DH(2007)8

La première affaire a trait à la dissolution injustifiée du parti requérant en 2000 par la Cour constitutionnelle qui a estimé que le parti avait prôné le séparatisme et avait donc mis en danger l'intégrité territoriale de la Bulgarie. La deuxième affaire concerne le refus des tribunaux compétents d'enregistrer l'association Ilinden en 1998-1999, basé sur des motifs insuffisants à justifier une mesure aussi radicale (violations de l'article 11).

La Cour européenne a conclu dans ces affaires que ces mesures restrictives radicales adoptées par les autorités étaient prévues par la loi et poursuivaient un but légitime mais n'étaient pas « nécessaire dans une société démocratique » dans la mesure où les requérants n'avaient pas préconisé l'utilisation de la violence ou d'autres moyens contraires aux principes démocratiques en vue d'atteindre leurs objectifs et n'avaient entrepris aucune action concrète pouvant effectivement menacer la sécurité nationale. Elle a réitéré à cet égard que le fait qu'un groupe de personnes appelle à l'autonomie ou même demande la sécession d'une partie du territoire d'un pays - exigeant par là des modifications constitutionnelles et territoriales fondamentales - ne justifie pas nécessairement une ingérence dans les droits garantis par l'article 11. Quant au style virulent de l'organisation Ilinden et à ses critiques acerbes vis-à-vis des autorités, la Cour a rappelé que la liberté d'expression vaut non seulement pour les « informations » ou « idées » accueillies avec faveur ou considérées comme inoffensives ou indifférentes, mais aussi pour celles qui heurtent, choquent ou inquiètent l'État ou une fraction quelconque de la population (§76 de l'arrêt OMU Ilinden et autres).

Mesures de caractère individuel : 

            1) Réenregistrement du parti politique :  

- Première demande de réenregistrement (2006-2007) : afin d'effacer les conséquences de sa dissolution injustifiée et au vu du fait que le parti disposait de plus de 6 000 membres à cette époque, les représentants d'OMU Ilinden - Pirin ont décidé d'introduire une demande d'enregistrement de leur parti en vertu de la nouvelle loi sur les partis politiques de 2005, nonobstant le fait que cette loi a porté le nombre de membres exigés pour un nouveau parti politique de 500 à 5 000. La demande a été rejetée par le tribunal de la ville de Sofia en octobre 2006. Les raisons évoquées par le tribunal concernent principalement les vices de forme qu'auraient présentés les déclarations individuelles d'adhésion au parti, ce qui rendrait l'assemblée constitutive non conforme aux exigences de la loi sur les partis politiques et impliquerait la non-validité des statuts et des autres documents adoptés lors de cette assemblée. La Cour suprême de cassation a confirmé la décision de la première instance (décision du 14/02/2007). Selon la haute juridiction les documents présentés ne permettaient pas d'identifier les membres du Comité d'initiative (qui convoque l'assemblée constitutive et élabore certains documents nécessaires à la création d'un parti politique), et donc de vérifier si ces personnes répondaient aux exigences de la loi. Elle n'a pas estimé que les allégations d'irrégularité avancées en ce qui concerne la liste de membres du parti fussent pertinentes pour son examen de l'affaire.

Les requérants ont adressé plusieurs plaintes au Comité au sujet de cette procédure d'enregistrement. Les autorités ont observé en réponse que l'arrêt de la Cour européenne n'impliquerait pas l'enregistrement automatique d'un nouveau parti politique et que la nouvelle procédure d'enregistrement ne serait pas liée à l'exécution de cet arrêt. Le Secrétariat a rappelé à cet égard que l'exigence d'effacer les conséquences des violations constatées (dans la mesure du possible restitutio in integrum) implique selon la pratique des Etats et du Comité des Ministres que les requérants disposent de la possibilité d'obtenir un nouvel enregistrement de leur parti, sauf si des raisons conformes à la Convention s'y opposent (voir pour plus de détails le CM/Inf/DH(2007)8).

Les requérants ont également allégué devant le Comité que des actions de la police (en marge de la procédure d'enregistrement - la police a interrogé les membres du « parti ») avaient eu un but d'intimidation (pour plus de détails voir les DD(2006)651, DD(2006)699 et DD(2007)183). Ils ont indiqué que, suite à ces actions, ils n’étaient plus en mesure de recueillir les 5 000 membres aujourd'hui requis pour un nouveau parti politique. Les autorités ont répondu à cet égard que les enquêtes menées par la police avaient été ordonnées par le parquet sur la base d'indications que des irrégularités avaient été commises et des documents avaient été falsifiés en vue de l'enregistrement de ce parti (pour plus de détails voir le DD(2006)716). Selon les requérants certaines procédures engagées sur des faits liés à la constitution du parti étaient toujours en cours en mars 2007 (voir le DD(2007)183). Le Secrétariat note que la Cour Suprême de cassation n'a pas estimé les enquêtes menées pertinentes pour son examen de l'affaire.


- Deuxième demande de réenregistrement (2007):

Face à la situation décrite ci-dessus, OMU Ilinden - Pirin s'est plaint du formalisme excessif des tribunaux et du fait qu'une nouvelle procédure d'enregistrement sur la base de la nouvelle loi sur les partis politique serait vouée à l'échec vu les problèmes survenus pour répondre à l'exigence de 5 000 membres. Ils ont rappelé à cet égard que selon les dispositions transitoires, les partis existants ne sont pas soumis à un nouvel enregistrement et par conséquent peuvent continuer à exister même s'ils ne répondent pas aux exigences requises pour un nouvel enregistrement. Si le parti de l'organisation requérante n'avait pas été dissout en 2000, il n'aurait pas été soumis à l'exigence des 5 000 membres. Au vu de ces problèmes particuliers, le Comité a invité le Secrétariat en coopération avec les autorités bulgares et les requérants à examiner rapidement les voies à la disposition des requérants afin d'obtenir l'enregistrement d'OMU Ilinden-Pirin (voir la décision adoptée lors de la 997e réunion, juin 2007).

Suite aux consultations du Secrétariat avec les autorités et les représentants d'OMU Ilinden - Pirin, le Secrétariat a envoyé une lettre aux autorités bulgares suggérant que la façon la plus appropriée et la plus rapide pour effacer les conséquences de la violation constatée par la Cour européenne - et donc obtenir l'enregistrement rapide du parti  - semblait être une nouvelle demande d'enregistrement sur la base de la nouvelle loi sur les partis politiques. En effet, cette loi, si elle était interprétée à la lumière des obligations de la Bulgarie suite à l'arrêt de la Cour, semblait pouvoir autoriser un enregistrement sur la base de la liste de 6 000 membres présentée devant les tribunaux dans le cadre de la procédure d'enregistrement de 2006‑2007. Suite à ces informations, les requérants ont tout de suite refondé leur parti politique, encore une fois avec le même programme que lors de sa dissolution. Ils ont déposé une nouvelle demande d'enregistrement fin juillet sur la base de la liste de 6 000 membres, recueillie en 2006. Le procureur s'est prononcé contre l'enregistrement estimant la liste de membres « périmée » et le programme contraire à la Constitution. Cette nouvelle demande a été rejetée par le tribunal de la ville de Sofia (décision du 23/08/2007). Dans sa décision, le tribunal n’a fait aucune référence à l'arrêt de la Cour européenne concernant OMU Ilinden - Pirin et a procédé à une interprétation très restrictive et formaliste de la nouvelle loi sur les partis politiques. En ce qui concerne le programme politique, le tribunal a réitéré les motifs d’inconstitutionnalité incriminés par la Cour européenne dans cette affaire. Le tribunal a en outre estimé la liste de membres invalide et a relevé un certain nombre de vices de forme. La décision de première instance a été confirmée par la Cour suprême de cassation (décision du 11/10/2007). La haute juridiction a indiqué que la décision de première instance était correcte et qu’elle ne devrait pas être annulée. Les motifs évoqués par la Cour suprême de cassation concernent l’absence de mise à jour de la liste des membres du parti.

Questions en suspens : Elles concernent principalement le maintien, dans la nouvelle procédure d’enregistrement, des exigences plus strictes de la nouvelle loi sur les partis politiques, s’agissant du nombre minimal de membres requis, exigences qui n’auraient pas été applicables au parti s’il n’avait pas été dissout. Reste en suspens également la question de savoir quelles seront les conséquences de la dernière décision de la Cour suprême de cassation qui a confirmé la décision de première instance sans rejeter clairement les motifs évoqués par celle-ci concernant l’inconstitutionnalité des statuts d’UMO Ilinden –Pirin. 

Développement : Dans sa plus récente décision dans cette affaire, en octobre 2007 (1007e réunion), le Comité a pris note des différents problèmes que pose toujours la question des mesures individuelles et a invité les autorités bulgares en coopération avec le Secrétariat a examiner les solutions possibles à ces problèmes dans le cadre de l’ordre juridique bulgare. Un séminaire sur ces questions a eu lieu les 17-18/12/2007, avec notamment la participation de la Cour suprême de cassation, du tribunal de la ville de Sofia et du parquet. Des consultations sont en cours à ce sujet entre le Secrétariat et la délégation bulgare. Le premier refus de réenregistrement a fait l’objet d’une nouvelle requête devant la Cour Européenne. Enfin, les requérants se sont plaints récemment de nouvelles actions de la police à l’égard de leurs membres (voir DD(2008)312).

            2) Nouvel enregistrement de l'association : la Cour européenne a noté dans la deuxième affaire qu'en 2002-2004 les tribunaux compétents avaient de nouveau refusé l'enregistrement de l'association requérante. Ces faits font l'objet d'une nouvelle requête, actuellement pendante devant la Cour. Les requérants n'ont pas fait état d'une nouvelle demande d'enregistrement suite à l'arrêt de la Cour. Les autorités ont toutefois indiqué qu'il leur semble probable, vu l'effet direct que devrait accorder les autorités à la Convention et aux arrêts de la Cour européenne, qu'une éventuelle nouvelle demande soit examinée dans le respect des exigences de la Convention (voir aussi les mesures générales).


Mesures de caractère général :

            1) Dissolution de partis politiques : il est relevé que l'arrêt incriminé de la Cour Constitutionnelle était inspiré par la Convention et la jurisprudence de la Cour européenne telle qu'elle existait à l'époque et que 3 des 12 juges ont voté contre la dissolution pour des motifs très semblables à ceux retenus par la Cour européenne. Dans cette situation, et vu l'effet direct des arrêts de la Cour européenne en droit bulgare, le gouvernement a estimé suffisant d'envoyer l'arrêt « Organisation macédonienne unie Ilinden – Pirin » à la Cour constitutionnelle, ainsi qu'aux tribunaux compétents pour l'enregistrement des partis politiques, afin d'assurer une interprétation du droit bulgare conforme à la Convention et ainsi prévenir de nouvelles violations similaires à celle constatée par la Cour européenne. Cette diffusion a été effectuée avec une lettre attirant l'attention de ces tribunaux sur le fait que cette communication est faite dans le cadre des mesures générales pour assurer l'exécution de l'arrêt de la Cour. De plus, en vue de la sensibilisation des autorités compétentes, un manuel sous forme de CD, préparé par l'Institut national de la justice, a été envoyé à 153 tribunaux, le même nombre de bureaux du procureur et à 29 bureaux d'investigation. Le manuel contient des exemples de la jurisprudence de la Cour européenne dans le domaine de la liberté d'association et de réunion, ainsi que des articles, études et autre matériel concernant ces domaines. Ce manuel peut être téléchargé sur Internet, à partir de http://www.blhr.org/bibl.htm.

Développement : un séminaire pour juges et procureurs sur la liberté d’association et de réunion a été organisé par l’Institut national de la justice en octobre 2007 avec la participation du Conseil de l’Europe. Un autre séminaire sur ce thème, pour juges, procureurs, représentants du bureau de l’Ombudsman, avocats et ONG a été organisé par le Ministère de la Justice et le Service de l’exécution des arrêts en décembre 2007. Une activité de formation concernant en particulier les maires et les chefs de police s’est déroulée au mois de mai 2008. 

Des contacts sont en cours concernant ces mesures de formation et de sensibilisation.

            2) Enregistrement des associations : l'arrêt dans l'affaire « Organisation macédonienne unie Ilinden et autres » a été envoyé au tribunal de la ville de Sofia et à la Cour suprême de cassation avec une lettre attirant leur attention sur leurs obligations en vertu de la Convention. Les deux arrêts ont été envoyés au tribunal régional de Blagoevgrad et à la Cour d'appel de Sofia (compétents pour l'enregistrement des associations dans la région concernée), accompagnés d'une lettre signalant à ces tribunaux que cette communication est faite dans le cadre des mesures générales pour assurer l'exécution des arrêts de la Cour. Les mesures de sensibilisation et de formation mentionnées ci-dessus sont également pertinentes pour la question de l’enregistrement des associations.

            3) Publication : les arrêts de la Cour européenne ont été publiés sur le site Internet du Ministère de la justice http://www.mjeli.government.bg afin d'attirer l'attention du public, ainsi que d'autres autorités pouvant être amenées à agir dans ce domaine, sur les exigences de la Convention en la matière. Les arrêts ont également été publiés dans la revue trimestrielle Intégration et droit européens, une publication du Ministère de la justice tirée à 1 000 exemplaires et distribuée aux magistrats et au milieu universitaire (n°2/2006), accompagnés d'un article analysant les conclusions de la Cour européenne dans ces affaires, ainsi que sa jurisprudence en la matière.   

Les Délégués,

1.             rappellent la décision du Comité des Ministres adoptée lors de la 1007e réunion (15‑17 octobre 2007) (DH) ;

2.             relèvent les questions qui restent soulevées par les mesures individuelles, notamment par rapport à certaines motivations retenues pour fonder le dernier refus d’enregistrement d’OMU Ilinden–Pirin et invitent les autorités bulgares à continuer à examiner les solutions possibles en coopération avec le Secrétariat ; 

3.             constatent à cet égard que les requérants ont fait part de leur intention de déposer une nouvelle demande d’enregistrement et invitent les autorités bulgares à tenir le Comité informé sur les développements à ce sujet ;

4.             prennent note des plaintes des requérants dans l’affaire d’OMU Ilinden–Pirin quant aux enquêtes menées sur certains de leurs membres et des réponses apportées par les autorités bulgares à cet égard ;

5.             prennent note avec intérêt des différentes activités de formation concernant la liberté d’association et de réunion qui ont été organisées par les autorités bulgares avec la participation du Conseil de l’Europe, dans le but de sensibiliser les autorités compétentes aux exigences de la Convention et arrêts de la Cour européenne en ces domaines ;

6.             relèvent que des activités de sensibilisation complémentaires sont en cours et encouragent les autorités bulgares à poursuivre en coopération avec le Conseil de l’Europe leurs efforts en ce sens ;

7.             décident de reprendre l’examen de toutes les mesures nécessaires à l’exécution de ces arrêts au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH).


- Affaires concernant des atteintes à la liberté de réunion d'organisations visant « la reconnaissance de la minorité macédonienne de Bulgarie » et de leurs membres

44079/98          Organisation macédonienne unie Ilinden et Ivanov, arrêt du 20/10/2005, définitif le 15/02/2006

46336/99          Ivanov et autres, arrêt du 24/11/2005, définitif le 24/02/2006

Ces affaires ont trait au fait que les autorités ont interdit, de manière injustifiée, aux requérants de tenir plusieurs réunions commémoratives entre 1998 et 2003 dans la région du sud-ouest de la Bulgarie et à Sofia (violations de l'article 11).

La Cour européenne a noté avec préoccupation qu'une des interdictions avait été imposée en 2003 sur des motifs qui auparavant avaient été déclarés contraires à la Convention dans l'affaire Stankov et Organisation macédonienne unie Ilinden contre la Bulgarie (arrêt du 02/10/2001). La Cour européenne a également relevé qu'à une occasion les autorités se sont montrées peu empressées à prendre des mesures appropriées pour empêcher des actes de violence dirigés contre les participants au rassemblement d'Ilinden.

L'affaire Ivanov et autres a trait également à l'absence de recours effectif à la disposition des requérants pour se plaindre des interdictions de leurs réunions (violation de l'article 13). La Cour européenne a noté que la possibilité de faire appel d'une telle interdiction devant les tribunaux en vertu de l'article 12§6 de la loi sur les réunions et manifestations revêtait en théorie un caractère effectif. Toutefois, il a été privé d'effectivité dans le cas des requérants en raison de l'application qui en a été faite par les tribunaux saisis de la question.

La Cour a rappelé sa jurisprudence selon laquelle des motifs tels que la menace à l'ordre public ou le danger pour l'intégrité territoriale et la sécurité nationale ne peuvent justifier des restrictions à la liberté de réunion dans des cas où il n'y a pas de risque réel d'actes de violence et où les organisateurs des manifestations en question ne préconisent pas l'utilisation de la violence ou d'autres moyens contraires aux principes démocratiques en vue d'atteindre leurs objectifs (voir également l'arrêt Stankov et OMU Ilinden c. Bulgarie, précité). Elle a également noté que la possibilité que certains participants dans les réunions d'Ilinden affichent des slogans à caractère séparatiste n'était pas suffisante en soi pour justifier l'interdiction de ces réunions. 

Mesures de caractère individuel : Les autorités bulgares ont informé le Comité de ce qu'au cours de l'année 2006, seulement 2 des 10 demandes d'autorisation de l'organisation de réunions avaient été rejetées. L'un des refus concerne l'utilisation d'une salle qui avait été réservée pour un autre événement ; les informations fournies ne contiennent pas de précisions sur le deuxième rejet. La police a assuré la sécurité des participants et l'ordre public lors des réunions autorisées. Toutefois, il convient de noter que deux autres requêtes sont actuellement pendantes devant la Cour européenne concernant des interdictions de réunions des requérants, qui étaient prévues respectivement entre 2004-2006 et en septembre 2006.

De surcroît, les requérants se sont plaints devant le Comité en avril 2007 de l'interdiction par le gouverneur de la région de Blagoevgrad d'une réunion commémorative qu'ils avaient prévue pour le 22/04/2007 (voir le DD(2007)224). Lors du dernier examen de ces affaires (juin 2007, 997e réunion), le Comité a pris note avec préoccupation de cette interdiction basée sur des motifs similaires à ceux déjà incriminés par la Cour européenne, mais a noté à cet égard avec satisfaction que la réunion en question avait néanmoins pu avoir lieu, notamment suite à l'intervention de l'agent du Gouvernement. Le Comité a invité les autorités bulgares à prendre toutes les mesures complémentaires nécessaires destinées à garantir efficacement la liberté de réunion d'OMU Ilinden - Pirin et des autres requérants et de s'assurer de l'efficacité des recours nationaux à cet égard.

En octobre 2007 les requérants ont soumis des informations complémentaires sur la réunion commémorative prévue pour le 22/04/2007. Selon eux, en réalité la réunion en question n’a pas pu avoir lieu puisqu’ils se plaignent d’avoir rencontré différents problèmes concernant le transport des participants, le comportement de la police, ainsi que le fait qu’ils n’ont pas été autorisés à utiliser de la musique, tenir des discours, déposer des gerbes et hisser des drapeaux. Les requérants ont déposé une nouvelle requête devant la Cour européenne au sujet de ces faits.

Des informations sont attendues sur les mesures envisagées par les autorités afin de garantir la liberté de réunion des requérants et l’efficacité des recours internes à cet égard (voir également les mesures générales). .

Mesures de caractère général :

            1) Organisation de réunions pacifiques: Les autorités ont rappelé que déjà suite à l'arrêt Stankov et Organisation macédonienne unie Ilinden de 2001 (Résolution finale ResDH(2004)78), cet arrêt, en traduction bulgare, avait été envoyé, accompagné d'une lettre circulaire, aux maires des villes de Petrich et Sandanski qui étaient directement concernés par cette affaire. Vu que les violations constatées dans les présentes affaires concernent également d'autres villes, les arrêts de la Cour européenne ont été envoyés également aux maires des villes de Sofia et Blagoevgrad afin d'attirer leur attention sur les exigences de la Convention et assurer une interprétation du droit bulgare conforme à la Convention.

Les arrêts ont également été envoyés aux tribunaux de district des villes ci-dessus, ainsi qu'aux procureurs compétents et aux directeurs du Service national de sécurité, de la Direction de la police de Sofia et de la Direction de l'intérieur de Blagoevgrad.


La diffusion des arrêts a été effectuée moyennant une lettre attirant l'attention de ces autorités sur les principales conclusions de la Cour dans ces affaires, ainsi que sur le fait que cette communication était faite dans le cadre des mesures générales pour assurer l'exécution des arrêts de la Cour.

Les deux arrêts ont également été inclus en 2007 dans la série de séminaires sur la Convention et la jurisprudence de la Cour européenne organisés par l'Institut national de la justice (plus de 23 séminaires pour plus de 798 participants - juges, procureurs, experts nationaux - ont eu lieu pour la période 2001-2006, dont 3 séminaires sur l'article 11). Un séminaire pour juges et procureurs sur la liberté d’association et de réunion a été organisé par l’Institut national de la justice en octobre 2007 avec la participation du Conseil de l’Europe. Un autre séminaire sur ce thème, pour juges, procureurs, représentants du bureau de l’ombudsman, avocats et ONG a été organisé par le Ministère de la justice et le Service de l’exécution des arrêts en décembre 2007. Une activité de formation concernant en particulier les maires et les chefs de police s’est déroulée au mois de mai 2008. 

Des contacts sont en cours concernant ces mesures de formation et de sensibilisation.

                   2) Recours efficace : Une réflexion a été menée au sein du Ministère de la justice sur la nécessité d'amender la loi sur les réunions et les manifestations. En juin 2007 les autorités ont informé le Comité de ce qu'un projet de loi portant amendement à la loi sur les réunions et les manifestations serait examiné prochainement par le Parlement. Le projet prévoit que les organisateurs de réunions ou de manifestations à l'extérieur doivent en informer le bureau du maire de la commune concernée au moins 48 heures à l'avance. Le maire peut interdire une manifestation pour des raisons énumérées dans le projet de loi au plus tard dans les 24 heures suivant la notification par les organisateurs. Cette décision peut faire l'objet d'un appel devant le tribunal de district compétent. Le tribunal doit se prononcer dans un délai de 3 jours. Sa décision est définitive.  

Evaluation : les motifs pour lesquels une réunion peut être interdite, en vertu de la loi en vigueur, semblent permettre la prise en compte des exigences de la Convention, eu égard notamment aux activités de formation en cours. Ils ne sont pas modifiés par le projet de loi. En revanche, les autorités bulgares ont été invitées à considérer la possibilité de mieux agencer les différents délais prévus dans le projet de loi afin de permettre qu'un recours contre l'interdiction d'une réunion puisse être examiné avant la date prévue pour cette réunion (voir la décision adoptée par le Comité des Ministres lors de leur 1007e réunion (octobre 2007)).

Des informations sont attendues à ce sujet, ainsi que sur le calendrier prévu pour l'adoption du projet de loi modifiant la loi sur les réunions et les manifestations.

Les Délégués,

1.             notent avec intérêt les différentes activités de formation concernant la liberté d’association et de réunion qui ont été organisées par les autorités bulgares avec la participation du Conseil de l’Europe, dans le but de sensibiliser les autorités compétentes aux exigences de la Convention et arrêts de la Cour européenne en ce domaine ;

2.             prennent note des informations fournies par les autorités bulgares sur l’état d’avancement du projet de loi visant à amender la loi sur les réunions et les manifestations et les invitent à fournir une copie du texte de ce projet, ainsi que le calendrier prévisionnel de son adoption ;

3.             invitent également les autorités bulgares à continuer à tenir le Comité des Ministres informé de la situation actuelle des requérants en ce qui concerne l’exercice de leur liberté de réunion ;

4.             décident de reprendre l’examen de toutes les mesures nécessaires à l’exécution de ces arrêts au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH).

60018/00          Bonev, arrêt du 08/06/2006, définitif le 08/09/2006

L’affaire concerne l’iniquité du procès du requérant du fait qu’il n’a pas pu contre interroger les témoins dont les dépositions avaient pour l’essentiel servi à sa condamnation en 1999 (violation de l’article 6§§1 et 3 d)). Le tribunal compétent, ayant estimé que ces témoins ne pouvaient être convoqués lors du procès, l’un d’entre eux étant décédé est l’autre ne résidant pas à l’adresse indiquée (et apparemment sans domicile fixe), a inclus au dossier leurs dépositions faites au stade de l’enquête préliminaire, après avoir obtenu le consentement du requérant. Le requérant a interjeté appel en vain.

La Cour européenne a estimé que le requérant n’avait pas valablement renoncé à ses droits en vertu de l’article 6 de la Convention puisqu’il n‘était pas représenté pas un avocat lorsqu’il avait donné son consentement concernant l’inclusion des dépositions des témoins au dossier et, de plus, il n’avait pas été averti des conséquences de cet acte. Elle a noté, en outre, qu’aucun effort n’avait été fait pour retrouver l’unique témoin oculaire en vie, alors que le requérant était accusé de meurtre et risquait une lourde peine.

Mesures de caractère individuel : le requérant a été condamné en 1999 à dix ans d’emprisonnement. Selon le Code de procédure pénale (articles 421§2 et 422§1, p. 4), lorsqu'un arrêt de la Cour européenne a constaté une violation de la Convention qui est déterminante pour la procédure pénale, le procureur général doit demander la réouverture de la procédure en question, dans un délai d'un mois à compter du moment où il a pris connaissance de l'arrêt de la Cour européenne.

Des informations sont attendues sur la situation actuelle du requérant et sur une éventuelle demande de réouverture de son procès.


Mesures de caractère général : Les dépositions des témoins concernés par cette affaire ont été incluses au dossier sur la base de l’article 279§1, pp. 4 et 5 du Code de procédure pénale de 1974. Selon la première disposition, la déposition d’un témoin, faite au stade de l’enquête préliminaire peut être lue et incluse au dossier, si le témoin est décédé ou s’il ne peut pas être retrouvé pour être convoqué. Selon la deuxième disposition, cela peut être également fait avec l’accord des parties, si le témoin, valablement convoqué, ne se présente pas.

Selon une nouvelle disposition, introduite en 2003 (article 279§3), dans les conditions citées au §1 (ci‑dessus) les dépositions faites au stade de l’enquête préliminaire peuvent être incluses au dossier avec le consentement des parties. Dans ce cas, le tribunal a l’obligation soit de désigner un avocat à l’accusé, s’il le désire et s’il n’est pas représenté, soit de lui expliquer au préalable quelles seront les conséquences de son consentement. Ce cadre législatif a été repris par le nouveau Code de procédure pénale de 2006 (art. 281§§1 et 3).

Evaluation : Dans la mesure où il semble toujours exister une possibilité d’inclure au dossier pénal des dépositions de témoins faites au stade de l’enquête préliminaire, sans le consentement de l’accusé, il serait nécessaire de diffuser l’arrêt de la Cour européenne aux tribunaux pénaux, afin d’attirer leur attention en particulier sur la nécessité d’effectuer des recherches approfondies afin de localiser le témoin en question, avant de conclure qu’il ne peut pas être retrouvé.

Il convient de noter, dans ce contexte, que deux décisions de la Cour suprême, de 1981 et 1991, vont dans ce sens, mais n’ont pas été suivies en l’espèce (§31 de l’arrêt de la Cour européenne).

L’arrêt de la Cour européenne a été publié sur le site Internet du Ministère de la justice www.mjeli.government.bg.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles, à savoir la possibilité d’une réouverture de la procédure, ainsi que sur les mesures générales, à savoir la diffusion de l’arrêt de la Cour européenne aux autorités compétentes.

49429/99          Capital Bank AD, arrêt du 24/11/2005, définitif le 24/02/2006

L'affaire concerne l'iniquité de la procédure ayant abouti à la liquidation forcée de la banque requérante en 2005 (violations de l'article 6§1). Les juridictions internes, saisies de l'affaire, se sont en effet estimées liées par le constat d'insolvabilité émanant de la Banque nationale, sans examiner son bien-fondé. De plus, comme la banque requérante était représentée par des personnes (les administrateurs spéciaux puis les liquidateurs) qui dépendaient de l'autre partie à la procédure (la Banque nationale), elle n'a pas été en mesure d'exposer sa position et de défendre ses intérêts dans de bonnes conditions. 

Enfin, l'impossibilité de contester le retrait de la licence de la banque concernée devant un organe indépendant, en vertu du droit applicable, a également porté atteinte au droit de la requérante au respect de ses biens (violation de l'article 1 du Protocole n° 1). 

Mesures de caractère individuel : La banque requérante a cessé d'exister en avril 2005. Son entreprise a été achetée par une autre banque qui s'est engagée à payer certaines sommes aux créditeurs.

A la suite de l'arrêt de la Cour européenne, les trois sociétés actionnaires de la Capital Bank (qui l'ont représentée devant la Cour européenne) ont initié plusieurs procédures visant l'annulation des décisions ayant abouti à sa liquidation.

Ils ont fait part au Comité des Ministres de leurs inquiétudes concernant le refus de la Cour suprême administrative et du parquet d'annuler les décisions en question :

- la Cour suprême administrative a refusé d'annuler la décision de la Banque nationale retirant la licence de la banque requérante (décision qui constitue le point de départ de la procédure de liquidation), du fait que le demandeur (un des actionnaires) n'était pas directement concerné par cette décision et que cette juridiction s'était déjà prononcée sur cette question en 2002 (décisions n°8088/17.07.2006 et n°11643/23.11.2006). De plus, la Cour suprême administrative a déclaré irrecevable le recours des actionnaires contre le refus tacite de la Banque nationale d'annuler elle-même la décision retirant la licence de la banque requérante, puisque cette décision a déjà fait l'objet d'un recours devant les tribunaux en 2002 (selon le droit interne, le refus tacite des organes administratifs d'annuler eux-mêmes leurs décisions ne peut faire l'objet d'un recours administratif que si la décision contestée elle-même n'a pas fait l'objet d'un appel devant les tribunaux)(décision n°659/22.01.2007).

- le bureau du procureur général a refusé de demander la réouverture de la procédure de liquidation, notant qu'au cours de la procédure contestée une des juridictions saisies avait examiné le bien fondé de la question de l'insolvabilité de la banque requérante (voir le §31 de l'arrêt de la Cour européenne) et que cette banque avait été vendue à une tierce personne de bonne foi (décisions des 07/04/2006, 30/05/2006 et 14/07/2006). Il convient de noter que l'article 231§1, lettre « z » du Code de procédure civile prévoit la possibilité d’une réouverture en principe.

- la Cour suprême de cassation a également refusé la réouverture de la procédure concernant la liquidation de la Capital Bank (décision du 12/04/2007). 

Les requérants ont soumis des observations détaillées pour se plaindre de leur situation.


Le Secrétariat est en train d’examiner les différentes informations soumises afin d’évaluer la nécessité d’autres mesures.

Mesures de caractère général :

            1) Violation de l'article 6§1 et de l'article 1 du Protocole n°1 (absence de contrôle indépendant du retrait de la licence de la banque requérante) : une nouvelle loi sur les institutions de crédit a été adoptée en juillet 2006. A la différence du droit applicable à l'époque des faits (article 21§5 de la loi sur les banques de 1997) qui excluait explicitement de tout contrôle judiciaire une décision de la Banque nationale retirant la licence d'une banque pour insolvabilité, la nouvelle loi prévoit que ce type de décisions pourra être contesté devant la Cour suprême administrative. La loi sur les institutions de crédit est entrée en vigueur le 01/01/2007.

Evaluation: dans ces circonstances, il semble qu'aucune mesure complémentaire ne s'impose concernant cette question. 

            2) Violation de l'article 6§1 (représentation partiale de la banque requérante au cours de la procédure de liquidation) : une modification dans la loi sur l'insolvabilité des banques introduite en juillet 2006 prévoit que les actionnaires qui possèdent plus de 5% des actions d'une banque peuvent participer à la procédure concernant sa liquidation forcée (article11§4). Cependant, la disposition selon laquelle seuls les administrateurs spéciaux nommés par la Banque nationale, le procureur et les représentants de la Banque nationale peuvent faire appel d'une décision judiciaire ordonnant la mise en liquidation, reste inchangée (article 16§1 de la loi sur l'insolvabilité des banques).

Des informations sont attendues sur les mesures envisagées par les autorités à cet égard.

            3) Publication et diffusion : l'arrêt de la Cour européenne a été publié sur le site Internet du Ministère de la justice www.mjeli.government.bg.

La confirmation de sa diffusion à la Banque nationale et aux tribunaux compétents est attendue. 

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), aux fins de l’examen des mesures individuelles et générales.

57785/00          Zlínsat, spol. S. r.o., arrêt du 15/06/2006, définitif le 15/09/2006 et du 10/01/2008, définitif le 10/04/2008

L’affaire concerne l’absence de recours judiciaire sur des décisions prises par le parquet concernant la possession et l’usage d’un hôtel par la société requérante. A cet égard, en juillet et octobre 1997 le parquet avait suspendu l’exécution d’un contrat de privation de cet hôtel, conclu par la société requérante, et avait ordonné son éviction de la propriété en question, au motif que le contrat avait été conclu dans des conditions manifestement désavantageuses pour l’Etat.

La Cour européenne a estimé que dans la mesure où le parquet ne pouvait passer pour une instance judiciaire indépendante et impartiale, aucune raison ne justifiait l’absence de recours judiciaires sur ses décisions en matière civile (violation de l’article 6§1).

L’affaire concerne en outre l’ingérence dans le droit de la requérante au respect de ses biens. La Cour européenne a estimé que cette ingérence était illégale dans la mesure où les décisions du parquet qui ne pouvaient pas être contrôlées par un tribunal étaient basées sur des dispositions légales rédigées en des termes particulièrement vagues (violation de l’article 1 du Protocole n° 1).

Mesures de caractère individuel : En octobre 1999, le parquet a notifié la police que, suite au rejet de l’action concernant l’annulation du contrat de privatisation, les décisions portant sur la suspension de la privatisation et sur l’éviction de la société requérante n’étaient plus exécutables. L’hôtel en question a été restitué à la société requérante.

L’arrêt sur l’article 41 est devenu définitif le 10/04/2008 ; le délai pour le paiement est donc le 10/07/2008.

Mesures de caractère général :

Situation à l’époque des faits : les décisions mises en cause dans cet arrêt ont été adoptées sur la base de l’article 185§1 du Code de procédure pénale et l’article 119§1, p. 6 de la loi sur le pouvoir judiciaire. Selon la première de ces dispositions, les organes d’investigation sont obligés de prendre les mesures nécessaires afin de prévenir qu’un crime ne soit commis, lorsqu’il y a de raisons de croire qu’un tel crime va être commis. Ces mesures peuvent inclure la saisie des moyens qui pouvaient servir à commettre un crime (il convient de noter que le parquet avait déclaré son intention d’ouvrir une enquête contre certains fonctionnaires qui auraient commis des infractions dans le cadre de la procédure de privatisation ; il semble qu’aucune enquête de ce type n’a été ouverte). Selon la deuxième disposition, les procureurs peuvent prendre toutes les mesures prévues par la loi, s’ils disposent d’informations indiquant qu’un crime ou un autre acte illégal peut être commis.

Ces règles, particulièrement vagues, qui confèrent au parquet un pouvoir discrétionnaire absolu pour agir comme il l’entend, combinées avec l’absence de contrôle judiciaire, ont amené la Cour européenne à conclure que le degré minimum de protection juridique auquel les individus et les sociétés ont droit a fait défaut.


Développement : l’article 185§1 du Code de procédure pénale a été abrogée et le nouveau Code de procédure pénale, entré en vigueur en 2006 ne contient pas de disposition similaire (voir également le §37 de l’arrêt).

Informations requises : sur les mesures envisagées afin de clarifier la portée exacte de l’article 119§1, p. 6 de la loi sur le pouvoir judiciaire et d’introduire un contrôle indépendant des décisions prises par le parquet en vertu de cette disposition et, de façon générale, et dans des situations similaires à celle de la présente affaire. En tout état de cause, les autorités bulgares ont été invitées à publier l’arrêt de la Cour européenne et à le diffuser aux autorités compétentes et en particulier aux procureurs.

L’arrêt a été publié sur le site Internet du Ministère de la justice www.mjeli.government.bg.

Le 08/12/2006, le Secrétariat a envoyé une lettre aux autorités bulgares les invitant à présenter un plan d'action pour l'exécution de cet arrêt.

Les Délégués :

1.             rappellent qu’un plan d’action sur les mesures générales est toujours à fournir, et invitent le gouvernement à le fournir rapidement ;

2.             décident de reprendre l'examen de cette affaire lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

3.             décident de reprendre l'examen de cette affaire au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

                       - Affaires de durée de procédures pénales

37104/97          Kitov, arrêt du 03/04/03, définitif le 03/07/03

35825/97          Al Akidi, arrêt du 31/07/03, définitif le 31/10/03 rectifié le 16/10/03

61662/00          Angelov Vasil, arrêt du 12/04/2007, définitif le 12/07/2007

39270/98          Belchev, arrêt du 08/04/2004, définitif le 08/07/2004

50401/99          Dimitrov Vasko Yordanov, arrêt du 03/05/2006, définitif le 03/08/2006

56762/00          Dimov, arrêt du 08/03/2007, définitif le 08/06/2007

43231/98          E.M.K., arrêt du 18/01/2005, définitif le 18/04/2005

44062/98          Hamanov, arrêt du 08/04/2004, définitif le 08/07/2004

35436/97          Hristov, arrêt du 31/07/03, définitif le 31/10/2003

67189/01          Ivanov, arrêt du 24/05/2007, définitif le 12/11/2007

49163/99          Kalpachka, arrêt du 02/11/2006, définitif le 02/02/2007

45964/99          Karov, arrêt du 16/11/2006, définitif le 26/03/2007

50326/99          Kolev, arrêt du 28/04/2005, définitif le 28/07/2005

58775/00          Mladenov, arrêt du 12/10/2006, définitif le 12/01/2007

40896/98          Nikolova n° 2, arrêt du 30/09/2004, définitif le 30/12/2004

44241/98          Nedyalkov, arrêt du 03/11/2005, définitif le 03/02/2006

54178/00+        Osmanov et Yuseinov, arrêt du 23/09/2004, définitif le 23/12/2004

50358/99          Pekov, arrêt du 30/03/2006, définitif le 30/06/2006

48137/99          Popov, arrêt du 01/12/2005, définitif le 01/03/2006

56337/00          Rezov, arrêt du 15/02/2007, définitif le 15/05/2007

37355/97          S.H.K., arrêt du 23/10/03, définitif le 23/01/04

55057/00          Sidjimov, arrêt du 27/01/2005, définitif le 27/04/2005

58733/00          Sodadjiev, arrêt du 05/10/2006, définitif le 05/01/2007

62594/00          Terziev, arrêt du 12/04/2007, définitif le 12/07/2007

56308/00          Toshev, arrêt du 10/08/2006, définitif le 10/11/2006

42987/98          Vachev, arrêt du 08/07/2004, définitif le 08/10/2004

59913/00          Vasilev, arrêt du 02/02/2006, définitif le 02/05/2006

45563/99          Zhbanov, arrêt du 22/07/2004, définitif le 22/10/2004

Ces affaires concernent la durée excessive des procédures pénales engagées contre les requérants entre 1986 et 1999 (violations de l’article 6§1). Les affaires Dimitrov, Karov, Osmanov, Popov, Sidjimov, Sodadjiev et Yuseinov concernent également l'absence de recours effectif à la disposition des requérants pour dénoncer la durée des procédures pénales (violations de l'article 13).

Les affaires Al Akidi, Belchev, Dimov, E.M.K., Hamanov, Hristov, Kolev, Nedyalkov, Nikolova n° 2, Pekov, Popov, Toshev, Vachev et Vasilev ont trait également à différentes violations de la Convention, liées à la détention des requérants entre 1993 et 2003 (violations de l’article 5§§1, 3, 4 et 5).

Mesure de caractère individuel : S’agissant des violations de l’article 5, les requérants détenus dans ces affaires ont été remis en liberté.

Le préjudice moral que les requérants ont subi en raison des violations de la Convention a été indemnisé par la Cour européenne, sauf dans l’affaire Ivanov où le requérant n’a soumis aucune demande au titre de la satisfaction équitable.


Des informations complémentaires sont attendues sur l’état des procédures pénales dans les affaires Belchev, Hamanov, Karov, Kitov, Kolev, Nedyalkov, Pekov, Sidjimov, Toshev et Vasilev, le cas échéant, sur leur accélération.

Mesures de caractère général :

I. Durée excessive des procédures pénales et recours effectif à cet égard :

            1) Violations de l’article 6§1 :

Informations demandées : sur les mesures envisagées ou adoptées. La diffusion avec circulaire de l’arrêt de la Cour européenne dans l’affaire Kitov aux juridictions pénales, aux procureurs et aux organes d’instruction attirant leur attention sur les conclusions et les suggestions concrètes faites par la Cour concernant les problèmes constatés (en particulier §§71, 73 et §§81-83) a également été demandée.

• Informations fournies : Un nouveau Code de procédure pénale est entré en vigueur le 29/04/2006. L’adoption de ce code fait partie de la réforme globale de la justice pénale en Bulgarie visant notamment l’accélération des procédures pénales. Ainsi, il introduit explicitement l’obligation pour les tribunaux et les organes d’investigation d’examiner les affaires pénales dans un délai raisonnable (art. 22 du code). De nombreuses autres nouvelles dispositions visent également l’accélération des procédures. Les plus importantes prévoient de courts délais pour l’examen d’une affaire et pour son report (articles 252, 271 et 345) ainsi que l’utilisation plus étendue de procédures simplifiées (articles 362-367, 370-374 et 356-361).

De plus, des séminaires et autres type de formations sur la Convention et la jurisprudence de la Cour européenne (y compris sur les articles 6 et 13) sont régulièrement organisés par l’Institut national de la justice (plus de 23 séminaires pour plus de 798 participants – juges, procureurs, experts nationaux - ont eu lieu pour la période 2001-2006).

Les autorités bulgares ont fourni des statistiques sur la durée moyenne des procédures pénales (lettre du 19/06/07). Les Secrétariat est en train de les examiner.

Des informations sont attendues sur d’autres mesures envisagées ou adoptées afin de réduire la durée excessive des procédures pénales, en plus de la réforme législative. Il convient de noter à cet égard que le plan d’action du Ministère de la justice pour la mise en œuvre de la réforme de la justice pénale prévoit des mesures concernant l’informatisation du système judiciaire, la création d’un système cohérent de collecte et analyse des données statistiques concernant le travail des tribunaux, ainsi que d’autres mesures pertinentes dans ce domaine. Des informations sont également attendues sur la diffusion de l’arrêt de la Cour européenne dans l’affaire Kitov.

            2) Violations de l’article 13 : Les dispositions des articles 368-369 du nouveau Code de procédure pénale prévoient la possibilité pour l’accusé de demander le transfert de son affaire pour examen au tribunal compétent sur le fond lorsqu’une période de 1 à 2 ans, selon la gravité de l’incrimination, s’est écoulée depuis le début de l’enquête préliminaire. Le tribunal saisi de l’affaire peut ordonner au procureur de terminer l’enquête préliminaire dans un délai de deux mois ou de mettre fin à la procédure pénale. La délégation a indiqué que le Ministère de la justice envisageait de proposer l’introduction d’un recours similaire au stade de l’examen de l’affaire par un tribunal.

Des informations supplémentaires sont attendues à cet égard.  

II. Violations concernant la détention provisoire : 

            1) Violation de l’article 5§1dans l’affaire Popov (maintien illégal en détention provisoire en dépassement du délai maximal de la détention) : aucune mesure spécifique ne semble être nécessaire (décision du procureur de transmettre la demande du requérant de mise en liberté au tribunal au lieu d’ordonner sa remise en liberté contraire au droit interne, constat confirmé par le tribunal interne saisi de l’affaire – voir §§75-76 de l’arrêt de la Cour européenne). 

            2) Violations de l'article 5§3 dans les affaires Nikolova n° 2 et Pekov (durée excessive de l'assignation à résidence) : bien qu'à partir du 01/01/2000 l'assignation à résidence ne puisse être ordonnée que par un tribunal, et non comme jusqu'à lors par un procureur, les autorités bulgares sont invitées à diffuser l’arrêt Nikolova n° 2 aux tribunaux compétents avec une lettre circulaire, pour attirer leur attention sur les exigences de la Convention concernant la durée et la justification d'une telle mesure (§§60-62 et 67-68 de l'arrêt de la Cour européenne).

Des informations sont attendues sur la diffusion de l’arrêt Nikolova n° 2.

3) Violations de l’article 5§3 (durée excessive de la détention provisoire, violation du droit d’être traduit devant un juge) et de l’article 5§4 (absence de contrôle judiciaire effectif de la légalité de cette détention) : les affaires Al Akidi, Belchev, Dimov, E.M.K., Hamanov, Hristov, Kolev, Nedyalkov, Nikolova n° 2, Pekov, Popov, Toshev et Vachev sont à rapprocher des affaires Assenov (arrêt du 28/10/1998) et Nikolova (arrêt du 25/03/1999) dont l’examen a été clos respectivement par les Résolutions ResDH(2000)109 et ResDH(2000)110 après une réforme de la procédure pénale qui a pris effet le 01/01/2000.

            4) Violation de l’article 5§4 dans l’affaire Nedyalkov (refus du tribunal compétent d'examiner une demande de mise en liberté après l’expiration du délai légal maximal de la détention) : la Cour européenne a relevé que la décision prise par le tribunal interne en l’espèce était contraire à la jurisprudence interne en la matière (§79 de l’arrêt Nedyalkov). Pour cette raison la diffusion de l’arrêt de la Cour européenne aux juridictions compétentes semble être une mesure suffisante aux fins de l’exécution.


Des informations sont attendues sur la diffusion de l’arrêt Nedyalkov. 

            5) Violations de l'article 5§4 dans les affaires Nikolova n° 2, Pekov et Vachev (absence de contrôle judiciaire de l’assignation à domicile) : la Cour européenne a noté (§55 de l'arrêt Vachev) que postérieurement aux faits de l'espèce, en 2000, le Code de procédure pénale avait été modifié et que son article 151§2 prévoyait désormais un contrôle judiciaire initial et continu de la légalité de cette mesure (voir également les articles 62 et 270 du nouveau Code de procédure pénale).

            6) Violations de l’article 5§4 (absence de procédure contradictoire devant une cour d’appel et devant la Cour suprême) : les affaires E.M.K., Hristov et Kolev sont à rapprocher de l’affaire Ilijkov (arrêt du 26/07/2001), close à la suite d'une réforme législative de la procédure d'appel contre la détention provisoire, adoptée en 2003 (Résolution CM/ResDH(2007)158).

            7) Violations de l’article 5§4 dans les affaires Kolev et Popov (absence d'examen à bref délai des demandes de mise en liberté) : il a déjà été noté qu'à la suite des amendements du Code de procédure pénale entrés en vigueur le 01/01/2000, les tribunaux sont tenus de se prononcer sur les demandes de mise en liberté dans des délais très courts (voir également l’article 65 du nouveau Code de procédure pénale). Cependant, puisque de tels délais ne sont prévus que pour la phase de l'enquête préliminaire, il serait nécessaire d'informer les juridictions compétentes des exigences de l'article 5§4 de la Convention en la matière, et plus particulièrement de l'obligation d'examiner également à bref délai les demandes de mise de mise en liberté formulées au stade de l'examen de l'affaire pénale par le tribunal.

Des informations sont attendues à cet égard.

8) Absence de contrôle judiciaire de la légalité de la détention (article 5§4) dans l'affaire Toshev: cette affaire est à rapprocher de l’affaire Asenov (arrêt du 15/07/2005).

            9) Violations de l'article 5§5 (inexistence d'un droit à réparation pour une détention contraire à l'article 5) : les affaires Belchev, Hamanov et Vachev sont à rapprocher de l'affaire Yankov (1013e réunion, décembre 2007, rubrique 4.2).

III. Publication :

Les arrêts Belchev, Hamanov, Kitov, Nedyalkov, Nikolova n° 2, S.H.K., Sidjimov et Zhbanov, ont été publiés sur le site Internet du Ministère de la justice www.mjeli.government.bg. L’arrêt Zhbanov a également été publié dans le premier numéro de la revue trimestrielle « Intégration et droit européens » qui est une édition du Ministère de la justice tirée à 1000 exemplaires et qui sera distribuée aux magistrats et au milieu universitaire.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ces points au plus tard à leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations complémentaires à fournir sur les mesures individuelles et générales, et d’une évaluation des informations statistiques fournies sur des mesures générales.

                       - Affaires de durée de procédures civiles et d’absence de recours effectif

45950/99          Djangozov, arrêt du 08/07/2004, définitif le 08/10/2004

56793/00          Babichkin, arrêt du 10/08/2006, définitif le 10/11/2006

47829/99          Dimitrov, arrêt du 23/09/2004, définitif le 23/12/2004

62722/00          Gospodinov, arrêt du 10/05/2007, définitif le 10/08/2007

58497/00          Hadjibakalov, arrêt du 08/06/2006, définitif le 08/09/2006

60939/00          Karcheva et Shtarbova, arrêt du 28/09/2006, définitif le 28/12/2006

44626/98          Kiurkchian, arrêt du 24/03/2005, définitif le 24/06/2005

76763/01          Kostova, arrêt du 03/05/2007, définitif le 03/08/2007

57641/00          Kovacheva et Hadjiilieva, arrêt du 29/03/2007, définitif le 29/06/2007

77147/01           Kuiyumdjiyan, arrêt du 24/05/2007, définitif le 24/08/2007

72855/01          Parashkevanova, arrêt du 03/05/2007, définitif le 03/08/2007

47877/99          Rachevi, arrêt du 23/09/2004, définitif le 23/12/2004

58828/00          Stefanova, arrêt du 11/01/2007, définitif le 11/04/2007

39832/98          Todorov Nikolai Petkov, arrêt du 18/01/2005, définitif le 18/04/2005

55956/00          Vatevi, arrêt du 28/09/2006, définitif le 28/12/2006

Ces affaires concernent la durée excessive de procédures civiles (violations de l’article 6§1). Certaines d’entre elles concernent, en outre, également l'absence de recours effectif à la disposition des requérants pour se plaindre de cette durée excessive (violations de l’article 13).


La Cour européenne a relevé que les retards dans les procédures civiles dans les affaires Djangozov et Todorov étaient dus en grande partie à la durée de deux procédures pénales, elle-même excessive.

Mesures de caractère individuel: les procédures dans toutes ces affaires, à l’exception des affaires Kiurkchian et Stefanova, sont terminées.

Informations complémentaires attendues : sur l'état de la procédure dans les affaires Kiurkchian et Stefanova et, le cas échéant, sur leur accélération.

Mesures de caractère général:

            1) Durée excessive des procédures civiles et les recours existant pour s’en plaindre :

  Informations fournies par les autorités bulgares : selon un rapport de deux ONG bulgares (Centre pour stratégies libérales et Agence de recherche sociologique et de marketing Alpha research) la durée moyenne des procédures civiles en Bulgarie est actuellement de 350 jours. Des statistiques officielles sur cette question seront fournies, dès qu’elles seront disponibles. De plus, des séminaires et autres type de formations sur la Convention et la jurisprudence de la Cour européenne (y compris sur les articles 6 et 13) sont régulièrement organisés par l'Institut national de la justice (plus de 23 séminaires pour plus de 798 participants - juges, procureurs, experts nationaux - ont eu lieu pour la période 2001-2006). Par ailleurs, il a été noté que le nouvel article 217a du Code de procédure civile, introduit en juillet 1999, permet aux justiciables de déposer une plainte contre la lenteur des procédures civiles devant le tribunal supérieur au tribunal saisi de l’affaire. Le président du tribunal saisi de la plainte a le pouvoir de donner des instructions obligatoires au tribunal compétent. Les autorités ont indiqué qu’elles allaient fournir des exemples de l’application de ce recours. Les arrêts dans les affaires Djangozov, Rachevi et Kiurkchian ont été publiés sur le site Internet du Ministère de la justice www.mjeli.government.bg

Les autorités bulgares ont fourni des informations complémentaires au sujet des questions ci-dessus (lettre du 15/06/07) Le Secrétariat est en train de les examiner.

            2) Durée excessive des procédures pénales et recours existant pour s’en plaindre : les mesures à prendre sont examinées dans le cadre de l'affaire Kitov (voir ci-dessus).

Informations attendues : en outre, des clarifications sont nécessaires sur l’introduction de recours permettant à une partie à une procédure civile suspendue d'obtenir l'accélération de la procédure pénale qui bloque sa reprise (voir le §63 de l'arrêt Todorov).

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1e réunion DH de 2009, à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales et d’une évaluation des informations déjà fournies sur les mesures générales.

- 24 affaires contre la Croatie

35030/04          Karadžić, arrêt du 15/12/2005, définitif le 15/03/2006

L'affaire concerne l'absence de mesures adéquates et effectives prises par les autorités croates pour réunir la requérante et son fils, né en 1995, en raison des retards intervenus dans la procédure en application de la Convention de La Haye de 1980 (concernant les aspects civils de l'enlèvement international des enfants) et dans la mise en œuvre de la décision rendue en 2003 ordonnant la restitution de l'enfant à sa mère (violation de l'article 8).

La Cour européenne a relevé en particulier que la police n'avait pas fait preuve de la diligence nécessaire pour retrouver le père de l'enfant, lequel avait pu lui échapper à deux reprises. De plus, les autorités s'étaient contentées d'infliger une amende au père et d'ordonner son incarcération, et il n'apparaît pas que l'une ou l'autre de ces mesures ait été exécutée.

La Cour européenne a souligné que l'appréciation du caractère adéquat des mesures prises dans de telles affaires dépendait de la rapidité de leur mise en œuvre, étant donné que l'écoulement du temps et l'évolution des circonstances ont des conséquences irréparables sur la relation qui unit un enfant à sa mère ou son père lorsqu'ils vivent séparément.

Mesures de caractère individuel :

            1) Situation de la requérante au moment où la Cour européenne a rendu son arrêt : en février 2005 le tribunal interne a mis fin à la procédure d'exécution de la décision ordonnant la restitution de l'enfant après avoir été informé par l'avocat de la requérante que l'enfant avait été rendu à sa mère. Cependant, celle-ci a déclaré devant la Cour européenne qu'elle n'avait pas donné de telles instructions à son avocat et que son fils ne lui avait pas été rendu (§§27 et 56 de l'arrêt).


La Cour a estimé que les autorités ne pouvaient être tenues responsables du comportement du représentant de la requérante, désigné par cette dernière, et n'a pris en considération que la période allant jusqu'à février 2005. La Cour a également noté que la requérante n'avait pas fait appel de la décision mettant fin à la procédure d'exécution.

            2) Développements : en mai 2006 le représentant de la requérante s'est plaint devant le Comité des Ministres de la non-exécution de l'arrêt de 2003 ordonnant la restitution de l'enfant à sa cliente. En réponse, la délégation croate a rappelé les constats de la Cour européenne concernant la fin de la procédure d'exécution de cette décision et a affirmé qu'il est nécessaire que la requérante saisisse les autorités afin que ces dernières puissent envisager, le cas échéant, des mesures visant à remédier à sa situation.

Le représentant de la requérante a indiqué qu'il tiendrait le Comité informé de la décision de sa cliente à ce sujet.

            3) Situation actuelle de l'enfant de la requérante : en réponse à la question de savoir qui a actuellement la garde de l'enfant et sur quelle base légale, les autorités ont indiqué que l'enfant vit avec son père sur la base d'un accord conclu entre les parents en février 2005. Les services sociaux ont approuvé cet accord par décision du 15/02/2005. Cette décision indique également que la requérante aura accès à son fils sur la base d'accords avec le père. Par ailleurs, un rapport des services sociaux de juillet 2006 indique que l'enfant vit avec son père et sa nouvelle famille, qu'il va régulièrement à l'école où il obtient de très bonnes notes et qu'il est en bonne santé et normalement développé.

Mesures de caractère général :

Informations demandées : les autorités croates ont été invitées à présenter un plan d'action pour l'exécution de cet arrêt, notamment sur la nécessité d'adopter de mesures visant à garantir la célérité des procédures d'application de la Convention de la Haye de 1980 et l'efficacité des mécanismes de mise en œuvre des décisions ordonnant la restitution d'un enfant. L'attention des autorités a été attirée sur l'expérience d'autres Etats membres qui ont rencontré des problèmes similaires (voir le mémorandum sur les arrêts de la Cour européenne soulevant des questions liées à des conflits internationaux de compétence en matière de garde d'enfants - CM/Inf/DH(2005)11).

La publication et la diffusion de cet arrêt aux autorités compétentes (Ministère de la santé, centres sociaux, juridictions et autorités de la police) ont également été demandées.

Le 7/12/2007 le gouvernement croate a décidé de former un groupe de travail pour la préparation d’une législation relative à la mise en œuvre de la Convention de la Haye.

Des informations sont attendues sur les progrès du groupe de travail, en particulier le calendrier pour l’adoption de la loi annoncée et le contenu des dispositions pertinentes.

L'arrêt de la Cour européenne a été publié sur le site Internet du Ministère de la justice http://www.pravosudje.hr et dans la revue « Jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l'Homme », n° 2 (juin - décembre 2005). Il a été diffusé à toutes les autorités impliquées dans l'application de la Convention de la Haye. En outre, trois séminaires ont déjà été organisés sur l’application de la Convention de la Haye par l'Académie des juges, avec des conférenciers venant d'Allemagne et du Secrétariat de la Conférence de la Haye.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

73786/01          Cenbauer, arrêt du 09/03/2006; définitif le 13/09/2006

L'affaire concerne les mauvaises conditions de détention du requérant à la Prison d'Etat de Lepoglava de janvier 2001 à avril 2003 (violation de l'article 3).

La Cour européenne a constaté que l'espace insuffisant de la cellule du requérant, combiné à l'absence de toilettes et d'eau courante dans sa cellule où il était confiné pendant plus de douze heures toute une journée, ceci pendant environ deux ans et trois mois constituaient au traitement dégradant.

La Cour européenne n'a pas exclu que la loi sur l'exécution des peines d'emprisonnement dont les dispositions pertinentes pour cette affaire sont entrées en vigueur le 01/01/2002, puisse fournir un recours efficace à l'encontre de décisions ou d'actes violant prétendument les droits d'un détenu garantis par la loi interne (y compris les conditions de la détention). Néanmoins, dans cette affaire, le requérant avait déjà purgé un an de prison dans les conditions décrites, avant la mise en place de nouveau recours. De plus, il a saisi la Cour européenne avant cette date. Par conséquent, la Cour a estimé qu'il n'avait pas à épuiser cette voie de recours.

Mesures de caractère individuel : Aucune. Le requérant a été libéré le 08/04/2003 après avoir purgé sa peine. La Cour européenne lui a accordé une satisfaction équitable couvrant le préjudice moral subi.


Mesures de caractère général : Suite à l'affaire Benzan (règlement amiable, Résolution ResDH(2005)49 du 8/11/2002), les autorités croates ont entrepris différentes mesures, elles ont en particulier rénové la Prison d'Etat de Lepoglava.

Il convient également de noter que la loi sur l'exécution des peines d'emprisonnement contient des dispositions sur les conditions de vie et d'hygiène et prévoit la possibilité de se plaindre des conditions d'emprisonnement. En vertu de l’article 17, il est possible de déposer une plainte directement au juge de l’exécution des peines qui rend une décision appropriée après délibération. L’article 15 prévoit la possibilité pour les détenus d’interjeter appel auprès du juge de l’exécution des peines contre les actes et les décisions de l’administration pénitentiaire.

Selon les données statistiques, seulement 3 sur les 21 tribunaux de comté en Croatie ont traité ce type d’affaires. La majorité des plaintes a été déposée en vertu de l’article 17. Ces plaintes concernaient les conditions de détention dans les prisons, les heures de visites, les soins médicaux etc.Un nombre significatif de plaintes a été déposé en vertu de l’article 15, contre des sanctions disciplinaires. Les autorités croates ont indiqué que la jurisprudence interne concernant les recours mentionnés ci-dessus se développait encore. En outre, quelques amendements sont actuellement en cours d’examen.

Il serait utile de recevoir des exemples de décisions rendues par les tribunaux au sujet de plaintes relatives aux conditions de détention. En outre, des informations sont attendues sur l’état actuel des conditions de vie et d’hygiène dans les centres de détention en Croatie. 

L'arrêt de la Cour européenne a été traduit et diffusé auprès des autorités compétentes. Il a été également publié sur le site Internet du ministère de la justice (www.pravosudje.hr) et dans la publication périodique sur la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l'Homme.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

40116/02           Šečić, arrêt du 31/05/2007, définitif le 31/08/2007

Cette affaire concerne le manquement des autorités publiques à leur obligation de mener une enquête effective sur une agression raciste par des hommes non identifiés, en avril 1999, sur une personne d’origine Rom (violation de l’article 3).

La Cour européenne a noté que la procédure pénale était pendante au stade de l’instruction depuis près de sept ans sans que la police n’ait mis quiconque en cause. Ainsi, la police n’a interrogé aucun individu appartenant au groupe de « skinheads » connus pour avoir été impliqués dans des incidents semblables ni la personne identifiée par un témoin oculaire. De plus, la police n’a pas davantage demandé au tribunal compétent d’ordonner au journaliste ayant interviewé un jeune « skinhead » qui avait reconnu être impliqué dans des agression sur des personnes d’origine Rom, de révéler sa source malgré la modification de la loi qui l’autorisait à le faire depuis 2003. Enfin, la police n’a eu recours à aucune des autres mesures d’enquête qu’elle était en droit de prendre et est restée inactive depuis 2001.

La Cour européenne a également observé que la police qui savait que l’agression avait très probablement été motivée par la haine raciale, n’aurait pas dû permettre que l’enquête dure plus de 7 ans sans entreprendre la moindre démarche sérieuse pour identifier ou poursuivre les auteurs (violation de l’article 14 combiné avec l’article 3)

Mesures de caractère individuel : La procédure concernant l’enquête relative à l’agression était toujours pendante au stade de l’instruction au moment où la Cour européenne a donné son arrêt.

Des informations sont attendues sur l’état actuel de la procédure et sur les mesures prises ou envisagées pour garantir que les défauts identifiés par la Cour européenne dans cet arrêt soient pris en compte.

Mesures de caractère général : L’arrêt de la Cour européenne a été traduit et diffusé à l'attention de la Cour constitutionnelle, de la Cour suprême, du Ministère de l’intérieur et du parquet. Il est également disponible sur le site Internet du Ministère de la justice (www.pravosudje.hr) et va être publié dans une revue périodique.

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées pour éviter des violations similaires. Dans ce contexte la présentation d’un plan d’action est attendue.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.


25774/05           Bistrović, arrêt du 31/05/2007, définitif le 31/08/2007

Cette affaire concerne la violation du droit des requérants au respect de leurs biens, les autorités n’ayant pas pris en compte, dans la fixation de l’indemnité d’expropriation correspondant à une partie de leur ferme, tous les facteurs pertinents, y compris la diminution de la valeur du terrain non exproprié (violation de l’article 1 du Protocole n° 1).

En avril 2003, une partie de la propriété des requérants avait été expropriée dans le but de construire une autoroute, tandis que les requérants avaient conservé leur droit de propriété sur la maison et une cour environnante. La Cour européenne a noté que les autorités internes ne pouvaient fixer de compensation proportionnée dans une procédure d’expropriation qu’à partir du moment où elles avaient vérifié l’ensemble des facteurs pertinents, à savoir les conséquences de la construction d’une autoroute sur la propriété non expropriée, telles que la dépréciation de la valeur de leur propriété, la possibilité de la vendre et l’intérêt que son utilisation pouvait encore présenter pour le requérants (§43 de l’arrêt).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a relevé que les requérants pouvaient demander la réouverture de la procédure en vertu de l’article 428(a) de la loi de la procédure civile qui permettrait un nouvel examen de leurs demandes concernant l’expropriation de leur propriété (§58 de l’arrêt). De plus, elle a alloué aux requérants une satisfaction équitable au titre du préjudice moral.

Evaluation : Aucune autre mesure ne semble d’être nécessaire.

Mesures de caractère général : L'arrêt de la Cour européenne a été traduit et diffusé auprès de la Cour constitutionnelle, le Cour suprême et le tribunal impliqué dans cette affaire. La traduction de l'arrêt est également accessible sur le site Internet du Ministère de la justice (www.pravosudje.hr) et va être publiée dans une publication périodique sur la jurisprudence de la Cour européenne.

Des informations sont attendues sur l'évaluation par les autorités de la question de savoir si la violation constatée par la Cour européenne dans cette affaire a un caractère structurel et sur les mesures spécifiques prises ou envisagées pour éviter des violations similaires.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

9056/02            Radanović, arrêt du 21/12/2006, définitif le 21/03/2007[5]

22344/02          Kunić, arrêt du 11/01/2007, définitif le 23/05/2007

24661/02          Buj, arrêt du 01/06/2006, définitif le 01/09/2006

Cette affaire concerne la durée excessive d'une procédure civile concernant l'enregistrement du requérant en tant que propriétaire dans le registre foncier (violation de l'article 6§1). La procédure a commencé en mai 2002 et était encore pendante lorsque la Cour européenne a rendu son arrêt.

L'affaire concerne également l'absence de recours effectif contre la durée excessive concernant ce type de procédures (violation de l'article 13).

Mesures de caractère individuel : Le 27/09/2006 le Tribunal municipal de Stari Grad a enregistré le requérant en tant que propriétaire dans le registre foncier.

Mesures de caractère général :

1) Durée excessive des procédures d'enregistrement du droit de propriété au registre foncier : le Gouvernement croate a indiqué lors de l'examen de cette affaire devant la Cour européenne qu'il s'agissait d'un problème systémique et qu'une réforme du système d'enregistrement au registre foncier était en cours (§ 25 de l'arrêt).

La réforme a pour objectifs : de diminuer le nombre des affaires pendantes concernant l’inscription au registre foncier, de réduire la durée totale des procédures d’inscription au registre foncier selon l’exigence du « délai raisonnable » et de transférer toutes les données d’inscription d’hypothèque et de droits de la propriété en forme électronique.

Au cours de la mise en œuvre de cette réforme, le nombre d’affaires pendantes concernant l’inscription au registre foncier a diminué continuellement. Ainsi, au premier trimestre de 2007 il y avait 146 085 affaires non résolues en Croatie, ce qui fait à 47 970 moins d’affaires qu’à la période concernée en 2006. De plus, la durée des procédures dans les affaires de ce type diminue également continuellement. En ce qui concerne les procédures d’inscription des droits d’hypothèque, la durée moyenne est de 7 jours.


En ce qui concerne les procédures d’inscription des droits de propriété la durée moyenne est de 63 jours (les autorités ont présenté des données statistiques concernant la durée des procédures d’inscription au registre foncier dans les tribunaux municipaux particuliers en Croatie). Enfin, le transfert de toutes les données d’inscription en forme électronique se trouve dans son étape finale (en mai 2007 99,17% des données avaient ainsi été transférées). Il doit également être noté que tous les formulaires de demande d’introduction de procédures d’inscription sont disponibles en forme électronique sur Internet.

Des informations supplémentaires seraient utiles sur les récentes données statistiques concernant le nombre d’affaires pendantes et leur durée moyenne.

2) Recours effectif contre la durée de ce type de procédures : Lorsque la Cour européenne a rendu son arrêt le recours constitutionnel contre la durée des procédures judiciaires, introduit en 2002, ne s'appliquait pas aux procédures d'enregistrement des propriétaires au registre foncier (§§ 20 et 34 de l'arrêt). Cependant, cette pratique a été changée ultérieurement et il est désormais possible d'introduire une requête contre la durée excessive des procédures d'enregistrement du droit de propriété au registre foncier devant la Cour constitutionnelle.

3) Publication et diffusion : L'arrêt de la Cour européenne a été traduit et diffusé auprès de la Cour suprême et des tribunaux impliques dans cette affaire. La traduction de l'arrêt est également accessible sur le site Internet du Ministère de la justice (www.pravosudje.hr) et va être publiée dans une publication périodique concernant la jurisprudence de la Cour européenne.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH) à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

                       - Affaires de durée de procédures en exécution forcée[6]

71549/01          Cvijetić, arrêt du 26/02/04, définitif le 26/05/04

4899/02            Kvartuč, arrêt du 18/11/2004, définitif le 18/02/2005

39810/04          Lukavica, arrêt du 05/07/2007, définitif le 05/10/2007

33593/03          Majski, arrêt du 01/06/2006, définitif le 01/09/2006

36071/03          Omerović, arrêt du 01/06/2006, définitif le 01/09/2006

75139/01          Pibernik, arrêt du 04/03/04, définitif le 04/06/04

29759/04          Măcinković, arrêt du 07/12/2006, définitif le 07/03/2007

9505/03            Mahmutović, arrêt du 15/02/2007, définitif le 15/05/2007

39299/02          Mužević, arrêt du 16/11/2006, définitif le 16/02/2007

14898/04          Šamija, arrêt du 07/12/2006, définitif le 07/03/2007

39659/04          Šoštarić, arrêt du 12/04/2007, définitif le 12/07/2007

- Affaires de durée de procédures civiles[7]

12419/04           Jakupović, arrêt du 31/07/2007, définitif le 31/10/2007

43714/02           Skokandić, arrêt du 31/07/2007, définitif le 31/10/2007

- Affaires de durée de procédures concernant des droits et obligations de caractère civil devant les autorités et juridictions administratives[8]

38550/02          Počuča, arrêt du 29/06/2006, définitif le 29/09/2006

22457/02          Božić, arrêt du 29/06/2006, définitif le 11/12/2006

28074/03          Smoje, arrêt du 11/01/2007, définitif le 11/04/2007

35384/04          Tomljenović, arrêt du 21/06/2007, définitif le 21/09/2007

- 1 affaire contre Chypre

73797/01          Kyprianou, arrêt du 15/12/2005 - Grande Chambre

L'affaire concerne l'absence d'impartialité de la cour d'assises de Limassol qui en 2001 a condamné le requérant, un avocat, à 5 jours d'emprisonnement pour contempt (outrage à magistrat) commis devant ce tribunal alors qu'il défendait un homme accusé de meurtre.


La Cour européenne a constaté que la cour d'assises n'avait pas satisfait aux conditions d'impartialité objective et subjective : (a) les juges visés par les critiques du requérant ont pris la décision d'engager des poursuites, ont examiné les questions soulevées par la conduite du requérant, ils ont jugé l'intéressé coupable et infligé la sanction ; (b) l'attitude personnelle des juges a démontré qu'ils n'avaient pas réussi à considérer la situation avec le détachement nécessaire (violation de l'article 6§1).

L'affaire concerne également la violation de la liberté d'expression du requérant en sa qualité d'avocat. La Cour européenne, ayant pris également en considération le manque d'équité de procédure, a constaté que la peine infligée au requérant, qui fut appliquée immédiatement, était d'une gravité disproportionnée et « de nature à produire un 'effet dissuasif' sur les avocats dans les situations où il s'agit pour eux de défendre leurs clients » (§181 de l'arrêt) (violation de l'article 10).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé au requérant une satisfaction équitable au titre du préjudice moral.

Des informations sont attendues sur la question de savoir si le casier judiciaire a été expurgé de cette condamnation.

Mesures de caractère général :

1) Violation de l'article 6§1

• Informations reçues : La procédure incriminée est prévue par la loi de 1960 sur les juridictions (modifiée). Lors de la 955e réunion (février 2006), les autorités chypriotes ont informé le Comité de ce qu'une modification législative était envisagée.

Informations attendues : Sur ces mesures envisagées (et éventuellement d'autres) afin d'assurer l'impartialité tant objective que subjective des procédures relatives à une infraction d’outrage au tribunal.

2) Violation de l'article 10

• Informations reçues : Lors de cette même réunion, les autorités chypriotes ont également informé le Comité de ce que l'arrêt de la Cour européenne, avec une note explicative, avait été immédiatement diffusé à la Cour suprême, au Barreau (publié également sur son site Internet : www.cyprusbarassociation.org), le Médiateur et le Ministère de la justice. L'arrêt a également été traduit et publié dans la Tribune juridique de Chypre du Barreau de Chypre, 2005, n° 1, p 38 et suivantes.

Informations attendues sur : La diffusion de l'arrêt de la Cour aux juridictions inférieures.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1ère réunion DH de 2009, à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

- 7 affaires contre la République tchèque

7550/04            Reslová, arrêt du 18/07/2006, définitif le 18/10/2006

1633/05            Koudelka, arrêt du 20/07/2006, définitif le 20/09/2006

26141/03          Fiala, arrêt du 18/07/2006, définitif le 11/12/2006

26634/03          Kříž, arrêt du 09/01/2007, définitif le 09/04/2007

27726/03          Mezl, arrêt du 09/01/2007, définitif le 09/04/2007

14044/05          Zavřel, arrêt du 18/01/2007, définitif le 18/04/2007

Ces affaires concernent la violation du droit des requérants au respect de leur vie familiale en raison du défaut de diligence spéciale par les autorités nationales dans la conduite de procédures concernant des droits de garde ainsi que des droit de visite (violations de l'article 8).

Dans l'affaire Reslová, la Cour européenne a relevé que la mesure provisoire ordonnant au père de restituer les enfants à la requérante n'avait jamais été exécutée et même déclarée inexécutable par le tribunal de district dans la mesure où elle ne comprenait aucune indication sur l'attribution du droit de garde. Dans ces circonstances, la requérante n'avait aucune chance d'obtenir un droit d'accès à ses enfants en l'absence de décision, même provisoire, attribuant le droit de garde à l'un des parents. Les juridictions tchèques, en laissant ainsi ouverte la question du droit de garde, avaient permis que le litige soit tranché par le simple passage du temps, au détriment de la requérante.

Dans l'affaire Koudelka, la Cour européenne a estimé que la non-exécution des droits de visite du requérant était essentiellement attribuable à l'attitude négative de la mère ainsi que de l'enfant, cette dernière subissant l'influence de sa mère. La Cour a néanmoins relevé que les tribunaux tchèques n'avaient pas pris toutes les mesures rapides et systématiques qu'elles auraient dû raisonnablement prendre en vue de contraindre la mère à respecter le droit de visite du requérant. Elle a conclu que les juridictions avaient laissé le litige se régler par le simple passage du temps, et que désormais la reprise des contacts entre le requérant et sa fille ne semblait plus possible.


Dans l'affaire Fiala, la Cour européenne a estimé que les autorités nationales étaient restées en deçà de ce que l'on pouvait raisonnablement attendre d'elles et n'avaient pas déployé d'efforts adéquats et suffisants pour faire respecter le droit de visite du requérant. Par ailleurs, très peu de mesures pratiques avaient été prises en vue d'inciter les intéressés à prendre part à une thérapie familiale ou d'organiser un contact préparatoire.

De plus, dans l'affaire Kříž, la Cour européenne a pris note du temps écoulé entre la demande d'exécution de la décision accordant un droit de visite au requérant, introduite en décembre 1994, et la première rencontre organisée entre l'intéressé et son fils le 23/05/2001, alors que l'enfant était déjà âgé de presque 10 ans. Entre ces deux dates, l'activité des autorités tchèques s'est limitée à de vaines tentatives d'entrer en contact avec la mère et à lui imposer des amendes qui se sont avérées inefficaces. Se bornant à des moyens répressifs, les tribunaux n'ont pris pendant des années aucune mesure préparatoire en vue de créer les conditions nécessaires à l'exécution du droit de visite du requérant.

Dans l'affaire Mezl, la Cour européenne a noté que le droit de visite du requérant était resté pratiquement indéterminé pendant presque deux ans, entre 1995 et 1997. Puis, si le tribunal, en 1998, a bien engagé d'office une procédure en vue de modifier les arrangements en matière de droit de garde, aucune décision n'a été rendue dans cette procédure jusqu'à ce que la fille du requérant atteigne sa majorité. La Cour européenne a estimé que si la non-mise en œuvre du droit de visite du requérant était imputable surtout au refus manifeste de la mère, puis à celui de l'enfant, influencée par sa mère, les autorités auraient dû néanmoins prendre les mesures adéquates afin de sanctionner ce manque de coopération de la mère.

Dans l’affaire Zavřel, la Cour européenne a estimé que l’absence de mise en œuvre du droit de visite du requérant était imputable surtout à la tolérance de facto par les tribunaux de la résistance constante de la mère, et à l’absence de mesures visant à instaurer des contacts effectifs.

Les affaires Reslová, Fiala, Kříž et Mezl concernent également la durée excessive de la procédure civile. La Cour européenne a indiqué que de telles périodes étaient excessives eu égard en particulier à l'enjeu de la procédure pour les requérants (violation de l'article 6§1).

L'affaire Fiala concerne également le défaut de recours effectif de se plaindre pour la durée excessive (violation de l'article 13).

Mesures d'ordre individuel :

1) Affaire Reslová :

• Informations soumises par les autorités tchèques : La garde des enfants a été accordée à leur père par une décision de 2005. La requérante est en contact avec ses filles irrégulièrement et le père des enfants ne s'oppose pas à ces contacts. Après que la garde avait été accordée au père, la requérante est restée passive à l’égard de la mise en œuvre judiciaire de ses droits de visite au point que le tribunal de première instance a initié ex officio une procédure pour organiser le droit de visite de la requérante avec ses enfants. Le 5/01/2007 le Tribunal cantonal de Kutna Hora a octroyé à la requérante un droit de visite un weekend sur deux et le 26 décembre, décision confirmée par le Tribunal régional de Prague le 03/05/2007 et devenue définitive le 22/06/2007. L’arrangement bénéficie de l’accord du père ainsi que des enfants. Dans un rapport du 22/11/2007 l’agence chargée de suivre la famille a indiqué que la requérante était restée totalement inactive depuis la conclusion de la procédure judiciaire concernant les arrangements en matière de droit de visite à l’égard de ses enfants.

2) Affaire Koudelka :

• Informations soumises par les autorités tchèques : La procédure concernant le droit de visite et la pension alimentaire est actuellement pendante devant le tribunal de première instance de Prague 1. Les autorités de la protection de jeunesse ont offert au requérant en juin 2006 la possibilité de contacter sa fille par lettre mais cette dernière a refusé. Il semble qu'en raison du mauvais état de santé du requérant et du comportement hostile de sa fille, née en 1990, il ne soit pas possible de créer des contacts entre le requérant et sa fille sans la présence d'une tierce partie. 

3) Affaire Zavřel :

• Informations fournies par les autorités tchèques : Le 25/09/2007 le Tribunal cantonal de Brno a adopté une décision relative aux droits de visite qui prévoit un rétablissement progressif des contacts entre le requérant et son enfant.

Des informations sont attendues dans les affaires Reslová et Zavřel relatives au respect dans la pratique du droit de visite des requérants. En outre, des informations sont attendues dans l’affaire Koudelka sur l’état actuel de la procédure en matière de droits de visite ainsi que sur tout autre développement dans cette affaire.

            4) Affaire Mezl : La fille du requérant a atteint l'âge de la majorité en 2004. Par conséquent, le tribunal national a prononcé l'extinction sur les droits de garde et de visite.


5) Affaire Fiala : Par un jugement de 2005, la garde des enfants a été confiée à leur mère. Tout contact entre le requérant et ses enfants a été interdit pour une durée indéterminée. Cette décision n'a pas été contestée par la Cour européenne (paragraphe 105).

            6) Affaire Kříž : La procédure est terminée. Le droit de visite accordé au requérant est resté en vigueur, mais non exécuté, pendant plus de dix ans jusqu'à sa conversion, en 2004 et 2005, en des contacts par écrit uniquement. La Cour n’a pas remis en cause cet arrangement. En outre, l’enfant est désormais âgé de 16 ans.

Evaluation : Aucune autre mesure de caractère individuel ne semble nécessaire dans les affaires Mezl, Fiala et Kříž.

Mesures de caractère général :

1) Violation des articles 6§1 et 13 : Les affaires Reslová, Fiala, Kříž et Mezl sont à rapprocher de l'affaire Bořánková (arrêt du 07/01/2003, en rubrique 4.2 lors de la 1007e réunion, octobre 2007) pour laquelle les autorités tchèques ont déjà adopté et sont en train d'adopter des mesures concernant la durée excessive des procédures judiciaires et le défaut de recours effectif.

2) Violation de l'article 8:

Les autorités tchèques sont invitées à fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées afin de prévenir de nouvelles violations semblables, en particulier à la lumière de l'expérience d'autres Etats, voir le mémorandum CM/Inf/DH(2005)11révisé 3.

Les arrêts de la Cour européenne ont déjà été traduits et publiés sur le site Web du Ministère de la Justice (www.justice.cz) et ils ont été diffusés aux autorités pertinentes.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH),  à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

48548/99          Zich et autres, arrêts du 18/07/2006, définitif le 18/10/2006 et of 21/12/2006 - Règlement amiable (article  41)

L'affaire a trait à la restitution à ses anciens propriétaires d'une coopérative de logement acquise en toute bonne foi par les requérant en 1981.

En 1991, les successeurs des propriétaires d'origine ont intenté une action en vue d'obtenir de la coopérative la restitution de l'immeuble en question. Le 23/03/1994, le tribunal d'arrondissement de Prague 3 a ordonné à la coopérative de conclure un accord de restitution de l'immeuble, de façon à ce que les demandeurs en deviennent les copropriétaires ; il estima que l'état de gêne était établi chez les demandeurs qui étaient habilités à demander la restitution au sens de l'article 3 de la loi sur les réhabilitations extrajudiciaires, et que la coopérative était tenue à restitution. Ce jugement a été confirmé en appel et les requérants ont formé vainement un pourvoi en cassation et devant la Cour constitutionnelle.

Le ministère des Finances a conclu avec la coopérative un accord aux termes duquel, en août 1999, celle-ci s'est vue rembourser le prix d'achat de l'immeuble fixé en 1981, à savoir 53 470 euros. En juillet 2002, le tribunal d'arrondissement a rejeté l'action de la coopérative contre l'Etat tendant au paiement de la différence entre le prix d'achat et la somme qui avait été payée par les membres et par la banque pour les besoins de la reconstruction et de la modernisation de l'immeuble.

La Cour européenne a estimé que les requérants étaient titulaires d'un bien et que la restitution de l'immeuble litigieux avait entraîné une ingérence dans leur droit au respect de leurs biens. Cette ingérence, basée sur la loi sur les réhabilitations extrajudiciaires, poursuivait une cause d'utilité publique. Néanmoins, la Cour a relevé notamment que la coopérative avait acquis l'immeuble de bonne foi, sans savoir qu'il s'agissait du bien donné par les anciens propriétaires à l'Etat sous pression et pour le prix établi conformément à la loi. Elle a observé également qu'en vertu de la loi sur les réhabilitations extrajudiciaires, la coopérative avait eu droit au remboursement du prix d'achat qu'elle avait payé à l'Etat en 1981. Dans ces conditions, la Cour a considéré que les requérants avaient subi une « charge spéciale et exorbitante » et que les autorités tchèques, en appliquant la loi sur les réhabilitations extrajudiciaires, n'avaient pas pris en considération les conditions dans lesquelles la restitution de l'immeuble était effectuée, en particulier les conditions d'indemnisation destinées à atténuer la charge pesant sur eux (violation de l'article 1 du Protocole n° 1).

Mesures de caractère individuel : Le préjudice matériel subi a fait l'objet d'un règlement amiable conclu entre les requérants et le gouvernement devant la Cour européenne. De plus, la Cour européenne a octroyé au requérant satisfaction équitable pour le préjudice moral subi.

Mesures de caractère général :

Les autorités tchèques sont invitées à fournir des informations sur les mesures prises ou envisagées afin de prévenir de nouvelles violations semblables. Par ailleurs, la publication et la diffusion de l'arrêt de la Cour européenne aux autorités concernées semblent nécessaires.


L'arrêt de la Cour européenne a déjà été traduit et publié sur le site Web du Ministère de la Justice (www.justice.cz).

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

- 2 affaires contre la Finlande

18249/02          C., arrêt du 09/05/2006, définitif le 09/08/2006

L’affaire concerne l’atteinte au droit du requérant à la vie familiale en raison d’une décision de la Cour suprême cassant deux décisions rendues par les tribunaux inférieurs qui avaient octroyé au requérant la garde de ses enfants (violation de l’article 8).

La garde des enfants avait été confiée auparavant à la mère des enfants, vivant en Finlande avec sa partenaire. Suite au décès de la mère en 1999, le tribunal de première instance et la cour d’appel ont décidé de confier la garde des enfants au requérant, vivant en Suisse. La Cour suprême a cependant cassé les arrêts de ces deux instances et a octroyé la garde des enfants à la partenaire de la mère, les enfants ayant vécu avec elle depuis 1993 et ayant exprimé le souhait de continuer à vivre avec elle.

La Cour européenne a estimé que la Cour suprême s’était fondée exclusivement sur les souhaits exprimés par les enfants sans prendre en considération tout autre facteur comme les droits du requérant en tant que père. Ceci a abouti à conférer un droit de veto absolu aux enfants, âgés chacun d’au moins 12 ans. De plus, la Cour européenne a relevé que la Cour suprême avait rendu sa décision sans tenir d’audience et sans ordonner de mesures d’expertise ou d’enquête qui auraient permis de clarifier les positions.

Mesures de caractère individuel : Les enfants sont majeurs. La Cour européenne a octroyé au requérant une indemnisation au titre du préjudice moral subi. Par conséquent, aucune autre mesure d’ordre individuel ne semble nécessaire.

Toutefois, la satisfaction équitable couvrant les frais et dépens a été saisie par les autorités finlandaises afin de couvrir des dettes précédentes du requérant. Le requérant s’est plaint de cette situation.

Des contacts bilatéraux sont en cours sur cette question.

Mesures de caractère général : Etant donné l’effet direct de la Convention et de la jurisprudence de la Cour européenne en droit finlandais, la publication et la transmission de l’arrêt de la Cour européenne à toutes les autorités judiciaires semblent utiles en vue de prévenir de futures violations similaires.

• Informations fournies par les autorités finlandaises :

            1) Publication et diffusion : L’arrêt de la Cour européenne a été publié dans la base de données judiciaire Finlex (www.finlex.fi) et il a été largement diffusé notamment à la Cour suprême, à la Cour suprême administrative, au Ministère de la Justice et au Médiateur pour les enfants.

            2) Mesures supplémentaires: Le Ministère de la Justice  projette de modifier la loi sur les saisies de manière à empêcher la saisie de sommes octroyées par la Cour européenne au titre de la satisfaction équitable. Le groupe de travail établi pour examiner le problème de la durée excessive des procédures et l’absence de recours effectif a déjà proposé une telle modification de la loi sur les saisies.

Des informations supplémentaires sont attendues sur les résultats du groupe de travail.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales ainsi que sur d’éventuelles mesures individuelles.

22508/02           F. et M., arrêt du 17/07/2007, définitif le 17/10/2007

L’affaire concerne le caractère inéquitable et la durée excessive d’une procédure pénale diligentée à l’encontre du requérant pour abus sexuels sur sa fille, suite aux déclarations que cette dernière avait faites à un psychologue en 1991.

La procédure pénale a commencé en octobre 1995 et s’est terminée en décembre 2001 (6 ans et 2 mois pour trois instances (violation de l’article 6§1).

S’agissant du caractère inéquitable de la procédure, l’enfant avait 11 ans lors de l’enquête préliminaire et 14 ans lors de l’audience du tribunal de première instance. Elle na jamais été interrogé au cours de la procédure pénale. La Cour européenne a en particulier constaté que ni le requérant, ni son avocat, n’avaient eu la possibilité d’interroger le témoin mineur et que le requérant avait été condamné sur la seule base des affirmations de l’enfant faites à la psychologue en 1991 (violation de l’article 6§1 combiné avec l’article 6§3(d)).


Mesures de caractère individuel: La procédure pénale est terminée. En outre le requérant a la possibilité de demander sa réouverture. La Cour européenne a octroyé au requérant une indemnisation au titre du préjudice moral subi.

Evaluation : aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général:

1) Equité de la procédure pénale : L’affaire présente des similitudes avec l’affaire W c. la Finlande (1007e réunion, octobre 2007, rubrique 2.1), mais certaines différences nécessitent des clarifications, notamment à la suite de la reforme de 2003 du Code de procédure judiciaire.

Evaluation : Questions à clarifier au niveau bilatéral (législation applicable et garanties suffisantes de droits à la défense lors du début et durant la procédure).

            2) Durée de la procédure : voir groupe Kangasluoma (rubrique 5.1).

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales.

- 20 affaires contre la France

39922/03          Taïs, arrêt du 01/06/2006, définitif le 01/09/2006

Cette affaire a trait au décès du fils des requérants en 1993, alors qu’il était placé en cellule de dégrisement dans un commissariat de police.

D’une part, la Cour européenne a estimé que le Gouvernement n’avait « pas été en mesure de fournir une explication plausible ni concernant la discordance, voire la contradiction, entre le rapport médical établi lors du certificat de non-admission [à l’hôpital] et le rapport d’autopsie ni à propos de l’origine des blessures constatées sur le fils des requérants alors qu’en tout état de cause les violences à leur origine ne peuvent être survenues que pendant la détention » (§95) ; de surcroît, l’inertie des policiers face à la détresse physique et morale de l’intéressé et l’absence de surveillance policière effective et médicale ont enfreint l’obligation qu’a l’Etat de protéger la vie des personnes en garde à vue (violations de l’article 2 sous son volet substantiel).

D’autre part, la Cour européenne a estimé que les autorités françaises n’avaient pas mené d’enquête effective, en particulier à bref délai, sur les circonstances entourant le décès (violation de l’article 2 sous son volet procédural). Pour parvenir à cette conclusion, outre la durée de la procédure qui n’a pas permis de déceler la cause réelle de la mort, la Cour européenne a pris en compte : le fait que la compagne du fils des requérants n’avait pas été entendue de manière circonstanciée alors qu’elle était présente dans le commissariat de police la nuit du drame ; le fait que la reconstitution des faits ait été refusée par le juge d’instruction ; la réalisation d’une enquête psychologique post-mortem, dont l’utilité dans la recherche de la vérité était discutable et qui a donné aux autorités judiciaires un moyen de minimiser ou d’écarter la responsabilité des policiers dans la mort du fils des requérants.

Mesures de caractère individuel : Le requérant a indiqué avoir formulé une demande de reprise de l’information sur charges nouvelles, laquelle a été rejetée par le Ministère public le 12/01/2007.

Des contacts bilatéraux sont en cours concernant les mesures individuelles pouvant être envisagées, en particulier à la lumière d’informations récemment fournies par les autorités françaises

Mesures de caractère général :

1) Violation de l’article 2 (volet substantiel) :

• Informations fournies par les autorités françaises : L’arrêt a été diffusé auprès des services de police et il sera commenté lors des formations des personnels de police en vue d’en tirer les conséquences dans leurs activités et afin de prévenir la répétition de tels actes.

Dans un cadre plus général, le Gouvernement français poursuit depuis plusieurs années, vu les recommandations du CPT, un important effort d’amélioration des conditions de garde à vue. A ce titre, il a notamment pris un ensemble de mesures définies par la circulaire du 11/03/2003 relative à la garantie de la dignité des personnes gardées à vue, qui vise la  « modernisation des pratiques professionnelles et des moyens consacrés à la garde à vue (…) afin de garantir la dignité de la personne ».

Concernant l’absence d’explications plausibles sur l’origine des blessures, voir les mesures exposées ci‑dessous (volet procédural).

L’examen de ces mesures est en cours


2) Violation de l’article 2 (volet procédural) :

• Informations fournies par les autorités françaises : l’arrêt de la Cour européenne a été diffusé auprès du Premier président de la Cour de cassation et du Procureur général près de ladite Cour, ainsi qu’au Procureur général près la Cour d’appel de Bordeaux, concerné dans cette affaire. L’arrêt a également fait l’objet d’une publication (accompagnée d’un commentaire) dans le numéro de septembre/octobre 2006 de la Revue d’information juridique du Ministère de l’Intérieur. La diffusion de cette revue est assurée sur le site Intranet du Ministère auquel a accès l’ensemble des agents du Ministère et des préfectures.

L’examen de ces mesures est en cours

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire, et en vue d’évaluer les mesures individuelles et générales.

6253/03            Vincent, arrêt du 24/10/2006, définitif le 26/03/2007

L'affaire concerne le traitement dégradant dont le requérant a fait l'objet durant sa détention du 17/02/2003 au 11/06/2003 dans un établissement pénitentiaire (à Fresnes) : handicapé, il ne pouvait se déplacer et, en particulier, quitter sa cellule par ses propres moyens (violation de l'article 3).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé une satisfaction équitable au requérant au titre du préjudice moral subi. Le requérant n’est plus détenu à Fresnes. Il a indiqué au Secrétariat être actuellement détenu à Liancourt et se plaint de ses conditions de détention actuelles, lesquelles ne seraient pas adaptées pour l’accueil de personnes handicapées. .

• Des informations ont été fournies par la délégation. Elles sont en cours d'examen par le Secrétariat.

Mesures de caractère général : la Cour a constaté (§ 101) « que requérant et Gouvernement s’accord(aient) sur le fait que la maison d’arrêt de Fresnes, établissement fort ancien, est particulièrement inadaptée à la détention de personnes handicapées physiques ».

• Des informations ont été fournies par la délégation. Elles sont en cours d'examen par le Secrétariat.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire, et sur les mesures individuelles ;

2.             au plus tard à leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

70204/01           Frerot, arrêt du 12/06/2007, définitif le 12/09/2007

L’affaire concerne les traitements dégradants infligés au requérant - un ancien membre du mouvement armé d’extrême gauche « Action directe » qui purge une peine de réclusion criminelle à perpétuité - lors de sa détention à la maison d'arrêt de Fresnes, entre septembre 1994 et décembre 1996 (violation de l’article 3). Durant cette détention, le requérant fut contraint de se soumettre à plusieurs reprises à des fouilles intégrales qui ne reposaient pas sur un « impératif convaincant de sécurité », de défense de l'ordre ou de prévention des infractions pénales.

L’affaire concerne également une atteinte au droit au respect de la correspondance en raison du refus du directeur de Fleury-Mérogis d’acheminer le courrier du requérant à un détenu dans une autre prison, parce que, selon lui, il « ne correspond[ait] pas à la définition de la notion de correspondance » (violation de l’article 8).

Elle concerne en outre l’absence de recours pour se plaindre de la violation de son droit au respect de sa correspondance (violation de l’article 13).

Enfin l’affaire concerne la durée excessive d’une procédure devant les juridictions administratives (violation de l'article 6 § 1)

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a alloué au requérant une somme pour préjudice moral. La procédure devant les juridictions administratives est terminée. Le requérant n’est plus détenu à Fresnes ; il est actuellement détenu à la maison centrale de Lannemezan.

Evaluation : Aucune autre mesure ne semble donc nécessaire.

Mesures de caractère général :

1) Violation de l’article 3 : La Cour européenne admet que des fouilles corporelles, même intégrales, puissent parfois se révéler nécessaires pour assurer la sécurité dans une prison, défendre l'ordre ou prévenir les infractions pénales. Elle précise par ailleurs que les modalités de ses fouilles prévues par la circulaire du 14/03/1986 ne sont pas, d’un point de vue général, inhumaines ou dégradantes.


Toutefois, la Cour relève que le requérant a fait l’objet de fouilles intégrales uniquement lors de son séjour à la prison de Fresnes, où il y avait une présomption que tout détenu revenant du parloir dissimulait des objets ou substances dans les parties les plus intimes de son corps. Dans ces conditions, la Cour comprend que les détenus concernés, tel que le requérant, aient eu le sentiment d'être victimes de mesures arbitraires, d’autant que le régime de la fouille était prévu par une circulaire et laissait au chef d'établissement un large pouvoir d'appréciation.

L’arrêt de la Cour européenne a été communiqué au directeur de l’administration pénitentiaire (le 29/06/2007) et au Ministère de la Justice, afin que celui-ci le diffuse auprès des différents établissements pénitentiaires.

Des informations complémentaires semblent nécessaires sur les autres mesures prises ou envisagées afin d’éviter la répétition de la violation constatée (telles que par exemple : instruction, circulaire, mesures se sensibilisation…) ; en toute hypothèse, la confirmation de la diffusion de l’arrêt aux établissements pénitentiaires semble nécessaire.

2) Violation de l’article 8 : La Cour européenne a dit que l’ingérence dans le droit du requérant ne reposait sur aucun des articles du Code de procédure pénale, qu’en outre aucun texte de nature législative ou réglementaire, pas plus que la jurisprudence, ne donnait de définition de la notion de correspondance ; la Cour conclu que l’ingérence dans le droit du requérant n’était donc pas prévue par la loi. La Cour a en outre relevé que la définition de la notion de correspondance retenue par la circulaire du 29/12/1986 était incompatible avec l’article 8 de la Convention, en ce qu’elle s’articule autour du contenu de la « correspondance ».

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées afin d’éviter la répétition de la violation constatée et en particulier sur la mise en conformité de la notion de correspondance avec l’article 8 de la Convention;

3) Violation de l’article 13 : La Cour européenne a constaté que le Conseil d'Etat avait déclaré irrecevable la demande du requérant tendant à l'annulation de la décision de refus du directeur de Fleury-Mérogis d’acheminer un courrier à un autre détenu, au seul motif qu'il s'agissait d'une mesure d'ordre intérieur, insusceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Elle a relevé que le gouvernement ne prétendait pas que le requérant disposait d’un autre recours, et a donc conclu que le requérant avait été privé de tout recours, s'agissant du grief tiré d'une violation de son droit au respect de sa correspondance.

L’arrêt de la Cour européenne a été communiqué au Conseil d’Etat

Des informations complémentaires semblent nécessaires sur les mesures prises ou envisagées afin d’éviter la répétition de la violation constatée.

4) Violation de l’article 6§1 : Sur ce point l’affaire est à rapprocher de l'affaire Raffi et d'autres affaires de durée de procédure devant les juridictions administratives, closes par Résolution finale CM/ResDH(2008)12 suite aux mesures annoncées par l'Etat défendeur, notamment : l'adoption de la loi n° 2002-1138 du 09/09/2002 qui prévoit entre autres des embauches, des créations de juridictions et des allocations budgétaires ; l'adoption de mesures d'ordre procédural afin de permettre aux cours d'appel de réduire leurs stocks de dossiers anciens de manière plus rapide et de voir le flux de nouveaux dossiers se réduire, ainsi que l'implication du chef de la mission permanente d'inspection des juridictions administratives afin d'éviter la durée excessive de procédures devant les juridictions administratives.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1e réunion DH de 2009, à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

59450/00           Ramirez Sanchez, arrêt du 04/07/2006 - Grande Chambre

L’affaire concerne l’absence de voie de recours pour contester les mesures de prolongation de la mise à l’isolement du requérant, détenu (violation de l’article 13). Incarcéré en 1994 et condamné à la réclusion criminelle à perpétuité en 1997, le requérant a été détenu en régime d’isolement depuis son incarcération jusqu’en 2002. A l’époque des faits litigieux, les mises à l’isolement (et leur prolongation) étaient assimilées à des mesures d’ordre intérieur insusceptibles de recours juridictionnel.

Mesures de caractère individuel : La violation constatée a trait à une période ayant pris fin en 2002. Le requérant n’est plus maintenu en isolement depuis janvier 2006 (§76 de l’arrêt). Il convient également de noter que le requérant n’a présenté aucune demande devant la Cour européenne au titre d’un éventuel préjudice subi.

Evaluation : dans ces circonstances, aucune mesure de caractère individuel ne semble nécessaire.


Mesures de caractère général : A compter d’un revirement de jurisprudence du Conseil d’Etat du 30/07/2003, ce dernier a admis qu’il devait être possible de déférer une mesure de mise à l’isolement devant le juge administratif, ce dernier pouvant, le cas échéant, l’annuler dans le cadre d’un recours pour excès de pouvoir « eu égard à l’importance de ses effets sur les conditions de détention ».

Ce revirement a été consacré par deux décrets du 31/03/2006, relatifs à l’isolement des détenus, selon lesquels ces décisions ne sont plus des « mesures d’ordre intérieur » insusceptibles de recours, mais des « décisions administratives individuelles » (Voir code de procédure pénale, Partie Réglementaire - Décrets en Conseil d'Etat, Chapitre II), c’est-à-dire des « actes unilatéraux de l'administration ». Or, un acte administratif unilatéral peut, de plein droit, faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif (arrêt du Conseil d’Etat du 17/02/1950, Dame Lamotte). Les juridictions administratives contrôlent la légalité externe (forme) et interne (fond) de l’acte et peuvent, le cas échéant, l’annuler. Il est rappelé que le juge administratif français applique directement la Convention telle qu’interprétée par la Cour (voir ci-dessous, publication et diffusion de l’arrêt).

A toutes fins utiles, il est précisé que les décrets de mars 2006 prévoient des garanties supplémentaires pour le détenu dans le cadre de procédures relatives au placement en isolement, (débat contradictoire avant la prise de décision, le détenu pouvant être assisté d’un avocat commis d’office, sans condition de ressource ; obligation de motiver la décision…).

Le personnel pénitentiaire a été informé en détails des nouvelles règles applicables par le biais d’une circulaire du Ministre de la Justice du 24/05/2006 et a bénéficié de formations appropriées.

L’arrêt de la Cour européenne a été transmis aux juridictions et services concernés ; il sera publié sur le site intranet du Ministère de la Justice, avec des commentaires.

Evaluation : Ces mesures vont manifestement dans le sens de celles appelées par l’arrêt de la Cour. Des clarifications sembleraient encore utiles sur la façon dont le droit de recours contre une décision de placement à l’isolement est notifiée au détenu (information fournie par le Gouvernement), ainsi que des éléments complémentaires sur l’étendue exacte de la publication / diffusion de l’arrêt.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière de précisions à fournir sur les mesures générales adoptées.

7508/02            L.L., arrêt du 10/10/2006, définitif le 12/02/2007[9]

62740/00          Matheus, arrêt du 31/03/2005, définitif le 01/07/2005

Cette affaire concerne l’impossibilité pour le requérant, depuis une décision de justice rendue en sa faveur en 1988, d’obtenir le concours de la force publique pour faire évacuer les occupants sans titre d’un terrain situé en Guadeloupe dont il avait la propriété et qu’il a finalement vendu en 2004, ayant perdu tout espoir d’en reprendre un jour possession. La Cour européenne a estimé que le prolongement excessif de l’inexécution de la décision de justice, en l’absence de circonstance exceptionnelle justifiant un tel retard, et l’incertitude du requérant qui en a résulté quant au sort de sa propriété avaient entravé son droit à une protection judiciaire effective (violation de l’article 6§1).

Par ailleurs, la Cour a estimé que le refus d’apporter le concours de la force publique en l’espèce avait eu pour conséquence, en l’absence de toute justification d’intérêt général, d’aboutir à une sorte d’expropriation privée dont l’occupant illégal s’était retrouvé bénéficiaire (violation de l’article 1 du Protocole no 1).

Mesures de caractère individuel : Il est rappelé, outre le fait que le terrain en cause n’est plus la propriété du requérant, que ce dernier a perçu, d’une part, à plusieurs reprises des indemnités pour compenser la perte de jouissance de son bien et, d’autre part, une indemnisation pour faute lourde de l’Etat du fait de son refus de prêter concours à l’exécution de la décision de justice litigieuse. La Cour européenne a de surcroît octroyé une satisfaction équitable pour compenser le préjudice moral subi par le requérant.

Evaluation : Aucune mesure de caractère individuel ne semble s’imposer.

Mesures de caractère général : la Cour européenne a notamment estimé que le refus du concours de la force publique découlait « d’une carence des huissiers et du préfet, voire d’un refus délibéré de la part de ce dernier, dans les circonstances locales particulières, et pendant seize années de prêter main-forte dans une procédure d’expulsion » (§68).


Les juridictions nationales ont estimé que ce refus en l’espèce était illégal (voir la jurisprudence du Conseil d’Etat citée dans l’arrêt de la Cour européenne : si le refus d’exécuter une décision de justice par la force publique n’est justifié par aucun motif sérieux d’ordre public - comme en l’espèce - il est illégal et la responsabilité de l’Etat est engagée pour faute lourde).

La violation ne semble donc pas découler de la loi elle-même mais de l’application qui en a été faite par les autorités compétentes.

Dans ce contexte, des informations ont été demandées sur les mesures prises ou envisagées pour éviter de nouvelles violations similaires. En tout état de cause, la publication et la diffusion de l’arrêt de la Cour européenne à toutes les autorités concernées (notamment les préfets) semblent appropriées.

Informations fournies par les autorités françaises (lettre du 6/07/2007) : Le Ministère de l’Intérieur va être saisi pour obtenir une confirmation de la diffusion de l’arrêt Matheus auprès des autorités concernées.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations complémentaires à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales.

63879/00          Ben Naceur, arrêt du 03/10/2006, définitif le 03/01/2007

L'affaire concerne une atteinte au principe de l'égalité des armes (violation de l'article 6§1). Le 22/02/1999, le tribunal correctionnel de Lyon condamna le requérant à 7 ans d'emprisonnement et à l'interdiction définitive du territoire français. Ni le requérant ni le procureur de la République ne firent appel du jugement dans le délai de dix jours imparti par l'article 498 du code de procédure pénale. Cependant, à la demande du procureur de la République, le procureur général interjeta appel le 16/03/1999, en vertu de l'article 505 du code de procédure pénale qui ouvre au procureur général un délai d'appel de 2 mois à compter du prononcé du jugement correctionnel. La cour d'appel confirma la mesure d'éloignement du requérant et porta la peine d'emprisonnement à 12 ans. Le requérant se pourvut vainement en cassation.

La Cour européenne a estimé que, dans les circonstances de l'espèce, la conjugaison de deux éléments avait mis le requérant dans une position de net désavantage par rapport au ministère public, rompant ainsi l'égalité des armes :

- d'une part, le fait que le ministère public qui a des intérêts distincts et opposés à ceux du requérant, bénéficie d'une prolongation du délai d'appel ;

- d'autre part le fait que le requérant ne disposait pas de la possibilité d'interjeter un appel incident, en vertu du droit applicable. En effet, bien que, nonobstant cette circonstance, le requérant ait eu la possibilité de contester à nouveau sa culpabilité devant la Cour d'appel, en réalité la possibilité pour lui d'obtenir un acquittement ou simplement la réformation in melius de la peine était en grande partie théorique et illusoire dans les circonstances de l'espèce (en réalité sa peine ayant au demeurant été sensiblement alourdie). En particulier, le fait même que le requérant n'ait pas relevé appel dans le délai légal de dix jours qui était à sa disposition apparaissait comme la démonstration qu'il estimait avoir peu de chances de pouvoir faire réformer en appel, dans un sens qui lui aurait été favorable, la décision de condamnation rendue en première instance.

Mesures de caractère individuel :le requérant dispose de la possibilité de demander le réexamen de son affaire en application des articles L 626-1 ss. du code de procédure pénale. Le préjudice moral subi a été indemnisé par la satisfaction équitable allouée par la Cour européenne ; le requérant n'a en revanche justifié d'aucun préjudice matériel.

Evaluation : aucune autre mesure ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général : les autorités ont indiqué que l’arrêt avait été diffusé au Premier Président de la Cour de Cassation et au Procureur Général près la même Cour, au Procureur Général près la Cour d’appel de Lyon, ainsi qu’à la Direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la Justice. L’arrêt a également fait l’objet d’une dépêche émanant de cette direction et datée du 4/12/2004, adressée aux procureurs généraux près les cours d’appel, attirant leur attention sur les conséquences de la condamnation prononcée par la Cour à l’encontre de la France. Il est précisé qu’en cas d’exercice du droit d’appel des procureurs généraux dans le délai prévu par l’article 505 du code de procédure pénale, les procureurs généraux doivent veiller à ce que soit requise la recevabilité de l’appel interjeté par le prévenu durant le délai supplémentaire de cinq jours.


Des contacts bilatéraux sont en cours concernant ces mesures.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de cette affaire :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1e réunion DH de 2009, à la lumière des informations fournies sur les mesures générales et de l’issue des contacts bilatéraux en cours.

34043/02          Mattei, arrêt du 19/12/2006, définitif le 19/03/2007

73529/01          Miraux, arrêt du 26/09/2006, définitif le 12/02/2007

Ces affaires concernent l'iniquité de procédures pénales (respectivement closes en 2002 et 1999) à l'encontre des requérants, en raison de la requalification à un stade tardif de la procédure - au moment du délibéré, respectivement des cours d'appel (Mattei) et d'assises (Miraux) - des accusations portées à leur encontre, sans l'assortir de garanties procédurales suffisantes (violations de l'article 6§§1 et 3 a) et b)).

La Cour européenne n'a pas contesté la possibilité dont disposent les juges du fond de modifier la qualification des faits poursuivis. En revanche, les accusés doivent en être informés avec un « soin extrême » or, tel n'a pas été le cas dans les présentes affaires. La Cour a donc estimé que les requérants n'étaient pas en position de préparer et présenter leurs moyens de défense relatifs aux nouvelles qualifications respectivement retenues et à leurs conséquences, y compris, le cas échéant, au regard des peines susceptibles d'être prononcées concrètement.

Mesures de caractère individuel :Les requérants peuvent demander le réexamen de leur condamnation, en vertu des articles L 626-1 ss. du code de procédure pénale. Dans ces deux arrêts, la Cour a rappelé que cela constitue « en principe un moyen approprié de redresser la violation constatée ». De surcroît, il peut être noté que la requérante Mattei a allégué devant la Cour avoir subi uniquement un préjudice moral, que la Cour a estimé suffisamment réparé par le constat de violation. Le requérant Miraux, a quant à lui bénéficié d'une satisfaction équitable allouée « tous chefs de préjudice confondus », vu ses prétentions de préjudices matériel et moral.

Evaluation : Aucune autre mesure ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général :Les présentes affaires présentent certaines similarités avec l'affaire Pélissier et Sassi (arrêt du 25 mars 1999), en rubrique 6.2 vu les mesures les mesures de publication et diffusion de l'arrêt prises afin que les juridictions adaptent leur pratique aux exigences en la matière, ainsi que l'évolution de la jurisprudence de la Cour de cassation mentionnée ci-dessous. Dans l'arrêt Mattei, la Cour s'est déclarée « sensible à l'argument du Gouvernement selon lequel la Cour de cassation mentionne, depuis 2001, l'article 6§1 dans ses visas et reprend l'attendu de principe précisant « que s'il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c'est à la condition que le prévenu ait été mis en mesure de se défendre sur la nouvelle qualification envisagée ». Il semble toutefois que cette jurisprudence ne soit pas systématique et, en tout état de cause, lorsqu'elle s'est prononcée dans les présentes affaires, en particulier dans l'affaire Mattei, où l'on se trouvait (2002) après l'évolution de la jurisprudence de la Cour de cassation, cette dernière ne l'a pas appliquée.

La délégation a indiqué que l’arrêt Miraux avait été transmis le 27/10/2006 à la Cour d’appel de Rouen.

Informations attendues : il semble nécessaire de confirmer, d'une part, que malgré et depuis le problème constaté, la jurisprudence de 2001 a été confirmée et, d'autre part, que ces arrêts ont été dûment portés à l'attention de la Cour de cassation et des juridictions pénales. Des informations sont également demandées sur toute autre mesure éventuellement prise ou envisagée par les autorités françaises.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ces points au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

71611/01          Wisse, arrêt du 20/12/2005, définitif le 20/03/2006

Cette affaire concerne un atteinte au droit des requérants au respect de la vie privée et familiale du fait de l’enregistrement, entre novembre 1998 et février 1999, de leurs conversations avec leurs proches dans les parloirs des prisons où ils étaient maintenus en détention provisoire (violation de l’article 8).

Selon la Cour européenne, l’enregistrement systématique des conversations dans un parloir à d’autres fins que la sécurité de la détention dénie à la fonction du parloir sa seule raison d’être, celle de maintenir une « vie privée » du détenu - relative - qui englobe l’intimité des propos tenus avec ses proches. A cet égard, la Cour a estimé que le droit français n’indiquait pas avec assez de clarté la possibilité d’ingérence par les autorités dans la vie privée des détenus, ainsi que l’étendue et les modalités d’exercice de leur pouvoir d’appréciation dans ce domaine.


Au terme de la procédure, en 2002, les requérants ont été condamnés respectivement à 25 et 20 ans de réclusion criminelle par la cour d’assises d’Ille-et-Vilaine statuant en premier ressort. Ils n’ont pas fait appel de cette décision.

Mesures de caractère individuel : Il peut être noté que dans sa décision (partielle) sur la recevabilité du 04/04/2004, la Cour européenne a rejeté pour non-épuisement des voies de recours internes le grief des requérants concernant l’iniquité de la procédure pénale du fait de l’utilisation de l’enregistrement des conversations dans les parloirs comme élément de preuve à charge dans la procédure (grief tiré de l’article 6§1).

Des informations sur le sort des enregistrements seraient utiles

Mesures de caractère général : Postérieurement aux faits de l’espèce, une loi contenant des dispositions relatives aux sonorisations dans le cadre de procédures portant sur des faits relevant de la criminalité organisée a été adoptée (loi n° 2004-204 du 9/03/2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité). Le 14/06/2006, le Secrétariat a envoyé une lettre aux autorités françaises leur demandant la portée exacte de ces nouvelles dispositions afin d’évaluer la nécessité d’adopter des mesures complémentaires.

Des informations sont attendues sur la question de savoir si, et dans quelle mesure, la loi n° 2004-204 du 9/03/2004 est susceptible de s’appliquer à des faits similaires à ceux de l’affaire Wisse. Dans la négative, des informations seraient utiles sur la question de savoir quelles mesures les autorités françaises envisagent de prendre afin d’éviter la répétition de la violation constatée dans la présente affaire.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

59842/00          Vetter, arrêt du 31/05/2005, définitif le 31/08/2005

L'affaire concerne tout d'abord l'ingérence dans le droit du requérant au respect de sa vie privée. Le requérant étant soupçonné d'avoir commis un homicide volontaire, la police judiciaire, sur demande d'un magistrat instructeur, procéda en 1997 à des écoutes à l'aide de micros dans l'appartement d'un tiers dans lequel le requérant se rendait régulièrement.

La Cour européenne a estimé en particulier que, dans le domaine de la pose de micros, le droit français n'indiquait pas avec assez de clarté l'étendue et les modalités d'exercice du pouvoir d'appréciation des autorités et que la sonorisation n'était donc pas un procédé « prévu par la loi » (violation de l'article 8).

D'autre part, l'affaire concerne le caractère inéquitable de la procédure pénale devant la chambre criminelle de la Cour de cassation, en raison de l'absence de communication au requérant ou à son avocat du rapport du conseiller rapporteur, alors même que ce rapport avait été fourni à l'avocat général (violation de l'article 6§1).

Au terme de la procédure, le requérant a été condamné en 2000 à 20 ans de réclusion criminelle par un arrêt définitif.

Mesures de caractère individuel : le requérant a la possibilité de demander le réexamen de son pourvoi sur le fondement des articles L 626-1 ss. du code de procédure pénale.

Des informations sont attendues depuis décembre 2005 sur le sort des enregistrements litigieux.

Mesures de caractère général :

            1) Violation de l'article 8 : le 19/12/2005, le Secrétariat a envoyé une lettre aux autorités françaises les invitant à établir un plan d'action pour l'exécution de cet arrêt. Il a attiré l'attention des autorités françaises sur les conclusions de la Cour européenne dans cet arrêt (entre autres §26). Postérieurement à l'envoi de ce courrier, le Comité des Ministres a examiné l'arrêt Wisse contre la France (rubrique 4.2) dans lequel la Cour mentionne l'arrêt Vetter et l'entrée en vigueur d'une nouvelle loi, postérieurement à cet arrêt, la loi n° 2004‑204 du 9/03/2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité. Cette loi contient des dispositions relatives aux sonorisations dans le cadre de procédures portant sur des faits relevant de la criminalité organisée (article 706-9 du code de procédure pénale) ».

Des informations sont attendues sur la question de savoir si, et dans quelle mesure, la loi n° 2004-204 du 9/03/2004 est susceptible de s'appliquer à des faits similaires à ceux de l'affaire Vetter. Dans la négative, des informations seraient utiles sur la question de savoir quelles mesures les autorités françaises envisagent de prendre afin d'éviter la répétition de la violation constatée dans la présente affaire.

            2) Violation de l'article 6§1 : cette affaire est à rapprocher notamment de l'affaire Reinhardt et Slimane‑Kaïd (22921/93, Résolution DH(98)306) et de l'affaire Slimane-Kaïd n° 2 (Résolution CM/ResDH(2008)13).

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point :

1              à leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire;

2.             au plus tard à leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.


65411/01          Sacilor-Lormines, arrêt du 09/11/2006, définitif le 09/02/2007

L’affaire concerne le caractère inéquitable d’une procédure devant le Conseil d’Etat en raison de la présence au sein de la formation qui rendit un jugement, en mai 2000, sur un litige opposant la société requérante au ministère de l’Economie, des Finances et de l’Industrie, d’un conseiller d’Etat qui fut par la suite nommé au poste de Secrétaire général de ce Ministère (violation de l’article 6§1). La Cour européenne a estimé à cet égard que ce conseiller ne pouvait apparaître comme quelqu’un de neutre vis-à-vis de la requérante dans la mesure où, au moment des faits, les pourparlers sur sa future nomination étaient déjà en cours.

L’affaire concerne également une atteinte au droit à un procès équitable en raison de la participation du commissaire du Gouvernement au délibéré devant le Conseil d'Etat (violation de l'article 6§1).

Enfin, elle concerne la durée d’une procédure civile devant le Conseil d’Etat (violation de l'article 6§1).

Mesures individuelles : La Cour européenne a alloué à la société requérante une satisfaction équitable au titre du préjudice moral du fait de la durée de la procédure. Elle a dit en outre qu’elle n’apercevait aucun lien de causalité entre les autres violations constatées et le préjudice matériel allégué. Enfin, elle a estimé que le préjudice moral se trouvait suffisamment réparé par les constats de violation.

Des informations sont attendues sur d’éventuelles mesures individuelles envisagées.

Mesures de caractère général :

1) Indépendance et impartialité du Conseil d’Etat :

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées pour éviter de nouvelles violations similaires. En tout état de cause, la publication et la communication de l’arrêt de la Cour européenne au Conseil d’Etat semblent nécessaires.

2) Participation du commissaire du Gouvernement au délibéré devant le Conseil d'Etat : les mesures ont déjà été adoptées, voir CM/ResDH(2007)44 dans l’affaire Kress.

3) Durée excessive des procédures devant les juridictions administratives : sur les mesures déjà adoptées (embauches, mesures procédurales …) voir notamment l’affaire Raffi (CM/ResDH(2008)12).

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales et individuelles.

                       - Affaires concernant la liberté d’expression

54968/00          Paturel, arrêt du 22/12/2005, définitif le 22/03/2006

71343/01          Brasilier, arrêt du 11/04/2006, définitif le 11/07/2006

64016/00          Giniewski, arrêt du 31/01/2006, définitif le 01/05/2006

12697/03          Mamère, arrêt du 07/11/2006, définitif le 07/02/2007

Ces affaires concernent des atteintes à la liberté d’expression des requérants, condamnés dans le cadre de procédures en diffamation, entre 1994 et 2002, en vertu des articles 29, 31 ou 32 de la loi du 29 juillet de 1881 sur la liberté de la presse (violations de l’article 10).

Dans l’affaire Paturel, le requérant a été condamné pénalement sur la base de certains extraits d’un ouvrage qu’il avait fait paraître en 1996, visant à dénoncer les dérives alléguées des mouvements anti-sectaires. La Cour européenne a notamment estimé que les juridictions françaises ont excédé la marge d'appréciation dont elles disposaient en exigeant du requérant qu'il prouve la véracité des extraits litigieux (qui constituaient en réalité des jugements de valeur, reposant sur une base factuelle suffisante), et ce, en écartant systématiquement les nombreux documents produits par lui à cette fin et en lui opposant de manière récurrente une prétendue partialité et une animosité personnelle principalement déduites de sa qualité de membre d'une association qualifiée de secte par la partie civile.

Dans l’affaire Brasilier, le requérant a été acquitté pénalement mais condamné civilement au paiement d’un « franc symbolique » au titre de dommages-intérêts pour avoir diffamé un homme politique, par le biais de banderoles et tracts, dans la mesure où il n’avait pas apporté la preuve des affirmations qu’ils contenaient. La Cour européenne a notamment estimé que les jugements de valeur exprimés par le requérant reposaient sur une base factuelle suffisante, mais aussi qu’ils visaient un homme politique, pris en cette qualité, et émanaient d’un adversaire dans des élections publiques.

Dans l’affaire Giniewski, le requérant a également été acquitté au plan pénal mais condamné civilement pour avoir publié un article concernant la portée d’un dogme catholique et sur ses liens possibles avec les origines de l’Holocauste. La Cour européenne a notamment estimé qu’il ne s’agissait pas d’un texte comportant des attaques contre des convictions religieuses en tant que telles, mais d’une réflexion que le requérant avait voulu exprimer en tant que journaliste et historien, et que cet article n’avait aucun caractère « gratuitement offensant », ni injurieux, qu’il n’incitait ni à l’irrespect ni à la haine, et qu’il n’a en aucune manière contesté la réalité de faits historiques clairement établis.


Dans l’affaire Mamère, le requérant, homme politique issu du parti écologiste « les Verts », fut condamné pour une déclaration faite lors d’une émission de télévision à propos d’un fonctionnaire - le directeur de l’époque de l’organe public chargé notamment de surveiller le niveau de radioactivité du territoire français - dans le contexte de la catastrophe de Tchernobyl. La Cour européenne a rappelé que les personnes poursuivies à raison de propos qu’elles ont tenus sur un sujet d’intérêt général devaient pouvoir s’exonérer de leur responsabilité en établissant leur bonne foi et, s’agissant d’assertions de faits, en prouvant la véracité de ceux-ci. En l’espèce, les propos litigieux tenaient du jugement de valeur mais aussi de l’imputation de faits. Le requérant devait donc se voir offrir cette double possibilité, ce qui n’a pas été le cas. D’une part, les motifs retenus par le juge interne pour conclure à l’absence de bonne foi mettaient en exergue une « particulière raideur » dans la lecture des propos du requérant. D’autre part, l’article 35 de la loi de 1881 empêchaient l’intéressé de faire valoir l’exceptio veritatis, car les faits concernés remontaient à plus de 10 ans.

Mesures de caractère individuel:

            1) Affaires Paturel et Mamère : les requérants ont été condamnés à payer des amendes et dommages-intérêts. Dans l’affaire Paturel, la satisfaction équitable octroyée par la Cour européenne couvre en particulier l’amende qu’a dû payer par le requérant au terme de la procédure litigieuse. Dans l’affaire Mamère en revanche, le requérant n’a présenté aucune demande de satisfaction équitable à la Cour européenne.

Les requérants disposaient d’un « délai d'un an à compter de la décision de la Cour européenne des Droits de l'Homme » (article L 626-3 du Code de procédure pénale) pour demander le réexamen de la décision incriminée. Selon les dernières informations disponibles, les requérants n’avaient pas formé de telle demande.

Des informations sont attendues sur la question de savoir si la condamnation de ces requérants est inscrite à leur casier judiciaire et s’il subsiste éventuellement d’autres conséquences négatives de la violation.

            2) Affaires Brasilier et Giniewski : Aucun des requérants n’a soumis de demande devant la Cour européenne au titre d’un quelconque préjudice éventuel.

Aucune mesure ne semble requise, étant donné qu’ils ont été condamnés civilement au versement de sommes symboliques.

Mesures de caractère général :

            1) Dans toutes ces affaires (hormis le point 2 ci-dessous) ce sont les motifs que les juridictions internes ont retenus (c’est-à-dire leur application des textes pertinents), pour condamner les requérants pour diffamation, qui ont été critiqués par la Cour européenne.

L’arrêt Mamère a été transmis le 27/11/2006 à la Cour de cassation et au Procureur Général de la Cour d’appel de Paris.

Des informations complémentaires sont attendues sur les mesures prises ou envisagées pour éviter de nouvelles violations similaires. En tout état de cause la publication et la diffusion de tous ces arrêts de la Cour européenne auprès des autorités concernées semblent nécessaires. Des contacts bilatéraux sont en cours.

            2) Dans l’affaire Mamère : impossibilité de faire valoir l’exceptio veritatis pour des faits remontant à plus de dix ans : cette violation résulte de la lettre de la loi (voir ci-dessus), aux termes de laquelle « la vérité des faits diffamatoires peut toujours être prouvée, sauf (…) b) lorsque l’imputation se réfère à des faits qui remontent à plus de dix années ».

Des informations ont été demandées sur les mesures prises ou envisagées pour assurer que, dans des cas similaires, plus de dix ans après les faits auxquels se réfèrent l’imputation, il soit possible de faire valoir l’exceptio veritatis (voir notamment le §24 de l’arrêt Mamère).

Des informations ont été récemment fournies sur ce point par la Délégation. Leur examen est en cours.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

1914/02            Dupuis et autres, arrêt du 07/06/2007, définitif le 12/11/2007

Cette affaire concerne une atteinte à la liberté d'expression des requérants, deux journalistes et une maison d’édition, en raison de leur condamnation pénale et civile - définitive en 2001 – suite à la publication d’un livre présentant des informations issues d’une instruction en cours à l’époque (violation de l’article 10).


L’instruction en question concernait des écoutes téléphoniques organisées au niveau de la Présidence de la République française au milieu des années 1980 et visant, entre autres, de nombreuses personnalités de la société civile (affaire dite des « écoutes de l’Elysée »). Les condamnations litigieuses, basées sur des violations du secret de l'instruction ou du secret professionnel, tendaient à protéger la réputation et les droits d’autrui (en particulier une personne mise en examen dans l’affaire des écoutes) et à garantir « l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire ».

La Cour européenne a tout d’abord noté l’intérêt public considérable pour « l’affaire d’Etat » en question, ainsi que le fait que la personne dont on voulait protéger la réputation et les droits était un homme public influent, impliqué dans la vie politique au plus haut niveau de l’exécutif, et que les limites de la critique admissible devaient dans ce cas être plus larges. Pour conclure à la violation, la Cour européenne a notamment pris en compte la médiatisation dont bénéficiait déjà l’affaire au moment de la publication, le respect par les requérants des règles de la profession journalistique, ainsi que le potentiel effet dissuasif de telles condamnations quant à l’exercice de la liberté d’expression.

Mesures de caractère individuel : Au plan pénal, les deux journalistes ont été déclarés coupables du délit de recel de violation du secret de l'instruction ou du secret professionnel et condamnés chacun à une peine d’amende équivalant à 762,25 euros. L’arrêt n’indique pas s’ils subissent d’autres conséquences négatives de la violation, telles qu’une inscription au casier judiciaire par exemple. En vertu des articles L 626-1 ss. du code de procédure pénale, ils ont la possibilité de demander le réexamen de la condamnation pénale litigieuse, à la suite de l’arrêt de la Cour européenne.

Au plan civil, les journalistes ont été condamnés solidairement à payer l’équivalant de 7 622,50 euros de dommages-intérêts. L’éditeur du livre a quant à lui été déclaré civilement responsable. Devant la Cour européenne, les requérants n’ont toutefois formulé aucune demande au titre de la satisfaction équitable. Enfin, il convient de noter que l'ouvrage des requérants a pu continuer à être publié et aucun exemplaire n’a été saisi.

Des informations semblent nécessaires sur le point de savoir si la condamnation des deux journalistes est inscrite à leur casier judiciaire et s'il subsiste pour eux éventuellement d'autres conséquences négatives de la violation. Aucune autre mesure ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général : L’origine de la violation réside dans l’appréciation faite par les juges nationaux sur le point de savoir si, dans les circonstances particulières de l’affaire, l’intérêt d’informer le public l’emportait sur les « devoirs et responsabilités » pesant sur les requérants en raison de l’origine des documents publiés. Un problème similaire est examiné dans le cadre d’autres affaires relatives à des condamnations pénales ou civiles contraires à l’article 10 (affaires Paturel et autres, rubrique 4.2).

Des informations semblent nécessaires sur les mesures prises ou envisagées pour éviter de nouvelles violations similaires. La publication et la diffusion de l’arrêt de la cour européenne semblent en tout état de cause nécessaires. Des contacts bilatéraux sont en cours, en lien avec le groupe Paturel.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

58675/00          Martinie, arrêt du 12/04/2006 - Grande Chambre

Cette affaire concerne des atteintes au droit à un procès équitable du requérant, un ancien agent comptable du lycée de Bayonne et du Centre national d'entraînement à la pelote basque (CNEA), organisme sans personnalité morale et rattaché au budget dudit lycée. En octobre 1997, la chambre régionale des comptes d'Aquitaine a estimé que le requérant devait au lycée une somme correspondant à des paiements qu'il avait effectué en sa qualité de comptable public de cet établissement entre 1989 à 1993 au directeur de la CNEA et à lui-même agissant en qualité de secrétaire général de cette dernière. En appel, la Cour des comptes a réduit cette somme à 191 900 FRF (29 117,76 euros) par un arrêt du 20/10/1998. En octobre 1999, le pourvoi en cassation déposé par le requérant auprès du Conseil d'Etat a été déclaré « non admis ».

La Cour européenne a conclu à deux violations de l'article 6§1 quant à l'instance devant la Cour des comptes, au vu de ce que le requérant n'avait pas eu la possibilité de solliciter la tenue des débats publics devant cette juridiction et au vu du déséquilibre à son détriment du fait de la place du procureur dans la procédure.

En outre, la Cour européenne a conclu à une violation de l'article 6§1 quant à la participation du commissaire du gouvernement au délibéré de la formation de jugement du Conseil d'Etat, confirmant sa jurisprudence de l'arrêt Kress (arrêt du 07/06/2001, Grande Chambre).

Mesures de caractère individuel : Le 07/06/2001, le ministre des finances a accordé au requérant une remise gracieuse du débet prononcé par la Cour des comptes, à hauteur de 21 053,91 euros, 762,25 euros restant ainsi à sa charge (§ 12 de l'arrêt). Devant la Cour européenne, le requérant réclamait le remboursement de cette dernière somme plus les intérêts légaux, ainsi qu'une satisfaction équitable pour le préjudice moral subi.


La Cour européenne a estimé qu'elle ne pouvait spéculer sur le résultat auquel la procédure incriminée aurait abouti si la violation n'avait pas eu lieu et a rejeté les prétentions du requérant au titre du préjudice matériel. Quant au préjudice moral, elle a estimé qu'il était suffisamment réparé par le constat de violation.

Evaluation : Le requérant ne semble plus subir de conséquence grave de la violation, aucune mesure supplémentaire n'est requise.

Mesures de caractère général :

            1) Violations de l'article 6§1 lors de la procédure devant la Cour des comptes :

Premièrement, étant donné que la procédure devant les chambres régionales se déroule à huis clos, la Cour européenne juge essentiel que les comptables publics se voient offrir la possibilité de solliciter une audience publique devant la Cour des comptes lorsque celle-ci est saisie en appel d'un jugement de première instance les mettant en débet.

Deuxièmement, la Cour européenne a critiqué la position du procureur dans la procédure devant la Cour des comptes: en effet, le procureur est présent à l'audience, est informé préalablement du point de vue du rapporteur, entend celui-ci lors de l’audience, participe pleinement aux débats et a la possibilité d'exprimer oralement son propre point de vue sans être contredit par le comptable. Ce déséquilibre se trouve accentué par le fait que l'audience n'est pas publique et se déroule en dehors de tout contrôle non seulement du comptable concerné mais aussi du public.

Informations fournies par les autorités françaises (courriers du 29/08/2006 et du 25/04/2007) :

Modifications déjà apportées au Code des juridictions financières. Le Code a été amendé par la loi n°2001-1248 du 21/12/2001 et prévoit désormais en particulier que les jugements, avis, propositions, rapports d’instruction et observations de la chambre régionale des comptes doivent être délibérés et adoptés collégialement selon une procédure contradictoire. Il prévoit également que lorsque la chambre régionale des comptes et la Cour des comptes statuent en matière de gestion de fait et d’amende, elles délibèrent hors la présence du rapporteur (sur ce dernier point voir articles L140-7 et L241-13 du code). Le Code des juridictions financières a en outre été modifié par le décret n°2007-543 du 12/04/2007, l’article R141-11 prévoit désormais qu’ « après l’exposé du rapporteur et les conclusions du procureur général, du premier avocat général ou d’un chargé de mission, la ou les parties présentes peuvent formuler, soit en personne, soit par un avocat au Conseil d’Etat ou à la Cour de cassation ou un avocat, des observations complétant et précisant celles fournies par écrit sur l’affaire qui la concerne ».

Mesures provisoires prises par le premier Président de la Cour des comptes : Elles sont appliquées, sous la forme d’une instruction, depuis le 16/05/2006 par les juridictions financières. Désormais, une audience publique est organisée avant toute mise en débet (première instance), comme avant le jugement d'un recours portant sur un débet (appel). Le magistrat rapporteur est exclu du délibéré. Le ministère public demeure exclu du délibéré. Le rapport d'instruction n'est plus couvert par le secret du délibéré. Il est versé au dossier, avec les conclusions du ministère public. Les parties peuvent consulter le dossier et obtenir communication de toute pièce.

Les autorités ont fourni très récemment des informations complémentaires sur un nouveau projet de loi actuellement examiné par le Parlement.

Des informations complémentaires sont attendues sur l'état d'avancement de ce projet et une copie de ce projet pourrait utilement être envoyée au Secrétariat en vue de permettre une analyse globale des mesures adoptées.

            2) Violation de l'article 6§1 suite à la participation du commissaire du gouvernement au délibéré de la formation de jugement du Conseil d'Etat : Des mesures générales ont été adoptées à la suite de l'arrêt dans l'affaire Kress (voir Résolution CM/ResDH(2007)44 dans l'affaire Kress contre la France et 5 autres affaires relatives au droit à un procès équitable devant le Conseil d'Etat).

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1ère réunion DH de 2009, à la lumière d'informations complémentaires à fournir sur  les mesures générales, à savoir celles relatives à la procédure devant la Cour des comptes.

- Affaires de durée de procédures concernant des droits et obligations de caractère civil devant les juridictions financières (administratives)

53929/00          Richard-Dubarry, arrêt du 01/06/2004, définitif le 01/09/2004

49699/99+        Siffre, Ecoffet et Bernardini, arrêt du 12/12/2006, définitif le 12/03/2007, rectifié le 27/03/2007

Ces affaires concernent la durée excessive de procédures concernant des droits et obligations de caractère civil devant des juridictions financières (violations de l’article 6§1). Dans l’affaire Richard-Dubarry, les quatre procédures incriminées ont débuté en novembre et décembre 1994 et étaient toujours pendantes lorsque la Cour européenne a rendu son arrêt (presque 9 ½ ans). Dans l’affaire Siffre, Ecoffet et Bernardini, la procédure a duré de 1995 à 2000.


Mesure de caractère individuel :

1) Affaire Siffre, Ecoffet et Bernardini : aucune mesure individuelle n’est nécessaire, la procédure étant close.

2) Affaire Richard-Dubarry : La délégation française a fourni des informations détaillées sur l’état d’avancement des procédures, contenant entre autres les éléments suivants :

Dans deux des quatre procédures (relatives à l’Association du personnel de la commune de Noisy-le-Grand et à l’Association Noisy communication), la Cour des comptes a pris des mesures pour accélérer les procédures. En particulier, après avoir annulé, le 21/12/2006, divers jugements antérieurs émanant de la Chambre régionale des comptes (faisant d’ailleurs ainsi une stricte application de la jurisprudence de la Cour européenne dans l’arrêt Martinie du 12/04/2006), elle a choisi d’évoquer elle-même directement le fond des contentieux plutôt que de renvoyer à la Chambre régionale des comptes, afin de réduire les délais de jugement. La procédure suit son cours devant la Cour des comptes.

Dans les deux autres procédures (relatives à l’Association centre culturel Michel Simon et à l’Association Michel Simon Arts Production), postérieurement à l’arrêt de la Cour européenne, la Chambre régionale des comptes a rendu des arrêts en 2005 et 2006. Des requêtes en appel de la requérante sont examinées par la Cour des comptes.

Des informations seraient utiles sur le développement de ces procédures.

Mesures de caractère général :

1) Durée excessive de la procédure

Informations fournies par les autorités françaises :

- Premièrement, les mesures suivantes ont été adoptées. L’article R 112-2 du code de justice administrative, dans sa rédaction issue du décret du 09/12/2005, prévoit que toute partie qui fait état de la durée excessive d’une procédure engagée devant un tribunal administratif ou une cour administrative d’appel peut saisir le chef de la mission permanente d’inspection des juridictions administratives. Ce dernier a la faculté de faire des recommandations pour remédier à cette situation. De plus, le chef de la mission permanente d’inspection des juridictions administratives est également rendu destinataire des décisions administratives ou juridictionnelles allouant une indemnité en réparation du préjudice causé par une durée excessive de procédure devant les juridictions administratives. Il peut ainsi, s’il l’estime opportun, signaler aux chefs de juridictions les dossiers faisant apparaître une insuffisance du fonctionnement du service public de la justice.

- Deuxièmement, concernant l’étendue du problème, il est rappelé que dans l’affaire Martinie (rubrique 4.2), la Délégation avait indiqué qu’un groupe de travail interne aux juridictions financières avait entre autres jugé qu’une révision des procédures juridictionnelles de la Cour et des chambres régionales et territoriales des comptes était nécessaire et qu’elle devait couvrir « l’ensemble de la procédure de gestion de fait dont le récent arrêt de la Cour européenne dans l’affaire Siffre, Ecoffet et Bernardini contre France a souligné les incompatibilités avec l’exigence de juger dans un délai raisonnable ».

- Enfin, les autorités ont fourni très récemment des informations complémentaires sur un nouveau projet de loi actuellement examiné par le Parlement.

Des précisions ont été demandées sur la question de savoir si les mesures prises par les autorités françaises afin d’éviter les durées excessives de procédures devant les juridictions administratives (affaire Raffi et autres affaires, résolution finale CM/ResDH(2008)12) sont pertinentes également pour les juridictions financières.

De plus, des informations complémentaires sont attendues sur l'état d'avancement du projet de loi, dont une copie pourrait utilement être envoyée au Secrétariat.

2) Recours effectif pour se plaindre de la durée excessive de la procédure :

Informations fournies par la délégation : la Cour des comptes a confirmé que le recours effectif permettant de se plaindre de la durée d’une procédure administrative s’applique également aux procédures devant les juridictions financières, qui sont des juridictions administratives spécialisées. Les rappels et précisions suivants sont faits concernant ce recours. Dans l’arrêt Broca et Texier‑Micault de la Cour européenne du 21/10/2003, la Cour européenne a considéré (sur la base d’une jurisprudence stable des juridictions nationales) qu’il existait un recours effectif pour se plaindre de la durée déraisonnable d’une procédure devant les juridictions administratives. Depuis le 01/09/2005 cette action en responsabilité a été insérée dans le code de justice administrative (article R 311-1, 7°) et relève désormais de la compétence du Conseil d’Etat en premier et dernier ressort ; la délégation a précisé que les requêtes déposées sur cette base trouvent ainsi rapidement un règlement définitif en un nouveau contentieux sur la durée de l’instance en responsabilité elle-même.

Evaluation : aucune autre mesure ne semble nécessaire.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1ère réunion DH de 2009, à la lumière d’informations complémentaires à fournir sur les mesures générales et, le cas échéant, sur les mesures individuelles dans l’affaire Richard-Dubarry.


- 4 affaires contre la Géorgie

71678/01           Gurguenidze, arrêt du 17/10/2006, définitif le 17/01/2007

L'affaire concerne l'absence de protection suffisante, par les juridictions géorgiennes, de la vie privée du requérant à la suite de la publication par un journal de sa photographie et d'une série d'interviews contenant des propos outrageant à son égard. Les juridictions ont rejeté la demande de compensation morale du requérant.

La Cour européenne a considéré que l'atteinte à sa personne et le défaut de protection suffisante de la part des juridictions internes avaient dû causer au requérant des inconvénients dans sa vie privée et professionnelle ainsi qu'un fort sentiment de honte l'empêchant d'affronter le regard d'autrui (violation de l'article 8).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a alloué au requérant une satisfaction équitable au titre du préjudice moral.

La publication et la diffusion de l'arrêt de la Cour européenne (voir ci-dessous) constituera une mesure supplémentaire afin d'effacer les conséquences de la violation.

Mesures de caractère général : Le 5/12/2007, le Secrétariat a reçu une copie du Journal officiel de Géorgie, n° 55 en date du 26/11/07, dans lequel l'arrêt de la Cour européenne traduit en géorgien a été publié. L'arrêt traduit a été distribué à différents organes de l'Etat. Il est en outre disponible sur le site web du Ministère de la Justice : www.justice.gov.ge/gurgenidze.pdf.

Confirmation est attendue de la diffusion de l’arrêt aux tribunaux de districts et aux cours régionales, avec une circulaire attirant leur attention sur leurs obligations en vertu de la Convention, telle qu'interprétée par le présent arrêt.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations complémentaires à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations complémentaires à fournir sur les mesures générales.

71156/01           97 membres de la congrégation des Témoins de Jéhovah de Gldani et 4 autres, arrêt du 03/05/2007, définitif le 03/08/2007

L’affaire concerne les traitements inhumains et/ou dégradants infligés, en octobre 1999, à un certain nombre de requérants, membres de la Congrégation des témoins de Jéhovah de Gldani, par un groupe de religieux orthodoxes extrémistes dirigés par Vassil Mkalavichvili (appelé « le père Basile »), sans qu’ils ne parviennent à obtenir la protection de l’Etat et sans qu’aucune enquête effective n’ait été conduite sur ces évènements (violations de l’article 3).

L’affaire concerne en outre l’inactivité des autorités géorgiennes qui manquèrent à leur obligation de prendre des mesures nécessaires pour assurer que le groupe d'extrémistes orthodoxes animé par le père Basile tolère l'existence de la communauté religieuse des requérants et permette à ceux-ci un exercice libre de leurs droits à la liberté de religion (violation de l’article 9).

Enfin, l’affaire concerne le fait que les propos et attitudes de certains fonctionnaires impliqués dans l’affaire – propos et attitudes qu’on ne saurait qualifier de compatibles avec le principe de l'égalité de tous devant la loi – ont laissé penser que les agissements du « père Basile » bénéficiaient de l'aval officieux des autorités, lui permettant de continuer de prôner la haine dans les médias et de poursuivre avec ses partisans des actes de violence religieux (violation de l’article 14 combiné avec les articles 3 et 9).

Mesures de caractère individuel : La Cour a alloué aux requérants une satisfaction équitable au titre du préjudice moral subi. La position établie du Comité dans ce type d’affaire est qu’il existe une obligation continue de mener une enquête dans la mesure où une violation de l'article 3 a été constatée.

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées par les autorités afin de se conformer à cette obligation.

Mesures de caractère général : Il ressort de l’arrêt qu’il n’y a plus de violences commises contre les Témoins de Jehovah depuis 2004.

Le 5/12/2007, le Secrétariat a reçu une copie du journal officiel de Géorgie n° 50 en date du 24/10/07 dans lequel l’arrêt de la Cour européenne traduit en géorgien a été publié. Le jugement traduit a été distribué à différents organes de l’Etat. Il est en outre disponible sur le site web du Ministère de la Justice www.justice.gov.ge/gladni.pdf.


Est attendue la confirmation de la diffusion de cet arrêt aux services de police et à l’ensemble des juridictions pénales géorgiennes afin d’attirer leur attention sur les exigences de la Convention.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard à leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

40765/02           Apostol, arrêt du 28/11/2006, définitif le 28/02/2007

L'affaire concerne une atteinte au droit à un procès équitable en raison de la limitation excessive du droit d'accès du requérant à une procédure d'exécution d'un jugement définitif rendu en sa faveur le 21/11/2001. Ce jugement est resté inexécuté car le requérant n'a pu s'acquitter au préalable des frais afférents à la procédure d'exécution (violation de l'article 6§1).

Mesures de caractère individuel : Le requérant n'a formulé aucune demande de satisfaction équitable. La Cour européenne a dit que l'Etat défendeur devait, par des moyens appropriés, veiller à l'exécution du jugement du 21/11/2001.

Informations fournies par les autorités géorgiennes (30/10/2007) : A ce jour, les pouvoirs publics n’ont pas été en mesure d’assurer l’exécution du jugement du 21/11/2001 car le débiteur est introuvable et ne possède apparemment aucun bien (ni véhicule, ni bien immobilier, il n’est pas enregistré comme entrepreneur et ne possède pas de compte bancaire). Les pouvoirs publics poursuivent toutefois leurs efforts pour faire exécuter le jugement du 21/11/2001.

Evaluation : des informations sont attendues sur d’autres mesures entreprises afin de faire exécuter l’arrêt du 21/11/2001.

Mesures de caractère général : La Cour européenne a dit qu'en faisant porter au requérant la responsabilité financière de l'organisation de la procédure d'exécution, l'Etat tentait d'échapper à son obligation positive d'organiser un système d'exécution des décisions de justice qui soit efficace à la fois en droit et en pratique.

Informations fournies par les autorités géorgiennes (30/10/2007): L’arrêt de la Cour a été traduit en géorgien, publié et distribué à de nombreux corps de l’Etat ; le Gouvernement est actuellement en train de préparer un projet de loi sur les procédures d’exécution qui incorporera les normes internationales. En outre, afin de renforcer l’efficacité du service de l’exécution, des changements structurels sont en cours. 

Evaluation : Des informations sur l’évolution de ce projet et une copie du texte de ce projet sont attendues. En outre, des précisions sur les administrations auxquels l’arrêt de la Cour a été distribué seraient très utiles.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations complémentaires à fournir sur les mesures individuelles et générales.

                       - Affaire concernant la liberté d’expression

12979/04           Gorelishvili, arrêt du 05/06/2007, définitif le 05/09/2007

L’affaire concerne une atteinte à la liberté d’expression de la requérante, journaliste à l’époque des faits, en raison de sa condamnation, en septembre 2003, pour diffamation pour avoir publié un article sur la situation financière d’une personnalité politique au vu de sa déclaration de patrimoine (violation de l’article 10).

La Cour européenne a relevé en particulier qu’il n’y avait aucun doute sur le fait que la liberté d’expression de la requérante s’était exercée dans le contexte d’une question d’intérêt public importante et que les expressions condamnées par la Cour Suprême dans la présente relevaient d’une opinion, bien qu’exprimée de manière provocante. La Cour européenne a conclu que les critères appliquées par la Cour Suprême n’étaient pas compatibles avec les principes contenus dans l’article 10, puisqu’elle ne fournissait pas de raisons pertinentes et suffisantes pour justifier l’ingérence dans le droit de la requérante de communiquer des informations et des idées sur des questions d’intérêt public. La Cour a estimé que l’ingérence n’était pas nécessaire dans une société démocratique.

Mesures de caractère individuel : Aucune demande d’indemnisation du préjudice matériel n’a été faite. La Cour européenne a estimé que le constat de violation ne suffisait pas pour compenser le préjudice moral subi par la requérante et lui a donc attribué une somme de ce chef.

Evaluation: A la lumière de ce qui précède, aucune autre mesure ne semble nécessaire.


Mesures de caractère général : La Cour a dit que l’état de la législation géorgienne en matière de diffamation à l’époque des faits avait conduit à la décision de la Cour Suprême ; en particulier l’article 18§2 du code civil n’établissait pas de distinction entre les déclarations factuelles et les jugements de valeur mais se référait de manière uniforme à « l’information » (cnobebi), et exigeait que la vérité sur toute « information » soit prouvée par le défendeur. Cette approche monolithique de l’appréciation de l’expression est, aux yeux de la Cour, incompatible en soi avec la liberté d’opinion qui est un élément fondamental de l’article 10.

Le 5/12/2007, le Secrétariat a reçu une copie du journal officiel de Géorgie n° 54 en date 12/11/07 dans lequel l'arrêt de la Cour européenne traduit en géorgien a été publié. Le jugement traduit a été distribué à différents organes de l'Etat. Il est en outre disponible sur le site Internet du Ministère de la Justice : http://www.justice.gov.ge/gorelishvili.pdf

Des informations sont attendues sur les dispositions actuellement applicables en matière de diffamation.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point :

1.             à leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’information à fournir sur la satisfaction équitable si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

- 125 affaires contre la Grèce

9029/05 Kampanellis, arrêt du 21/06/2007, définitif le 21/09/2007

L’affaire concerne la violation de la présomption d’innocence du requérant. A cet égard, en 2004, la chambre d’accusation de la cour d’appel d’Athènes, statuant dans le cadre de sa demande de mise en liberté sous caution, a utilisé des termes équivalant à une déclaration de culpabilité alors que la procédure pénale à l’encontre du requérant n’était pas été terminée (violation de l’article 6§2).

Mesures de caractère individuel: La Cour européenne a estimé que le préjudice moral du requérant se trouvait suffisamment réparé par le constat de violation. Le requérant a été mis en liberté sous caution en janvier 2005. La procédure pénale à son encontre était pendante au moment du prononcé de l’arrêt de la Cour européenne.

Le Secrétariat va contacter la délégation pour évaluer la nécessité de mesures individuelles.

Mesures de caractère général : Cette affaire est à rapprocher de l’affaire Diamantides n°2 (rubrique 4.2), dans laquelle les autorités grecques ont diffusé l’arrêt de la Cour européenne aux autorités compétentes.

Le Secrétariat est en train d’évaluer la nécessité de mesures complémentaires.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), pour l’examen des mesures individuelles et générales.

21091/04          Papa, arrêt du 06/07/2006, définitif le 06/10/2006

Cette affaire concerne la violation du droit du requérant à un procès équitable en ce que la cour d'assises d'Athènes, en décembre 2003 avait décidé, sans motivation suffisante, de n'octroyer aucune indemnisation au requérant, après son acquittement, au titre de sa détention provisoire pendant 430 jours (violation de l'article 6§1).

La Cour européenne a rappelé qu'elle avait déjà sanctionné cette pratique des juridictions helléniques (§14 de l'arrêt).

Mesures de caractère individuel : Le requérant a le droit de demander une réouverture de la procédure interne, suite à l'arrêt de la Cour européenne, en conformité avec l'article 525A du Code de procédure pénale. La Cour européenne a octroyé au requérant une satisfaction équitable au titre des préjudices matériel et moral.

Evaluation : dans ces circonstances, aucune autre mesure de caractère individuel ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général : L'affaire est à rapprocher de l'affaire Anastassios Georgiadis dont l'examen par le Comité a été clos après l'adoption par la Grèce d'un certain nombre de mesures législatives (en particulier en 2001) et autres pour la prévention de violations similaires (voir Résolution finale ResDH(2004)82, adoptée le 22/12/04).

Il convient de noter que le droit grec prévoit, en particulier depuis les amendements de 2001 de la Constitution et Code de procédure pénale, que les juridictions doivent motiver de manière détaillée toutes leurs décisions. Les autorités grecques ont estimé que ces mesures préviendraient de nouvelles violations similaires.


Il convient de relever que l'arrêt interne en question dans la présente affaire date de décembre 2003.

Des informations ont par conséquent été demandées sur d'éventuelles mesures supplémentaires de caractère général envisagées ou déjà prises par les autorités grecques (par exemple, diffusion large de l'arrêt de la Cour à toutes les juridictions pénales, accompagné d'une circulaire détaillée, formation des juges pénaux en matière de jurisprudence de la Cour européenne, en particulier en ce qui concerne l'article 6§1).

• Les autorités grecques ont fourni des informations à ce sujet. Le Secrétariat est en train de les examiner.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de la 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), aux fins de l’examen des mesures générales.

32186/02          Agga n° 3, arrêt du 13/07/2006, définitif le 13/10/2006

33331/02          Agga n° 4, arrêt du 13/07/2006, définitif le 13/10/2006

Ces affaires concernent les poursuites pénales et les condamnations du requérant (de 1997 jusqu'à 2002) à des peines d'emprisonnement converties en amendes, en application de l'article 175 du Code pénal pour avoir usurpé les fonctions de ministre d'une «  religion connue » au motif qu'en 1996 et 1997 il avait délivré et signé des messages en tant que mufti de Xanthi, après son élection par des musulmanes dans cette région.

Dans les deux affaires la Cour européenne a constaté que les condamnations du requérant constituaient une ingérence dans son droit de manifester sa religion collectivement et en public, par le culte et l'enseignement, laquelle n'était pas nécessaire dans une société démocratique (violations de l'article 9).

Mesures de caractère individuel : Le requérant a le droit de demander la réouverture des procédures pénales, à la suite des arrêts de la Cour européenne, selon l'article 525§1.5 du code de procédure pénal.

Il est à noter que la Cour européenne n'a octroyé au requérant aucune compensation au titre du préjudice matériel dans la mesure où le requérant n'a pas démontré qu'il avait payé la moindre amende (§§35 dans les deux arrêts).

Mesures de caractère général : Ces affaires sont à rapprocher des affaires Serif (arrêt du 14/12/99, définitif le 14/03/00) et Agga n° 2 (arrêt du 17/10/02, définitif le 17/01/03, il concerne le même requérant et des faits similaires) dont l'examen a été clos par le Comité par la Résolution finale ResDH(2005)88 (adoptée le 26/10/05). Le Comité a pris en considération notamment le revirement de la jurisprudence interne (en particulier par les décisions et arrêts des tribunaux de 1e instance et d'une cour d'appel en 2001 et 2002) qui a interprété l'article 175 du code pénal à la lumière de la jurisprudence de la Cour européenne. Le Gouvernement avait estimé que les mesures prises permettraient de prévenir de nouvelles violations similaires.

Ces développements positifs se sont avérés cependant insuffisants pour prévenir de nouvelles violations dans ces affaires dans la mesure où les tribunaux grecs en 2000, et en particulier de la Cour de cassation en 2002, n'ont pas accordé d'effet direct aux précédents arrêts de la Cour européenne (Serif et Agga n° 2). Par conséquent des mesures générales complémentaires semblent nécessaires.

Informations fournies par les autorités grecques: Les arrêts ont été traduits et distribués à tous les juges du pays entre décembre 2006 et mars 2007, accompagnés d’une lettre du Président de la Cour de cassation attirant l’attention sur le raisonnement et les conclusions de la Cour européenne. Ils ont également été envoyés au Procureur Général qui à son tour les a distribués à tous les procureurs grecs.

Conformément aux programmes de formation annuels de l’Ecole Nationale des Magistrats, la Convention européenne des Droits de l’Homme a été enseignée en 2006 et 2007 en tant que norme constitutionnelle. Plus concrètement, cette formation comprenait une analyse approfondie des différents droits protégés par la Convention, ainsi que les procédures concernant le droit de recours devant la Cour européenne. L’effet direct de la Convention et de la jurisprudence de la Cour a été un élément central de ces programmes de formation. Un accent spécial a été mis sur les affaires contre la Grèce et les conséquences résultant de leur exécution sur le système juridique du pays. Une attention particulière a été portée aux droits relatifs au domaine du droit pénal.

En outre, bon nombre de séminaires thématiques ad hoc ont été organisés en vue de tenir les juges informés des informations les plus récentes et pertinentes concernant la Convention.

Il est à noter que les tribunaux nationaux ont appliqué la jurisprudence de la Cour directement dans leurs décisions à de nombreuses occasions ; des exemples concrets ont été fournis par les autorités.

Des copies des programmes de formation de 2006 et 2007 de l’Ecole Nationale des Magistrats ont également été fournies.

Evaluation : en cours.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ces points au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), aux fins de l'examen des mesures générales adoptées et de leurs effets en pratique.


11801/04          Tsalkitzis, arrêt du 16/11/2006, définitif le 26/03/2007

Cette affaire concerne la violation du droit d'accès du requérant à un tribunal dans la mesure où le président du Parlement en 2004 a rejeté la demande du procureur près la Cour de cassation de lever l'immunité parlementaire d'un député, élu en 2000, contre lequel le requérant, promoteur immobilier, avait déposé une plainte des chefs de chantage, forfaiture et subornation, infractions prétendument accomplies par cette personne en 1997 en sa qualité de maire (violation de l'article 6§1).

La Cour européenne a relevé que dans ce genre d'affaires l'absence d'un lien évident avec une activité parlementaire appelait une interprétation étroite de la notion de proportionnalité entre le but visé et les moyens employés, particulièrement lorsque les restrictions au droit d'accès découlent d'une délibération d'un organe politique (§49 de l'arrêt). En outre, la Cour a considéré que la suspension de toute poursuite pénale contre un député pendant son mandat parlementaire entraînerait l'écoulement d'un laps de temps important entre la commission des actes incriminées et l'ouverture des poursuites pénales rendant celles-ci aléatoires, notamment en ce qui concerne la preuve (§50 de l'arrêt).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé au requérant une satisfaction équitable couvrant son préjudice moral.

Mesures de caractère général : Il convient de noter que d'après l'article 62§1 de la Constitution, pendant la session parlementaire aucun membre du Parlement ne peut être poursuivi, arrêté, détenu ou restreint de toute autre manière sans l'autorisation du Parlement. Conformément à l'article 83 du Règlement du Parlement les demandes d'autorisation d'engager des poursuites contre un député sont d'abord examinées par le comité de déontologie parlementaire qui doit considérer, inter alia, si l'acte incriminé est lié à l'activité politique du député (voir §§16-17 de l'arrêt).

Des informations ont été demandées sur les mesures adoptées ou envisagées par les autorités pour la prévention de violations similaires. Dans ce contexte, il est à noter que dans des affaires similaires contre l'Italie (voir l'affaire Cordova, arrêt du 30/01/03, définitif le 30/04/03 ; l'affaire De Jorio, arrêt du 03/06/04, définitif le 10/11/04, rubrique 6.2), il y a eu un revirement de jurisprudence de la Cour constitutionnelle italienne selon lequel il n'est désormais plus possible d'étendre l'immunité parlementaire aux actes et expressions non liés aux fonctions parlementaires.

En particulier, des informations ont été demandées sur la large diffusion de l'arrêt de la Cour européenne aux autorités judiciaires compétentes, au président du Parlement et au comité de déontologie parlementaire qui ont été impliqués dans cette affaire.

Des informations fournies en décembre 2007 sont actuellement examinées par le Secrétariat.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2              au plus tard à leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales, et d’une évaluation à faire par le Secrétariat des informations déjà fournies sur les mesures générales.

8863/03 Gousis, arrêt du 29/03/2007, définitif le 29/06/2007

Cette affaire concerne la violation du droit du requérant à un tribunal dans la mesure où, depuis 1997, des retards injustifiés dans l’instruction menée sur sa plainte avec constitution de partie civile ont abouti en 2002 à la prescription des délits en cause et ont entraîné l’impossibilité pour le requérant de voir statuer sa demande de dommages et intérêts (violation de l’article 6§1).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé au requérant une satisfaction équitable au titre du préjudice moral subi. En vertu des lois n°s2865/200 et 3060/2002 ayant amendé l’article 525 du Code de procédure pénale, seules les personnes ayant fait l’objet d’une condamnation, et non pas celles ayant introduit des plaintes pénales avec constitution de partie civile, sont habilitées à demander la réouverture d’une procédure pénale à la suite d’un constat de violation par la Cour européenne.

Evaluation : au vu des circonstances spécifiques de cette affaire, aucune autre mesure individuelle ne semble requise.

Mesures de caractère général : Cette affaire est à rapprocher d’autres affaires ayant trait à la durée excessive des procédures pénales dans le cadre desquelles la Grèce a adopté une série de mesures législatives et autres en vue de l’accélération des procédures pénales (voir Résolution finale ResDH(2005)66 dans l’affaire Tarighi Wageh Dashti contre la Grèce et 7 autres affaires). Des mesures additionnelles sont en cours en vue d’introduire une voie de recours effectif à l’encontre de ce type de violation (voir Résolution intérimaire CM/ResDH(2007)74 du 06/06/2007).

L’arrêt de la Cour européenne a été envoyé au Ministère de la justice aux fins de sa diffusion à l’attention des autorités judiciaires. L’arrêt traduit en grec a également été placé sur le site internet du Conseil Juridique de l’Etat (www.nsk.gr).


Evaluation : le Secrétariat est en train d’évaluer si des mesures additionnelles sont requises ou non.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1ère réunion DH de 2009, à la lumière d’une évaluation de la situation relative aux mesures générales.

2898/03            N.T. Giannousis et Kliafas Brothers S.A., arrêt du 14/12/2006, définitif le 23/05/2007

L'affaire concerne la violation du droit d'accès de la société requérante à un tribunal dans la mesure où en 2002, le Conseil d'Etat a mis un terme à la procédure en annulation d'un arrêté préfectoral dont il avait été saisi au motif qu'il ne lui était plus possible de statuer sur le fond. A cet égard, le Conseil d'Etat a estimé que lorsqu'il avait été appelé en 2002 à statuer sur le recours en annulation de l'arrêté préfectoral de décembre 2000 révoquant l'autorisation d'exploitation de l'usine de la société requérante (autorisation accordée jusqu'en avril 2001), cette autorisation n'était déjà plus en vigueur (violation de l'article 6§1).

La Cour européenne a estimé que sous couvert d'un artifice juridique, le Conseil d'Etat avait entériné l'interdiction de l'exploitation de l'usine sans se prononcer sur la légalité des actes administratifs en cause. De ce fait, la haute juridiction administrative s'était soustraite à son obligation d'apporter une réponse à la question qui lui avait soumise, ce qui constitue l'essence de la fonction juridictionnelle (§28 de l'arrêt).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé une satisfaction équitable à la société requérante au titre du préjudice moral subi.

• Des informations fournies le 25/10/2007 sont examinées par le Secrétariat actuellement.

Mesures de caractère général :

• Des informations fournies le 25/10/2007 sont examinées par le Secrétariat actuellement.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire 

2.             au plus tard à leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’une évaluation par le Secrétariat des informations fournies sur les mesures individuelles et générales.

35533/04          Mamidakis, arrêt du 11/01/2007, définitif le 11/04/2007

Cette affaire concerne la violation du droit au respect de la propriété d'une société du fait de l'imposition, en 1997, d'une amende fiscale de plus de 3 millions d'euros pour contrebande de pétrole. Le requérant qui présidait la société pétrolière en question, fut également déclaré conjointement responsable du paiement d'amendes, de plus de 4,9 millions d'euros, imposées à d'autres personnes pour violations douanières.

La Cour européenne a constaté que, même en tenant compte de la marge d'appréciation dont disposent les Etats en cette matière, l'imposition de l'amende en question avait porté une telle atteinte à la situation financière du requérant qu'il s'agissait d'une mesure disproportionnée par rapport au but légitime qu'elle poursuivait (§48 de l'arrêt) (violation de l'article 1 Protocole n°1).

Mesures de caractère individuel : Il est à noter que le requérant n'a pas réclamé d'indemnisation du préjudice matériel devant la Cour européenne. Cette dernière lui a octroyé une satisfaction équitable couvrant son préjudice moral.

Des informations ont été demandées sur la situation du requérant et sur les mesures prises ou envisagées par les autorités, en conformité avec l'arrêt de la Cour.

• Des informations ont été fournies le 17/12/2007 et le Secrétariat est en train de les examiner.

Mesures de caractère général :

Des informations ont été demandées sur les mesures adoptées ou envisagées par les autorités pour la prévention de violations similaires. En particulier, des informations sont attendues sur la traduction et la diffusion de l'arrêt de la Cour aux autorités douanières compétentes ainsi qu'aux tribunaux et aux cours administratives.

• Des informations ont été fournies le 17/12/2007 et le Secrétariat est en train de les examiner.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2              au plus tard à leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’une évaluation par le Secrétariat des informations fournies sur les mesures individuelles et générales.


39725/03           Anastasiadis, arrêt du 10/05/2007, définitif le 10/08/2007[10]

17721/04          Perlala, arrêt du 22/02/2007, définitif le 22/05/2007

L’affaire concerne la violation du droit du requérant à un procès équitable dans la mesure où la Cour de cassation a refusé, en 2003, d’examiner le grief du requérant relatif à l’administration des preuves par la Cour d’appel fondé sur le seul article 6 de la Convention. Par conséquent les garanties prévues par cette disposition n’ont été ni prises en compte ni appliquées dans cette affaire (violation de l’article 6§§1 et 3).

La Cour d’appel avait condamné le requérant à une peine de prison avec sursis.

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a indiqué que la réouverture ou un nouveau procès, à la demande de l’intéressé, constituait le moyen le plus approprié pour la violation constatée (§35 de l’arrêt).

Informations fournies par les autorités grecques (lettre du 25/10/2007) : Une telle réouverture est possible en droit grec et il est loisible au requérant de la demander.

La Cour européenne a octroyé au requérant une satisfaction équitable au titre du préjudice moral subi.

Evaluation : Aucune autre mesure individuelle ne semble donc nécessaire.

Mesures de caractère général : Il convient de relever que bien que la Convention et la jurisprudence de la Cour européenne bénéficient d’un effet direct en droit grec et dans la pratique (voir par exemple Résolution finale ResDH(2004)82 dans les affaires Tsirlis et Koloumpas, et Georgiadis), la Cour de cassation estime à ce jour que le droit à un procès équitable tel que garanti par l’article 6 de la Convention ne constitue pas un moyen de cassation indépendant et doit être invoqué en combinaison avec d’autres moyens prévus par l’article 510 du code de procédure pénale (§17 de l’arrêt).

Informations fournies par les autorités grecques (lettre du 25/10/2007) : L’arrêt de la Cour européenne a été envoyé au Ministère de la justice et par la suite au Procureur général et au Président de la Cour de cassation aux fins de sa diffusion à l’attention des autorités judiciaires. L’arrêt traduit en grec a également été placé sur le site internet du Conseil Juridique de l’Etat (www.nsk.gr). Les autorités ont souligné que la violation dans cette affaire résultait du raisonnement suivi par la Cour de cassation dans son arrêt. Par conséquent, la publication et une large diffusion de l’arrêt représentent des mesures suffisantes pour l’exécution de cette affaire.

Le Secrétariat et en train d’examiner la question des mesures générales.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’une évaluation des informations fournies sur les mesures générales.

- 98 affaires de durée de procédures concernant des droits et obligations de caractère civil devant les juridictions administratives et d’absence de recours effectif

                       (Voir Annexe pour la liste d’affaires dans le groupe Manios)

                       Résolution intérimaire CM/ResDH(2007)74

Toutes ces affaires concernent des durées excessives de procédures concernant des droits et obligations de caractère civil devant les juridictions administratives (violations de l’article 6§1). Certaines d’elles concernent également l’absence de voie de recours effectif pour se plaindre de la durée de ces procédures (violations de l’article 13).

Mesures de caractère général :

            1) Durée excessive des procédures devant le Conseil d’Etat et les tribunaux administratifs inférieurs, la Grèce a adopté un certain nombre de mesures législatives et autres pour accélérer les procédures devant les juridictions administratives (voir Résolution finale ResDH(2005)65 concernant Pafitis et autres et 14 autres affaires contre la Grèce, adoptée le 18/07/2005).

Le 29/03/2007, les autorités grecques ont fourni une copie d’un projet de loi, en grec, et ont indiqué que ce projet sur « L’amélioration et l’accélération des procédures administratives » faisait l’objet d’un examen par le Parlement. Ce projet impose des limitations en matière de demandes d’ajournements d’audiences par les parties, prévoit la possibilité pour le Greffe d’effectuer des actes au nom d’une partie et fixe des délais stricts aux juges pour qu’ils rendent leurs décisions dans un délai raisonnable.

Néanmoins, d’autres questions dans ce domaine ont été mises en relief par des arrêts plus récents dans ce groupe d’affaires et font l’objet d’un examen par les autorités grecques sous la surveillance du Comité.


Des informations sont attenduessur : le calendrier d’adoption du projet de loi sur le Code de droit administratif visant à accélérer les procédures des tribunaux administratifs ainsi que sur tout développement relatif à l’adoption de ce texte, y compris une traduction, ainsi que sur toutes autres mesures spécifiques envisagées pour l'accélération des procédures devant le Conseil d'Etat.

En ce qui concerne en particulier l’affaire Lalousi-Kotsovos, il est à noter que, bien que la procédure concerne également des tribunaux administratifs, sa durée excessive a été principalement causée par des retards graves devant la « commission [administrative] spéciale d’appréciation » (§24 de l’arrêt).

Des informations sont attendues sur la durée moyenne actuelle des procédures devant cette commission et sur les mesures envisagées afin de les accélérer.

            2) Recours internes effectifs : La délégation grecque a informé le Secrétariat de l’adoption des travaux effectués sur le projet de loi relatif à l’ « Indemnisation des parties au titre de la durée excessive des procédures judiciaires ». Ce projet de loi un recours interne en indemnisation au titre de la durée excessive des procédures, à tous les niveaux de la procédure et quelque soit la juridiction concernée.

Des informations supplémentaires d’urgence sont attendues sur l’état d’avancement et le calendrier d’adoption de ce projet de loi, y compris une version traduite de ce texte.

Il convient de relever que la question a été initialement soulevée dans le contexte de l’affaire Konti-Arvaniti concernant la durée excessive des procédures devant les juridictions civiles (arrêt du 10/04/2003) et par la suite dans certaines des affaires ci-dessus.

            3) Cour de comptes : l’affaire Hadjidjanis qui concerne également la durée de procédures devant cette juridiction, est également à rapprocher du groupe d’affaires Papazoglou (rubrique 4.2).

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales, en particulier l’état d’avancement des projets de lois pour l’accélération des procédures devant les juridictions administratives et la mise en place d’un recours effectif, ainsi que sur toute autre mesure générale.

                   - Affaires de durée de procédures pénales

71563/01           Diamantides n° 2, arrêt du 19/05/2005, définitif le 19/08/2005

26763/04           Dalidis, arrêt du 21/09/2006, définitif le 21/12/2006

14846/05           Peca, arrêt du 21/06/2007, définitif le 12/11/2007

14249/04           Sakkopoulos n° 2, arrêt du 22/02/2007, définitif le 22/05/2007

35115/03           Vaden, arrêt du 29/03/2007, définitif le 29/06/2007

2736/05 Vasilev, arrêt du 18/01/2007, définitif le 18/04/2007

Ces affaires concernent la durée excessive des procédures pénales, initiée par le requérant dans l’affaire Diamantides n° 2, ou diligentées contre les requérants dans les affaires Dalidis, Peca, Sakkopoulos n° 2, Vaden, Vasilev et Peca (violations de l’article 6§1).

L’affaire Diamantides n° 2 concerne également une violation du principe de présomption d’innocence du requérant dans la mesure où, en 2000 et 2001, les chambres d’accusation de la cour d’appel d’Athènes et de la Cour de cassation ont rejeté la plainte du requérant en employant dans leur décisions des termes d’un caractère particulièrement absolu et imprécis ne laissant aucun doute sur l’accomplissement par le requérant d’actes dont il était déjà soit acquitté soit poursuivi devant les juridictions pénales (violation de l’article 6§2).

L’affaire Vasilev concerne également l’absence de recours effectif permettant de se plaindre de la durée de la procédure pénale (violation de l’article 13).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé à tous les requérants une satisfaction équitable au titre du préjudice moral couvrant les deux violations.

            1) Durée excessive de la procédure pénale (article 6§1) :

Informations fournies par les autorités grecques (lettre du 06/11/2007) : Dans l’affaire Sakkopoulos n° 2, les requérants ont contesté leur mise en accusation devant le tribunal correctionnel et l’affaire a été transmise au Parquet près la Cour de cassation. Dans l’affaire Vaden, la procédure s’est terminée en 2007 devant la Cour de cassation. Dans l’affaire Vasilev, la procédure s’est terminée le 27/03/2007 avec la condamnation du requérant par la cour d’appel.

Il est urgent d’avoir des informations par écrit : de l’état de la procédure dans les affaires Dalidis et Sakkopoulos n° 2.

2) Violation de la présomption d’innocence (article 6§2) : Dans l’affaire Diamantides n° 2, il convient de relever que le requérant a été acquitté dans le cadre de la procédure pénale qui était pendante au moment des faits.


Mesures de caractère général :

            1) Durée excessive des procédures pénales et absence de recours effectif : Un certain nombre des mesures législatives et autres ont été adoptées par la Grèce pour accélérer les procédures devant les juridictions pénales (voir la Résolution finale ResDH(2005)66 concernant Tarighi Wageh Dashti et 7 autres affaires contre la Grèce, adoptée le 18/07/2005). Les autorités grecques ont informé le Comité de ce que des mesures législatives étaient actuellement envisagées afin d’introduire un recours effectif en droit grec contre ce genre de violations. La question des recours effectifs est examinée dans le cadre du groupe Manios.

            2) Violation de la présomption d’innocence par les tribunaux : Par courrier du 15/02/2006 les autorités grecques ont informé le Comité de ce que l’arrêt de la Cour avait été traduit et publié sur le site Internet du Conseil juridique de l’Etat (www.nsk.gr) et a été diffusé au Ministère de la justice ainsi qu’à la Cour de cassation. Il convient de relever que l’article 366§2 du Code pénal prévoit que si un fait allégué ou dénoncé fait l’objet d’une procédure pénale, la procédure en diffamation est ajournée jusqu’à l’issue de la procédure pénale. Le fait concerné par l’action en diffamation est considéré comme réel en cas de condamnation et faux en cas d’acquittement. Les procédures ne respectant pas cette disposition sont entachées de nullité absolue (article 171§1c du Code de Procédure pénale).

            3) Publication et diffusions : Dans toutes ces affaires, les arrêts de la Cour européenne ont été largement diffusés à toutes les autorités judiciaires, au Président de la Cour de cassation et au Procureur général. Ils ont été traduits et publiés sur le site Internet du Conseil juridique de l’Etat. L’arrêt Diamantides n° 2 a été diffusé en particulier au Président de la Cour de cassation, au Procureur général et à tous les juges et procureurs du pays.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), et de les joindre lors de cette réunion au groupe Manios aux fins de l’examen des mesures individuelles et générales, s’agissant notamment de l’introduction d’un recours effectif pour se plaindre de la durée excessive des procédures pénales.

- Affaires de durée de procédures concernant des droits et obligations de caractère civil devant la Cour des comptes

73840/01          Papazoglou et autres, arrêt du 13/11/03, définitif le 13/02/04

66296/01          Belaousof et autres, arrêt du 27/05/2004, définitif le 10/11/2004

12767/02          Hourmidis, arrêt du 19/05/2004, définitif le 19/08/2004

66808/01          Lazarou, arrêt du 08/07/2004, définitif le 08/10/2004

62771/00          Litoselitis, arrêt du 05/02/2004, définitif le 05/05/2004

Ces affaires concernent la durée excessive de procédures concernant des droits et obligations de caractère civil devant la Cour des comptes. La Cour européenne a indiqué dans l'affaire Lazarou que l'encombrement chronique du rôle d'une juridiction ne constituait pas une explication valable pour des retards (§21 de l'arrêt) (violations de l'article 6§1).

Mesures de caractère individuel : Aucune (toutes les procédures sont terminées).

Mesures de caractère général :

Informations fournies par les autorités grecques (courrier du 02/01/2006) : D'après des informations fournies par le Président de la Cour des comptes au Ministère de la justice en 2005, les audiences devant cette Cour sont en moyenne fixées dans les 7-8 mois suivant l'introduction du recours et le prononcé des arrêts a lieu après 6 mois après. Des retards exceptionnels peuvent se produire en cas d'afflux de recours par de grands groupes d'intéressés, par exemple, des anciens militaires (comme c'était le cas dans les présentes affaires).

Néanmoins, le Ministère de justice a constitué un comité pour examiner l'opportunité d'une modification du règlement procédural de la Cour des comptes, en prenant en considération des propositions pertinentes du Président de cette Cour.

Des informations supplémentaires sont attendues sur l'état d'avancement du travail de ce comité.

Les Délégués décideny de reprendre l'examen de ces points au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 decembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.


- Affaires de durée de procédures civiles et d’absence de recours effectif

Résolution intérimaire CM/ResDH(2007)74

53401/99          Konti-Arvaniti, arrêt du 10/04/03, définitif le 10/07/03

77198/01          Athanasiou, arrêt du 29/09/05, définitif le 29/12/05

20898/03          Chatzibyrros et autres, arrêt du 06/04/06, définitif le 06/07/06

527/05              Doggakis et autres, arrêt du 26/07/2007, définitif le 26/10/2007

11720/03          Inexco, arrêt du 27/04/06, définitif le 27/07/06

3257/03            Sflomos, arrêt du 21/04/05, définitif le 21/07/05

Ces affaires concernent la durée excessive des procédures civiles et l'absence de recours effectif (violations des articles 6§1 et 13).

Mesures de caractère individuel : Le Comité a attiré l'attention des autorités sur l'affaire Inexco dans laquelle la procédure était pendante lorsque la Cour a prononcé son arrêt. Toutes les autres procédures sont closes.

• Informations fournies par les autorités (juin 2007) : Entre 2004 et mars 2007 les parties n’ont fait aucune démarche en vue de la reprise des procédures. Les autorités ont précisé que selon le Code de procédure civile, les parties doivent agir pour que la procédure avance.

Mesures de caractère général :

            1) Violations de l'article 6§1 : Un certain nombre de mesures législatives et autres ont été déjà adoptées par la Grèce visant à accélérer les procédures devant les juridictions civiles (voir la Résolution finale ResDH(2005)64 concernant Academy Trading Ltd et autres cointre la Grèce et autres affaires, adoptée le 18/07/2005).

            2) Violations de l'article 13 : Lors de la 976e réunion (octobre 2006) le Comité a pris note avec préoccupation du problème systémique de l'absence de recours interne efficace mis en relief par ces affaires, lequel mérite une attention particulière. Il est à noter, en particulier, que ce problème a été soulevé pour la première fois dans l'arrêt Konti-Arvaniti en 2003.

Les autorités grecques ont indiqué au Comité qu'un projet de loi était actuellement en cours d'adoption afin d'introduire un recours effectif en droit grec pour ce genre de violations.

Des informations supplémentaires sont requises d'urgence à cet égard.

L'attention des autorités est également attirée sur la Recommandation Rec(2004)6 du Comité des Ministres aux Etats membres sur l'amélioration des recours internes, ainsi que sur les mesures adoptées par d'autres pays confrontés avec des problèmes similaires (voir e.g. Résolutions finales ResDH(2005)60 concernant Horvat et 9 autres affaires contre la Croatie ; ResDH(2005)67 concernant Jóri et 18 autres affaires contre la République slovaque).

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’une évaluation de la nécessité de mesures individuelles additionnelles, et de les joindre lors de la même réunion au groupe Manios aux fins de l’examen des mesures générales, notamment la question du recours effectif.

- 1 affaire contre la Hongrie

47940/99          Balogh, arrêt du 20/07/2004, définitif le 20/10/2004

L’affaire concerne les mauvais traitements infligés au requérant par la police lors d’un interrogatoire en août 1995 (violation de l’article 3). Bien que la Cour européenne ait constaté que les autorités avaient mené une enquête effective et indépendante sur les allégations du requérant, elle a cependant considéré que les autorités n’avaient pas fourni d’explication plausible pour les lésions du requérant ni établi de façon satisfaisante qu’elles avaient une origine autre que le traitement subi en garde à vue.

Mesures de caractère individuel: aucune. Les préjudices matériel et moral subis par le requérant en raison de la violation de la Convention ont été indemnisés par la Cour européenne.

Mesures de caractère général :

Informations demandées: le 17/02/2005, le Secrétariat a adressé une lettre aux autorités hongroises en vue de la présentation d'un éventuel plan d'action pour l'exécution de cet arrêt. Des informations ont été sollicitées notamment sur la situation actuelle au niveau national s’agissant des mauvais traitements infligés à des personnes détenues par la police, ainsi que sur l'existence de garanties efficaces contre de tels traitements, en dehors des enquêtes menées suite à des plaintes.

Informations fournies : L'arrêt de la Cour européenne a été publié en traduction hongroise sur le site Internet du Ministère de la justice et l’exécution http://www.im.hu ainsi que dans la revue trimestrielle des droits de l'homme Acta Humana.


Les autorités ont indiqué que depuis les faits de cette affaire un grand nombre de mesures a été adopté afin de prévenir des mauvais traitements par la police. Parmi ces mesures elles ont cité l’introduction de la protection des droits de l’homme dans le programme de formation des officiers de police et le fait que l’arrêt en espèce a devenu une partie importante des mesures de formation des membres de police.

Ces mesures sont les suivantes :

- L’enseignement des droits de l’homme est une priorité dans le programme d’études des institutions supérieures spécialisées dans les fonctions policières et dans celui de l’académie de la police. Il est attendu des étudiants qu’ils soient capables de respecter les droits de l’homme et les droits des minorités dans le cadre d’actions policières ou d’actes procéduraux.

- Les droits de l’homme et droits des minorités sont enseignés par le biais de formations spéciales dont la durée et le contenu varient en fonction des besoins identifiés par les organes régionaux. Les droits de l’homme et les droits des minorités sont également enseignés dans le cadre de la formation organisée par l’institut de la police et de la prévention des crimes.

- Afin d’atteindre l’objectif selon lequel le respect de droits de l’homme constitue une partie évidente et automatique de la conduite quotidienne des agents, la formation comprends une base théorique solide et des exercices de simulation.

- Suite à la visite du CPT en 1999 en Hongrie, le quartier général de la police nationale a émis des directives aux commandants les obligeant à attirer l’attention des agents, avant leur entrée en fonction, aux exigences de proportionnalité et à l’interdiction de la torture, des interrogatoires forcés et traitements cruels, inhumains ou dégradants. Les commandants doivent également rappeler aux agents que les mesures coercitives ne seront pas appliquées si aucune opposition n’est rencontrée et s’il s’avère qu’une opération de police peut aboutir sans y recourir.

- L’une des formations les plus importantes est celle sur « la population rom et le maintien de l’ordre » pour les agents de la police. Elle est organisée depuis 2002 par l’institut de formation et de recherche dans la gestion du maintien de l’ordre. Cette formation traite, entre autres sujets, de la prévention et de la gestion des conflits, des stéréotypes négatifs, de la lutte contre ces stéréotypes, et du principe de la légalité des actions dépourvues de préjugé et de discrimination négative.

- Une autre formation importante est organisée pour les agents des centres d’immigrations et des cellules de contrôle de l’immigration. Elle est financée par les fonds Schengen. Son objectif est de préparer les agents pour la détention de type Schengen et d’appliquer les normes Schengen.

- Les formations, y compris dans le cadre de la formation continue, mettent l’accent sur les questions relatives aux droits de l’homme et les mesures prises dans des procédures concernant des Roms ou d’autres personnes vulnérables. Des juges, des procureurs, des experts en matière de protection des témoins et des membres d’organisations à but non lucratif sont invités régulièrement à donner des conférences afin d’assurer une approche globale des différents aspects des problèmes discutés.

Des informations sont attendues sur l’effet des mesures de formation ainsi que sur la situation actuelle au niveau national s’agissant des affaires de mauvais traitements infligés à des personnes détenues par la police.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales, en particulier sur les effet des mesures de formation.

- 1 affaire contre l’Islande

31930/04           Eggertsdottir, arrêt du 05/07/2007, définitif le 05/10/2007

L’affaire concerne la violation du droit du requérant à un procès équitable devant un tribunal impartial (violation de l’article 6§1). En 2004, dans le cadre d’une procédure en indemnisation pour négligence médicale, la Cour suprême a cassé l’arrêt du tribunal de première instance lequel était favorable au requérant, en fondant sa décision sur l’avis de l’Office médico-légal public (OMP), dont quatre des ses membres étaient employés de la partie défenderesse, l’hôpital.

La Cour européenne a estimé que le requérant pouvait de façon légitime craindre que le OMP n’ait pas agi avec la neutralité requise dans la procédure devant la Cour suprême du fait de sa composition, sa position et son rôle dans la procédure.

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé au requérant une indemnisation pour perte de chances et au titre du préjudice moral subi. Les autorités islandaises ont indiqué que le requérant n’avait pas demandé la réouverture de la procédure (12/03/2008). Même si elle ne le prévoit pas explicitement, la législation islandaise ne semble pas exclure la possibilité de rouvrir des procédures civiles afin de donner effet aux arrêts de la Cour européenne (article 169 (1) du Code de procédure civile).


Des informations sont attendues confirmant que la réouverture est possible suite à un arrêt de la Cour européenne, avec des exemples de jurisprudence le cas échéant.

Mesures de caractère général :

Informations fournies par les autorités islandaises (12/03/2008) : Le Ministère de la Santé a soumis un projet de loi au Parlement visant à abolir la loi sur l’Office médico-légal public, acte n° 14/1942. Le rapport explicatif au projet fait référence à l’arrêt de la Cour européenne pour affirmer que, dans l’état actuel, la procédure de l’Office médico-légal public n’est pas en conformité avec les règles d’impartialité. Il est proposé désormais de résoudre les conflits en matière médicale devant les tribunaux, avec l’assistance d’auditeurs de justice et de juges spécialisés nommés par le tribunal.

L’arrêt de la Cour européenne a été traduit et publié sur le site  Internet du Ministère de la Justice (http://eng.domsmalaraduneyti.is), assurant par ce moyen sa diffusion aux avocats et autres personnes intéressées. Il va également être publié dans un périodique sur la jurisprudence de la Cour européenne.

Des informations sont attendues sur l’état d’avancement du projet de loi (une copie du projet, si possible, serait utile).

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

- 5 affaires contre l’Irlande

39474/98           D.G., arrêt du 16/05/02, définitif le 16/08/02

L'affaire a trait au fait que le requérant, un mineur victime notamment de sévères dysfonctions de la personnalité qui constituaient un risque pour lui-même ainsi que pour d'autres, a été placé du 27 juin au 28 juillet 1997 dans une institution pénale inapte à la réalisation de ses droits constitutionnels (violation de l'article 5§1).

L'affaire concerne en outre l'impossibilité d'obtenir une indemnisation au plan national au titre de la détention subie dans la mesure où cette détention était considérée comme régulière en droit interne (violation de l'article 5§5).

Mesures de caractère individuel : Aucune, car le requérant est devenu majeur entre-temps. La Cour européenne a octroyé au requérant une satisfaction équitable au titre du préjudice moral.

Mesures de caractère général :

1) Violation de l'article 5§1 :

a) l'augmentation de nombre de places dans des institutions spécialisées de prise en charge d'enfants non délinquants : Depuis le milieu des années 1990, les commissions de santé et, par la suite, la Direction du service de la santé (établie le 1/01/2005 en vertu de la loi sur la santé de 2004) ont mis en place un programme de développement d’unité de soutien élevé et de soins particuliers afin de prendre en compte les besoins d’un nombre limité d’enfants perturbés mais non délinquants et nécessitant des soins particuliers ou une protection. Les unités de soutien élevé fonctionnent en tant qu’unités ouvertes tandis que les enfants dans des unités de soin particulier sont détenus par un ordre de la Cour suprême. Les autorités irlandaises ont indiqué que le nombre de places dans des institutions spécialisées de prise en charge d'enfants non délinquants nécessitant des soins particuliers ou une protection était passé de 17 en 1997 à plus de 120 en 2003. En particulier, l'unité de Portrane qui dispose de 24 places, est opérationnelle depuis septembre 2002 (conformément à la décision de la High Court du 27/06/1997 concernant le requérant). De plus, l'unité spéciale du Mid-West Health Board, disposant de 5 places, a été mise en place de manière progressive en 2003. Enfin, il y a trois unités de soins particuliers d’une capacité totale de 27 places.

Des contacts bilatéraux sont en cours pour évaluer la portée des mesures déjà prises afin de prévenir de nouvelles violations similaires.

b) la loi de 2001 sur les enfants (Children Act 2001) : Cette loi prévoit notamment l'amendement de la loi de 1991 sur la prise en charge des enfants (Child Care Act 1991) et dans sa partie 3 impose des devoirs statutaires aux comités de santé s'agissant des enfants nécessitant des soins ou une protection particuliers. La partie 2 de la loi a institué la Conférence sur le bien-être des familles (Family Welfare Conference) sur une base statutaire. Les parties 2 et 3 sont désormais entrées en vigueur. La partie 11 (entrée en vigueur le 07/11/2003) prévoit la mise en place sur une base statutaire d'un Comité (Special Residential Services Board) chargé de la coordination de ces institutions.


                   2) Violation de l'article 5§5 : Le gouvernement a indiqué que les personnes lésées à la suite d'une action par une autorité de l'Etat contraire à la Convention (mais en conformité avec le droit national) peuvent demander une compensation pour le préjudice subi sur la base de l'article 5 de la loi sur la Convention européenne des Droits de l'Homme (European Convention on Human Rights Act 2003). Selon cette disposition, à la suite d'une « déclaration d'incompatibilité » rendue par la High Court ou la Cour suprême, la partie lésée peut demander devant le gouvernement, par le biais de l'Attorney General, une indemnité compensatrice à titre gracieux pour toute perte, préjudice ou dommage subi à la suite de l'incompatibilité.

Des contacts bilatéraux sont en cours à l'égard de ce mécanisme.

                   3) Publication et diffusion : L'arrêt de la Cour européenne a été publié dans European Human Rights Reports sous la référence (1998) 25 EHRR 33.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

- Affaires de durée de procédures judiciaires

50389/99          Doran, arrêt du 31/07/03, définitif le 31/10/03

42297/98          McMullen, arrêt du 29/07/2004, définitif le 29/10/2004

18273/04          Barry, arrêt du 15/12/2005, définitif le 15/03/2006

54725/00          O’Reilly et autres, arrêt du 29/07/2004, définitif le 29/10/2004

Ces affaires concernent la durée excessive de procédures concernant des droits et obligations de caractère civil devant les juridictions pénales, civiles et administratives. Pour l’affaire Doran, la procédure a duré environ 8 ans et 5 mois, pour l’affaire O’Reilly et autres environ quatre ans et onze mois, et pour l’affaire McMullen la procédure a débuté le 29/06/1988 et était toujours pendante lorsque la Cour européenne a rendu son arrêt (la période que la Cour a considéré dans son arrêt était d’environ seize ans) ; dans l’affaire Barry la procédure n’a démarré que 8 ans après la mise en accusation du requérant et était toujours pendante lorsque la Cour européenne a rendu son arrêt (violations de l’article 6§1).

Les affaires Barry, Doran et O’Reilly et autres concernent en outre l’absence de recours effectif en droit interne au titre de la durée excessive d’une procédure (violations de l’article 13).

Mesures de caractère individuel :

- Dans l’affaire McMullen, les informations fournies par les autorités irlandaises semblent laisser apparaître que la procédure n’est plus pendante.

- Dans l’affaire Barry, les autorités ont indiqué qu’en mars 2006, le juge de la Circuit Criminal Court traitant l’affaire a ordonné un sursis permanent des poursuites à la Cork Circuit Criminal Court. Il n’y a pas eu d’appel et l’affaire n’ira pas plus loin.

Mesures de caractère général:

            1) Violations de l’article 6§1:

Mesures prises en vue de réduire la durée des procédures :

- Amélioration de la gestion administrative des tribunaux : Un organe chargé de la gestion administrative des juridictions (Courts Service) a été créé par une loi en 1999 pour gérer les tribunaux, fournir un soutien logistique aux juges et assurer aux tribunaux un service professionnel de haute qualité (par la mise en œuvre d’une stratégie en matière de technologies de l’information, l’assistance aux juges pour la gestion des dossiers et des efforts importants pour réduire les retards dans les affaires pénales et de droit de la famille). Pour le moment l’unité ICT du Courts Service a pour ambition de développer un système de gestion des affaires civiles. Un tel système permettrait au Courts Service d’identifier les affaires qui sont en instance depuis un certain temps et celles pour lesquelles aucune mesure n’a été prise et d’agir en conséquence ou de radier ces affaires le cas échéant.

- Nomination de nouveaux juges : En novembre 2004, en application de la loi sur la responsabilité civile et les cours (Civil Liability and Courts Act), huit juges supplémentaires ont été nommés pour plusieurs juridictions. Trois de ces juges ont été nommés à la High Court. Les juges supplémentaires ont été déployés afin de réduire le temps d’attente pour les affaires pénales graves, les affaires concernant les questions d’asile ou d’immigration, les requêtes concernant l’enlèvement d’enfant et le Mandat d’arrêt européen. En conséquence, au niveau de la Central Criminal Court, le temps écoulé entre le renvoi en jugement (return for trial) jusqu’à la clôture des affaires de meurtre et de viol a été réduit de 18-24 mois en 2004 à 6-8 mois en 2006. Les affaires d’enlèvement d’enfant doivent être traitées en 6 semaines en vertu de la loi. La High Court doit traiter les requêtes concernant le mandat d’arrêt européen en 60 jours. En mai 2007, le gouvernement a nommé huit autres juges à la High Court pour permettre l’inscription plus rapide des affaires au rôle de la High Court.


- Création de juridictions spécialisées : Une « Cour commerciale » (une chambre où sont listées les affaires commerciales) a été créée en janvier 2004, ce qui a fortement contribué à diminuer le temps de traitement des affaires devant la High Court. Ces dernières trois années, devant la Cour commerciale, 50% des procédures ont été terminées en moins de 14 semaines ; 75% en mois de 25 semaines ; et 90% en moins de 45 semaines.

- Utilisation de cours de justice à l’extérieur de Dublin : Il existe un projet visant à utiliser les tribunaux de la banlieue de Dublin pour pallier à l’engorgement des tribunaux de Dublin et faire face à un manque de locaux. En outre, le Président de la High Court et du Courts Service ont développé une pratique consistant à délocaliser les activités de la High Court et d’utiliser ainsi partout dans le pays de plus grands tribunaux récemment rénovés. Ainsi les affaires non examinées en jury (par exemple les procédures civiles relatives au paiement de dettes, les litiges en matière de contrat, les allégations de négligence ou de fausses déclarations, les procédures administratives) sont désormais examinées au sein de tribunaux régionaux. Ainsi, de nombreuses affaires qui seraient restées en souffrance, ont pu être inscrites au rôle de ces tribunaux.

- Gestion de l’engorgement des affaires : Des mesures ont été prises pour gérer l’engorgement d’affaires dans certaines régions

- Par ailleurs, des modifications aux Règles de différentes juridictions sont en cours en vue d’introduire une plus grande efficacité dans la pratique et les procédures.

Les autorités irlandaises ont indiqué qu’à la lumière des informations ci-dessus, il était évident que les mesures adoptées en réponse à la violation de l’article 6 avaient amélioré la situation en Irlande en ce qui concerne la durée des procédures judiciaires.

Des contacts bilatéraux sont en cours pour évaluer la portée des mesures déjà prises et envisagées afin de prévenir de nouvelles violations similaires.

            2) Violation de l’article 13 : Les autorités ont fait état d’un arrêt (du 03/12/2004) de la Cour suprême, qui, se référant à l’affaire McMullen et au Human Rights Act de 2003, établit que les tribunaux nationaux sont dans l’obligation de conclure les affaires dans un délai raisonnable. Elles ont également fait état de l’article 46 de la loi de 2002 sur tribunaux et fonctionnaires de tribunaux, entrée en vigueur le 31/03/2005, qui prévoit la création d’un registre de tous les arrêts réservés dans des procédures civiles. Si l’arrêt n’est pas rendu dans les deux mois suivant la date à laquelle il a été réservé, le président du tribunal devant lequel l’affaire a été plaidée doit inscrire l’affaire tous les deux mois devant le juge qui a réservé le jugement. Celui-ci doit alors préciser la date proposée pour rendre son jugement.

Informations complémentaires fournies par les autorités irlandaises : Les autorités compétentes au sein du système irlandais procèdent actuellement à un examen détaillé concernant la violation de l’article 13.

Des clarifications sont attendues sur la façon dont cette mesure peut donner aux justiciables un droit d’engager une procédure interne leur permettant de remédier à la violation de l’article 6, en vue d’obtenir soit l’accélération de la procédure, soit une indemnisation adéquate pour les retards déjà enregistrés.

            3) Publication et diffusion : Dans l’affaire Barry, la violation semble être due aux circonstances particulières de l’affaire ; par conséquent la publication et la diffusion de l’arrêt semble suffisante au titre de l’exécution. L’arrêt de la Cour européenne a été diffusé à tous les ministères et toutes les agences gouvernementales concernés par l’affaire, en particulier, le Department of Justice, Equality and Law Reform, le Bureau du Director of Public Prosecutions et le Bureau de l’Attorney General.L’arrêt a également été diffusé à l’organe chargé de la gestion administrative des juridictions. Les arrêts de la Cour européenne, publiés sous forme de recueils de jurisprudence et/ou dans d’autres recueils et journaux, sont disponibles dans les bibliothèques juridiques irlandaises. Un court article concernant cette affaire a été publié dans le Law Society Gazette. L’arrêt de la Cour européenne et l’affaire ont fait l’objet d’une large couverture dans la presse à l’époque.

Les arrêts de la Cour européenne dans les affaires Doran, McMullen et O’Reilly ont été diffusés à tous les ministères et agences gouvernementales concernés par ces affaires, ainsi qu’au Courts Service. Un article sur l’affaire Doran est paru dans le Irish Times du 01/08/2003. Plusieurs sites Internet du Gouvernement et quelques sites Internet juridiques contiennent un lien vers le site Internet de la Cour

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

- 96 affaires contre l’Italie

30595/02          Bove, arrêt du 30/06/2005, définitif le 30/11/2005

L'affaire a trait au manquement des autorités italiennes à leur obligation de prendre des mesures adéquates pour mettre en œuvre les décisions judiciaires ordonnant une reprise progressive des rapports entre le requérant et sa fille. L'enfant avait été reconnue par ses deux parents à sa naissance en 1995.


Le 22/09/1996, le Tribunal pour enfants de Naples a octroyé le droit de garde à la mère de l'enfant, avec un droit de visite pour le père. En raison d'un conflit entre les parents, le tribunal a également chargé le service social de surveiller les visites.

Ultérieurement et pendant une certaine période, le tribunal a étendu le droit de visite du requérant sur base d’un avis favorable des psychologues et assistants sociaux. Toutefois, en juin 2000, ladite juridiction a, par mesure temporaire et urgente, limité les rencontres entre le requérant et sa fille. Cette décision a été prise au vu des allégations de la mère de l’enfant selon lesquelles le père du requérant et deux amis de ce dernier auraient commis des abus sexuels sur l’enfant. La procédure ouverte contre les deux amis du requérant a été classée sans suite en avril 2001. Le grand-père paternel décéda en janvier 2003. Fin janvier 2003, la Cour d’appel de Naples a décidé que la garde de l’enfant restait confiée à la mère et a fixé un calendrier de reprise graduelle des contacts entre le requérant et sa fille au sein d’une structure protégée et sous surveillance.

En dépit des différentes décisions judiciaires intervenues, ordonnant la reprise progressive des relations entre le requérant et sa fille, celui-ci n’a plus pu la rencontrer depuis septembre 2002. La situation s’est détériorée au point que toute relation entre le père et sa fille a été anéantie. Pour la Cour européenne, le point décisif consiste à savoir si les autorités nationales ont pris toutes les mesures pouvant être exigées d’elles afin de respecter les décisions prises par le Tribunal pour enfants de Naples. Elle a considéré que leur inaction avait forcé le requérant à utiliser sans relâche toute une série de recours longs et finalement inefficaces afin de faire respecter ses droits. La Cour européenne a conclu que l’inobservation du droit de visite du requérant depuis septembre 2002 s’analysait en une atteinte à son droit au respect de sa vie familiale (violation de l’article 8).

Mesures de caractère individuel : En janvier et mars 2006, deux rencontres ont eu lieu entre la fille et une juge du tribunal, en présence d’une psychologue. Il a été conclu que le refus de la fille de voir son père était provoqué par la représentation négative de l’image paternelle opérée par la mère. Ce refus ne pourrait être modifié de façon significative que moyennant un changement d’attitude de la mère. En conséquence, par décret du 22/03/2006, la section pour enfants de la Cour d'Appel de Naples, a:

-                  reconnu l'autorité parentale aux deux parents;

-                  confié la garde exclusive de la fille à la mère;

-                  suspendu les rencontres entre le père et sa fille;

-                  ordonné la poursuite de la médiation entre les parents.

La médiation familiale s’est développée de façon systématique et régulière pendant plus d’un an. Ainsi en 2006, les services sociaux ont organisé cinq rencontres entre les parents. Un rapport des services sociaux, en date du 10/07/2007, fait état de la tenue de cinq autres rencontres entre les parents depuis le début de l’année (28/01, 5/02, 12/03, 2/04, 14/05) et conclut que la médiation se poursuit dans un esprit de plus en plus positif. Toutefois, l'avocat du requérant a envoyé, en septembre 2007, une lettre dans laquelle il se plaint de la décision judiciaire de suspendre les rencontres entre le père et sa fille. Il ajoute que les rencontres entre la mère et le père n'ont pas eu lieu entre juillet et septembre 2007, à cause de la mère.

Un récent rapport des services sociaux, en date du 14/03/2008, précise qu’après les vacances d’été 2007, sur l’ensemble des rencontres prévues dans le cadre de la médiation entre les parents, une seule s’est déroulée en novembre 2007, la mère de l’enfant ayant refusé d’y participer. La délégation italienne a relevé, par lettre du 10/04/2008, que la décision judiciaire de suspendre les visites est conforme à la jurisprudence de la Cour européenne car un juste équilibre doit être ménagé entre les intérêts de l’enfant et celui du parent.

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées par les autorités pour pallier le manque de coopération de l’une des parties à la médiation.

Mesures de caractère général  : L’arrêt de la Cour européenne a été publié, en langue italienne, sur le site Internet du Ministère de la Justice dans la partie dédiée aux droits de l’homme (http://www.giustizia.it/pol_internaz/tutela/tutela_du_indice.htm).

Les Délégués,

1.             notent qu’en mars 2006, la Cour d’Appel de Naples a réexaminé la situation du requérant, ordonnant la suspension des rencontres entre le père et son enfant ainsi qu’une médiation entre les parents en vue d’un possible rapprochement entre le requérant et son enfant ;

2.             notent que cette médiation s’est développée de façon positive pendant plus d’un an ;

3.             relèvent que cette médiation est à présent interrompue en raison du refus de la mère de l’enfant de continuer à y participer ;

4.             prennent note des informations fournies par les autorités sur les moyens existant au niveau interne pour leur permettre ainsi qu’au requérant de réagir à cette situation et les invitent à fournir des informations complémentaires à cet égard ;

5.             décident de reprendre l'examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH).


26740/02           Grande Oriente d’Italia di Palazzo Giustiniani n° 2, arrêt du 31/05/2007, définitif le 31/08/2007

L'affaire concerne une ingérence dans le droit à la liberté d'association du Grande Oriente d'Italie di Palazzo Giustiniani, une association d'obédience maçonnique. La Cour européenne a observé qu'en région Frioul Vénétie Julienne seuls les membres d'une association maçonniques sont tenus de déclarer leur affiliation lorsqu'ils postulent à certains postes du ressort régional.

Elle a constaté qu'il n'y avait aucune justification objective et raisonnable à cette différence de traitement entre associations non secrètes, prévue par la loi n°1 de 2000 de la Région Frioul Vénétie Julienne (violation de l'article 14 combiné à l'article 11 de la Convention)

Mesures d'ordre individuel : L’association requérante a fait état d’un préjudice moral pour son image et la réputation de ses membres. Elle n’a invoqué aucun préjudice matériel individuel. La Cour européenne a estimé que le constat de violation constituait en soi une satisfaction équitable au titre du préjudice moral.

Evaluation : aucune autre mesure individuelle ne semble donc nécessaire.

Mesures d'ordre général : aux termes de la loi n°1 de 2000 de la Région des Frioul Vénétie Julienne, qui a modifié la loi régionale n°75 de1978, les candidats à des postes du ressort régional doivent « déclarer leur éventuelle appartenance à des associations maçonniques ou en tout cas à caractère secret. L'absence de cette déclaration constitue une condition empêchant la nomination ».

La Cour, examinant l'affaire sous l'angle de non-discrimination, a considéré que l'appartenance à de nombreuses autres associations non secrètes pourrait poser un problème pour la sécurité nationale et la défense de l'ordre public, lorsque les membres de celles-ci sont appelés à remplir des fonctions publiques. Or les membres de telles autres associations non secrètes, ne sont pas tenus, à la différence des membres d'association maçonniques de déclarer leur appartenance. Cette obligation imposée aux seuls francs-maçons ne repose sur aucune justification objective et raisonnable.

Des informations sont attendues: sur les mesures prises ou envisagées afin de rendre la loi régionale conforme à la Convention, notamment par l'abrogation ou la modification de l'article 7 bis ante de la loi n° 75 de1978, telle que modifiée par la loi n° 1 de 2000, de la Région des Frioul Vénétie Julienne.

Tenant compte de ce qu'une autre affaire (Grande Oriente di Palazzo Giustiniani, requête n° 35972, rubrique 6.2) avait déjà soulevé des problèmes de conformité des lois régionales à la Convention, une large diffusion et publication de l'arrêt serait souhaitable afin d'éviter une répétition de violations en matière de liberté d'association en Italie.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

36822/02          Bracci, arrêt du 13/10/2005, définitif le 15/02/2006

62094/00          Majadallah, arrêt du 19/10/2006, définitif le 26/03/2007

Ces affaires concernent l’iniquité de procédures pénales qui ont abouti à la condamnation des requérants sur la base de témoignages effectués au stade de l’enquête, les requérants n’ayant pas eu la possibilité d’examiner ou de faire interroger ces témoins en méconnaissance de leur droit à un procès équitable (violations de l'article 6§§1 et 3d).

Dans l'affaire Bracci, la procédure, portant sur plusieurs délits (vol, abus sexuels et port d'arme illégal) contre différentes victimes, avait abouti le 5/12/2000 à la condamnation du requérant à une peine globale de 6 ans d'emprisonnement. La Cour européenne a relevé que, pour partie, la condamnation était fondée exclusivement sur le témoignage, fait avant le procès, d'une victime qui est par la suite devenue introuvable.

Dans l’affaire Majadallah, le requérant a été reconnu coupable le 22/01/1998 d’attentat à la pudeur avec violence, d’actes obscènes en lieu public, de lésions corporelles et d’état d'ébriété. Il a été condamné à une peine d’un an et quatre mois d’emprisonnement sans avoir eu la possibilité d’interroger ses accusateurs qui ne s’étaient pas présentés à l’audience.

Mesures de caractère individuel : Dans les deux affaires, la Cour européenne a estimé que le constat de  violation constituait en soi une satisfaction équitable au titre du préjudice moral subi par les deux requérants.

            1) Affaire Bracci : Le requérant a saisi (incidente d'esecuzione) le Tribunal de Rome, faisant office de juge de l'application des peines, en arguant de l'illégalité de sa détention du fait de la violation constatée par la Cour européenne. Le Tribunal a accueilli sa requête le 25/09/2006, et a déclaré la condamnation illégale. Le requérant a par conséquent été dispensé de purger cette peine. Le Tribunal de Rome a relevé que l'Italie, à la différence d'autres pays européens, n'avait pas encore de mécanisme de réouverture des procédures suite à un arrêt de la Cour européenne, et a souligné la nécessité d'introduire un tel mécanisme dans le système juridique interne pour donner effet à la Convention, telle qu'interprétée par la Cour européenne. Au vu de l'impossibilité d'une réouverture par la voie jurisprudentielle constatée par le Tribunal de Rome, ce dernier a décidé d'établir le caractère illégal de la détention du requérant en déclarant sa condamnation non exécutoire.


Evaluation : dans ces circonstances, aucune autre mesure d’autre individuelle ne semble nécessaire.

            2) Affaire Majadallah : Le requérant a saisi tout d’abord la cour d’appel de Florence puis la Cour de cassation mais sa condamnation a été confirmée.

Des informations sont attendues sur la situation actuelle du requérant et sur une éventuelle demande de sa part de réouverture de la procédure pénale qui a abouti à sa condamnation. Dans ce contexte, il serait utile d’être informé des conséquences que les autorités italiennes envisagent de tirer, sur un plan plus général, du constat du Tribunal de Rome précité ainsi que de l’arrêt de la Cour de cassation du 1/12/2006 rendue dans l’affaire Dorigo (Résolution finale CM/ResDH(2007)83).

Il est à noter également que, dans son arrêt du 30/04/2008, la Cour constitutionnelle a adressé une invitation pressante au législateur pour qu’il adopte des mesures propres à permettre une réouverture des procédures suite à un constat de violation de l’article 6 de la Convention.

Mesures de caractère général : La Cour européenne a affirmé que les droits de la défense sont restreints de manière incompatible avec les garanties de l'article 6 lorsqu'une condamnation se fonde, uniquement ou dans une mesure déterminante, sur des dépositions faites par une personne que l'accusé n'a pu interroger ou faire interroger, ni au stade de l'instruction ni pendant les débats (§55).

Aux termes de l'article 512 du Code de procédure pénal italien, une condamnation peut toujours être fondée sur un témoin que l'accusé n'a pu interroger ou faire interroger, mais uniquement lorsqu'il est devenu impossible, par la suite, de recueillir le témoignage en question en raison de faits ou circonstances imprévisibles.

Dans son arrêt du 18/10/2007 n. 43331, la Cour de cassation a rappelé l'obligation de se conformer aux arrêts définitifs de la Cour européenne, aux termes de l'article 46 de la Convention, et a souligné que l'article 512 du Code de procédure pénale devait être interprété en conformité à la Convention.

Un changement législatif ne s'avère pas strictement nécessaire si la loi est effectivement appliquée conformément aux principes qui découlent de la jurisprudence de la Cour européenne. Dans ce cas, non seulement la publication de l'arrêt est nécessaire mais également sa large diffusion auprès des juridictions, ainsi que d'autres mesures éventuelles pour assurer que la jurisprudence des tribunaux italiens soit mise en conformité avec les exigences de la Convention.

Des informations sont attendues sur ce point. Vu que la Cour de cassation est en train d’organiser la publication de la jurisprudence de la Cour européenne sur son site Internet, il serait utile de savoir si les arrêts dans ces affaires seront intégralement publiés en italien dans ce contexte.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16- 18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations supplémentaires à fournir sur les mesures individuelles et générales.

                        - Affaires concernant les procédures par contumace

12151/86          F.C.B., arrêt du 28/08/91, Résolution  DH(93)6 et Résolution intérimaire ResDH(2002)30

56581/00          Sejdovic, arrêt du 01/03/2006 - Grande Chambre

24691/04          Ali, arrêt du 14/12/2006, définitif le 14/03/2007

5941/04            Hu, arrêt du 28/09/2006, définitif le 28/12/2006

25701/03          Kollcaku, arrêt du 08/02/2007, définitif le 08/05/2007

19321/03          Pittito, arrêt du 12/06/2007, définitif le 12/11/2007

14405/05          Zunic, arrêt du 21/12/2006, définitif le 21/03/2007

Ces affaires concernent l'iniquité de procédures pénales par contumace, diligentées en Italie à l'encontre des requérants qui ont été condamnés à plusieurs années d'emprisonnement (voir mesures de caractère individuel).

La Cour européenne a estimé qu'il y avait eu déni de justice dans ces affaires car il n'avait pas été démontré que les requérants s'étaient soustraits à la justice ou qu'ils avaient renoncé à comparaître et à se défendre. Par la suite, après avoir été informés de l'arrêt rendu à leur encontre, ils n'ont pas eu la possibilité d'obtenir qu'une juridiction statue à nouveau sur le bien-fondé des accusations portées contre eux (violation des articles 6§1 et 6§3).

Mesures de caractère individuel :

            1) F.C.B. :

Poursuites pénales : le requérant, ressortissant italien, accusé de vol à main armée, meurtre et tentative de meurtre, a été condamné par contumace en 1984 à une peine de 24 ans d'emprisonnement. Il était détenu à Maastricht pendant la procédure, mais les autorités judiciaires ont estimé qu'il n'était pas dans l'impossibilité de participer aux audiences.

Exécution de la condamnation : en mars 1993, le Comité des Ministres a adopté la Résolution DH(93)6 qui mettait fin à l'examen de cette affaire sur la base des informations concernant les mesures de caractère général prises pour éviter de nouvelles violations semblables.


Toutefois, en 1999, le Comité a décidé de reprendre l'examen de cette affaire car les autorités italiennes avaient demandé l'extradition du requérant de la Grèce en vue de la mise en œuvre de la condamnation incriminée. En septembre 2000, cette demande a été retirée. En 2004, le requérant qui était entre-temps rentré en Italie, a été arrêté pour d'autres délits. A cette occasion, les autorités italiennes ont émis une ordonnance d'exécution de la condamnation en question.

Réouverture du procès : Par voie d’incident d’exécution incidente d’esecuzione, le requérant a contesté en 2004 la légalité de sa détention devant la Cour d’Appel d’assises de Milan qui a rejeté son recours. Saisie par le requérant, la Cour de cassation a, par un arrêt du 22/09/2005, cassé la décision de la Cour d’appel d’assises de Milan et lui a renvoyé l’affaire. Ce faisant, la Cour de cassation a pris soin de préciser à la juridiction de renvoi que, vu la valeur supranationale des normes de la Convention européenne, celle-ci devrait établir si cela a pour conséquence d’empêcher l’exécution dans l’ordre juridique italien d’une condamnation résultant d’un procès inéquitable ou si, en l’absence de voie de recours interne approprié, la force de la chose jugée doit prévaloir. La Cour d’appel a rejeté une nouvelle fois la demande du requérant en contestation de la légalité de sa détention. Saisie à nouveau par le requérant, la Cour de cassation l’a, par arrêt du 15/11/2006, débouté de son pourvoi, au motif que celui-ci aurait dü présenter un recours en relèvement de forclusion (istanza di rimessione in termini), conformément à l’article 175 du Code de procédure pénale au lieu de l’incident d’exécution (voir mesures de caractère général).

Le requérant a saisi la Cour européenne, en août 2007, se plaignant de sa privation de liberté et faisant, à cet égard, observer qu’elle résultait d’une condamnation prononcée à l’issue d’un procès jugé inéquitable par la Cour européenne. Il se plaint également du rejet de son incident d’exécution et du refus des juridictions nationales de le libérer ou de soulever un incident de constitutionnalité devant la Cour constitutionnelle.

La Représentation Permanente a fait savoir que le Gouvernement avait été invité en octobre 2007 à présenter ses observations sur les questions soulevées dans la requête.

            2) Sejdovic :

Poursuites pénales : le requérant, ressortissant de l'ancienne République fédérale de Yougoslavie, accusé de meurtre et introuvable, a été condamné à 15 ans et 8 mois d'emprisonnement. En l'absence d'appel, le jugement est devenu définitif en 1997. Les autorités judiciaires ont estimé qu'il s'était volontairement soustrait à la justice et il a été déclaré « en fuite » (latitante).

Exécution de la condamnation : en 1999, il a été arrêté en Allemagne en vertu d'un mandat d'arrêt international décerné par le parquet de Rome. La demande d'extradition a été rejetée par la suite par les autorités allemandes au motif que le droit italien ne garantissait pas, avec un degré suffisant de certitude, la possibilité d'obtenir la réouverture de son procès et le requérant a été remis en liberté. En mai 2006, les autorités italiennes ont abandonné les recherches du requérant au niveau international et ont inscrit l'arrêt de la Cour européenne dans son casier judiciaire.

Satisfaction équitable : des divergences existent concernant les formalités requises pour que l'avocat du requérant puisse recevoir le paiement. Le Secrétariat s’est mis à la disposition des parties afin de trouver une solution à ce problème.

3) Hu :

Poursuites pénales du requérant : le requérant, ressortissant chinois, accusé d'appartenance à une association des malfaiteurs organisant l'immigration clandestine et devenu introuvable, a été condamné à 19 ans d'emprisonnement. En l'absence d'appel, le jugement est devenu définitif en 1998. Les autorités judiciaires ont estimé qu'il s'était volontairement soustrait à la justice et il a été déclaré « en fuite » (latitante).

Exécution de la condamnation : en 2003, le requérant a été arrêté à l'aéroport d'Amsterdam en exécution d'un mandat d'arrêt international décerné par les autorités italiennes. La demande d'extradition a par la suite été rejetée par les autorités hollandaises au motif que le requérant n'avait pas eu la possibilité de se défendre. A la date de l'arrêt de la Cour européenne, le requérant résidait aux Pays Bas.

            4) Ay Ali :

Poursuites pénales du requérant : le requérant, ressortissant suédois, accusé de trafic international de stupéfiant et introuvable, a été condamné à 20 ans d'emprisonnement. En l'absence d'appel, le jugement est devenu définitif en 1999. Les autorités judiciaires ont estimé qu'il s'était volontairement soustrait à la justice et il a été déclaré « en fuite » (latitante).

Exécution de la condamnation : en 2000, il a été arrêté en Lituanie en exécution d'un mandat d'arrêt international décerné par les autorités italiennes et a été extradé en Italie.

Réouverture du procès : le 16/11/2000, le requérant a introduit en Italie une demande en relèvement de forclusion (istanza di rimessione in termini) contre sa condamnation, mais elle a été rejetée par la Cour d'appel, le 12/04/2001, puis par un arrêt définitif de la Cour de cassation du 4/12/2004. Le requérant a envoyé plusieurs lettres se plaignant d’être détenu. Il a informé avoir tenté d’introduire un recours devant le tribunal de Vérone en vue de faire appliquer l'arrêt de la Cour européenne. Malgré l'avis favorable du procureur général, le tribunal aurait rejeté le recours. Le 22/06/2007, il se serait pourvu en cassation.


            5) Zunic :

Poursuites pénales du requérant : le requérant, un ressortissant de la Bosnie-Herzégovine, accusé de faire partie d'une association des malfaiteurs et de proxénétisme, a été condamné à 10 ans d'emprisonnement et à une amende. En l'absence d'appel ce jugement est devenu définitif en 1999. Durant la procédure, les autorités judiciaires ont déclaré le requérant « introuvable » (irreperibile).

Exécution de la condamnation : en 2002, le requérant a été arrêté en Croatie en vertu d'un mandat d'arrêt international décerné par les autorités italiennes et extradé en Italie.

Réouverture du procès : le requérant a introduit plusieurs recours contre sa condamnation, notamment, le 13/02/2004, un incident d'exécution (incidente d'esecuzione) et, le 13/05/2005, une demande en relèvement de forclusion (istanza di rimessione in termini), mais tous ses recours ont été rejetés. A une date non précisée, le requérant a introduit un deuxième incident d'exécution qui a été rejeté par la Cour d'appel de Florence. La décision de la Cour de cassation qui a été saisie, n'est pas encore connue.

            6) Kollcaku :

Poursuites pénales du requérant : le requérant, ressortissant albanais, accusé de séquestration de personne, abus sexuels et de proxénétisme, et devenu introuvable, a été condamné à 5 ans d'emprisonnement. En l'absence d'appel, ce jugement est devenu définitif en 1997. Les autorités judiciaires ont estimé qu'il s'était volontairement soustrait à la justice et ils l'ont déclaré « en fuite » (latitante).

Exécution de la condamnation : en 2003, il a été arrêté à Rome.

Réouverture du procès: le 10/06/2003, le requérant a introduit un incident d'exécution (incidente d'esecuzione) qui a été rejeté.

            7) Pititto :

Poursuites pénales du requérant : le requérant, ressortissant italien, accusé de trafic international de stupéfiant, et devenu introuvable, a été condamné à 21 ans d'emprisonnement. L'avocat d'office a interjeté appel. L’appel a été déclaré irrecevable car l’avocat n'avait pas produit une procuration ad hoc signé par le requérant. En conséquence de la déclaration d'irrecevabilité de l'appel, le jugement est devenu définitif en 1999. Les autorités judiciaires ont estimé que le requérant s'était volontairement soustrait à la justice et ils l'ont déclaré « en fuite » (latitante).

Exécution de la condamnation : en 2000, le requérant a été arrêté en Espagne en vertu d'un mandat d'arrêt international décerné par les autorités italiennes et extradé en Italie.

Réouverture du procès: le 30/07/2001, le requérant a introduit un une demande en relèvement de forclusion (istanza di rimessione in termini) qui a été rejetée.

Informations attendues dans toutes ces affaires : Il serait utile de disposer d’une mise à jour des informations précitées sur les situations individuelles des requérants, y compris en ce qui concerne leurs demandes pour qu'une juridiction statue à nouveau sur le bien-fondé de leurs accusations.

Mesures de caractère général :

            1) Mesures législatives : En 1989, l'Italie a adopté un nouveau code de procédure pénale qui a amélioré les garanties dans les procédures par contumace (voir Résolution DH(93)6). En 2004, la Cour européenne dans l'affaire Sejdovic contre l'Italie, arrêt de chambre du 10/11/2004, a jugée insuffisante l'amélioration introduite par la réforme de 1989. Quelque mois après cet arrêt, l'Italie a modifié l'article 175 du code de procédure pénale (décret-loi n°17 du 21/02/2005, confirmé par la loi n° 60 du 22/04/2005), qui fixe les modalités de demande en relèvement de forclusion (istanza di rimessione in termini). Ainsi, les justiciables peuvent faire appel d'un jugement rendu par contumace en première instance y compris lorsque le délai a expiré.

Aux termes des nouvelles dispositions, un nouvel appel contre un jugement prononcé par contumace est possible sur simple demande de l'accusé. Il existe une seule exception à savoir, lorsque l'accusé a eu une « connaissance effective » de la procédure diligentée à son encontre ou du jugement, et a volontairement renoncé à comparaître ou à attaquer le jugement. De plus, le délai pour introduire cette demande a été porté de dix à trente jours et commence à courir à partir du moment où l'accusé est livré aux autorités italiennes. Dans l'arrêt Sejdovic (arrêt de Grande Chambre du 1/03/2005), postérieur à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, la Cour européenne a estimé qu'il était prématuré, en l'absence de jurisprudence nationale, de se prononcer sur cette réforme et, partant, n'a pas estimé nécessaire d'indiquer des mesures de caractère général nécessaires pour l'exécution (§§123-124).

Le 16/05/2007, le gouvernement a présenté au Parlement une réforme de la condamnation par contumace (projet de loi AC 2664). Dans son préambule, ce projet soulignait qu’il semblait désormais qu'une réforme en profondeur du procès in absentia ne puisse plus être différée et qu’au cours des dernières années, la Cour européenne avait rendu plusieurs arrêts de condamnation en la matière imposant à l'Etat l'obligation de s'y conformer en vertu de l'article 46 de la Convention (notamment arrêts Colozza, 1985; Sejdovic, 2004; Somogy, 2005). Ce projet de loi proposait plusieurs modifications au Code de procédure pénal, notamment dans la partie dédiée aux communications à l'accusé, en vue d'adapter les règles applicables aux exigences de la Convention. Après la dissolution du Parlement italien, en février 2008, le projet de loi est devenu caduc.


            2) Mesures jurisprudentielles : un problème posé par la loi n° 60 de 2005 concerne son application rétroactive, notamment aux affaires anciennes. En effet, cette loi n'a apparemment pas prévu de mesures transitoires. Par décision du 3/10/2006 n° 32678, la Cour de cassation est intervenue sur ce point en appliquant les nouvelles règles à une affaire ancienne : Somogyi (arrêt du 18/05/2004, actuellement en rubrique 6.2). Pour arriver à ce résultat, la Cour de cassation a réaffirmé l'effet direct en droit italien de la Convention et l'obligation juridique, prévue à l'article 46, de se conformer aux arrêts de la Cour européenne, y compris dans les affaires pour lesquelles un jugement national a acquis l'autorité de chose jugée.

Des informations sont attendues sur l’étendue de l’application de la jurisprudence de la Cour de cassation telle qu’elle ressort de son arrêt n°32678 du 3/10/2006 afin de pouvoir évaluer s’il est possible de s’en remettre à l'effet direct de la Convention pour résoudre ces affaires. A cet effet, copie d’éventuelles nouvelles décisions de la Cour de cassation seraient utiles.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire, ainsi que sur les mesures individuelles et générales.

- 83 affaires concernant l’expropriation indirecte

Résolution intérimaire CM/ResDH(2007)3

                       (Voir Annexe pour la liste d’affaires dans le groupe Belvedere Alberghiera S.R.L.)

Toutes ces affaires concernent des occupations d'urgence de terrains par les autorités locales, prolongées par la suite, sans acte régulier d'expropriation et suivies par des procédures et constats judiciaires de la transformation illégale de terrains par la réalisation d'œuvres publiques. En conséquence de cette « expropriation indirecte » (occupazione acquisitiva e usurpativa) qui a été développée par la jurisprudence italienne parallèlement à l'expropriation régulière depuis 1983, l'administration peut acquérir la propriété des terrains sans avoir recours à la procédure régulière. Dans cette situation, l'unique élément juridique de transfert de propriété devient le constat judiciaire de la transformation illégale.

La Cour européenne a constaté que les règles régissant ces procédures, entamées afin d'établir le transfert de propriété et l'indemnisation, n'avaient pas un degré suffisant de clarté et de prévisibilité.

Elle a relevé des applications contradictoires dans la jurisprudence italienne et dans les textes de la loi et a noté que l' « expropriation indirecte » permettait à l'administration de passer outre les règles ordinaires avec le risque d'un résultat imprévisible ou arbitraire pour les citoyens. En outre, la Cour européenne a constaté que, dans ce système, l'administration peut occuper et transformer des terrains sans verser immédiatement d’indemnité. Afin d'obtenir une indemnisation, les intéressés doivent entamer des procédures judiciaires pouvant être de longue durée. De plus, de nouvelles lois ont privé les expropriés d'une réparation intégrale avec une application rétroactive, et le montant de l'indemnisation est à peine plus élevé que dans les expropriations régulières. Enfin, le droit à réparation peut être déclaré prescrit car le tribunal établit le point de départ du délai de prescription de cinq ans, à compter de la transformation, ce qui peut rendre vain tout espoir de réparation pour l'intéressé.

La Cour européenne a constaté que, dans tous les cas, l' « expropriation indirecte » visait à entériner une situation de fait découlant des illégalités commises par l'administration et permettait à cette dernière de tirer bénéfice de son comportement illégal (violations de l'article 1 du Protocole n° 1).

Mesures de caractère individuel : Sous réserve des décisions sur la satisfaction équitable (jusqu'ici réservées par la Cour dans la plupart de ces affaires), les autorités italiennes sont invitées instamment à trouver les moyens d'effacer les conséquences continues des violations constatées.

L'identification de mesures d'ordre individuel efficaces pourrait contribuer à la résolution du problème général (voir ci-dessous) dans la mesure où celui-ci requiert la mise en place d'un système national efficace permettant de restituer des biens expropriés de fait et/ou de payer une indemnisation adéquate voire des dommages-intérêts au titre de telles expropriations.

Mesures de caractère général adoptées à ce jour:

Développements législatifs intervenus depuis les premières violations constatées par la Cour européenne en 2000 (Belvedere Alberghiera et Carbonara et Ventura) : l'Italie a adopté un Répertoire général mettant en œuvre une réforme en matière d'expropriation (décret présidentiel n°327 de 2001, modifié en 2002, entré en vigueur en 2003). Selon l’article 43 de ce Répertoire, l'administration peut, en cas de modification des terrains, sans arrêté d'expropriation ou de déclaration d'utilité publique, adopter par la suite un décret d'acquisition ayant des effets limités pour le futur. Elle doit toutefois reconnaître un droit à dédommagement intégral en conséquence de l'action illégale de l'administration publique. En faisant application de ces nouvelles règles, le Conseil d'Etat (décision en séance plénière n° 2 de 2005) a jugé qu’après l'adoption de ce Répertoire, l'expropriation ne pouvait plus découler d'une situation de fait, mais exclusivement d'un acte formel et motivé par l'administration publique, même si cet acte devait intervenir après les faits.


Il a également jugé qu'à défaut d'un tel acte, le citoyen disposait d'un droit fondamental à la restitution du bien et que l'administration ne pouvait la refuser en prétextant l'existence d'un ouvrage public. Affirmant la nécessité de l’application et l’interprétation de la loi de manière conforme à la Convention, le Conseil d'Etat a clairement dit que ce pouvoir de l'administration publique, en vertu de l'article 43, devait être exceptionnel et ne devait pas constituer une alternative à une procédure d'expropriation ordinaire.

Résolution intérimaire CM/ResDH(2007)3 : Le 14/02/2007, le Comité des Ministres a adopté une résolution intérimaire faisant le bilan de la situation. Il a pris note avec intérêt de l'adoption du répertoire précité et de la position du Gouvernement selon laquelle la nouvelle procédure constituera une rupture par rapport à la pratique de l'expropriation indirecte et exclura toute ingérence illicite de l'administration dans le droit de propriété tel que reconnu par la Convention, ceci à condition d’être appliquée de façon correcte et cohérente. Par ailleurs, le Comité a souligné que la Cour européenne avait noté « les applications contradictoires relevées dans l’historique de la jurisprudence » et pris note « également des contradictions entre la jurisprudence et les textes de loi », y compris le Répertoire précité (voir arrêt Prenna et autres, du 9/02/2006, §§ 40-43, 65). Dans cette Résolution, le Comité a encouragé les autorités italiennes à poursuivre leurs efforts et à adopter rapidement toutes les mesures nécessaires additionnelles afin de remédier de manière définitive à la pratique de l’« expropriation indirecte » et d’assurer que toute occupation de terrain par l’administration soit conforme au principe de légalité, tel qu’exigé par la Convention européenne. En outre, il a invité les autorités à s’assurer qu’un mécanisme de réparation fonctionne de manière rapide et effective et qu’il soit capable, dans toute la mesure du possible, de décharger également la Cour européenne de sa tâche en vertu de l’article 41 de la Convention.

Déclaration d’inconstitutionnalité par la Cour constitutionnelle : Par son arrêt n° 349 du 24/10/2007, la Cour Constitutionnelle a déclaré inconstitutionnel l'article 5 bis, comma 7 bis, de la loi n° 359 de 1992 (modifié par la loi budgétaire n°662 du 1996). Cet article excluait l’indemnisation intégrale pour toutes les occupations de terrain ayant eu lieu avant le 30 septembre 1996 ; il prévoyait une indemnisation équivalente au montant de l’indemnité prévue en cas d’expropriation en bonne et due forme, dans l’hypothèse la plus favorable au propriétaire, moyennant une augmentation de 10 %. La Cour européenne avait critiqué l’application rétroactive de cette loi privant les requérants d’une réparation intégrale du préjudice subi (voir arrêt Scordino n°3 §100).

La Cour Constitutionnelle dans l'arrêt précité a relevé que le montant insuffisant d'indemnisation prévu par la loi du 1996 était contraire à l'article 1 du Protocole n° 1 et également à l'article 117 de la Constitution italienne, lequel prévoit le respect des obligations internationales. Suite à cet arrêt, cette disposition de loi ne pourra plus être appliquée dans le cadre des procédures nationales encore pendantes.

Modifications législatives intervenues fin 2007 : la loi budgétaire de 2008 (loi n°244 du 24/12/2007) a modifié le Répertoire général en matière d'expropriation et notamment son article 55. Cet article, dans sa version modifiée, prévoit que si un terrain constructible est utilisé par l'administration pour des raisons d'utilité publique, en l'absence d'acte formel d'expropriation et avant le 30/09/1996, le dédommagement doit être calculé selon la valeur marchande du terrain.

Informations reçues et attendues : Par lettre du 3/12/2007, la Représentation Permanente a analysé les conséquences qu’elle considère découler de l'arrêt n°349 de la Cour Constitutionnelle précité, notamment sur les procédures en matière d'expropriation. La Représentation Permanente attire l'attention sur la récente jurisprudence administrative (du Conseil de l'Etat et des Tribunaux régionaux administratifs) qui interprète et applique l'article 43 du Répertoire dans le sens préconisé par la Résolution intérimaire CM/ResDH(2007)3. A l'évidence, tant l'arrêt de la Cour Constitutionnelle que la récente jurisprudence administrative méritent d'être salués.

Cependant, vu la complexité des questions soulevées par les affaires concernées et l’augmentation du nombre de ce type d’affaires, il serait opportun de disposer d’exemples de décisions judiciaires et administratives ayant effectivement octroyé une indemnisation conformément aux exigences de la Convention. Il serait également opportun de disposer d’informations sur l’application des nouvelles règles de 2007 par les différentes juridictions italiennes concernées compte tenu du constat fait par la Cour européenne des contradictions jurisprudentielles internes (cf. ci-dessus). Plus généralement, des informations seraient utiles au sujet de la diminution ou de l’annulation de la pratique des expropriations indirectes ainsi que sur l’effet dissuasif de la loi n° 296 de 2006 (voir la Résolution intérimaire CM/ResDH(2007)3) permettant d’imputer sur le budget des administrations concernées, le coût du dédommagement accordé au titre d’une occupation illégale d’un terrain.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1ère réunion DH de 2009, à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.


36813/97          Scordino n° 1, arrêt du 29/03/2006 - Grande Chambre

52980/99          Stornaiulo et autres, arrêt du 08/08/2006, définitif le 08/11/2006

Ces affaires concernent l'atteinte au droit au respect des biens des requérants en raison du montant d'indemnisation accordé à ces derniers pour des expropriations licites de leurs terrains. Ce montant, fixé par l'article 5 bis de la loi n° 359 de 1992, était largement inférieur (de près de la moitié) à la valeur marchande, taxé ultérieurement d'un impôt de 20% (violations de l'article 1 du Protocole n.1).

La Cour européenne a constaté que ces expropriation ne se situaient pas dans un contexte de réforme économique, sociale ou politique et ne se rattachaient à aucune autre circonstance particulière. Elle n'a aperçu aucun objectif légitime d'utilité publique pouvant justifier un remboursement inférieur à la valeur marchande.

La Cour a, en outre, constaté que la loi n° 359 de 1992 qui avait modifié le droit applicable aux indemnisations résultant des expropriations en cours ainsi qu’aux procédures judiciaires pendantes y relatives, avait ainsi appliqué rétroactivement un nouveau régime d'indemnisation entraînant un remboursement inférieur à la valeur marchande (voir ci-dessus) en violation du droit d’accès des requérants à un tribunal (violation de l’article 6§1). A cet égard, le Gouvernement n'a pas démontré de « intérêt général et impérieux » pour justifier de cet effet rétroactif.

Enfin, ces affaires concernent également des durées excessives de procédures judiciaires diligentées par les requérants pour obtenir une indemnisation au titre du non-respect du délai raisonnable, en vertu de la loi Pinto. L'indemnisation qui leur a été allouée était d'un montant insuffisant et, de surcroît, leur a été versée tardivement (violations de l’article 6§1).

Mesures de caractère individuel : Aucune, la Cour européenne a octroyé une compensation intégrale au titre des préjudices matériel et moral subis.

Mesures de caractère général :

            1) Indemnisation insuffisante dans la procédure d'expropriation : La Cour européenne a noté que la violation tirait « son origine d’un problème à grande échelle résultant d’un dysfonctionnement de la législation italienne, et qui a touché, et peut encore toucher à l’avenir, un grand nombre de personnes » (§72 de l'arrêt Stornaiuolo). La Cour de cassation italienne a réagi, par trois ordonnances (une du 29/05/2006 et deux du 19/10/2006) qui ont toutes soulevé la question de la conformité de l'article 5 bis de la loi n° 359 de 1992 à la Constitution italienne ainsi qu'à la Convention européenne. La Cour constitutionnelle a tranché cette question dans son arrêt n° 348 du 24/10/2007, en déclarant l'article 5 bis inconstitutionnel. Dans ses motifs, la Cour constitutionnelle a souligné que la loi en question n'était ni conforme à l'article 42 de la Constitution italienne, ni à l'article 1 du Protocole n° 1 à la Convention, en raison du montant insuffisant d'indemnisation prévu. Suite à cet arrêt de la Cour constitutionnelle, cette disposition ne pourra plus être appliquée dans le cadre des procédures nationales encore pendantes. A l'évidence, l'arrêt de la Cour constitutionnelle mérite d'être salué.

Des contacts sont actuellement en cours avec la délégation italienne pour préciser l'étendue des conséquences juridiques de cet arrêt.

            2) durée excessive de procédures judiciaires et réparation insuffisante de la violation au niveau national (loi Pinto) : Voir le groupe Mostacciuolo (1020e réunion, mars 2008, rubrique 4.2).

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales concernant l'indemnisation adéquate dans les procédures d'expropriation légales.

- 3 affaires contre la Lettonie

64846/01           Moisejevs, arrêt du 15/06/2006, définitif le 23/10/2006

L'affaire concerne un certain nombre de violations liées à la détention provisoire du requérant et à la procédure pénale intentée contre lui par la suite :

- l'irrégularité de la détention provisoire du requérant entre le 04/06/1998 et le 26/11/1998, sa détention ayant été automatiquement prolongée à l'expiration de son mandat de détention, sur la base d'une pratique reposant sur une interprétation erronée de la loi (violation de l'article 5§1) ;

- la durée excessive de la détention provisoire du requérant (4 ans, 2 mois et 28 jours), en l'absence de motifs suffisants pour en justifier la prolongation (violation de l'article 5§3) ;

- la durée excessive de la procédure pénale à son encontre (6 ans, 1 mois et 10 jours) en raison de périodes d'inactivité et de nombreux ajournements (violation de l'article 6§1) ;


- l'atteinte au droit du requérant au respect de sa vie familiale et privée en raison de l'interdiction presque totale des visites familiales pendant sa détention provisoire (violation de l'article 8), et l'absence de recours effectif à cet égard (violation de l'article 13 combiné avec l'article 8) ;

- l'atteinte au droit de recours individuel en raison de l'interception d'une lettre destinée à Cour européenne (violation de l'article 34) ;

- la quantité insuffisante de repas distribués au requérant pendant les jours d'audience qui constituait un traitement dégradant (violation de l'article 3).

Mesures de caractère individuel :Le requérant n'est plus en détention provisoire : il a été condamné le 25/09/2001 et le 17/01/2003 à douze ans d'emprisonnement ferme. Le requérant n'a pas présenté de demande de satisfaction équitable devant la Cour européenne.

Evaluation: Cela étant le cas, aucune autre mesure individuelle ne semble donc nécessaire.

Mesures de caractère général : Cette affaire est à rapprocher de l'affaire Lavents (arrêt du 28/11/2002, rubrique 6.2) et de l'affaire Kornakovs (arrêt du 15/06/2006, rubrique 5.3) :

Mesures adoptées et en cours d'adoption au titre des violations suivantes

            1) Violation de l'article 5§1 : L'article 77 du Code de procédure pénale letton sur la base duquel la requérante a été maintenue irrégulièrement en détention provisoire, a été abrogé par une loi du 20/01/2005, entrée en vigueur le 01/02/2005.

            2) Violation de l'article 5§3 : Les motifs de détention n'ont pas été mis en cause par la Cour européenne. Une nouvelle loi sur la procédure pénale est entrée en vigueur le 20/01/2005. Cette nouvelle loi introduit un poste de juge d'instruction dont la fonction principale est de contrôler le respect des droits de l'homme dans les procédures pénales. Le juge décide de l'application et de la prolongation de certaines mesures restrictives (détention, résidence surveillée, placement dans une institution) et se prononce sur les requêtes concernant d'autres mesures restrictives (par exemple des ordonnances imposant certaines restrictions, caution, les conditions de la surveillance policière). La nouvelle loi impose également des périodes maximales en matière de détention provisoire. En mai 2003, l'Institut des Droits de l'Homme de Lettonie a organisé un séminaire sur les questions ayant trait à la détention à l'attention des juges, procureurs, avocats, représentants du gouvernement et du parlement.

            3) Violation de l'article 6§1 : Il ne semble pas y avoir de problème systémique de durée des procédures pénales en Lettonie.

            4) Violation de l'article 8 (visites familiales) : Le 29/042003, le gouvernement letton a adopté une réglementation sur les centres de détention provisoire. Elle prévoit, inter alia, la possibilité de visites familiales ou de proches dans ces centres.

            5) Violation de l'article 34 (correspondance) : En plus des mesures déjà prises dans le contexte de l'affaire Lavents (reforme législative), la publication et la diffusion de l'arrêt de Cour européenne semblent nécessaires, en particulier à l'attention des autorités pénitentiaires.

Mesures attendues au titre des autres violations :

            6) Violation de l'article 3: La Cour européenne a noté que, suite à la plainte du requérant, lui-même et les autres accusés ont commencé à recevoir plus de nourriture. Cependant, afin de garantir que tous les autres centres de détention suivent également cette pratique, la publication et la diffusion de l'arrêt de Cour européenne semblent nécessaires, en particulier à l'attention des autorités pénitentiaires.

            7) Violation de l'article 8 combiné avec l'article 13 : Les autorités lettonnes sont invitées à soumettre des informations sur l'existence d'un recours effectif concernant les visites familiales. Sur ce point, les autorités pourraient souhaiter prendre en compte les préoccupations exprimées par le Comité européen Pour la Prévention de la Torture et des Peines ou Traitements Inhumains ou Dégradants (CPT) en ce qui concerne les contacts des détenus avec le monde extérieur (Voir le Rapport du CPT au Gouvernement letton, visite du 5-12 mai 2004, rendu public le 13/03/08, page 35. Disponible à http://www.cpt.coe.int/documents/lva/2008-15-inf-eng.pdf).

Des informations sont donc attendues sur ces deux questions.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales, à savoir la publication de l'arrêt de la Cour européenne et sa diffusion aux autorités concernées, ainsi que l'existence d'un recours effectif concernant les visites familiales.

61655/00           Miholapa, arrêt du 31/05/2007, définitif le 31/08/2007

Cette affaire concerne l’iniquité d’une procédure civile en dommages et intérêts diligentée à l’encontre de la requérante in absentia.

La requérante était propriétaire d'un appartement dans un immeuble situé à Riga, lequel a fait l’objet d’une vente forcée aux enchères en raison du non-paiement d'une dette de charges communales.


L’acquéreur de l’appartement a intenté deux procédures contre la requérante : la première a abouti à l’expulsion de l’intéressée et la seconde à sa condamnation au paiement de dommages et intérêts en janvier 1999. Cette dernière procédure a été conduite en l’absence de la requérante au motif que sa nouvelle adresse était inconnue et qu’elle n’avait pas répondu à la citation publiée au Journal Officiel.

La Cour européenne a estimé que le tribunal n'avait pas fait preuve de diligence suffisante et n'avait pas fait tout ce que l'on pouvait raisonnablement attendre de lui pour citer la requérante (violation de l’article 6§1).

Mesures de caractère individuel : La requérante n’ayant formulé aucune demande de satisfaction équitable, la Cour européenne a estimé qu’il n’y avait pas lieu de lui allouer de somme à ce titre.

Evaluation: Aucune autre mesure individuelle ne semble donc nécessaire.

Mesures de caractère général :

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées par les autorités lettones pour prévenir de nouvelles violations similaires, notamment la publication et la diffusion de l'arrêt de la Cour européenne à l'attention des instances judiciaires.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales, notamment la publication et la diffusion de l'arrêt de la Cour européenne.

61638/00          Dmitrijevs Igors, arrêt du 30/11/2006, définitif le 28/02/2007

Cette affaire concerne la violation du droit du requérant au respect de sa correspondance en raison de l'interdiction d'entretenir toute correspondance avec sa mère durant sa détention provisoire (violation de l'article 8) ainsi que de l'ouverture et du contrôle des lettres adressées au requérant par la Cour européenne (violation de l'article 8).

Cette affaire concerne également la violation du droit du requérant à la liberté de pensée, de conscience et de religion en raison de l'interdiction qui lui a été faite d'assister aux services religieux de la prison (violation de l’article 9). La Cour européenne a estimé à cet égard que cette ingérence n'était pas prévue par la loi.

Enfin, cette affaire concerne une violation du droit de recours individuel du fait du refus répété d'expédier le formulaire de requête du requérant à la Cour européenne et du fait de la déclaration du directeur adjoint de la prison selon laquelle le requérant devait obtenir une autorisation du juge letton avant d'écrire à la Cour (violations de l'article. 34).

Mesures de caractère individuel :Le requérant a été libéré en décembre 2002. Il n'a pas déposé de demande auprès de la Cour européenne au titre de la satisfaction équitable.

Evaluation: Aucune autre mesure individuelle ne semble donc nécessaire.

Mesures de caractère général :

1) Violation des articles 8 et 34 : Cette affaire est à rapprocher de l’affaire Kornakovs (arrêt du 15/06/2006, en rubrique 5.3), pour laquelle les autorités lettonnes ont adopté et sont en train d'adopter des mesures à cet égard.

2) Violation de l'article 9 :

• En plus des mesures en cours (voir ci-dessus), des informations sont attendues sur les mesures législatives prises ou envisagées afin de remédier à l'absence de dispositions concernant le droit des personnes en détention provisoire de participer à des services religieux (voir §§79-80 de l'arrêt).

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales, à savoir les mesures législatives prises ou envisagées afin de remédier à l’absence de dispositions concernant le droit des personnes en détention provisoire de participer aux services religieux.

- 2 affaires contre la Lituanie

11529/04           Baškienė, arrêt du 24/07/2007, définitif le 10/12/2007

Cette affaire concerne la violation du droit d’accès de la requérante à un tribunal et la durée excessive de la procédure, les tribunaux internes n’ayant pas pris une décision sur les demandes de la requérante qu’après plus de sept ans de procédure (violations de l’article 6§1).

En 1996, la requérante avait engagé une action civile concernant ses actions dans une société dont deux directeurs étaient l’objet des poursuites pénales pour escroquerie et détournement de fonds. Estimant que les intérêts sociaux de la requérante étaient menacés, les juridictions internes ont ordonné la jonction des deux procédures.


En 2003, les tribunaux internes ont reconnu les directeurs coupables mais ils n’ont constaté aucun lien de causalité entre les condamnations et les intérêts sociaux de la requérante. Par conséquent, ils ont refusé d'examiner les demandes civiles formulées par elle, indiquant qu'il lui était loisible de faire valoir ses prétentions dans le cadre d’une action civile distincte.

La Cour européenne a relevé que l'action civile initialement engagée par l'intéressée avait été jointe à la procédure pénale à l’initiative des juridictions internes. Dès lors, on ne pouvait raisonnablement escompter de la requérante qu’elle exerçait une action distincte de la procédure pénale. La Cour est particulièrement frappée de constater que l’intéressée a dû attendre plus de sept ans avant que les tribunaux ne lui indiquent qu'ils n’estimaient plus opportun d'examiner conjointement la procédure pénale et l'action civile.

Mesures de caractère individuel : Aucune mesure individuelle n’est nécessaire au sujet de la durée de la procédure, cette procédure étant déjà terminée. Il est noté en outre que la requérante n’a pas intenté de nouvelle procédure civile.

Dans ces circonstances, des informations sont attendues sur des mesures individuelles considérées appropriées par les autorités afin d’offrir à la requérante un redressement adéquat.

Mesures de caractère général :

1) Droit d’accès :

Des informations sont attendues sur des mesures générales prises ou envisagées par les autorités lituaniennes pour assurer que les parties civiles dans des procédures pénales puissent obtenir des décisions sur leurs demandes à l’issue de telles procédures. A priori, la publication et la diffusion de l’arrêt de la Cour aux autorités judiciaires apparaissent nécessaires.

2) Durée excessive de la procédure : les mesures générales sont déjà prises ; voir l’affaire Girdauskas (Résolution CM/ResDH(2007)127).

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point lors au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

4902/02            Čiapas, arrêt du 16/11/2006, définitif le 16/02/2007

Cette affaire concerne une atteinte au respect de la correspondance du requérant, un détenu, durant la phase d'instruction de deux procédures pénales diligentées contre ce dernier entre le 19/11/2001 et le 01/04/2003. En raison des charges de vol et de chantage retenues contre le requérant, toute sa correspondance avec des particuliers a été ouverte et lue en son absence par les autorités pénitentiaires.

Bien que la Cour européenne ait constaté que cette ingérence était prévue par la loi et qu'elle poursuivait un but légitime, elle a néanmoins estimé que le Gouvernement n'avait pas présenté de raisons suffisantes démontrant qu'un tel contrôle total de la correspondance du requérant avec des particuliers était « nécessaire dans une société démocratique » notamment s'agissant de la correspondance avec sa femme (violation de l'article 8).

Mesures de caractère individuel :Le requérant purge actuellement une peine de prison à Marijampolė.

Des informations sont attendues sur la question de savoir si la correspondance du requérant avec des particuliers est toujours soumise à la censure.

Mesures de caractère général : La Cour européenne a souligné la nécessité que la loi nationale autorisant de telles mesures soit rédigée avec précision et que le caractère et la durée des ordonnances autorisant la censure de correspondance soient reconsidérés régulièrement.

Informations fournies par les autorités lituaniennes (20/07/2007) : Des amendements législatifs sont en cours concernant la loi sur la détention provisoire, notamment en ce qui concerne le droit à la correspondance des détenus. Un projet d’amendement a été soumis au gouvernement le 05/07/2007 et a été pris en considération par ce dernier. Le procès législatif est en cours et le projet n’est pas encore parvenu au Parlement.

Les autorités lituaniennes sont invitées à tenir le Secrétariat informé de l’état d’avancement des amendements considérés.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.


- 7 affaires contre le Luxembourg

76240/01           Wagner et J.M.W.L., arrêt du 28/06/2007, définitif le 28/09/2007

L’affaire concerne une atteinte au droit à un procès équitable (violation de l’article 6§1) en raison du refus des tribunaux civils luxembourgeois d’examiner un moyen des requérantes – la première, une citoyenne luxembourgeoise et la deuxième, l’enfant péruvien qu’elle a adopté - tiré de la violation de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.

L’affaire concerne en outre une ingérence dans le droit au respect de la vie familiale des requérantes (violation de l’article 8) en raison du refus des tribunaux luxembourgeois d'accorder l'exequatur d’un jugement péruvien ayant prononcé une adoption plénière, refus résultant de l'absence dans la législation luxembourgeoise de dispositions permettant à une personne non mariée d'obtenir l'adoption plénière d'un enfant. A cet égard, la Cour a notamment relevé que la question de l’adoption par des célibataires se trouvait à un stade avancé d'harmonisation en Europe.

Enfin l’affaire concerne enfin une violation de l’article 14 combiné avec l’article 8 en raison des différences de traitements que subit la deuxième requérante par rapport à un enfant dont l'adoption plénière étrangère est reconnue au Luxembourg et du fait que la première requérante subit au quotidien, par ricochet, les inconvénients causés à la deuxième requérante, son enfant.

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a alloué une satisfaction équitable au titre des préjudices matériel et moral.

La Cour a rappelé que c'est l'intérêt supérieur de l'enfant qui doit primer dans ce genre d'affaires et a estimé que les juges luxembourgeois ne pouvaient raisonnablement passer outre le statut juridique créé valablement à l'étranger et correspondant à une vie familiale au sens de l'article 8.

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées pour mettre un terme aux conséquences, pour les requérantes, des violations constatées.

Mesures de caractère général :

1) Violation de l’article 6§1 : La Cour européenne a noté que la question de l'incompatibilité de la décision de première instance au regard de l'article 8 de la Convention – en particulier sous l'angle de sa conformité à l'ordre public international – figurait parmi les moyens principaux soulevés par les requérantes, de sorte qu'elle exigeait une réponse spécifique et explicite. Or la Cour d'appel a omis de donner une réponse au moyen selon lequel l'ordre public commandait précisément d'accorder, au titre de l'article 8 de la Convention, l'exequatur à la décision d'adoption péruvienne. La Cour de cassation a, de surcroît, entériné cette solution des juges du fond, et ce en dépit de sa jurisprudence selon laquelle la Convention déploie ses effets directs dans l'ordre juridique luxembourgeois.

L’arrêt de la Cour européenne a été publié dans la revue Codex de juin-juillet 2007.

La diffusion de l’arrêt à l’ensemble des juridictions civiles et à la Cour de cassation semble également nécessaire.

2) Violations de l’article 8 et de l’article 14 combiné avec l’article 8 : La Cour européenne a relevé qu’à l’origine des violations se trouve notamment l'absence, dans la législation luxembourgeoise, de dispositions permettant à une personne non mariée d'obtenir l'adoption plénière d'un enfant.

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées afin d’éviter à l’avenir la répétition des violations constatées dans cette affaire.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations complémentaires à fournir sur les mesures individuelles et générales.

2113/04 Schneider, arrêt du 10/07/2007, définitif le 10/10/2007

L'affaire concerne une atteinte au droit au respect des biens (violation de l'article 1 du Protocole n° 1) en raison de l'obligation pour la requérante d'inclure son terrain dans une zone de chasse. L'affaire concerne en outre une atteinte à la liberté d'association (violation de l'article 11) dans la mesure où la requérante était contrainte, en application d'une loi de 1925, d'adhérer à une association - le syndicat de chasse - alors qu'elle en désapprouvait les objectifs.

Bien qu'elle se fut déclarée opposante éthique à la chasse et fit connaître son opposition à ce que son terrain soit inclus dans la zone de chasse, le syndicat auquel elle était tenu d'appartenir se prononça pour la mise en location du droit de chasse sur son terrain et cette décision fut approuvée par le ministre de l'Intérieur et entérinée par les juridictions administratives en 2003 (tribunal et Cour administrative).


La Cour européenne a dit que ce système d'adhésion obligatoire plaçait la requérante dans une situation qui rompait le juste équilibre devant régner entre la sauvegarde du droit de propriété et les exigences de l'intérêt général et que contraindre par la loi un individu à adhérer a une association profondément contraire à ses propres convictions et l'obliger, du fait de cette adhésion, à apporter le terrain dont il est propriétaire pour que l'association en question réalise des objectifs qu'il désapprouve va au-delà de ce qui est nécessaire pour assurer un juste équilibre entre des intérêts contradictoires et ne saurait être considéré comme proportionné au but poursuivi.

Mesures de caractère individuel : La requérante n'a formulé aucune demande de satisfaction équitable, bien que son attention ait été attirée sur ce point ; la Cour européenne a estimé qu'il n'y avait pas lieu de lui allouer de somme à ce titre.

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées en faveur de la requérante afin de faire cesser les violations constatées.

Mesures de caractère général : La loi du 20/07/1925 sur l'amodiation de la chasse et l'indemnisation des dégâts causés par le gibier qui contraint les propriétaires à adhérer à un syndicat de chasse et prévoit les modalités d'inclusion des terrains dans les zones de chasse est mise en cause dans cette affaire.

L’arrêt de la Cour européenne a été publié dans la revue Codex de juin-juillet 2007.

Des informations complémentaires sont attendues sur les mesures prises ou envisagées afin d'éviter la répétition de la violation constatée dans cette affaire ; en outre la diffusion de l'arrêt de la Cour européenne aux juridictions administratives semble nécessaire.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

                       - Affaires concernant essentiellement la durée des procédures pénales

63286/00          Schumacher, arrêt du 25/11/03, définitif le 25/02/04

73983/01          Rezette, arrêt du 13/07/2004, définitif le 13/10/2004

40327/02          Casse, arrêt du 27/04/2006, définitif le 27/07/2006

33747/02          Laghouati et autres, arrêt du 05/04/2007, définitif le 18/05/2007

11282/05           Electro Distribution le Luxembourgeoise (E.D.L.) S.A., arrêt du 31/07/2007, définitif le 31/10/2007

Ces affaires concernent la durée excessive de procédures civiles et pénales, débutées en 1991 et 1996 (violations de l'article 6§1).

Ces affaires présentent des similarités dans la mesure où dans chacune d'elles, la durée excessive d'une procédure pénale est principalement en cause ; en effet, les procédure civiles concernées dans les affaires Rezette et Casse avaient été ajournées (en vertu du principe « le criminel tient le civil en l'état ») dans l'attente de l'issue de procédures pénales elles-mêmes excessivement longues.

Les affaires Casse et Laghouati concernent également l'absence de recours effectif pour s'en plaindre (violation de l'article 13).

Enfin, l'affaire Casse l'affaire concerne encore le fait que le requérant n'avait pas été informé des accusations portées contre lui (violation de l'article 6§3a) ; en effet, bien qu'il puisse être considéré comme « accusé » depuis 1996, il n'a depuis lors pas été inculpé, ni même convoqué devant le juge d'instruction.

Mesures de caractère individuel :

            1) Affaires Schumacher et Laghouati : aucune, les procédures incriminées étant closes.

            2) Affaires Rezette et Casse : dans l'affaire Rezette, la délégation a fait savoir que la procédure pénale en cause était terminée (la requérante n'a pas été inculpée), de sorte que la procédure civile a pu reprendre son cours.

Des informations sont attendues sur l'état des procédures dans les affaires Rezette et Casse et sur leur accélération, en particulier concernant l'affaire Casse.

Mesures de caractère général :

            1) Violations de l'article 6§1:

Sources des violations : ll ressort tant des arrêts que de l'analyse communiquée par la délégation que les causes de la durée excessive des procédures pénales en question tiennent, d'une part, à certains facteurs spécifiques aux présentes affaires et, d'autre part, également à la surcharge de travail du Service de la Police Judiciaire et des juges d'instruction du tribunal d'arrondissement de Luxembourg.  En revanche, de l'avis des autorités luxembourgeoises, il n'y a pas de problème structurel proprement dit en ce qui concerne la durée des procédures pénales.


Mesures adoptées :

- Mesures adoptées pour remédier à la surcharge de travail du Service de Police Judiciaire (SPJ).

Les effectifs du SPJ ont été accrus, passant de 138 agents en 2003 à 169 en 2005. De surcroît, les Ministères de l'Intérieur et de la Justice ont décidé d'une nouvelle organisation du SPJ, mise en œuvre à partir du 1/12//2003. Cette réorganisation, instaurant des réunions régulières entre autorités policières et judiciaires, est principalement dédiée à l'amélioration de l'efficacité du SPJ par le biais, entre autres, d'une meilleure coordination entre les autorités judiciaires et la direction du SPJ, en réduisant, dans la mesure du possible, le délai d'exécution des enquêtes confiées au SPJ, afin d'aboutir à un traitement plus rapide des affaires pénales par les juridictions nationales. Le parquet et les juges d'instruction sont ainsi mieux à même, actuellement, de superviser l'évolution des enquêtes confiées au SPJ. Le Gouvernement a ajouté qu'il travaille de façon continue pour améliorer les conditions matérielles, humaines et organisationnelles des services de police et des juridictions ainsi que les procédures, y compris la procédure pénale.

- Mesures adoptées pour remédier à la surcharge de travail des juges d'instruction.

Premièrement, il a été procédé à des embauches. A cet égard, la délégation a rappelé l'adoption de la loi du 24/07/2001 (programme pluriannuel de recrutement de magistrats et d'autres personnels) déjà constatée dans l'affaire Scheele (ResDH(2003)89) ; un second programme pluriannuel de recrutement a d'ailleurs été adopté par une loi du 1/07/2005 qui a cette fois-ci, notamment, renforcé les effectifs du Ministère public. Plus spécifiquement, un renforcement des effectifs du cabinet des juges d'instruction du tribunal d'arrondissement de Luxembourg a également été prévu par la loi du 12/08/2003, ces juges étant en effet passés de 6 en 1996 à 13 en 2004.

Deuxièmement, cette augmentation d'effectifs a permis une redistribution des dossiers entre les juges d'instruction, tenant compte de leur spécialisation et de leur expérience.

Troisièmement, des améliorations ont été apportées sur le recensement des affaires traitées au cabinet d'instruction.

Enfin, la loi du 6/03/2006, destinée à contribuer à l'amélioration du fonctionnement quotidien de la justice pénale, a notamment introduit des mesures réduisant la charge de travail des juges d'instruction (pour le texte de la loi, voir : http://www.legilux.public.lu/leg/a/archives/2006/0471503/0471503.pdf?SID=b8a998ca93a034e01a0c2f2a48e76ba8). D'une part, il est désormais possible de procéder à davantage d'actes d'instruction sans qu'il soit nécessaire d'ouvrir une instruction préparatoire, qui comporte de nombreux devoirs à la charge du juge d'instruction (instruction simplifiée). D'autre part, la loi introduit en droit luxembourgeois le contrôle judiciaire, mesure alternative à la détention préventive, mesure très sévère exigeant un traitement prioritaire des dossiers où elle intervient et influant ainsi sur la gestion des affaires au sein des cabinets des juges d'instruction.

Mesure en préparation concernant le principe « le criminel tient le civil en l'état ». Dans les affaires Rezette et Casse, les procédures civiles en question ont atteint des durées déraisonnablement longues car elles avaient été ajournées dans l'attente de l'issue de procédures pénales elles-mêmes excessivement longues. Le principe « le criminel tient le civil en l'état » n'a en lui-même, en revanche, pas été incriminé par la Cour ; elle a, au contraire, rappelé que « le fait de se prononcer sur la procédure civile avant que la procédure pénale ne soit achevée pouvait éventuellement ne pas être compatible avec le principe d'une bonne administration de la justice ».

Vu l'ensemble de ces éléments, le Gouvernement élabore actuellement un projet de loi visant à conférer un caractère facultatif à la disposition en vertu de laquelle « le criminel tient le civil en l'état » (article 3 du code d'instruction criminelle).

Publication et diffusion des arrêts.

L'arrêt Rezette a été publié au Codex n°12 de décembre 2004 et au Bulletin des Droits de l'Homme (n°11/12 - 2005) édité par l'Institut luxembourgeois des Droits de l'Homme. L'arrêt Schumacher a quant à lui été publié au Codex n°2 de février 2004. De surcroît, les deux arrêts ont été transmis par le Ministère de la justice au Procureur Général d'Etat, respectivement le 29/07/2004 et le 11/12/2003, aux fins d'information de toutes les instances judiciaires intéressées. Enfin, l'arrêt Casse a été publié au Codex n°6 de juin 2006.

Evaluation de l'effet de ces mesures sur la durée des procédures pénales : Compte tenu du volume des arriérés qui s'était accumulé durant les années précédant les mesures prises pour y remédier, l'effet bénéfique des mesures sur la durée des procédures pénales commence seulement à se faire sentir. A cet égard, les autorités luxembourgeoises ont confirmé, concernant plus spécifiquement la question de la charge de travail des juges d'instruction, que les mesures prises (voir ci-dessus) ont permis de diminuer de façon considérable les arriérés qui s'étaient accumulés avant l'entrée en vigueur des lois des 24/07/2001 et 12/08/2003.

Des informations complémentaires sont attendues sur les suites données au projet de rendre facultative l'application du principe « le criminel tient le civil en l'état » et, si des données plus précises sont disponibles sur ce point entre temps, sur les effets des mesures adoptées.


            2) Violation de l'article 13

Situation actuelle. Les autorités luxembourgeoises ont indiqué que le droit luxembourgeois permet d'obtenir réparation du préjudice subi par un administré du fait du fonctionnement défectueux de l'administration par le biais d'une action en responsabilité qui peut être intentée, soit sur la base des articles 1382 ss. du code civil luxembourgeois (règles générales), soir sur la base d'une loi spéciale du 1/09/1988. Toutefois, s'il convient de prendre note de l'existence de ces dispositions législatives, il peut également être relevé que la Cour européenne a elle-même constaté dans l'arrêt Rezette précité (et confirmé depuis lors, voir notamment l'arrêt Dattel et autres du 04/08/2005) que « le recours basé sur la loi du 1er septembre 1988 n'a […] pas acquis un degré de certitude juridique suffisant pour pouvoir et devoir être utilisé par la requérante aux fins de l'article 35§1 de la Convention ». A toutes fins utiles, il peut être noté qu'encore le 5/04/200dans l'arrêt Laghouati et autres c. Luxembourg, non définitif à ce stade, la Cour européenne a dit qu'elle « ne saurait raisonnablement spéculer sur la question de savoir si, à l'avenir, le recours mis en avant par le Gouvernement » (en l'occurrence celui basé sur la loi du 1er septembre 1988) « sera à considérer comme effectif au regard des critères posés par l'article 13 de la Convention ».

Les autorités luxembourgeoises ont précisé qu'il n'existait pas, à leur connaissance, de jurisprudence ayant fait application de la loi du 1/09/1988 en la matière autre que celle déjà versée à la Cour européenne, le problème étant justement que les parties préfèrent s'adresser directement à la Cour européenne que d'épuiser cette voire de recours interne.

Mesures en cours d'adoption. D'une part, le Gouvernement examine quelles mesures pourraient être utiles pour renforcer le caractère de recours effectif de la loi du 1/09/1988. D'autre part, un avant-projet de loi portant modification de la loi précitée est en cours de finalisation, avec l'objectif de consacrer, par une nouvelle formule, le droit (déjà préexistant dans la même loi selon le Gouvernement) à la réparation d'un dommage causé par le dépassement du délai raisonnable d'un procès.

Des informations complémentaires sont attendues à cet égard.

            3) Violation de l'article 6§3a) Dans l'affaire Casse, la violation en question résultait de l'absence de notification au requérant des accusations portées contre lui par le juge d'instruction.

Des informations sont attendues sur une diffusion de cet arrêt aux juges d'instruction ainsi que sur d'autres mesures éventuellement adoptées ou envisagées en vue de prévenir de nouvelles violations similaires.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ces points au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles s'il y a lieu, à savoir l'accélération des procédures pendantes, ainsi que sur les mesures générales.

- 5 affaires contre Malte

26111/02          Mizzi, arrêt du 12/01/2006, définitif le 12/04/2006

Cette affaire concerne le rejet par la Cour constitutionnelle de l'action du requérant, introduite en 1997, en contestation de la présomption légale de sa paternité en ce qui concerne la fille de son épouse, née en 1967.

Le requérant qui avait cessé de vivre avec son épouse avant la naissance de l'enfant, s'était légalement séparé de son épouse en 1968 et le mariage a été annulé en 1972. Jusqu'en 1990, le requérant ne pouvait introduire une telle action puisque les articles 70 et 73 du code civil maltais ne permettait une action en désaveu de paternité en cas d'adultère que si la naissance de l'enfant avait été cachée, ce qui n'était pas le cas. En 1990, les tests génétiques ont été admis à condition que l'action soit introduite dans les 3 mois à compter de la naissance (article 73). Ce délai a été étendu à 6 mois en 1993. Le requérant ne pouvait donc se prévaloir à cette date de ce mécanisme.

En dépit des conditions juridiques restrictives, et sur la base de tests ADN établissant que le requérant n'était pas le père de l'enfant, le tribunal civil a accepté le recours du requérant en 1997, estimant que la loi maltaise avait violé l'article 8 de la Convention. Cette décision a été cassée par la Cour constitutionnelle.

La Cour européenne a estimé que l'impossibilité pratique pour le requérant de contester sa paternité, depuis le jour de la naissance de l'enfant, avait porté atteinte au droit d'accès du requérant à un tribunal (violation de l'article 6§1). En outre la Cour a estimé que, l'Etat défendeur n'avait pas ménagé un juste équilibre entre l'intérêt légitime du requérant à obtenir une décision judiciaire sur sa paternité présumée et la protection de la sécurité juridique et des intérêts des autres personnes impliquées dans cette affaire (violation de l'article 8). De plus, cette action était soumise à des délais qui ne s'appliquaient pas aux autres parties intéressées (violation de l'article 14 combiné avec l'article 6§1 et 8).


Mesures de caractère individuel :

Informations fournies par les autorités maltaises : Il semble peu probable qu'une réouverture de l'affaire, en vertu de l'article 811 du Code de l'organisation et de la procédure civile, permettant de corriger « l'application erronée de la loi » puisse aboutir. Cependant, une réforme législative est en cours afin de permettre au requérant d'introduire une nouvelle procédure en contestation de sa paternité (voir ci-dessous pour plus de détails).

Des informations sont attendues sur la question de savoir si  le requérant pourra bénéficier de la nouvelle loi une fois qu'elle sera entrée en vigueur, au vu du délai strict envisagé fixé au 31/12/2006 envisagé pour introduire une telle demande. Des contacts bilatéraux sont en cours pour clarifier cette question.

Mesures de caractère général : En réponse à la demande du Secrétariat du 06/07/2006 concernant le plan d'action, l'Etat défendeur a répondu dans le délai en fournissant des informations détaillées le 11/09/2006 sur la réforme législative en cours. Le 09/06/2006, un projet de loi visant à amender l'article 70 du Code civil maltais a été publié. Le nouvel article 4 autorise le requérant, ainsi que les autres personnes se trouvant dans la même situation, à contester la paternité à l'égard d'enfants nés avant le 01/12/1993 avec une date limite stricte fixée au 31/12/2006. Le projet fait actuellement l'objet de débats.

Des informations sont attendues sur l'état d'avancement du projet de loi, en particulier s'agissant de la courte date limite envisagée. Dans ce contexte, il convient de rappeler que la Cour européenne a constaté une violation de l'article 14 dans la mesure où les autres parties concernées n'étaient soumises à aucun délai et a indiqué que les dates limites imposées devaient respecter les exigences de la Convention (§§129‑136 de l'arrêt).

Dans ce contexte, l'expérience acquise dans l'affaire très semblable Shofman contre la Fédération de Russie (rubrique 6.1) pourrait être prise en considération. Dans cette affaire, la Cour européenne a constaté qu'un délai d'un an après naissance violait l'article 8 et a noté que le nouveau code de la famille en vigueur depuis 1996 ne prévoyait aucun délai pour contester la paternité.

Tous les arrêts de la Cour européenne contre Malte sont habituellement diffusés aux autorités compétentes et sont accessibles au public par le site Internet du Ministère fédéral de la Justice et l'intérieur (http://www.bmj.de>mjha.gov.mt/ministry/links.html) qui comporte un lien direct vers le site Internet de la Cour européenne.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire, et sur les mesures individuelles, en particulier la question de savoir si le requérant pourra bénéficier de la nouvelle législation une fois qu'elle sera entrée en vigueur, ainsi que sur les mesures générales, à savoir l'état d'avancement du projet de loi visant à amender l'article 70 du Code civil maltais.

31122/05          Ghigo, arrêt du 26/09/2006, définitif le 26/12/2006

35349/05          Fleri Soler et Camilleri, arrêt du 26/09/2006, définitif le 26/12/2006

17647/04          Edwards, arrêt du 24/10/2006, définitif le 24/01/2007

Ces affaires concernent la violation du droit des requérants au respect de leurs biens dans la mesure où leurs appartements avaient fait l’objet de mesures de réquisitions en vertu de l’article 3(1) de la loi maltaise sur le logement (telle qu’en vigueur en 1989) imposant des locataires aux requérants.

A cet égard, il avait été demandé aux requérants de prendre en charge la plupart des frais sociaux et financiers pour le logement de tiers et de leur famille (Ghigo, Edwards) et de prendre en charge les frais afférant à la mise en place d’un espace de travail pour des services gouvernementaux et/ou des bureaux pour des activités publiques au profit de la communauté (Fleri Soler et Camilleri).

La Cour européenne a estimé qu’une charge disproportionnée et excessive avait été imposée aux requérants eu égard au très faible montant des loyers, au fait que les appartements des requérants avaient été réquisitionnés depuis plus de 22 ans (Ghigo), 30 ans (Edwards) et presque 65 ans (Fleri Soler et Camilleri), ainsi qu’aux restrictions à leurs droits en tant que propriétaires. Elle a conclu que l’’Etat maltais n’avait pas mis en balance les intérêts généraux de la communauté et la protection des droits des requérants en tant que propriétaires (violations de l’article 1 du Protocole n° 1)

Mesures de caractère individuel : Lorsque la Cour européenne a rendu ses arrêts, les requérants étaient toujours assujettis à ces mesures de réquisition.

La Cour européenne a réservé la question de l’indemnisation du préjudice matériel et moral dans ces trois affaires.

Des informations sont attendues sur la situation actuelle des requérants et sur les mesures prises ou envisagées pour effacer les conséquences des violations.


Mesures de caractère général : Tous les arrêts de la Cour européenne contre Malte sont automatiquement transmis aux autorités compétentes et sont disponibles sur le site Internet du Ministère de la Justice et du Ministère de l’Intérieur (http://www.bmj.de>mjha.gov.mt/ministry/links.html) qui comprend un lien vers le site de la Cour européenne.

Des informations sont attendues sur la législation et la pratique actuellement en vigueur ainsi que sur les mesures prises ou envisagées pour prévenir de nouvelles violations similaires, en particulier dans de telles affaires qui tombent sous le coup de la loi (valide jusqu’en 1989).

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

                       - Affaire concernant la liberté d’expression

7333/06 Lombardo et autres, arrêt du 24/04/2007, définitif le 24/07/2007

L’affaire concerne l’atteinte à la liberté d’expression des requérants, les trois premiers étant membres du Conseil local Fgura et le quatrième étant le rédacteur en chef du journal « In-Nazzjon Taghna », en raison de leur condamnation civile en diffamation pour avoir publié un article sur un projet de construction de route, dénonçant l’absence de consultation publique par le Conseil local Fgura et l’absence de prise en compte de l’opinion publique (violation de l’article 10).

La Cour européenne a estimé que l’article n’avait pas excédé les limites acceptables de la critique. Elle a relevé à cet égard qu’il était important de préserver en particulier la liberté d’expression de représentants élus sur un sujet d’intérêt général. Enfin la Cour a estimé que les déclarations des requérants avaient suffisamment de base factuelle. Elle a conclu qu’en dépit du faible montant des dommages et intérêts auxquels les requérants avaient été condamnés, la condamnation des requérants étaient de nature à dissuader toute déclaration critique à l’égard de la politique du Conseil local et par conséquent n’était pas nécessaire dans une société démocratique.

Mesures de caractère individuel: Les conséquences de la violation ont été réparées de manière adéquate par la Cour européenne par le biais de la satisfaction équitable octroyée, couvrant le montant des dommages et intérêts auxquels les requérants avaient été condamnés.

Mesures de caractère général: Tous les arrêts de la Cour européenne rendus contre Malte sont automatiquement envoyés aux autorités compétentes et sont accessibles au public par le biais du site Internet du Ministère de la Justice et de l’Intérieur (http://mjha.gov.mt/ministry/links.html) qui contient un lien direct vers le site de la Cour européenne.

Des informations sont attendues sur les mesures envisagées par les autorités pour prévenir de nouvelles violations similaires, en particulier des mesures de diffusion et de sensibilisation.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales.

- 31 affaires contre la Moldova

45701/99          Eglise métropolitaine de Bessarabie et autres, arrêt du 13/12/01, définitif le 27/03/02

                       Résolution intérimaire ResDH(2006)12

952/03              Biserica Adevărat Ortodoxă din la Moldova et autres, arrêt du 27/02/2007, définitif le 27/05/2007

Ces affaires concernent le refus des autorités de reconnaître les églises requérantes et l’absence de recours effectif à ce sujet.

Dans l’affaire l'Eglise métropolitaine de Bessarabie, la Cour européenne a conclu que l’absence de reconnaissance de l’église par le gouvernement avait constitué une ingérence dans le droit des requérants à la liberté de religion, (notamment à cause des effets de la non-reconnaissance sur les possibilités des membres de l’Eglise requérante d’exercer leur culte et des activités religieuses, et la capacité de l'Eglise requérante d'avoir un accès effectif à un tribunal pour faire valoir ses droits en matière de propriété). Cette ingérence, bien que poursuivant un but légitime, n'était pas nécessaire dans une société démocratique et donc pas justifiée en vertu de la Convention (violation de l'article 9). La Cour a également conclu que les requérants n'avaient pas bénéficié d'un recours effectif au plan interne au sujet de leurs différents griefs (violation de l'article 13).


L’affaire Biserica Adevărat Ortodoxă din Moldova et autres concerne le refus persistent des autorités d’enregistrer l’Eglise requérante (violation de l’article 9). La Cour européenne a relevé qu’en dépit d’un arrêt définitif d’août 2001 ordonnant l’enregistrement de l’église et des demandes répétées du service de l’exécution des décisions judiciaires, le gouvernement et l’Agence nationale pour la protection des cultes (l‘Agence) avaient refusé d’enregistrer l’église requérante. Le gouvernement a en outre essayé à trois reprises d’obtenir la réouverture de la procédure et l’Agence ne cesse de demander aux requérants de produire de nouveaux documents alors que ces documents ont déjà été produits et qu’en tout état de cause ils ne sont pas requis par la loi. La Cour européenne a constaté que le défaut d’exécution était plutôt dû à un problème plus général d’absence de recours effectif (violation de l’article 13). L’affaire concerne enfin l’atteinte au droit des requérants au respect de leurs biens en raison de l’exécution tardive de l’arrêt d’août 2001, dans sa partie allouant des dommages et intérêts à l’église requérante au titre du préjudice résultant du refus d’enregistrement par les autorités (violation de l’article 1 du Protocole n° 1).

Mesures de caractère individuel :

1) Affaire Eglise Métropolitaine de Bessarabie et autres

                   a) Enregistrement de l'Eglise requérante et de ses entités et protection des activités religieuses: A la suite de l'arrêt de la Cour européenne, les autorités moldaves ont reconnu et enregistré l'Eglise requérante le 30/07/2002, conformément à la loi moldave sur les cultes, telle qu'amendée le 12/07/2002. L'Eglise a ainsi acquis la personnalité juridique lui ouvrant notamment la possibilité de revendiquer son droit de propriété. Ceci a également permis d’engager le processus d’enregistrement des différentes composantes de l’Eglise requérante.

Selon les informations fournies par les autorités moldaves en mars 2006, 86 paroisses, 9 monastères, 2 missions sociales avec 73 filiales, 2 séminaires (l'un théologique et l'autre monacal) et une école des arts ecclésiastiques avaient été jusque-là enregistrés. L'Eglise disposait à cette date de plus de 120 presbytères et d'au moins 160 prêtres.

Toutefois, entre 2004 et 2006, l'Eglise requérante a informé à plusieurs reprises le Comité et le Secrétariat de ce qu'elle avait rencontré des obstacles pour l'enregistrement de ses paroisses auprès de l'autorité compétente (le Service d'Etat pour les affaires des cultes de l’époque) essentiellement du fait que ces paroisses portaient le même nom que les paroisses d'un autre culte religieux, ainsi que du fait des refus allégués de certaines autorités locales de délivrer aux paroisses des certificats formels requis pour leur enregistrement.

En réponse à ces griefs, les autorités moldaves ont fourni des explications, indiquant que certaines demandes d'enregistrement avaient été effectivement rejetées au motif qu'il existait déjà une communauté portant le même nom. Selon l'article 66 du Code civil, une personne morale ne peut pas être enregistrée, si son nom coïncide avec celui d'une personne morale déjà enregistrée. Le refus d'enregistrer ces paroisses a fait l'objet d'un appel mais sans succès. A présent, un procès civil d'ordre patrimonial oppose les communautés religieuses en question. De plus, le refus d'enregistrer un épiscopat était dû au fait que la création de nouvelles éparchies relève de la compétence de l'Eglise Orthodoxe Roumaine. Aussi, l'Archidiocèse Orthodoxe de Cainari n'a pas pu être enregistré parce qu'aucune communauté n'était enregistrée sur le territoire concerné (l'archidiocèse est une circonscription ecclésiastique qui réunit plusieurs paroisses appartenant à la même éparchie).

Fin 2006, quelques dossiers d'enregistrement ont encore été rejetés pour absence d'autorisation de l'administration publique locale. Les autorités moldaves ont indiqué que, 22 paroisses de l'Eglise Métropolitaine de Moldova ont demandé à être transférées à l'Eglise Métropolitaine de la Bessarabie. Ces paroisses doivent être enregistrées comme entités nouvelles du fait que la législation en vigueur ne s'applique pas aux situations de ce type. Huit de ces paroisses, attendaient à l’époque d'être enregistrées.

Selon les informations fournies au Comité par la délégation moldave, 293 entités de l'Eglise requérante avaient été enregistrées au 01/03/2007. Quelques entités qui avaient formulé des griefs sont désormais enregistrées tandis que les procédures pour les autres sont encore pendantes pour diverses raisons (par exemple, certaines entités portent le même nom que les personnes juridiques existantes).

En 2007 et 2008 l’église requérante s’est plainte des problèmes persistants concernant l’enregistrement de ses paroisses et d’une campagne hostile à son encontre à l’initiative des autorités étatiques (lettres des 16/02/2007, 14/10/2007 et 09/01/2008).

Dans une lettre du 3/03/2008, les autorités moldaves ont fourni des informations concernant la mise en place du nouveau système d’enregistrement au sein du Ministère de la Justice, ainsi que certaines explications concernant les allégations d’une campagne négative des autorités à l’encontre de l’Eglise requérante et ses membres.


Lors des derniers examens de l’affaire (octobre 2007 et mars 2008), les Délégués ont pris note de la persistance de griefs concernant l’enregistrement des entités locales de l’Eglise requérante. Les Délégués ont également pris note de leurs griefs relatifs à la continuation d’une campagne négative des autorités à l’encontre de l’Eglise et ses membres, nonobstant son enregistrement et l’entrée en vigueur de la nouvelle loi. Par ailleurs, ils ont pris note que les informations fournies par les autorités moldaves répondaient à certains des griefs soulevés (voir les décisions adoptées en 1007e et 1020e réunion).

Des informations sont attendues sur la situation actuelle concernant ces questions.

b) Autres questions : En septembre 2003, le Comité des Ministres a été informé d'une procédure pendante devant les tribunaux nationaux, engagée en février 2002 par l'Eglise requérante. Cette dernière contestait l'approbation par les autorités moldaves, par décision du 26/09/2001, d'un amendement au statut de l'Eglise métropolitaine de Moldova en vertu duquel cette dernière déclarait être le successeur légal de l'Eglise métropolitaine de Bessarabie (qui a cessé son activité en 1944). L'Eglise requérante soutenait que cette approbation portait atteinte à ses droits de propriété. Le 02/02/2004, la Cour suprême, siégeant en tant que tribunal de première instance, a autorisé le recours de l'Eglise requérante et a annulé la décision du 26/09/2001 du Gouvernement. Le 14/04/2004, l'Assemblée plénière de la Cour suprême a rejeté l'appel formé par le représentant de l'Eglise requérante contre le raisonnement de cette décision et a confirmé sa décision du 02/02/2004. Cette décision semble maintenir pour l'Eglise requérante la possibilité d'avoir un accès effectif à un tribunal pour revendiquer son droit de propriété dans le cadre de toute procédure ultérieure.

Il convient de noter qu’en 2004 l'Eglise requérante a déposé une nouvelle requête portant sur ces questions devant la Cour européenne. De surcroît, dans ses lettres du 16/02/2007 et 09/01/2008, l'Eglise requérante allègue que ses propriétés ont été illégalement confisquées et nationalisées. L’Eglise se plaint par ailleurs de ce que le Gouvernement moldave refuse de lui restituer ses archives. 

Dans sa dernière décision, lors de la 1020e réunion, le Comité a instamment invité les autorités moldaves à résoudre rapidement les questions en suspens et à fournir des détails sur les recours à la disposition des requérants en ce qui concerne leurs différents griefs.

2) Affaire Biserica Adevărat Ortodoxă din Moldova et autres : L’église requérante a été enregistrée le 16/08/2007.

Evaluation : Aucune autre mesure individuelle n’est nécessaire.

Mesures de caractère général :

                   1) Publication : La version originale de l'arrêt de la Cour européenne et sa traduction officielle ont été publiées le 09/07/2002 au Journal Officiel de la Moldova. L’arrêt dans l’affaire Biserica Adevărat Ortodoxă din Moldova et autres a été publié au Journal Officiel et diffusé sur le site internet du Ministère de la Justice (www.justice.md).

                   2) Amendements législatifs : La législation moldave sur les cultes a été amendée par la loi n° 1220-XV, entrée en vigueur le 12/07/2002. Cette loi a abrogé le Règlement du Gouvernement de 1994 relatif à certaines exigences en matière d’enregistrement, notamment à la nécessité d’obtenir au préalable l’approbation de l’autorité locale. L'article 325 du Code de procédure civile a également été amendé de manière à prévoir la réouverture de procédures civiles internes à la suite de violations de la Convention constatées par la Cour européenne. Ces amendements ont toutefois été jugés insuffisants pour prévenir d'autres violations similaires dans la mesure où ils ne reflètent pas l'exigence de proportionnalité inhérente à la Convention et ne prévoient pas avec suffisamment de clarté le droit pour une communauté religieuse d'introduire une action en justice pour contester une décision en matière d'enregistrement.

Entre mars 2003 et février 2006 six projets de loi ont été soumis au Comité. Ces projets ont été évalués par le Secrétariat et par des experts indépendants, mandatés par le Conseil de l’Europe, et discutés ensuite à l’occasion des rencontres de travail avec les représentants du Ministère de la Justice moldave, des experts et du Secrétariat, ainsi que des représentants de divers cultes religieux. Les problèmes de ces projets de loi ont été examinés en détail et des solutions concrètes ont été proposées.

En mars 2006, lors de la 960e réunion, le Comité des Ministres a adopté la résolution intérimaire ResDH(2006)12. Il a invité instamment les autorités moldaves à adopter rapidement la législation nécessaire et à prendre les mesures requises pour sa mise en œuvre, en vue de se conformer aux exigences de la Convention telles qu'établies dans le présent arrêt sans retard supplémentaire. De plus, il a encouragé les autorités moldaves à prendre en compte les conclusions et les recommandations fournis par les experts du Conseil de l'Europe, en vue de conclure d'une manière satisfaisante la reformé en cours.

Une nouvelle loi sur les cultes a été adoptée par le Parlement le 11/05/2007.

En juin 2007, le Comité a regretté que le texte de la loi finalement adopté ne lui avait pas été communiqué et a déclaré qu'il s'attendait à ce que cette loi ait pris en compte les constats de la Cour européenne, ainsi que les différentes expertises faites par le Secrétariat et les experts du Conseil de l'Europe. Le Comité a également pris note des assurances données par les autorités moldaves à ce sujet (voir décision adoptée en 997e réunion).


Lors des derniers examens de l’affaire en octobre 2007 et mars 2008 (1007e et 1020e réunions), le Comité des Ministres a noté que même si la nouvelle loi comportait de nombreuses améliorations par rapport aux projets de lois précédents, certaines recommandations des experts du Conseil de l’Europe et préoccupations du Comité des Ministres n’avaient toujours pas été prises en considération (en particulier, le maintien de l’exigence d’un minimum de 100 membres pour obtenir l’enregistrement d’un culte religieux, la définition imprécise dans la loi des procédures d’enregistrement applicables). Le Comité a également souligné l’importance qui s’attache à ce que les propositions relatives à la mise en œuvre de la nouvelle loi (prévues pour le 17/11/2007) soient conçues de manière à assurer que la nouvelle réglementation soit pleinement conforme à la Convention et que les recours judiciaires prévus soient pleinement efficaces.

Certaines informations concernant la mise en place du nouveau système d’enregistrement ont été fournies par les autorités moldaves (voir notamment la lettre du 3/03/2008). Selon ces informations, le premier enregistrement devrait pouvoir intervenir en avril/ mai 2008. A ce jour aucun exemple d’enregistrement d’un culte religieux en vertu du nouveau système n’a été fourni par les autorités.

Le Secrétariat a par la suite été en contact avec les autorités moldaves pour discuter des différentes questions en suspens, également réitérées dans une lettre du 07/02/2008. Des discussions avec les autorités moldaves sont en cours afin d’organiser prochainement une réunion de travail pour clarifier ces questions.

Dans leur dernière décision, lors de la 1020e  réunion, les Délégués ont pris note des informations fournies par les autorités moldaves sur la mise en œuvre de la nouvelle loi, réitérant néanmoins leur préoccupation du fait que plusieurs questions restaient en suspens, notamment celles relatives au nombre élevé requis pour l’enregistrement d’un culte religieux, ainsi qu’à la mise en œuvre pratique du nouveau système d’enregistrement.

Des informations sont attendues sur les différentes questions en suspens, et en particulier sur la protection juridique octroyée par le nouveau cadre juridique aux cultes religieux ayant moins de 100 membres, ainsi que des exemples d’enregistrement des cultes selon la procédure mise en place par la nouvelle loi sur les cultes.

Suite à l’adoption de la nouvelle loi sur les cultes, le Règlement de 1994 qui contenait des dispositions concernant l'enregistrement, a été annulé.

3) Exécution tardive des décisions judiciaires définitives : L’affaire Biserica Adevărat Ortodoxă din Moldova et autres est à rapprocher du groupe Luntre et autres (rubrique 4.2).

Les Délégués,

1.             prennent note des informations additionnelles fournies par les autorités moldaves sur les questions en suspens relatives aux mesures générales, y compris le premier exemple concret d’enregistrement d’un culte religieux selon le nouveau système ;

2.             relèvent néanmoins la nécessité de clarifier un certain nombre d’aspects notamment ceux relatifs aux droits des groupements ou des cultes religieux qui ne remplissent pas les critères fixés par la nouvelle  loi pour pouvoir obtenir leur enregistrement ;

3.             rappellent, quant aux différents griefs soulevés par les requérants, que des explications ont été fournies par les autorités moldaves, mais que certaines questions mériteraient toujours d’être clarifiées, notamment en ce qui concerne les recours qui sont ouverts aux requérants au niveau national ;

4.             encouragent l’initiative d’organiser rapidement des rencontres entre le Secrétariat et les autorités moldaves afin de clarifier les questions en suspens, en temps utile pour la prochaine réunion Droits de l’Homme du Comité de Ministres ;

5.             décident de reprendre l’examen de ces affaires lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), en tenant compte des conclusions qui pourraient se dégager de ces rencontres.

15084/03           Bimer S.A., arrêt du 10/07/2007, définitif le 10/10/2007

L’affaire concerne la violation du droit de de la société requérante au respect de ses biens du fait de l’illégalité d’une décision du Bureau des douanes visant à empêcher la société requérante de continuer à exploiter son commerce de produits détaxés et à mettre fin aux autorisations lui permettant d’exercer une activité commerciale à un endroit désigné, décision prise sur la base d’un amendement au Code des douanes. La Cour d’appel de Moldova a considéré que cette décision était contraire à l’article 43 de la loi sur les investissements étrangers dans la mesure où la société requérante relevait de cette législation qui établissait un régime spécial en la matière. Cependant, cette décision a été ultérieurement cassée par la Cour Suprême au motif que la décision en question se limitait à un lieu précis, ne privait pas la société requérante de la possibilité d’exercer d’autres activités à d’autres endroits et n’affectait donc pas son droit au respect de ses biens.

La Cour européenne a estimé que la décision constituait une ingérence dans le droit au respect des biens de la société requérante et que rien ne permettait de remettre en cause l’interprétation de la Cour d’appel (violation de l’article 1 du Protocole 1).


Mesures de caractère individuel : Le préjudice matériel subi par la société requérante résultant de la violation constatée a été indemnisé par la Cour européenne par le biais de la satisfaction équitable (520 000 euros).

Mesures de caractère général :

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées afin de mettre la réglementation du Bureau des douanes régissant le commerce des produits détaxés en conformité avec l’article 43 de la loi sur les investissements étrangers et les exigences de la Convention. Des informations sont également attendues sur la publication et la diffusion de l’arrêt de la Cour européenne, en particulier auprès des autorités douanières.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire, ainsi que sur les mesures générales.

20289/02           Guţu, arrêt du 07/06/2007, définitif le 07/09/2007

L’affaire concerne un certain nombre de violations en relation avec l’arrestation et la détention illégales de la requérante, cette dernière ayant refusé le 30/12/2001 de se rendre au commissariat de police avec son fils, soupçonné de vol, ainsi qu’avec la procédure ultérieure qui a abouti à sa condamnation pour désobéissance à un ordre légal de la police.

Même si l’article129 du Code de procédure pénale prévoit la possibilité d’emmener de force une personne en garde à vue, il en établit aussi les conditions, notamment le refus de la personne de paraître devant l’autorité d’investigation après avoir été convoquée en bonne et due forme dans le cadre d’une enquête pénale déjà ouverte. Ces conditions n’ayant pas été remplies, la Cour européenne a considéré que l’arrestation et la détention de la requérante étaient illégales (violation de l’article 5§1).

La Cour européenne a également estimé que l’entrée des policiers dans la maison de la requérante avait été contraire à la loi, car aucune des situations énoncées dans la loi sur la police du 18/12/1990 n’était applicable aux circonstances de l’espèce (violation de l’article 8).

La Cour européenne a en outre relevé l’absence de recours effectif au titre des griefs de la requérante en vertu des articles 5 et 8, l’article 4 de la loi n° 1545 ne permettant un droit à compensation qu’en cas d’acquittement (violation de l’article 13).

Enfin, la Cour européenne a constaté une violation du droit de la requérante à un procès équitable en raison de l’absence de convocation à l’audience en appel s’agissant des allégations de désobéissance aux forces de l’ordre portées contre elle (violation de l’article 6§1).

Mesures de caractère individuel : La requérante n’est plus détenue. La Cour européenne a octroyé à la requérante une satisfaction équitable au titre du préjudice moral subi. Il résulte de l’arrêt que le 25/11/2002, le Parquet a décidé de ne pas poursuivre les officiers de police impliqués dans la mesure où la requérante avait été condamnée par un arrêt définitif pour désobéissance à des ordres légaux de la police (§22).

Au vu des constats de la Cour européenne, des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées, soit d’ordre pénal ou disciplinaire, à l’encontre des officiers de police à l’origine des violations constatées.

Mesures de caractère général :

1) Violation des articles 5§1 et 8 :Il apparaît que dans cette affaire particulière, les officiers de police ont agi en méconnaissance du droit applicable qui n’a pas été remis en cause par la Cour européenne.

Cependant, des clarifications seraient utiles sur les dispositions applicables en matière d’arrestations de personnes soupçonnées d’avoir commis une infraction administrative. Des informations sont également attendues sur les mesures prises ou envisagées à l’égard de la police, en particulier des mesures de formation sur les exigences de la Convention et en matière de droits de l’homme dans leur pratique quotidienne, sur le renforcement de leur responsabilité disciplinaire etc...

2) Violation de l’article 6§1 : Voir l’affaire Ziliberberg (rubrique 5.1).

3) Violation de l’article 13 : Voir l’affaire Corsacov (rubrique 4.1).

4) Publication et diffusion de l’arrêt de la Cour européenne : La publication ainsi qu’une large diffusion sont requises à toutes les autorités compétentes, par le biais de lettres circulaire et d’instructions détaillées émanant des autorités hiérarchiques, en particulier le Ministère de l’Intérieur et le Bureau du Parquet, afin d’expliquer à tous les subordonnés les obligations découlant de cet arrêt et ses effets dans la pratique quotidienne. Une note explicative de la Cour suprême à toutes les juridictions inférieures serait également utile.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’information à fournir sur les mesures individuelles et générales.


                       - Affaire concernant la liberté d’expression

41827/02          Kommersant Moldovy, arrêt du 09/01/2007, définitif le 09/04/2007

Cette affaire concerne la violation du droit à la liberté d’expression de la société requérante en raison d’une décision du tribunal économique de Moldova en novembre 2001 ordonnant la fermeture de son journal (violation de l’article 10).

Cette décision était basée sur le fait qu’entre juin et septembre 2001, la société requérante avait publié dans son journal une série d’articles critiquant les autorités moldaves pour leurs actions à l’égard de la République moldave de Transnistrie (« la RMT »), sécessionniste, et reproduisant de vives critiques exprimées par certains dirigeants de « RMT » et de la Fédération de Russie envers le gouvernement moldave.

La Cour européenne a observé que, dans leurs décisions, les juridictions internes n’avaient pas examiné la question de la nécessité de l’ingérence dans les droits de la société requérante à laquelle elles se sont livrées. Elle a noté en particulier que celles-ci n’avaient pas précisé quels passages des articles litigieux posaient problème et en quoi ils mettaient en péril la sûreté nationale et l’intégrité territoriale du pays ou encore diffamaient le président et le pays. Ces juridictions avaient seulement recherché si les articles pouvaient passer pour des comptes rendus honnêtes de déclarations publiques dont la société requérante ne pouvait, aux termes du droit interne, être tenue pour responsable. La Cour a estimé que les juridictions internes n’avaient pas fourni de motifs pertinents et suffisants pour justifier l’ingérence en question et n’a pas été convaincue qu’elles avaient « appliqué de critères conformes aux principes consacrés par l’article 10 » ou qu’elles « se sont fondées sur une appréciation acceptable des faits pertinents ».

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a indemnisé le préjudice matériel et moral subi par la société requérante. De plus, la société requérante a par la suite été à nouveau enregistrée sous le nom « Kommersant-Plus » et elle a continué à publier son journal après seulement une courte pause.

Communication de la société requérante : Le représentant de la société requérante a indiqué que le 29/05/2007, soit environ un mois et demi après que l’arrêt de la Cour européenne était devenu définitif, la société requérante avait demandé la réouverture de la procédure sur la base de l’article 450 g) du code de procédure civile moldave qui prévoit une telle possibilité suite à un arrêt de la Cour européenne. Cette demande a cependant été rejetée par la Cour suprême de justice le 4/10/2007 au seul motif que cette demande avait été introduite après l’expiration du délai de trois mois prévu par le Code. Une telle décision semble contredire la précédente décision du 29/11/2006 dans laquelle la Cour suprême avait indiqué que le délai de trois mois ne devait commencer à courir qu’une fois l’arrêt de la Cour européenne devenu définitif. Le 31/11/2007, cette communication du représentant de la société requérante a été transmise aux autorités moldaves pour commentaire.

Des informations  sont attendues à ce titre et en particulier sur la possibilité pour le requérant d’obtenir la réouverture de la procédure au niveau national ainsi que sur les mesures visant à assurer une interprétation uniforme et claire de l’article 450 g) du Code de procédure civile (modification de la jurisprudence interne ou des dispositions législatives concernées).

Mesures de caractère général : La violation constatée en l’espèce semble résider dans le fait que les juridictions internes n’ont pas fourni des motifs suffisants pour justifier ses décisions, quand elles ont décidé la nécessité de l’ingérence à la liberté d’expression. Un changement de jurisprudence interne sur ce point apparaît donc nécessaire.

Informations fournies par les autorités moldaves : la version traduite de l’arrêt de la Cour européenne a été publiée au Journal officiel ainsi que sur le site Internet du Ministère de la Justice (www.justice.md).

Des informations complémentaires sont attendues sur les autres mesures prises ou envisagées pour prévenir de nouvelles violations similaires.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point à leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

                       - Affaires concernant l’annulation de décisions judiciaires nationales définitives

19960/04          Popov n° 2, arrêt du 06/12/2005, définitif le 06/03/2006

53773/00          Istrate, arrêt du 13/06/2006, définitif le 13/09/2006

6923/03            Melnic, arrêt du 14/11/2006, définitif le 14/02/2007

Ces affaires concernent une violation du droit des requérants à un procès équitable et au respect de leurs biens du fait de l’annulation de jugements définitifs favorables aux requérants). La Cour européenne a constaté qu’en prolongeant le délai imparti pour le dépôt des demandes de révision, sans aucune motivation, et en permettant d’obtenir un nouvel examen des affaires au lieu d’une véritable révision, les juridictions moldaves n’avait pas respecté le principe de sécurité juridique ce qui avait constitué une ingérence disproportionnée dans le droit au respect de leurs biens (violations de l’article 6§1 et de l’article 1 du Protocole N° 1.

L’affaire Istrate concerne en outre la non-exécution partielle d’une décision judiciaire définitive (violation de l’article 6§1).


Mesures de caractère individuel: Dans les affaires Istrate et Melnic, la Cour européenne a octroyé une satisfaction équitable au titre du préjudice matériel (équivalant aux sommes octroyées par les juridictions nationales) et au titre du préjudice moral.

Informations fournies par les autorités moldaves en ce qui concerne l’affaire Popov : Dans le cadre de la réouverture de la procédure, le tribunal de première instance a tranché en faveur du requérant, en lui attribuant le titre de propriété en litige. Cette décision a été attaquée en appel, et est toujours pendante devant la Cour suprême de Justice. L’exécution de cette décision a été suspendue jusqu’à ce que la Cour suprême de Justice rende son arrêt.

Des informations sont attendues sur l’état actuel de la procédure devant la Cour suprême de Justice.   

Mesures de caractère général:

Informations soumises par les autorités moldaves : L'arrêt de la Cour européenne a été traduit et publié au Journal Officiel de la République de Moldova (Monitorul Oficial) ainsi que sur le site officiel du Ministère de la Justice (www.justice.md) et il a été diffusé aux autorités concernées.

Il semblerait que le nouveau Code de procédure civile soit entré en vigueur le 12/06/2003. Par conséquent, reste à évaluer la question de savoir dans quelle mesure les nouvelles dispositions respectent les exigences de la Convention.

Des informations sont par conséquent attendues sur les nouvelles règles régissant l’extension des délais pour l’introduction de recours en cassation. Des informations sont également attendues sur les mesures prises ou envisagées pour s’assurer que les juges respectent leurs obligations en vertu des dispositions concernées.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

14385/04           Oferta Plus SRL, arrêt du 19/12/2006, définitif le 23/05/2007

Cette affaire concerne la violation du droit de la société requérante à un procès équitable et au respect de ses biens en raison de la non-exécution pendant trois ans d’un arrêt définitif rendu en sa faveur, puis de l'extension sans justification du délai pour faire appel au profit de la partie adverse (violations de l’article 6§1 et de l’article 1 du Protocole n° 1). La Cour européenne a constaté qu’en prolongeant le délai imparti pour le dépôt de la demande de révision, sans aucune motivation, et en permettant d’obtenir un nouvel examen de l’affaire au lieu d’une véritable révision, la Cour suprême de Justice n’avait pas respecté le principe de sécurité juridique et avait constitué une ingérence disproportionnée dans le droit du requérant au respect de ses biens.

Cette affaire concerne également la violation du droit de recours individuel dans le cadre d’une procédure pénale contre le directeur général de la société requérante et, par la suite, l’impossibilité pour le représentant de la société requérante à communiquer avec lui pendant sa détention sans être séparé par une cloison en verre (double violation de l’article 34). A cet égard, la Cour a considéré que, sur la base des documents produits, il y avait suffisamment d’éléments suggérant fortement que la procédure pénale contre le directeur général de la société visait à décourager la société de poursuivre la présente affaire devant la Cour européenne. Elle a en outre estimé qu’il était impossible pour ce dernier de communiquer en toute confidentialité avec son avocat au sujet de questions concernant la requête devant la Cour européenne.

Mesures de caractère individuel :

1) Violations de l’article 6§1 et de l’article 1 du Protocole n° 1 : La Cour européenne s’est prononcée sur la question de la satisfaction équitable par arrêt du 12/02/2008. Cet arrêt n’est pas encore définitif.

Informations fournies par les autorités moldaves : la Cour suprême de justice a accepté la demande de révision formulée par la société requérante, a annulé tous les arrêts rendus après la réouverture de la procédure et a confirmé l’arrêt initial rendu en faveur de la société requérante. La Cour suprême a accordé 16 000 MDL à la société requérante au titre du préjudice moral. Cette décision est devenue définitive le 29/10/2007.

• Soumissions de la société requérante : elle s’est plainte de l’inexécution à ce jour de l’arrêt de la Cour suprême, et par conséquent de l’arrêt initial rendu en sa faveur par le tribunal de droit économique de Chisinau lui octroyant 20 millions de MDL.

Des informations sont attendues à cet égard.

2) Violations de l’article 34: Le directeur général de la société requérante a été libéré en novembre 2006.

• Informations fournies par les autorités moldaves : Le directeur général de la société requérante a été acquitté en première instance le 28/06/2007. Le 12/10/2007, la Cour d’appel de Chisinau a rejeté le pourvoi introduit par le Parquet. Cet arrêt n’est cependant pas définitif et pourrait faire l’objet d’un pourvoi en cassation.

Des informations sont attendues à ce sujet.


Mesures de caractère général :

1) Violations de l’article 6§1 et de l’article 1 du Protocole n° 1 : Cette affaire est à rapprocher de l’affaire Luntre (arrêt du 15/06/2004, en rubrique 4.2 à la 997e réunion), ainsi que de l’affaire Popov N° 2 (arrêt du 06/12/2005, en rubrique 4.2) pour lesquelles les autorités moldaves sont en train d’adopter des mesures afin de prévenir des nouvelles violations similaires.

2) Violations de l’article 34 : cette affaire présente des similarités avec l’affaire Boicenco (arrêt du 11/07/2006, en rubrique 4.2).

Cependant, les autorités moldaves sont invitées à fournir des explications sur les raisons de ces violations et des informations sur les mesures prises ou envisagées pour prévenir la répétition de violations similaires. En tout cas, la publication et la diffusion de l’arrêt de la Cour européenne sont attendues.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

- Affaires concernant le manquement ou le retard substantiel de l’administration à se conformer à des arrêts internes définitifs

2916/02            Luntre et autres, arrêt du 15/06/2004, définitif le 15/09/2004

29808/02          Avramenko, arrêt du 06/02/2007, définitif le 06/05/2007

31530/03          Baibarac, arrêt du 15/11/2005, définitif le 15/02/2006

18872/02+        Bocancea et autres, arrêt du 06/07/2004, définitif le 06/10/2004

19981/02           Botnari, arrêt du 19/06/2007, définitif le 19/09/2007

39745/02          Cooperativa Agricola Slobozia-Hanesei, arrêt du 03/04/2007, définitif le 03/07/2007

18882/02          Croitoru, arrêt du 20/07/2004, définitif le 20/10/2004

46581/99          Daniliuc, arrêt du 18/10/2005, définitif le 18/01/2006

75975/01          Draguta, arrêt du 31/10/2006, définitif le 31/01/2007

20940/03          Dumbraveanu, arrêt du 24/05/2005, définitif le 24/08/2005

20567/02          Lozan et autres, arrêt du 10/10/2006, définitif le 10/01/2007

3021/02            Lungu, arrêt du 09/05/2006, définitif le 09/08/2006

3417/02            Lupacescu et autres, arrêt du 21/03/2006, définitif le 21/06/2006

1115/02            Mazepa, arrêt du 10/05/2007, définitif le 10/08/2007

14914/03          Moisei, arrêt du 19/12/2006, définitif le 19/03/2007

9898/02            Pasteli et autres, arrêt du 15/06/2004, définitif le 15/09/2004

74153/01          Popov, arrêt du 18/01/2005, définitif le 18/04/2005 et of 17/01/2006, définitif le 17/04/2006

49806/99          Prodan, arrêt du 18/05/2004, définitif le 10/11/2004 et of 25/04/2006, définitif le 25/07/2006 - Radiation

20864/03          Scutari, arrêt du 26/07/2005, définitif le 26/10/2005

73562/01+        Sîrbu et autres, arrêt du 15/06/2004, définitif le 10/11/2004

22970/02          ŢÎmbal, arrêt du 14/09/2004, définitif le 14/12/2004

27568/02           Ungureanu, arrêt du 06/09/2007, définitif le 06/12/2007

Ces affaires concernent la violation du droit des requérants à une protection judiciaire effective en raison de la non-exécution prolongée de décisions judiciaires définitives en leur faveur, rendues entre 1995 et 2000 (violations de l'article 6§1). Elles concernent en outre une atteinte en conséquence au droit au respect de leurs biens (violations de l'article 1 du Protocole n° 1) et l’absence des recours effectifs en cas d’inexécution (violations de l’article 13). La question de l’absence de recours effectif a déjà été traitée lors de la table ronde tenue à Strasbourg (voir ci-dessous). La Cour européenne a indiqué à cet égard qu'une autorité de l'Etat ne saurait prétexter du manque de ressources pour ne pas se conformer à une décision judiciaire.

Les affaires Prodan et Popov concernaient l'inexécution de décisions judiciaires rendues contre une partie privée et ordonnant l'expulsion des locataires et la restitution des maisons concernées aux requérants. L'affaire Prodan concerne également la non-exécution d'une décision ordonnant le remboursement à la requérante de la valeur marchande de cinq des appartements ainsi que l'expulsion des locataires du 6e appartement.

Mesures de caractère individuel : Les diverses décisions judiciaires nationales ont été finalement exécutées après communication des requêtes devant la Cour européenne au gouvernement défendeur, à l'exception des affaires Prodan et Popov.

            1) Affaire Prodan : Les décisions de 1997 et 2000 ont été partiellement exécutées, après communication de la requête par la Cour européenne au gouvernement défendeur. La Cour européenne a réservé la question de l'indemnisation du préjudice résultant de la non-restitution du 6e appartement à la requérante. Par lettre du 22/11/2005, la délégation a informé le Secrétariat de la conclusion d'un règlement amiable avec la requérante le 06/05/2004 selon lequel cette dernière a accepté la somme de 510 000 MDL au lieu de la restitution du 6e appartement. La Cour européenne a radié cette affaire de son rôle.

            2) Affaire Popov : Suite à une demande de révision déposée par les occupants de la maison, la Cour d'appel a annulé, le 26/05/2004, la décision finale du 05/11/1997 et a décidé de rouvrir la procédure qui était toujours pendante à la date de l'arrêt de la Cour européenne.


La réouverture des procédures a par la suite été considérée par la Cour Européenne en violation avec l’article 6 et l’article 1 du Protocole n° 1 (voir l’affaire Popov n° 2 (n° 19960/04) rubrique 4.2).

Lors de la 1013e réunion (décembre 2007) les autorités ont informé le Comité du fait que la Cour suprême avait confirmé la décision définitive initiale, par arrêt du 17/01/007. Les Délégués ont par conséquent invité les autorités moldaves à fournir les informations nécessaires relatives à la mise en œuvre de cet arrêt.

Des informations sont attendues sur les mesures prises par les autorités pour la mise en œuvre de cet arrêt. Mesures de caractère général :

            1) Mesures législatives :

Informations soumises par les autorités moldaves : Le problème de la non-exécution des décisions judiciaires est traité dans le cadre de la réforme globale en cours du système judiciaire. En particulier, en 2002 et 2003 quatre nouveaux codes (le Code civil, le Code pénal, le Code de procédure civile et le Code de procédure pénale) ont été adoptés et sont entrés en vigueur. Ces codes sont néanmoins en train d'être modifiés et un groupe de travail a été créé à cet égard. Un nouveau Code sur la procédure d'exécution a été adopté le 24/12/2004 et il est entré en vigueur le 01/07/2005. Les articles 243 et 246 du Code de procédure civile ont également été amendés par la suite.  

Plus particulièrement, les requérants qui ont eu gain de cause devant un tribunal national peuvent introduire une action en justice contre les personnes ou les autorités responsables de l'exécution tardive ou de la non-exécution d'une décision judiciaire définitive en invoquant directement les dispositions de la Convention ou l'article 20 de la Constitution moldave. De plus, l'article 7 du nouveau Code de procédure civile autorise les juridictions nationales à ouvrir un procès civil sur requête d'une personne qui réclame la protection de ses droits et libertés fondamentales. Dans le cadre de ce type d'actions, les requérants ont le droit de demander au tribunal la réparation du préjudice matériel et moral ainsi que le remboursement des frais de justice. A cet égard, plusieurs décisions judiciaires ont déjà été prononcées à l'encontre le Ministère des finances et une à l'encontre d'une mairie. Les sommes allouées par décision judiciaire peuvent également être indexées et les requérants peuvent exiger la réparation pour perte de profit.

Informations attendues: Une copie des dispositions pertinentes et leur traduction ainsi que les décisions judiciaires mentionnées ci-dessus.

            Table ronde à haut niveau tenue à Strasbourg : Etant donné l’importance de ce problème et le nombre de pays affectés, il a été décidé de tenir une table ronde à haut niveau, avec des représentants des autorités concernés par cette question, c'est-à-dire en ce qui concerne la Moldova les représentants des Ministères de la Justice et des Finances, ainsi que des représentants du Conseil de l’Europe pour discuter d’un point de vue comparatif des réformes adoptées ou en cours d’adoption dans certains pays en vue de permettre aux autorités compétentes d’établir des priorités et de préparer des plans d’action. La Table ronde a été organisée par le service de l’Exécution des arrêts dans le contexte du nouveau programme d’assistance du comité des Ministres dans le cadre de la surveillance de l’exécution des arrêts. Les discussions approfondies et constructives ont permis d’identifier les principaux problèmes restant à résoudre et ont conduit à l’approbation d’un certain nombre de propositions de réformes complémentaires en vue d’assurer le respect par l’Etat de l’exécution des arrêts internes. Les conclusions de la Table ronde figurent sur le site Internet du service de l’exécution : http://www.coe.int/t/e/human_rights/execution/ConclusionsRoundTableRussiaJune07.doc.

Lors de leur 1013e réunion, les Délégués ont pris note des réponses positives données par les autorités moldaves aux questions abordées lors de la Table Ronde (Strasbourg, 21-22 juin 2007) sur le défaut d’exécution des décisions de justice internes par les autorités publiques. Ils les ont également invitées à poursuivre la réflexion sur d’autres mesures utiles pour résoudre rapidement le problème général de l’inexécution ou du retard dans l’exécution des décisions judiciaires internes et de tenir le Comité des Ministres informé des résultats de cette réflexion.

Des informations sont attendues sur le suivi donné par les autorités moldaves aux conclusions de cette Table ronde.

            3) Autres fora de réflexion au sein du Conseil de l’Europe: Un programme joint a été lancé par la Commission européenne et le Conseil de l’Europe pour la Moldova (2006-2009) pour accroître l’indépendance, la transparence et l’efficacité du système judiciaire. La première visite d’évaluation des experts a eu lieu les 6 et 7/11/2007 en vue d’évaluer la situation concernant l’exécution des décisions judiciaires. Un ensemble de mesures sera par la suite proposé en vue d’améliorer la situation.

Dans sa dernière décision (1013e réunion), le Comité a pris note du Programme commun initié par la Commission européenne et le Conseil de l’Europe pour la Moldova 2006-2009, dans lequel une place essentielle est accordée à la question de l’absence d’exécution des décisions judiciaires, et ont invité les autorités à fournir des informations sur la mise en œuvre de ce programme.

Des informations complémentaires à ce sujet seraient utiles.


            4) Publication et diffusion : Les arrêts de la Cour européenne ont été traduits et publiés dans le Monitorul Oficial du 16/11/2004 et 31/01/2005. Ils ont également été publiés dans le Bulletin de la Cour Suprême de Justice de la République de Moldova.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces affaires :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard à leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures individuelles et générales, le cas échéant sur la base d’un mémorandum du Secrétariat.

- 1 affaire contre les Pays-Bas

1948/04            Salah Sheekh, arrêt du 11/01/2007, définitif le 23/05/2007

L'affaire concerne la décision des autorités nationales de rejeter la demande d'asile du requérant, un ressortissant somalien appartenant à la minorité Ashraf. Les autorités avaient estimé, sur la base des rapports réguliers sur le pays préparés par le Ministère des Affaires étrangères, que le requérant n'encourrait pas de risque réel d'être soumis à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention s'il retournait en Somalie et qu'un tel retour ne serait pas une épreuve d'une dureté inacceptable puisqu'il pouvait s'établir dans l'un des secteurs identifiés comme étant des « secteurs relativement sûrs de la Somalie ».

La Cour européenne a estimé qu'il n'existait aucune garantie que le requérant soit autorisé à rester sur le territoire, une fois installé dans « un secteur relativement sûr », et que les autorités néerlandaises n'avaient aucun moyen de vérifier si le requérant avait pu ou non s'installer dans un de ces secteurs en raison de l'absence de suivi des déboutés du droit d'asile. Au vu des positions prises par les autorités de facto des « secteurs relativement sûrs », la Cour européenne a estimé qu'il semblait peu probable que le requérant soit autorisé à s'y installer. La Cour a considéré qu'il existait un risque réel qu'il soit expulsé vers des secteurs jugés « non sûrs ».

La Cour européenne a en outre estimé que le traitement que le requérant avait subi avant son départ de Somalie pouvait être qualifié d'inhumain au sens de l'article 3 et que, dans l'hypothèse de son retour en Somalie, il n'y avait aucune garantie pour qu'il se retrouve dans une situation différente de celle qu'il avait fui.

Enfin, la Cour a estimé que la situation dont le requérant avait été victime n'avait pas été gérée de manière équitable, indiquant que pour ne pas rendre illusoire la protection offerte par l'article 3, il ne pouvait être exigé du requérant qu'il établisse l'existence d'autres facteurs spéciaux le concernant personnellement, autre que son appartenance à la minorité Ashraf, démontrant qu'il pouvait courir un risque. La Cour a donc conclu que l'expulsion du requérant vers la Somalie, telle qu'envisagée par les autorités néerlandaises, serait contraire à l'article 3.

Mesures de caractère individuel : Le 10/03/2006 a obtenu le droit d'asile sur la base de mesures provisoires de protection par catégorie, adoptée par le Ministre de la Justice le 24/06/2005 au titre des demandeurs d'asile en provenance de certaines zones de la Somalie. Suite à l’arrêt de la Cour européenne, le requérant s’est vu octroyer un titre de séjour en vertu de l’article 29§1d de la loi de 2000 sur les étrangers (danger de torture ou de traitements ou punitions inhumains ou dégradants).

Des informations sont attendues sur la durée de la validité du titre de séjour du requérant.

Mesures de caractère général : L’arrêt a reçu une large couverture médiatique nationale et dans la presse juridique. Outre la publication et des discussions à la radio, à la télévision et dans les journaux, le Nederlands Juristenblad (2007-7) y a consacré un numéro hors-série. L’arrêt a été publié et commenté dans de nombreux bulletins juridiques (AB Rechtspraak Bestuursrecht (2007,76), Jurisprudentie Vreemdelingenzaken (2007, 30) et NJCM- Bulletin (2007, pp. 111-113 et 179-194).

Selon une lettre adressée le 22/06/2007 par le Secrétaire d’Etat pour la Justice au Parlement, des modifications seront apportés à l’évaluation, dans le cadre de la procédure d’asile, de toute allégation d’éventuel traitement contraire à l’article 3. Il incombera toujours aux demandeurs de démontrer qu’ils ont été identifiés comme objets de persécution, mais la situation globale dans un pays, y compris les circonstances générales (c’est à dire notamment le fait d’appartenir à une minorité nationale) doit faire partie intégrante des critères d’évaluation. Par ailleurs il serait possible d’identifier des groupes de demandeurs d’asile pour lesquels un retour dans leur pays d’origine pourrait entrainer un risque de traitement contraire à l’article 3, au vu de la situation générale de leur pays.

Enfin, l’évaluation ne doit pas reposer uniquement sur les rapports pays-par-pays établis par le Ministère des affaires étrangères mais de plus en plus sur d’autres sources d’informations.


Des informations sont attendues sur les mesures complémentaires, prises ou envisagées par les autorités néerlandaises afin de prévenir de nouvelles violations similaires, en particulier sur les points suivants :

- la politique actuelle à l'égard des demandeurs d'asile somaliens dans la même situation que le requérant et notamment la question de savoir si la politique de protection provisoire liée à la catégorie adoptée par le Ministère de Justice le 24/06/2005 est toujours en vigueur ;

- des précisions supplémentaires sur les modifications envisagées de la politique d’asile à l’égard de l’évaluation des risques sous l’angle de l’article 3, notamment au vu du courrier du Secrétaire d’Etat pour la Justice du 27/06/2007 et sur toute modification éventuelle de la pratique judiciaire et administrative ou de la législation en la matière.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

- 1 affaire contre la Norvège

15472/02           Folgerø et autres, arrêt du 29/06/2007 – Grande Chambre

L’affaire concerne la violation du droit des requérants d’assurer une éducation et un enseignement pour leurs enfants conformément à leurs convictions religieuses et philosophiques en raison du refus des autorités de dispenser totalement leurs enfants du cours sur le christianisme, la religion et la philosophie (« le cours de KRL ») figurant impérativement au programme des dix ans de scolarité obligatoire en Norvège (violation de l’article 2 du Protocole n°1).

Les requérants sont tous membres d’une association humaniste norvégienne et à l’époque des faits leurs enfants étaient scolarisés dans l’enseignement primaire.

La Cour européenne a relevé que le cours de KRL avait été introduit à partir de 1997 en vue de promouvoir la compréhension et le respect des valeurs chrétiennes et humanistes, et de favoriser la compréhension, le respect et le dialogue entre des gens ayant des croyances et des convictions différentes. Toutefois, la description du contenu et des buts du cours de KRL qui figurait dans la loi de 1998 sur l’éducation et dans les autres textes constituant le cadre législatif donne à penser que des différences non seulement quantitatives mais aussi qualitatives distinguaient l’enseignement du christianisme de celui des autres religions et philosophies, en lui accordant un poids prépondérant. 

De plus, la Cour européenne a jugé que le mécanisme de dispense partielle du cours de KRL était susceptible de soumettre les parents concernés à une lourde charge dans la mesure où devaient préciser à quelles parties spécifiques du programme ils était opposés et au risque que leur vie privée soit indûment exposée, et qu’il y avait des chances que les parents s’abstiennent de demander de telles dispenses en vue d’éviter tout conflit potentiel sur le caractère raisonnable de leur demande.

En conclusion, la Cour a estimé que nonobstant les nombreux buts législatifs louables affirmés lors de l’introduction du cours de KRL, il apparaît que l’Etat défendeur n’avait pas suffisamment veillé à ce que les informations et connaissances figurant au programme de ce cours soient diffusées de manière objective, critique et pluraliste pour satisfaire aux exigences de l’article 2 du Protocole no 1.

Mesures de caractère individuel : Dans l’hypothèse où les enfants des requérants sont toujours scolarisés dans l’enseignement obligatoire, les mesures individuelles sont liées à l’adoption des mesures générales dans cette affaire.

La Cour européenne a estimé que le constat de violation constituait en soi une satisfaction équitable suffisante pour le préjudice moral subi par les requérants, étant donné que le Gouvernement défendeur s’est déclaré prêt à revoir le cours de KRL.

Mesures de caractère général : la Cour européenne a indiqué que la violation provenait directement du cadre juridique contesté (notamment les articles 1-2§1 et 2-4 de la loi de 1998 sur l’éducation, circulaires F-90-97 et F-03-98 et programme des dix ans de scolarité obligatoire) et non de la manière dont il a été mis en œuvre (§109 de l’arrêt). La Cour a également noté que la Norvège avait entrepris une réforme de ce cadre juridique, à la suite d’une décision du Comité des Droits de l’Homme des Nations unies de 2004 (saisi par d’autres parents que les requérants), lequel a déclaré ce même cadre juridique contraire au Pacte international de 1966 relatif aux droits civils et politiques.

En 2005 le Parlement a adopté certains amendements et adjonctions à la loi de 1998 sur l’Education, lesquels sont entrés en vigueur immédiatement. Les changements ont été complétés par la circulaire F‑02‑05. Ils ont déjà remédié à certaines des questions qui ont été jugées par la suite en violation de la Convention par la Cour européenne, cette dernière ayant examiné le cadre législatif tel qu’il s’appliquait à l’époque où l’affaire a été portée devant les juridictions internes. Les amendements visaient à remédier à la différence qualitative entre l’enseignement du christianisme et celui des autres religions et philosophies, notamment par la suppression de la référence faite à l’article 2-4 alinéa 3 à la clause de vocation chrétienne en tant que point de départ de l’enseignement.


Un nouvel article sur la dispense partielle (2-3 A) a été introduit conférant un droit à la dispense de toute partie du programme qui pourrait être perçue comme la pratique d’une croyance particulière. Il suffit désormais aux parents d’en faire état, ils n’ont pas à demander de dispense et ne doivent pas fournir de raisons ceci afin d’éviter toute ingérence indue dans leur vie privée. L’obligation pour les écoles de fournir toute information quant au droit de dispense a été incluse dans la loi. Enfin, en 2005, le programme scolaire a été adapté aux changements de législation.

Informations fournies par les autorités norvégiennes (09/04/2008) : Des amendements additionnels au cadre législatif sont en préparation et devraient entrer en vigueur avant le début de l’année scolaire 2008. En avril 2008, le gouvernement a soumis un projet de loi au Parlement proposant le changement de la clause de vocation dans la loi sur l’Education pour supprimer la référence à la contribution de l’école en vue d’aider les familles à donner aux enfants une éducation chrétienne. Les articles 2-3 et 2-4 seront encore amendés, le premier pour garantir que les parents soient dûment informés du contenu des cours, et le second afin de mieux répondre au souci d’égalité qualitative entre le christianisme et les autres religions et philosophies. Le programme sera changé en conséquence. Enfin, le gouvernement a pris une série des mesures pratiques, telle qu’une lettre circulaire envoyée à toutes les écoles en 2007 pour les charger de fournir un cours de KRL conforme à l’arrêt de la Cour européenne et de donner aux parents des informations suffisantes sur la planification des cours dans cette matière. Une formation continue a été assurée pour les enseignants et de nouveaux manuels sont en préparation.

Des informations sont attendues sur l’issue du processus de réforme et sur le contenu de la législation, si elle a été adoptée, ainsi que sur d’autres mesures prises pour exécuter l’arrêt. 

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales, à savoir l’état d’avancement de la réforme du cadre juridique régissant le cours sur le christianisme, la religion et la philosophie, mis en cause dans l’arrêt de la Cour européenne.

- 123 affaires contre la Pologne

11562/05          Byrzykowski, arrêt du 27/06/2006, définitif le 27/09/2006

Cette affaire concerne une violation du droit à la vie en raison de l'absence d'enquête efficace concernant le décès de l'épouse du requérant et le préjudice grave causé à la santé de son fils (violation de l'article 2).

En juillet 1999, l'épouse du requérant, sur le point d'accoucher, a été admise à l'Hôpital universitaire de Wrocław. Les médecins ayant décidé de procéder à une césarienne, lui ont administré une péridurale suite à laquelle elle est tombée dans le coma. Toute tentative de réanimation s'est avérée vaine, elle est décédée le 31/07/1999. Le fils, né par césarienne, souffre de sévères problèmes de santé, notamment d'ordre neurologique, nécessitant une assistance médicale en permanence.

Suite à la demande du requérant, une enquête policière a été ouverte suivie d'une instruction pénale visant une mise en accusation pour homicide involontaire. Vu le temps considérable requis pour obtenir les preuves, en particulier les éléments scientifiques, cette procédure a été suspendue à deux reprises, trois fois interrompue et trois fois reprise. Cette procédure est toujours pendante.

En août 1999 le requérant a également demandé l'ouverture d'une procédure disciplinaire qui a été suspendue, ensuite reprise et puis de nouveau suspendue le 25/04/2005. Cette procédure est également toujours pendante.

En outre en juillet 2002 le requérant a saisi les juridictions civiles d'une demande en indemnisation contre l'hôpital. Cette procédure a été suspendue en attendant l'issue des deux autres procédures.

La Cour européenne a noté que les trois procédures étaient pendantes depuis 4 ans à presque 7 ans et que le requérant avait ainsi épuisé toutes les voies de recours dont il disposait au titre de ses allégations d'erreur médicale. Elle a constaté qu'après presque 7 ans aucune de ces procédures n'avait abouti à une décision finale. Elle a relevé en outre que les autorités s'étaient constamment référées aux autres procédures pour justifier les suspensions et les refus de reprendre les procédures. Cependant, prenant en compte la durée globale écoulée depuis le décès de l'épouse du requérant ainsi que le fait que les procédures instituées semblent plutôt avoir entravé le processus judiciaire dans son ensemble, la Cour a conclu que les procédures ouvertes pour élucider les allégations de faute médicale n'avaient pas permis une enquête efficace.

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé une satisfaction équitable au titre du préjudice moral subi.

Informations fournies par les autorités polonaises : L'enquête policière concernant une accusation d'homicide involontaire de l'épouse du requérant a donné lieu à un constat de non-lieu par le procureur de district de Wrocław le 18/05/2006. Cette décision qui était basée sur les expertises des médecins des Hôpitaux universitaires de Cracovie, Katowice, Poznań et Białystok, est devenue définitive le 07/06/2006.


La procédure disciplinaire est toujours suspendue, mais au vu du constat de non-lieu par le procureur elle devrait être classée prochainement.

La procédure civile en indemnisation, pendante devant le tribunal régional de Wrocław, a été reprise le 01/06/2007 et fait l'objet d'une supervision administrative. Quatre audiences ont eu lieu. Lors de la dernière audience qui s'est tenue le 17/01/2007, un témoin a été entendu. En outre, avant cette date, le requérant a été sommé de verser une avance sur les frais de l'expertise médicale. Le greffe du tribunal a contacté les experts dans les Hôpitaux universitaires dans les autres villes en Pologne et il s'est avéré que l'élaboration d'une expertise durerait environ six mois. Cette expertise sera probablement préparée par l'hôpital universitaire de Szczecin.

Des informations sont attendues sur l'état actuel de la procédure disciplinaire et, le cas échéant, son accélération, ainsi que sur l'état d'avancement de la procédure civile.

Mesures de caractère général : La Cour européenne n'a pas constaté de manquement de la part de l'Etat à son obligation d'assurer des voies de recours permettant d'établir la responsabilité pénale, disciplinaire ou civile des personnes en question (§106 de l'arrêt). Le constat d'une violation dans la présente affaire résulte de l'évaluation faite par la Cour du fonctionnement de ces procédures dans des circonstances concrètes.

Informations fournies par les autorités polonaises : Les autorités polonaises ont entamé des réformes en vue de :

            1) Augmenter l'efficacité des experts judiciaires : Le 27/12/2006 le gouvernement a déposé au Parlement un projet de loi sur les experts dans les procédures judiciaires. Ce projet a été transmis à la commission de Justice et des droits de l'Homme du Parlement qui l'a examiné en première lecture le 16/02/2007. Ce projet régit les modalités de préparation des expertises pour les juridictions et les autres autorités. Il vise notamment à assurer le professionnalisme des experts, leur impartialité et leur respect de la loi. Sauf certaines circonstances particulières, notamment celles prévues par la loi, les experts ne pourront plus refuser l'élaboration d'une expertise dans le cadre d'une procédure menée par un procureur, un juge ou autre organe étatique (article 46, alinéa 1 du projet). En outre, dans l'hypothèse où une expertise aurait été réalisée de manière défectueuse ou en méconnaissance de la règle de la diligence nécessaire, avec un retard non justifié ou contrairement à son objet fixé par l'organe menant la procédure concernée, ce dernier pourrait diminuer la rémunération de l'expert ou même la refuser.

            2) Introduire un recours contre la durée excessive de l'enquête : Le 21/12/2006, le ministre de la Justice a envoyé une lettre au Médiateur polonais, exprimant l'avis selon lequel certaines dispositions du Code de procédure pénale n'étaient pas compatibles avec les exigences découlant de la jurisprudence de la Cour européenne concernant l'article 13. Aussi, il envisage de prendre des mesures en vue d'introduire un recours interne efficace contre la durée excessive des enquêtes préliminaires.

            3) Modifier de la procédure disciplinaire devant l'ordre des médecins : Actuellement le ministre de la Santé prépare un amendement à la loi de 1989 sur l'ordre des médecins. Cet amendement vise notamment à élargir les droits des parties lésées dans le cadre de procédures disciplinaires, car actuellement ces personnes ne peuvent y participer qu'en tant que témoin. En outre, il est prévu que les audiences devant les organes de l'ordre des médecins soient publiques, que les décisions de ce dernier soient susceptibles d'appel devant les juridictions pénales, que le catalogue des peines disciplinaires soit élargi et que des délais pour la conclusion des stades de la procédure disciplinaire soient fixés.

Par lettre du 24/08/2007, les autorités ont fourni au Secrétariat une copie du projet d’amendement à la loi sur l’Ordre des médecins. Le Secrétariat est en train d’évaluer ces informations.

Des informations sont attendues sur les suites données à ces projets de réforme.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard à leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations supplémentaires à fournir sur les mesures individuelles, à savoir l’état actuel de la procédure pendante, ainsi que sur les mesures générales.

5410/03 Tysiąc, arrêt du 20/03/2007, définitif le 24/09/2007

L’affaire concerne le manquement des autorités à leur obligation positive au titre du droit de la requérante au respect de la vie privée en raison de l’absence de cadre juridique lui garantissant un droit à l’avortement thérapeutique (violation de l’article 8).

En vertu du droit polonais (loi de 1993 sur le planning familial), l’avortement est interdit sauf si la grossesse risque de porter atteinte à la vie ou à la santé de la mère. Ce risque doit être établi par au moins un certificat médical. Un médecin qui pratique un avortement illégal se rend coupable d’une infraction pénale.

La requérante qui souffre d’une myopie sévère et d’un handicap moyen, est tombée enceinte en février 2000. Craignant que se grossesse n’aggrave ses problèmes de vue, elle a consulté quatre médecins (trois ophtalmologistes et un généraliste).


Bien que les ophtalmologistes aient estimé que la grossesse et l’accouchement constituaient un risque pour ses problèmes de vue, seul le généraliste lui a délivré un certificat médical en vue d’un avortement thérapeutique. A cette fin, la requérante a contacté une clinique gynécologique mais le gynécologue a estimé qu’il n’existait aucun motif pour autoriser un avortement thérapeutique. Quelques mois après la naissance de son enfant en novembre 2000, sa vue s’est détériorée et son handicap a été requalifié en conséquence. La requérante a tenté en vain d’introduire des procédures pénales à l’encontre du gynécologue, au motif qu’il l’avait privée de son droit à un avortement thérapeutique.

La Cour européenne a relevé que le droit au respect de la vie privée impliquait, dans le cas d’un avortement thérapeutique, que l’Etat assure l’intégrité physique de la mère en mettant équitablement en balance l’intérêt de l’individu et ceux de la communauté. A cet égard, elle a relevé que le cadre juridique légal polonais, tel qu’appliqué dans la présente affaire, n’avait pas permis à la requérante de faire valoir son désaccord avec les médecins ni de déterminer si les conditions en l’espèce étaient réunies pour autoriser un avortement thérapeutique. En outre, la Cour a estimé que des recours a postériori telles qu’un recours en responsabilité ou une procédure pénale contre les médecins ne pouvaient à elles seules assurer la protection de l’intégrité physique de la requérante.

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a rejeté la demande de la requérante au titre du préjudice matériel dans la mesure où elle ne pouvait se prononcer sur la validité des conclusions des médecins concernant une éventuelle détérioration future de sa vue. Elle a en revanche octroyé 25 000 euros au titre du préjudice moral.

Evaluation : Dans ces circonstances aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général : La Cour européenne s’est référée aux dispositions de l’ordonnance du Ministère de la Santé du 22/01/1997 et de la loi sur la profession médicale de 1996 (§§121-122) pour conclure à l’absence de mécanisme effectif visant à déterminer si les conditions légales d’un avortement thérapeutique étaient réunies. En premier lieu, elle a estimé que l’ordonnance qui met en pace une procédure régissant les décisions en matière d’avortement thérapeutique  ne prévoyait aucun cadre juridique pour régler les cas de désaccord entre patientes et médecins en la matière ni même entre les médecins. En second lieu, elle a relevé que l’article 37 de la loi de 1996 qui permet aux médecins, en cas de doute ou à la demande d’une patiente, d’obtenir un deuxième avis ne visait que la profession médicale et ne donnait aux patientes aucune garantie procédurale en vue d’obtenir un tel avis ou de le contester en cas en cas de désaccord. Cette disposition ne concerne pas davantage la question plus précise d’une femme enceinte demandant un avortement légal.

Développement récent : L’arrêt de la Cour européenne a été publié sur le site Internet du Ministère de la Justice : www.ms.gov.pl. Le 18/04/2008, les autorités polonaises ont fourni au Secrétariat une copie du projet de loi sur les droits individuels et collectifs des patients et sur le médiateur des droits des patients. Ce projet de loi vise notamment à introduire une procédure d’appel contre le refus d’un médecin de procéder à un avortement. Le Secrétariat est en train d’évaluer ces informations.

Des informations sont attendues sur l’état actuel du processus législatif concernant l’adoption de ce projet de loi ainsi que sur toute autre mesure éventuelle prise ou envisagée en vue de prévenir de nouvelles violations similaires.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard à leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations complémentaires à fournir sur les mesures générales.

77710/01          H.N., arrêt du 06/09/2005, définitif le 06/12/2005

Cette affaire concerne la violation du droit du requérant au respect de sa vie familiale (violation de l'article 8). Le requérant, ressortissant norvégien, était marié à une ressortissante polonaise M.C. Ils vécurent en Norvège et eurent trois enfants (A, B, C). Après leur divorce en 1998, un tribunal norvégien attribua la garde des enfants au requérant. En août 1999, M.C. enleva les enfants et les emmena avec elle en Pologne. En vertu des dispositions de la Convention de la Haye de 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants, le requérant introduisit une requête devant le ministère de la Justice polonais en vue d'assurer le retour de ses enfants. En mars 2000, le tribunal de district de Varsovie rendit une décision ordonnant la restitution des enfants au requérant (confirmée en appel en juillet 2000). Par la suite, une procédure d'exécution fut engagée et l'huissier renvoya l'affaire au tribunal de district, qui en janvier 2001 ordonna à M.C. de restituer les enfants. Le retour des enfants avait été fixé pour avril 2001. Malgré les craintes du requérant et ses demandes d'accélérer la procédure, l'huissier et le ministère de la Justice ne firent rien et M.C. disparut avec les enfants avant la date fixée pour leur restitution.


Par la suite, l'Autorité centrale norvégienne et le requérant intervinrent à plusieurs reprises auprès des autorités polonaises, mais sans succès. En juin 2002, le requérant trouva trace de sa fille A. par l'intermédiaire d'un membre de la famille et par la suite elle retourna chez lui en Norvège. En février 2003, le tribunal de district de Varsovie a été informé de l'arrestation de M.C ainsi que des charges pénales retenues contre elle. Par la suite, B. et C. lui furent repris par un curateur et retournèrent chez leur père en avril 2003.

La Cour européenne a conclu les autorités polonaises n'avaient pas fourni les efforts adéquats et effectifs qu'exigeait l'exécution du droit du requérant à obtenir le retour de ses enfants. Elle a notamment critiqué les périodes d'inactivité devant les juridictions, les omissions de l'huissier ayant facilité la fuite de M.C. avec les enfants et le défaut de réaction du ministère de Justice et de la police aux informations transmises par l'Autorité centrale norvégienne.

De surcroît, la Cour européenne a conclu que la durée de la procédure intentée par le requérant sur la base de la Convention de la Haye avait été excessive (trois ans, sept mois et 16 jours), car les autorités polonaises auraient dû agir avec une diligence exceptionnelle eu égard à l'enjeu pour le requérant et au caractère irréversible des mesures en cause (violation de l'article 6§1).

Mesures de caractère individuel : Aucune. Les trois enfants ont été restitués au requérant.

Mesures de caractère général :

            1) Violation de l'article 6§1 : Les questions concernant la durée excessive de procédures devant les juridictions civiles sont examinées dans le cadre des affaires du groupe Podbielski (arrêt du 30/10/1998, Résolution intérimaire CM/ResDH(2007)28, dernier examen lors de la 1020e réunion, mars 2008, rubrique 4.2).

            2) Violation de l'article 8 :

• Informations fournies par les autorités polonaises :

1) Publication, diffusion de l'arrêt et mesures connexes : Le ministère de la Justice a envoyé l'arrêt de la Cour européenne aux présidents des tribunaux régionaux en vue de sa diffusion aux magistrats et aux curateurs. Une lettre similaire a été envoyée au Commandant en Chef de la Police nationale en vue de la diffusion de l'arrêt aux agents de police.

L'arrêt de la Cour européenne a été publié sur le site Internet du ministère de la Justice http://www.ms.gov.pl.

De surcroît, il a fait l'objet d'une discussion des fonctionnaires s'occupant de l'application de la Convention de la Haye au sein du ministère de la Justice (agissant en qualité d'Autorité Centrale au sens de la Convention de la Haye). La problématique de la célérité des procédures menées sur la base de la Convention de la Haye sera incluse dans le programme de la formation des magistrats s'occupant du droit de la famille.

2) Application de la Convention de la Haye en Pologne : Selon le Ministre de la Justice, dans la majorité des cas cette Convention est appliquée de manière efficace. Entre janvier 2001 et octobre 2007, les tribunaux polonais ont rendu 34 décisions accueillant les demandes introduites sur la base de ses dispositions. Actuellement trois décisions judiciaires ordonnant le retour de l'enfant au parent habitant à l'étranger demeurent non exécutées, ce qui est dû au fait que l’enfant est caché par l’autre parent. Des exemples de cas ont été fournis dans lesquels des enfants enlevés avaient été retrouvés par la police.

Le problème de l'exécution des décisions judiciaires concernant le retour de l'enfant au parent exerçant l'autorité parentale est régi par les articles 5986 - 598 12 du Code de procédure civile. En cas de non-exécution d'une telle décision par la personne concernée, le tribunal peut ordonner au curateur de reprendre l'enfant par force. A cet égard, le curateur peut être assisté par la police qui peut notamment l'aider à déterminer le domicile de l'enfant.

Evaluation : dans ces circonstances, aucune autre mesure ne semble nécessaire.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), et de le joindre, lors de la même réunion, au groupe d'affaires Podbielski, aux fins de l'examen des mesures générales.

11638/02           Pawlik, arrêt du 19/06/2007, définitif le 19/09/2007

L’affaire concerne la violation du droit du requérant au respect de la vie familiale en raison du manquement des autorités polonaises à leur obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la mise en œuvre de son droit de visite à l’égard de son fils, née en 1988 (violation de l’article 8).

Par décision du 16/09/1994, la Cour régionale de Szczecin a prononcé le divorce du requérant, limité l’exercice des droits parentaux du requérant à l’égard de son fils et précisé les modalités du droit de visite (modifiées par la suite le 30/06/2000). En raison du refus permanent de la mère de respecter les modalités du droit de visite, le requérant s’est employé activement à demander leur mise en œuvre devant le tribunal de première instance de Szczecin.


Bien que le requérant n’ait pu voir son fils qu’à quelques rares occasions, la seule sanction imposée à son ex-femme a consisté en l’imposition d’une amende en septembre 2001. La situation ne s’est améliorée qu’après le 17/06/2006 date à la laquelle le tribunal de première instance a mis un terme à la procédure suite à un accord conclu entre le requérant et son ex-femme au sujet du droit de visite.

La Cour européenne a relevé de nombreuses périodes d’inactivité dans la procédure de mise en œuvre et a constaté l’absence d’explication satisfaisante pour les justifier. L’inaction des autorités a ainsi contraint le requérant à faire constamment usage d’une succession de recours qui se sont avérés longs et inefficaces pour faire valoir ses droits. La Cour européenne a rappelé que ce type d’affaires nécessitait un traitement urgent dans la mesure où le passage du temps et le changement de circonstances pouvaient avoir des conséquences insurmontables pour les relations entre l’enfant et le parent ne disposant pas du droit de garde.

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé une satisfaction équitable au titre du préjudice moral subi. Le fils du requérant a atteint la majorité en 2006.

Evaluation : aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général : Les dispositions du Code de procédure civile sur l’exécution des obligations non pécuniaires sont applicables à l’exécution des décisions judiciaires en matière de droit de visite. En vertu de l’article 1050, alinéa 1, si le débiteur ne s’acquitte pas de son obligation de prendre des mesures qui ne peuvent être prises par une autre personne, le tribunal fixe une date limite pour l’exécution de cette obligation sous peine d’une amende.

Un problème similaire a été soulevé dans le cadre de l’examen de l’affaire Zawadka (rubrique 6.2), dans laquelle la violation de l’article 8 résultait partiellement du défaut de mise en œuvre des accords en matière de droit de visite. Dans cette affaire, les autorités ont publié et procédé à une diffusion large de l’arrêt de la Cour européenne.

Des informations sont attendues sur la portée de l’application en pratique des dispositions du Code de procédure civile pour assurer la mise en œuvre d’accords en matière de droit de visite, ainsi que sur toute autre mesure prise ou envisagée pour prévenir de nouvelles violations similaires. En toute hypothèse, la publication et la diffusion de l’arrêt de la Cour européenne aux juridictions compétentes seraient utiles.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard à leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

- Affaires concernant le caractère inéquitable de procédures de lustration

38184/03           Matyjek, arrêt du 24/04/2007, définitif le 24/09/2007

68761/01           Bobek, arrêt du 17/07/2007, définitif le 10/12/2007

Ces affaires concernent le caractère inéquitable des « procédures de lustration » (procédures visant à identifier les personnes ayant travaillé pour les services de sécurité de l’Etat ou collaboré avec eux à l’époque communiste) (violations de l’article 6§1 combiné à l’article 6§3). Suite à ces procédures menées entre 1999 et 2000, les requérants (respectivement un parlementaire et une avocate) ont été reconnus coupables de collaboration volontaire et secrète avec les services secrets communistes et d'avoir ainsi menti dans leurs déclarations de lustration.

La Cour européenne a critiqué certaines particularités de ces procédures de lustration. En premier lieu, elle a mis en cause les pouvoirs du Bureau des services de sécurité de l’Etat de lever la confidentialité de certains documents classés « top secret ». Dans l’affaire Matyjek, certains documents ont déclassifiées en 2000, alors que d’autres documents versés au dossier de l’affaire étaient restés confidentiels. En second lieu, les requérants n’ont pas disposé d’un accès illimité au dossier et aux notes qu’ils avaient prises durant la procédure. Ils n’ont pas pu davantage obtenir de copie de documents pertinents. En troisième lieu, le commissaire représentant l’intérêt public dont les pouvoirs étaient identiques à ceux d’un procureur, a disposé d’un droit d’accès à toute la documentation des requérants, a pu entendre les témoins et ordonner des expertises et disposait d’un personnel habilité à consulter les documents classifiés. Enfin, la Cour européenne a relevé que seuls les dispositifs des arrêts furent notifiés aux requérants, les motifs de ces décisions ne pouvant être consultés dans « la salle du greffe réservée aux documents secrets ».

Enfin, la Cour européenne a estimé que les requérants n’avaient pas disposé de recours effectif en droit interne leur permettant de remettre en cause le droit interne en vigueur en matière de procédures de lustration.

Mesures de caractère individuel :

Dans l’affaire Matyjek, le requérant a été déchu de son mandat parlementaire et déclaré inéligible pour une période de dix ans, en vertu du jugement de la Cour d’appel de Varsovie du 17/12/2000.


Dans l’affaire Bobek, la réputation de la requérante a été mise en cause dans la procédure de lustration. Le jugement de la Cour d’appel de Varsovie du 15/09/1999, constatant le caractère mensonger de sa déclaration de lustration, a entraîné la déchéance des qualifications morales de la requérante, nécessaires pour l’exercice de la profession d’avocat (§ 63 de l’arrêt).

Dans les deux affaires, la Cour européenne a statué que le constat de violation constituait en lui-même une satisfaction équitable pour le préjudice moral. Quant au préjudice matériel, les prétentions des requérants ont été rejetées pour absence de lien de causalité avec la violation constatée. La Cour européenne a conclu qu’elle ne pouvait pas spéculer sur ce qu’aurait été l’issue de la procédure si elle avait été conforme à l’article 6.

Des informations sont attendues sur la possibilité de rouvrir la procédure de lustration ainsi que sur toute autre mesure effaçant les conséquences de la violation à l’égard des requérants.

Mesures de caractère général : La confidentialité des documents et les pouvoirs des services de sécurité de l’Etat de lever la confidentialité de certains documents découlent d’une série de lois successives, comprenant en particulier la loi de 1999 sur la protection des documents classifiés, sur la base desquels les documents de la période communiste sont toujours considérés comme des secrets d’Etat.

La position privilégiée du commissaire représentant l’intérêt public découlait des dispositions de la loi de lustration de 1997.

L’accès limité au dossier de l’affaire et l’impossibilité pour le requérant d’obtenir une copie papier des motifs de l’arrêt résultaient d’une application combinée du Code de procédure pénale et la loi de 1999 sur les la protection des documents classifiés.

Dans l’affaire Bobek, la Cour européenne a constaté que la violation ne pouvait être considérée comme résultant d’une disposition législative particulière ou même d’un ensemble bien déterminé de dispositions. Elle découlait plutôt de la manière dont les lois pertinentes avaient été appliquées au cas de la requérante et, en particulier, des « règles spéciales » dont il est question à l’article 156§4 du Code de procédure pénale, permettant au président du tribunal de lustration de limiter l’accès de la requérante aux dossiers et ses possibilités de prendre des notes et des copies de documents (§§ 73 et 33).

Mesures prises : La loi de lustration de 1997 a été abrogée et remplacée par la nouvelle loi du 18/04/2006. En vertu de cette nouvelle loi, les procédures de lustration sont instituées par un procureur spécial. Par conséquent la fonction de commissaire représentant l’intérêt public n’existe plus.

Les deux arrêts de la Cour européenne ont été publiés sur le site Internet du Ministère de la Justice www.ms.gov.pl.

Des informations sont attendues sur la diffusion de l’arrêt de la Cour européenne aux autorités compétentes (Cour d’appel de Varsovie et Cour suprême, services de sécurité de l’Etat, procureurs compétents) ainsi que sur les mesures prises ou envisagées pour prévenir de nouvelles violations similaires. Dans ce contexte des clarifications sont attendues sur :

- les dispositions en vigueur en matière de procédure de lustration et en particulier sur les pouvoirs des autorités de poursuite ;

- la question de savoir si les restrictions au droit d’accès du dossier ainsi qu’aux motifs des décisions continuent de s’appliquer à des personnes dans la même situation que le requérant, à la lumière des dispositions en vigueur du Code de procédure pénale et de la législation sur la protection des documents classifiés ;

- la question de savoir si le chef des services de sécurité de l’Etat dispose toujours de la faculté de lever la confidentialité de certains documents dans le cadre des procédures de lustration.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard à leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

21508/02           W.S., arrêt du 19/06/2007, définitif le 24/09/2007

Cette affaire concerne la violation du droit du requérant à un procès équitable et du droit d’obtenir la convocation et l’interrogation d’un témoin (violation de l’article 6§1 combiné avec l’article 6§3(d)).

Par arrêt du 06/11/1997 du Tribunal régional de Łòdź, le requérant fut accusé d’abus sexuel sur sa fille X. et condamné à quatre ans d’emprisonnement. Sa condamnation, confirmée en appel, ne reposait principalement que sur l’avis d’une psychologue qui avait interrogé X.


La Cour européenne a noté que X. n’avait jamais été à aucun moment interrogée que ce soit par la police, le procureur ou la défense. Les autorités n’ont pas tenté de vérifier la fiabilité de la victime d’une manière moins perturbante, par exemple en l’interrogeant en présence d’un psychologue et en lui posant des questions écrites de la défense ou en l’interrogeant dans un studio, ce qui aurait permis au requérant ou à son avocat d’assister indirectement à l’audition par un contact vidéo ou un miroir sans tain.

Aucune procédure n’a été introduite pour contre balancer les difficultés rencontrées par la défense et le requérant et ce dernier n’a pas bénéficié d’une opportunité propre et adéquate pour défier et interroger la victime contre lui.

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a accordé au requérant une satisfaction équitable pour préjudice moral subi.

En vertu de l’article 540§3 du Code de procédure pénale, il peut demander la réouverture de la procédure pénale invoquant le constat d’une violation par la Cour européenne (voir l’affaire Skałka, arrêt du 27/05/03, définitif le 27/08/03, rubrique 5.3).

Évaluation : dans ces circonstances, aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général : Il semble que la violation dans cette affaire résulte de décisions des procureurs et des tribunaux pénaux.

Des informations sont attendues : sur la publication de l’arrêt de la Cour européenne, et sa diffusion aux autorités compétentes (procureurs, tribunaux pénaux, la Cour Suprême) ainsi que sur d’autres mesures envisagées ou prises pour prévenir de nouvelles violations similaires.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales.

54723/00          Brudnicka et autres, arrêt du 03/03/2005, définitif le 03/06/2005

Cette affaire a trait au défaut d'indépendance et d'impartialité des chambres maritimes, saisies en 1993 pour déterminer les causes du naufrage d'un navire au cours duquel des proches des requérants avaient péri (violation de l'article 6§1).

Cette procédure s'est achevée par une décision définitive de la chambre maritime d'appel de Gdańsk du 26/01/1999, qui a retenu la responsabilité des membres de l'équipage en raison d'un manquement à leur devoir de diligence eu égard à l'absence de coordination dans la conduite des opérations.

La Cour européenne a constaté que le droit polonais ne prévoyait, en principe, aucune possibilité de contrôle juridictionnel des décisions des chambres maritimes et que le président et le vice-président de ces chambres étaient nommés et révoqués par le ministre de la Justice en accord avec le ministre de la Navigation, un lien de subordination hiérarchique existant alors entre eux et les ministres. Elle a donc conclu que les chambres maritimes, telles qu'elles existent en droit polonais, ne pouvaient être considérées comme des tribunaux impartiaux aptes à assurer le respect des exigences d'équité énoncées par l'article 6 de la Convention.

Mesures de caractère individuel :

Informations fournies par les autorités polonaises : Les requérants peuvent saisir les tribunaux de droit commun d'une demande en indemnisation, au titre des préjudices matériel et moral, en vertu des articles 415 et suivants du Code civil. L'introduction d'une telle demande obligera le juge à examiner la question de la responsabilité des membres de l'équipage. Ainsi, sept affaires concernant le naufrage en question, et introduites par les familles des membres de l'équipage, sont actuellement pendantes devant le tribunal régional de Szczecin.

Des informations sont attendues sur l'état de ces procédures.

Mesures de caractère général : Dans son arrêt, la Cour européenne a noté que la législation polonaise concernant les chambres maritimes avait été modifiée récemment, mais que cette nouvelle législation n'avait instauré ni pourvoi en cassation à l'encontre des décisions de la chambre maritime d'appel ni modifié le mode de désignation et de révocation des présidents et vice-présidents des chambres maritimes.

Informations fournies par les autorités polonaises : Des modifications législatives sont envisagées. Des amendements à la loi de 1961 sur les chambres maritimes assureront notamment que les chambres maritimes soient composées de juges et introduiront un recours juridictionnel contre leurs décisions.

Développement récent : les autorités ont fourni au Secrétariat une copie de la dernière version des amendements à la loi de 1961 sur les chambres maritimes (version de janvier 2008). De surcroît, en février 2008 des rencontres à haut niveau ont eu lieu à Varsovie entre le Secrétariat et les autorités polonaises en vue de discuter des mesures d’exécution dans cette affaire.


Des informations sont attendues sur l’adoption des amendements annoncés à la loi de 1961 sur les chambres maritimes.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales, notamment l'état d'avancement de la réforme législative annoncée.

                       - Affaire concernant la liberté d’expression

28949/03           Sanocki, arrêt du 17/07/2007, définitif le 17/10/2007

Cette affaire concerne la violation du droit du requérant à la liberté d'expression suite à sa condamnation au plan civil (violation de l'article 10). Le requérant qui était maire de la ville de Nysa à l’époque des faits, fut critiqué dans plusieurs articles publiés par le quotidien local Nowa Trybuna Opolska. En réplique à un de ces articles l’accusant de mauvaise gestion financière, le requérant fit publier en mars 2000, dans un hebdomadaire local un article intitulé « Les mensonges de la Trybuna », dans lequel il utilisa un langage provocateur. Estimant que cet article portait atteinte à sa réputation, la société éditrice du journal Nowa Trybuna Opolska, intenta une action en justice contre le requérant. Par conséquent, par décision du 20/12/2001, par la suite confirmée en appel, le tribunal régional d'Opole condamna le requérant à publier des excuses à la société éditrice, à lui rembourser les frais de procédure, à verser la somme d’environ 1705,32 euros à des institutions caritatives et à régler les frais de justice.

La Cour européenne a estimé que, bien que la condamnation du requérant s’analyse en une ingérence prévue par l’article 24§1 du code civil et qu’elle ait eu pour but légitime la protection de la réputation ou des droits d’autrui, elle n’était pas « nécessaire dans une société démocratique ». La Cour a souligné que les expressions incriminées avaient été émises par voie de presse lors d'un débat politique ouvert. Bien que le requérant ait utilisé un langage provocateur et manquant d'élégance envers son adversaire, il aurait dû pouvoir se défendre lorsqu'il considérait que les publications mettant en cause sa personne étaient mensongères et pouvaient induire en erreur l'opinion publique sur sa façon d'exercer le pouvoir.

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a accordé au requérant une satisfaction équitable au titre du préjudice moral et matériel subi, notamment pour couvrir toutes les sommes qui lui avait été imposées.

Evaluation : aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général : La Cour européenne a constaté que les juridictions internes n’avaient pas établi de manière convaincante l’existence d’un besoin social impérieux de placer la protection des droits du journaliste au-dessus du droit du requérant à la liberté d’expression et de l’intérêt général qu’il y a à défendre pareille liberté lorsque les questions du débat politique sont en jeu. La violation constatée est donc due à la pratique des tribunaux nationaux n'ayant pas pris en compte les critères découlant de la Convention concernant le droit à la liberté d'expression.

Des informations sont attendues sur la publication et la diffusion large de l’arrêt aux juridictions concernées (tribunaux civils et Cour suprême) ainsi que sur d'autres mesures éventuellement envisagées ou adoptées en vue de prévenir de nouvelles violations similaires.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

1543/06 Bączkowski et autres, arrêt du 03/05/2007, définitif le 24/09/2007

Cette affaire concerne la violation du droit de réunion pacifique des requérants qui sont la Fondation pour l’égalité et ses cinq membres (violation de l’article 11). Dans le cadre de la campagne « Les journées de l’égalité », les requérants voulaient organiser un défilé et des rassemblements à Varsovie afin de sensibiliser l’opinion à la discrimination envers les minorités, les femmes et les handicapés. Ils demandèrent l’autorisation d’organiser le défilé et les rassemblements le 12/05/2005 et le 03/06/2005 respectivement. Le 20/05/2005, lors d’un entretien, dans un journal national, le Maire de Varsovie avait fait part de son opinion personnelle appuyée concernant la liberté de réunion et la « propagande au sujet de l’homosexualité » et avait déclaré qu’il refuserait d’autoriser les manifestations. Les autorisations ont été refusées le 03/06/2005 et le 09/06/2005. En dépit du refus, le défilé eut lieu le 11/06/2005. Le 17/06/2005 et 22/08/2005, les autorités d’appel annulèrent les décisions du 03/06/2005 et du 09/06/2005 au motif qu’elles étaient insuffisamment motivées et contraires aux lois en vigueur.


La Cour européenne a constaté que les refus d’organiser le défilé et les rassemblements constituaient une ingérence dans les droits des requérants tels que garantis par l’article 11, laquelle n’était pas « prévue par la loi », en particulier compte tenu des décisions du 03/06/2005 et du 09/06/2005 annulant les décisions de première instance. Elle a également été constaté que les recours disponibles, tous valables a posteriori, n’ont pu offrir aux requérants le redressement approprié (violation de l’article 13 combiné avec l’article 11).

De plus, la Cour européenne a noté que le refus d’autoriser le défilé se fondait sur le fait que les requérants n’avaient pas fourni de « plan d’organisation de la circulation » alors que d’autres organisateurs n’avaient pas été soumis à la même exigence. Pour ce qui est des rassemblements, ils n’ont pas été autorisés notamment en raison du risque que de violents affrontements se produisent entre manifestants. Or il n’a pas été contesté que les autorités avaient autorisé d’autres groupes à tenir leurs contre-manifestations ce même jour. La Cour a observé que les décisions avaient été rendues par les autorités municipales au nom du Maire alors que ce dernier avait déjà fait connaître au public son avis sur la question lors de l’entretien du 20/05/2005. L’opinion du Maire a donc eu une influence sur le processus décisionnel et a en conséquence porté atteinte au droit des requérants à la liberté de réunion de manière discrimination (violation de l’article 14 combiné avec l’article 11).

Mesures de caractère individuel : le défilé et les rassemblements dont l’organisation a été autorisée ont eu lieu le 11/06/2005. Les requérants n’ont réclamé aucune indemnisation pour dommage devant la Cour Européenne.

Évaluation: dans ces circonstances, aucune mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures générales :

1) Violation de l’article 11: Conformément à l’article 8 de la loi sur les réunions de 1990, une municipalité peut refuser l’autorisation de tenir une manifestation si son but est en infraction avec la loi elle-même ou les dispositions du Code pénal, ou si la manifestation peut entraîner un danger pour la vie ou la santé, ou un danger majeur pour la propriété.

Le 18/01/2006 la Cour constitutionnelle a rendu un arrêt dans lequel elle a constaté que les dispositions de la loi sur la circulation routière telles qu’appliquées dans l’affaire des requérants étaient incompatibles avec les garanties constitutionnelles de la liberté de réunion.

Des clarifications sont attendues sur les dispositions applicables de la loi sur les réunions et la loi sur la circulation routière concernant les conditions dans lesquelles l’organisation de défilés et de rassemblements peut être refusée.

2) Violation de l’article 13 combiné avec l’article 11: La Cour européenne a noté que les organisateurs avaient fourni aux autorités des indications suffisantes de leurs plans (12/05/2005 pour le défilé et 03/06/2005 pour les rassemblements) : selon l’article 7 de la loi sur les réunions, une demande pour tenir une manifestation doit être soumise à la commune au plus tôt 30 jours et au plus tard trois jours avant la date de l’évènement. Il n’existait toutefois aucune loi similaire obligeant les autorités à rendre leur décision définitive, dans un délai précis, avant la tenue des manifestations.

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées pour garantir un recours effectif en cas de refus de l’organisation d’un défilé ou un rassemblement en vertu de la loi sur les réunions.

3) Violation de l’article 14 combiné avec l’article 11: Cette violation est de nature isolée et est due à l’opinion personnelle du Maire de Varsovie.

Mesures adoptées : l’arrêt de la Cour européenne a été publié sur le site Internet du ministère de la Justice www. ms.gov.pl.

Des informations sont attendues sur la diffusion de l’arrêt de la Cour européenne aux autorités compétentes ainsi que sur d’autres mesures prises ou envisagées pour prévenir de nouvelles violations similaires.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales.

35014/97          Hutten-Czapska, arrêt du 19/06/2006 - Grande Chambre ; (article 41) arrêt du 28/04/2008 - Grande Chambre - Règlement amiable

Cette affaire concerne la violation du droit de la requérante au respect de ses biens (article 1 du Protocole 1). Malgré plusieurs procédures civiles et administratives intentées entre 1992-2002, la requérante qui avait hérité de ses parents une maison à Gdynia en 1990, n’a pu ni faire reloger les locataires auxquels l’Etat avait attribué auparavant des logements dans cette maison, ni fixer librement le montant du loyer. Ceci était dû à une législation appliquée aux biens privés en Pologne et introduisant un système de contrôle des loyers ainsi que des restrictions quant à la cessation des baux (loi de 1994, remplacée ensuite par une autre loi de 2001, modifiée en 2004 suite aux arrêts de la Cour constitutionnelle).


Ce système, tirant son origine des lois adoptées à l’époque du régime communiste, fixait pour les loyers un plafond si bas que les intéressés ne pouvaient même pas couvrir les frais d’entretien de leurs immeubles et encore moins réaliser un profit.

La Cour européenne (Grande Chambre) a conclu que la violation constatée ne tenait pas exclusivement à la question du montant des loyers (contrairement à ce qu’avait conclu la Chambre ; arrêt du 22/02/2005) mais résultait plutôt du jeu combiné des dispositions défectueuses sur la fixation des loyers et de diverses restrictions aux droits des propriétaires en matière de cessation des baux, des charges financières que la loi fait peser sur les intéressés et de l’absence de tout mécanisme légal leur permettant de compenser ou d’atténuer les pertes subies dans le cadre de l’entretien des biens ou d’obtenir, lorsque cela se justifie, des subventions de l’Etat pour financer les réparations nécessaires.

Au vu de ce qui précède et eu égard aux effets que l’application de la législation sur le contrôle des loyers a entraînés pendant toute la période considérée sur les droits de la requérante et des autres personnes se trouvant dans une situation comparable, la Cour européenne a conclu que l’Etat polonais n’a pas ménagé le juste équilibre requis entre l’intérêt général de la collectivité et la protection du droit de propriété.

Mesures de caractère individuel : La maison de la requérante a été définitivement libérée en février 2006.

La Cour européenne a alloué à la requérante 30 000 euros au titre du préjudice moral et 22  500 euros pour frais et dépens. En outre, les parties ont conclu un règlement amiable aux termes duquel le gouvernement s’est engagé notamment à indemniser le préjudice matériel subi par la requérante (voir arrêt du 28/04/2008).

Evaluation : Aucune autre mesure d’ordre individuel ne semble donc requise.

Mesures de caractère général :

En appliquant la procédure de l’arrêt pilote, à l’instar de l’affaire Broniowski c. Pologne (arrêt du 22/06/2004, Grande Chambre ; rubrique 4.2, Vol. I), la Cour européenne a conclu dans le dispositif de l’arrêt que :

1) la violation constatée résulte d’un problème structurel lié au dysfonctionnement de la législation interne, laquelle :

-           imposait et continue d’imposer malgré les amendements introduits en 2004 des restrictions aux droits des propriétaires notamment en ce qu’elle comporte des dispositions défectueuses quant à la fixation des loyers ;

-           ne prévoyait pas et ne prévoit toujours pas de procédure ou mécanisme permettant aux propriétaires de compenser les pertes subies dans le cadre de l’entretien de leurs biens ;

2) l’Etat défendeur doit ménager dans son ordre juridique interne, pas des mesures légales et/ou autres mesures appropriées, un mécanisme qui établisse un juste équilibre entre les intérêts des propriétaires et l’intérêt général de la collectivité, conformément aux normes de protection du droit de propriété énoncées dans la Convention.

A cet égard, la Cour européenne a bien pris note de l’arrêt de la Cour constitutionnelle polonaise du 19/04/2005 (rendu donc après l’arrêt de la Chambre du 22/02/2005). Cet arrêt a abrogé les dispositions introduites par la loi de 2004 qui plafonnaient à 10 % par an l’augmentation des loyers dont le montant dépassait 3 % de la valeur de reconstruction de l’appartement.

Toutefois, en dépit de cet arrêt de la Cour constitutionnelle, la Grande Chambre a noté que la situation générale n’avait pas encore été mise en conformité avec les normes de la Convention : les autorités polonaises n’ont pas supprimé les limitations antérieures en matière de cessation des baux et n’ont pas créé de procédure ou de mécanisme légal permettant aux propriétaires d’atténuer ou de compenser les pertes occasionnées par l’entretien ou la réparation de leurs biens. 

La Cour européenne a également observé que parmi les nombreuses possibilités dont dispose l’Etat polonais figurent celles indiquées dans les recommandations de la Cour constitutionnelle au Parlement du 29/06/2005, traçant entre autres les grandes lignes d’un mécanisme destiné à ménager un équilibre entre les droits des propriétaires et ceux des locataires et exposant les critères devant servir à définir ce que sont un « loyer de référence », un « loyer économiquement justifié » et un « profit correct » (§§ 136-141 de l’arrêt).

Enfin, la Cour européenne a noté que le système de contrôle des loyers était susceptible de toucher environ 100 000 propriétaires et de 600 000 à 900 000 locataires. Elle a ainsi ajourné l’examen des requêtes similaires (18 dont une émanant d’une association regroupant quelque 200 propriétaires).

• Plan d’action fourni par les autorités polonaises (lettres du 29/01/2007 et du 24/08/2007) :

            1) Amendement de la loi du 21/06/2006 relative à la protection des droits des locataires et aux ressources immobilières des communes : Le 15/12/2006, le Parlement polonais a adopté un amendement à cette loi lequel est entré en vigueur le 01/01/2007. Il en résulte qu’il ne peut être procédé à des augmentations annuelles de loyers de plus de 3% de la valeur de reconstruction que dans des cas justifiés (article 8a, section 4a de la loi amendée). L’augmentation de loyer est justifiée si :

- elle n’excède pas l’indice de l’augmentation générale moyenne du prix de la consommation et des services de l’année précédence (article 8a, section 4e), ou


- le propriétaire ne retire pas suffisamment de bénéfice du loyer ou des autres charges locatives lui permettant de couvrir les frais d’entretien du logement, ou pour couvrir le taux d’intérêt de son capital ou son profit (article 8a, section 4e). L’article 8a, section 4b fixe les limites dans lesquelles une telle augmentation peut être imposée. A cet égard, cet article détermine le pourcentage de frais supportés par le propriétaire pour la construction ou la modernisation du logement pouvant être inclus dans une telle augmentation. Cette disposition prévoit également que l’augmentation de loyer prévue à l’article 8a, section 4a peut permettre « un profit décent » sans toutefois définir cette notion.

Sur demande écrite du locataire, le propriétaire doit justifier l’augmentation et ses modalités de calcul par écrit dans les 14 jours (article 8a, section 4). Six mois doivent au moins s’écouler entre chaque augmentation de loyer (article 9, section 1b).

Bien que la nouvelle législation adoptée étende et précise les droits des propriétaires en matière d’augmentation de loyer, elle ne définit cependant pas la notion de « profit décent » et n’introduit pas davantage la notion de « loyer de référence » ou de « loyer économiquement justifié » découlant de l’arrêt de la Cour constitutionnelle du 29/06/2005. Selon les autorités, la portée de la notion du « loyer économiquement justifié » a été déterminée dans l’article 8a sur les modalités d’augmentation de loyer. Toutefois, la définition du « profit décent » a été laissée à l’appréciation des juridictions internes. La « décence » des loyers sera déterminée au cas par cas. A cet égard, les autorités ont fourni un exemple de décision judiciaire (arrêt du tribunal de district de Tarnów du 14/06/2007), dans laquelle le juge s’est référé à la compréhension usuelle du mot « décent » en langue polonaise ainsi qu’au taux moyen d’intérêt des billets du Trésor Public (5%). En aucun cas, la situation financière du locataire ne devrait influer sur la détermination de la « décence » du loyer.

            2) Arrêt de la Cour constitutionnelle du 11/09/2006 : La Cour constitutionnelle a déclaré inconstitutionnel l’article 18, section de la loi du 21/06/2006, limitant la responsabilité civile des municipalités pour les préjudices résultant du défaut de fournir des logements sociaux aux locataires qui y ont droit. Cette disposition a par conséquent été annulée. Désormais, les propriétaires peuvent réclamer une indemnisation au titre du préjudice subi à ce titre, sur la base de l’article 417 du Code civil.

3) Loi du 8/12/2006 sur l’aide financière pour les logements sociaux, les logements protégés, les refuges et foyers pour personnes sans domicile fixe : Cette nouvelle loi a pour objectif de résoudre le problème de l’insuffisance de logements sociaux dans les municipalités en fournissant les moyens pour que l’Etat finance de tels logements. Cette loi est entrée en vigueur le 23/12/2006.

            4) Amendement à loi de 1997 sur la gestion du patrimoine immobilier : Le 06/07/2007, la Diète a adopté un amendement visant à introduire un système de recensement des niveaux de loyers dans chaque municipalité. Ce système fournira des informations sur les taux moyens locatifs dans une région donnée et servira d’instrument auxiliaire pour permettre aux juridictions d’évaluer les bases pour fixer ou augmenter les loyers.

5) Autres mesures prévues : Le Ministre de la construction prépare un projet de loi pour assister les propriétaires dont les logements ont été soumis au régime de baux spéciaux. Ces derniers auront droit à une assistance financière de l’Etat pour rénover leurs logements en des termes préférentiels. De plus, le Ministre prépare un nouveau projet de loi permettant aux propriétaires de disposer de leurs biens faisant l’objet de contrat de location. Le projet de cette loi devra être finalisé avant fin 2007.

Des informations complémentaires sont attendues sur le développement de la jurisprudence des tribunaux nationaux concernant la définition du « profit décent », le suivi des travaux législatifs évoqués au point 5 ainsi que sur toute autre mesure visant à prévenir de nouvelles violations similaires. Des clarifications sur la portée de la notion de « loyer de référence » et son introduction dans la législation interne seraient également utiles.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales en particulier les mesures législatives et le développement de la jurisprudence des juridictions nationales.

22860/02          Woś, arrêt du 08/06/2006, définitif le 08/09/2006

Cette affaire concerne la violation du droit d'accès du requérant à un tribunal (violation de l'article 6§1) dans le cadre de son recours devant la Fondation pour la réconciliation germano-polonaise (en vertu du « premier régime d'indemnisation »), chargée d'indemniser les victimes des persécutions nazies.

Le « premier régime d'indemnisation » fut établi sur la base d'un accord conclu le 16/10/1991 entre la Pologne et la République fédérale d'Allemagne. Dans son cadre, en novembre 1991, le gouvernement polonais créa ladite fondation qui fut chargée d'indemniser les victimes des persécutions nazies grâce aux fonds versés par le gouvernement de la République fédérale d'Allemagne.


Le « second régime d'indemnisation »  fut établi en vertu d'une déclaration conjointe conclue le 17/07/2000 par plusieurs Etats, notamment la Pologne, la République fédérale de l'Allemagne, les Etats-Unis, et l'Israël.

Dans le cadre du premier régime d'indemnisation, en février 1994, la commission de vérification (Komisja Weryfikacyjna) de la Fondation accorda au requérant une indemnisation pour le travail forcé qu'il avait effectué entre 1941 et 1945. Etant donné que cette décision ne prenait pas en compte la question de la déportation du requérant, ce dernier fit appel devant la commission d'appel (Odwoławcza Komisja Weryfikacyjna), mais en fut débouté.

En 1999, le conseil d'administration de la Fondation (Zarząd Fundacji) adopta la résolution n° 29/99, selon laquelle ne pouvaient être indemnisés que les travailleurs forcés ayant été déportés, à l'exception des personnes qui avaient été soumises au travail forcé avant l'âge de 16 ans (en février 1944). Par la suite, en mars 2000, le requérant obtint une indemnisation complémentaire, mais seulement au titre du travail forcé effectué avant qu'il ait atteint cet âge, la Fondation ayant considéré que les critères de déportation n'étaient pas remplis en l'espèce. Le requérant attaqua en vain cette décision devant la commission d'appel et devant la Cour suprême administrative. Cette dernière exclut tout contrôle de telles décisions par les juridictions administratives. En outre, conformément à la jurisprudence de la Cour suprême qui estima que la Fondation n'était pas une autorité publique et que, le droit de percevoir une prestation de la Fondation ne relevait pas du droit civil, les juridictions nationales n'étaient pas compétentes pour connaître des demandes concernant un tel droit.

La Cour européenne a estimé, que dans les circonstances particulières de l'espèce les actions de la Fondation concernant les deux régimes d'indemnisation mettaient en jeu la responsabilité de l'Etat polonais (au vu notamment des modalités de la création des organes dirigeants de celle-ci) et que le droit de s'adresser à la Fondation en vue de se faire indemniser au titre des persécutions nazies était un droit « civil » aux fins de l'article 6§1 de la Convention. Elle a jugé que les organes décisionnels de la Fondation, la commission de vérification et la commission d'appel, ne peuvent pas être considérées comme des tribunaux remplissant les exigences de l'article 6§1, notamment au vu de ce que leurs membres étaient nommés et révoqués respectivement par le conseil d'administration et le conseil de surveillance de la Fondation. En outre, en excluant tout contrôle juridictionnel des décisions rendues par cette dernière dans des cas particuliers, les juridictions internes n'avaient laissé au requérant aucune possibilité de les faire contrôler par un « tribunal ».

Mesures de caractère individuel : Le requérant a été indemnisé par la Cour européenne pour le préjudice moral. En outre, à la lumière des informations fournies par les autorités polonaises sur les mesures générales (voir la résolution de la Cour suprême du 27/06/2007ci-dessous), il semble que les griefs du requérant tels qu’invoqués lors de la procédure intentée dans le cadre du premier régime d’indemnisation devant la commission d’appel puissent être examinés par un « tribunal ».

Des contacts bilatéraux sont en cours en vue de clarifier si cette mesure est suffisante.

Mesures de caractère général :

• Informations fournies par les autorités polonaises :

            1) Publication et diffusion de l'arrêt de la Cour européenne : L'arrêt a été publié sur le site Internet  officiel du Ministère de la Justice www.ms.gov.pl et dans le Bulletin de Varsovie Bureau d'information du Conseil de l'Europe (n° 2006/III), avec un commentaire. Il a également été envoyé aux Présidents des cours d'appel.

            2) Cessation de paiements : Le 7/06/2006, la Fondation a cessé de verser des indemnisations au titre du premier régime d'indemnisation par sa Résolution 29/2002 du fait de l'épuisement des fonds versés par le gouvernement allemand. Le second régime d'indemnisation a cessé de fonctionner le 30/09/2006, les derniers versements effectués à titre exceptionnel en vertu de ce régime ont eu lieu jusqu'au 30/12/2006. Il n'est désormais plus possible de recevoir une indemnisation au titre de l'un ou l'autre des régimes d'indemnisation.

            3) Requêtes introduites en droit interne : La Cour constitutionnelle polonaise examine à l'heure actuelle un recours introduit par un certain Stanisław K., soutenu par l'Ombudsman polonais, selon lequel certaines dispositions législatives régissant la compétence et les règles de procédures des juridictions administratives seraient contraires à l'article 45§1 de la Constitution polonaise qui garanti le droit d'accès à un tribunal. Ces dispositions excluent de la compétence des juridictions administratives les décisions rendues par la Fondation pour la réconciliation germano-polonaise alors que ces juridictions sont habilitées de manière générale à contrôler les décisions des autorités administratives. La Cour constitutionnelle devrait rendre prochainement sa décision sur la recevabilité du recours.

Par ailleurs, l'Ombudsman polonais a introduit un recours (zapytanie prawne) devant la Cour suprême portant sur la question de savoir si les décisions définitives des autorités de la Fondation pour la réconciliation germano-polonaise en matière d'assistance financière pouvaient faire l'objet d'un recours judiciaire devant les juridictions de droit commun.


L'Ombudsman s'est référé à cet égard à l'arrêt de la Cour européenne et à la Recommandation du Comité des Ministres aux Etats membres Rec(2000)2 sur le réexamen ou la réouverture de certaines affaires au niveau interne suite à des arrêts de la Cour européenne des Droits de l'Homme. Le 27/06/2007, la Cour suprême a adopté une résolution confirmant que de telles décisions de la Fondation pour la réconciliation germano-polonaise peuvent être attaquées devant les juridictions de droit commun (affaire n° III CZP 152/06).

Enfin, le 12/02/2007, le Parquet a introduit une action civile devant la Cour régionale de Varsovie, au nom de Mme Walentyna B., pour contester le refus de lui octroyer une indemnisation au titre du second régime d'indemnisation. Cette procédure a été introduite en vertu des dispositions du Code de procédure civile permettant aux procureurs de saisir les tribunaux dans l'intérêt de la protection de la prééminence du droit, des droits des citoyens et des intérêts sociaux.

Des informations sont attendues sur les suites données à ces différentes actions judiciaires internes.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard à leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations complémentaires à fournir sur les mesures individuelles et générales.

- Affaires concernant la violation du droit au respect des biens suite aux modifications du plan de développement local

52589/99          Skibińscy, arrêt du 14/11/2006, définitif le 26/03/2007

17373/02           Rosiński, arrêt du 17/07/2007, définitif le 17/10/2007

38672/02           Skrzyński, arrêt du 06/09/2007, définitif le 06/12/2007

Ces affaires concernent des ingérences dans le droit des requérants au respect de leurs biens (violation de l'article 1 du Protocole n° 1), lesquelles ont eu lieu entre 1993 et 2003. Les requérants n’ont pas pu de facto disposer de leurs terrains suite aux amendements aux plan de développement local adoptés entre 1993 et 1994 et ont été menacés d’une expropriation à un moment indéterminé dans le futur.

Par ailleurs, ils ne disposaient d'aucune possibilité d'indemnisation pour l'ingérence subie pendant une période dépassant respectivement 8 et 9 ans en dans la mesure où la loi sur la planification locale de juillet 1994 ne s'appliquait pas aux plans adoptés avant 1995. Une nouvelle législation en la matière, entrée en vigueur en juillet 2003, n'a rien changé à la situation des requérants car elle ne s'appliquait qu'aux plans de développement local adoptés après cette date.

La Cour européenne a estimé qu'un juste équilibre n'avait pas été assuré entre les intérêts généraux et individuels et que les requérants avaient dû supporter une charge excessive.

Mesures de caractère individuel :

1) Affaire Skibińscy : Le plan de développement local a expiré le 31/12/2003 et en avril 2004, la municipalité a accordé à la première requérante la première autorisation d'aménagement.

Par ailleurs la Cour européenne a octroyé une satisfaction équitable au titre des frais et dépens mais a réservé la question de l'application de l'article 41, au titre du préjudice matériel et moral.

2) Affaires Rosiński et Skrzyński : Les plans de développement local ont expiré le 31/12/2002. Le 25/08/2003, le requérant Rosiński, a obtenu la première autorisation d'aménagement (§ 25 de l’arrêt). Le requérant Skrzyński s’est vu octroyer une autorisation d’aménagement définitive le 25/11/2003.

Les deux requérants ont été dédommagés par la Cour européenne pour le dommage moral subi. Néanmoins, il ne ressort pas des arrêts qu’ils aient demandé une indemnisation pour le dommage matériel.

• Evaluation : dans ces circonstances, aucune autre mesure ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général : La Cour européenne a relevé que les mesures affectant les requérants avaient été prises sur la base de la loi de 1994 précitée, et que les législations adoptées successivement en matière de planification locale ne prévoyaient pas de droit à indemnisation avec effet rétroactif (§95 de l'arrêt).

• Informations fournies par les autorités (courrier du 27/08/2007) : Tous les plans de développement local adoptés avant la 01/01/1995 ne sont plus valides et ne peuvent plus être à l’origine de limitations des droits des propriétaires. Dans l’hypothèse où un nouveau plan de développement local serait adopté et imposerait des limitations aux droits des propriétaires, les propriétaires affectés par ses dispositions seront autorisés à réclamer une indemnisation sur la base de l’article 36§§1-3 de la loi de 2003 sur les plans de développement local. Les dispositions légales actuellement en vigueur excluent la possibilité de nouvelles violations similaires.


Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées pour garantir aux personnes dans la même situation que les requérants un droit à une compensation rétroactive pour les dommages subis avant l’entrée en vigueur de la loi de 2003 sur les plans de développement local.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard à leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations complémentaires à fournir sur les mesures générales ;

3.             lors de l’une de leurs prochaines réunions une fois que la Cour européenne se sera prononcée sur le préjudice moral et matériel subi par les requérants dans l’affaire Skibińscy aux fins de l'examen de mesures individuelles éventuelles.

                       - Affaires concernant le contrôle de la correspondance des prisonniers

31583/96          Klamecki n° 2, arrêt du 03/04/03, définitif le 03/07/03

43120/05          Andrulewicz, arrêt du 03/04/2007, définitif le 24/09/2007

20841/02          Drozdowski, arrêt du 06/12/2005, définitif le 06/03/2006

8363/04 Kliza, arrêt du 06/09/2007, définitif le 06/12/2007

10816/02          Kozimor, arrêt du 12/04/2007, définitif le 12/07/2007

51895/99          Kwiek, arrêt du 30/05/2006, définitif le 30/08/2006

73988/01          Łuczko, arrêt du 03/10/2006, définitif le 03/01/2007

14450/02          Maksym, arrêt du 19/12/2006, définitif le 19/03/2007

37641/97          Matwiejczuk, arrêt du 02/12/03, définitif le 02/03/04

42083/98          Mianowski, arrêt du 16/12/03, définitif le 16/03/04

62323/00          Najdecki, arrêt du 06/02/2007, définitif le 06/05/2007

6390/03            Nowicki, arrêt du 27/02/2007, définitif le 27/05/2007

64284/01          Oleksy, arrêt du 28/11/2006, définitif le 28/02/2007

92/03               Pisk-Piskowski, arrêt du 14/06/2005, définitif le 14/09/2005

64283/01          Tomczyk Prokopyszyn, arrêt du 28/03/2006, définitif le 28/06/2006

63905/00          Wasilewski, arrêt du 06/12/2005, définitif le 06/03/2006

Ces affaires concernent en premier lieu des ingérences dans le droit des requérants au respect de leur correspondance pendant leur détention provisoire (violations de l'article 8). Dans les affaires Klamecki n° 2, Drozdowski, Kwiek et Wasilewski, la Cour européenne a conclu que la surveillance de la correspondance des requérants avant le 01/09/1998 (date de l'entrée en vigueur du code de l'exécution des peines de 1997) n'était pas « prévue par la loi » car le droit polonais en vigueur à l'époque ne précisait pas clairement la portée et les modalités du pouvoir d'appréciation accordé aux autorités en la matière. En outre, dans l'affaire Kwiek, la Cour européenne a conclu que la surveillance de la correspondance du requérant avec la Cour constitutionnelle et la Cour européenne après cette dernière date n'était pas non plus « prévue par loi », car contraire aux dispositions législatives en vigueur.

Les affaires Kliza, Kozimor, Łuczko, Maksym, Matwiejczuk, Mianowski, Nowicki, Oleksy, Pisk-Piskowski, Tomczyk Prokopyszyn et Wasilewski ont trait au fait que, entre 1998 et 2002, la correspondance des requérants avec les organes de la Convention, et dans l'affaire Kozimor - avec le Bureau du Sénat, portait la mention « censuré ». La Cour européenne a conclu que ces inscriptions indiquaient selon toute probabilité que les lettres avaient été ouvertes par les autorités nationales, alors que la loi applicable (le code de l'exécution des peines de 1997 et les Règles sur la détention provisoire de 1998) permettait un tel contrôle seulement en présence du détenu. En outre, la censure de la correspondance des requérants avec leur avocat dans les affaires Andrulewicz, Najdecki et Kozimor était aussi « contraire à la loi nationale », car contraire aux dispositions du Code de procédure pénale de 1997.

Dans les affaires Maksym et Wasilewski, au vu de ce dernier élément et étant donné que les lettres des requérants avaient été postées avec un retard significatif, la Cour a également conclu à une violation de l'article 34.

De plus, l'affaire Klamecki porte sur la violation du droit du requérant au respect de sa vie familiale suite à la restriction excessive des contacts du requérant avec son épouse entre août 1996 et août 1997 (violation de l'article 8).

En outre, la Cour européenne a conclu que la détention provisoire des requérants avait été excessivement longue (dans les affaires Klamecki, Matwiejczuk, Najdecki et Oleksy) et que, dans l'affaire Klamecki, la détention avait été ordonnée par un procureur, enfreignant ainsi le droit du requérant d'être aussitôt traduit devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires (violations de l'article 5§3).


L'affaire Klamecki concerne aussi le défaut de caractère contradictoire de la procédure sur la légalité de la détention provisoire du requérant car ni le requérant, ni son défenseur n'avaient eu la possibilité de participer à cette procédure (violation de l'article 5§4).

Enfin, la Cour européenne a conclu que la durée de la procédure pénale dirigée contre le requérant (dans l'affaire Matwiejczuk), ainsi que celle de la procédure civile concernant les demandes de compensation formées par le requérant (dans l'affaire Mianowski), avaient été excessives (violations de l'article 6§1).

Mesures d'ordre individuel: Les requérants ne sont plus en détention provisoire et la Cour européenne a octroyé une satisfaction équitable au titre du préjudice moral subi dans la plupart des affaires.

Informations fournies par les autorités polonaises (lettre du 30/04/2007) : En vertu du droit national, les requérants et les personnes qui allèguent une atteinte à leur droit au respect de leurs correspondances peuvent demander une indemnisation au Trésor public, sur la base de l'article 448 combiné à l'article 24§2 du code civil (par exemple voir l'arrêt de la Cour régionale de Varsovie du 27/11/2006).

Evaluation : dans ces circonstances, aucune autre mesure d'ordre individuel ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général:

       1) Violations du droit d'être aussitôt traduit devant un juge (article 5§3), ainsi que du droit de participer à une procédure portant sur la légalité de la détention provisoire (article 5§4),ces affaires se rapprochent de l'affaire Niedbała (arrêt du 04/07/2000), dont l'examen a été clos par la Résolution ResDH(2002)124 après une réforme de la procédure pénale.

       2) Durée excessive de la détention provisoire (article 5§3), ces affaires peuvent être rapprochées de l'affaire Trzaska (rubrique 4.2, Résolution intérimaire CM/ResDH(2007)75).

       3) Durée des procédures pénales et civiles (article 6§1), ces affaires sont à rapprocher d'autres affaires qui sont pendantes devant le Comité des Ministres pour contrôle des mesures de caractère général (voir notamment Podbielski et Kudła, Résolution intérimaire CM/ResDH(2007)28, 1020e réunion, mars 2008, rubrique 4.2).

       4) Violations du droit au respect de la correspondance des personnes détenues (article 8) et dans l'affaire Wasilewski violation de l'article 34 :

Informations fournies par les autorités polonaises :

a) Législation en vigueur : Le code d'exécution des peines de 1997 a été modifié en septembre 2003. Selon la nouvelle loi, la correspondance des personnes condamnées avec notamment leur avocat (article 8§1), la justice administrative ou les organes de Strasbourg (article 102§11 alinéa 11 et article 10§3) ne peut être censurée ou retenue, mais peut faire seulement l'objet d'une surveillance effectuée par la voie de l'ouverture des lettres en présence du condamné, lorsqu'il existe un risque raisonnable que les lettres contiennent des objets interdits (article 8§3 et 10§2). En ce qui concerne les personnes se trouvant en détention provisoire l'article 217a§1du code dispose que leur correspondance peut être surveillée par l'organe sous la responsabilité duquel elles se trouvent (le procureur ou le tribunal). A moins que la loi ne le prévoie autrement, ils bénéficient des même droits que les personnes condamnées purgeant leur peine dans un établissement pénitentiaire fermé, dans le cadre du régime normal de détention (article 214§1). Des règles plus détaillées, régissant la censure de correspondances des personnes en détention provisoire et des personnes condamnées, ont été introduites dans les règles de mise en œuvre des peines d'emprisonnement d'août 2003 et dans les règles relatives à la détention provisoire du 25/08/2003 (toutes deux entrées en vigueur le 01/09/2003).

b) Projet d'amendement législatif au Code de l'exécution des peines pénales : Le Ministre de la Justice a préparé un projet de loi qui a déjà été soumis au Conseil des Ministres. Ce projet vise notamment :

-           A éliminer la différence de traitement entre le traitement de la correspondance des personnes condamnées d'une part avec leurs avocats et d'autre part avec certaines institutions y compris le pouvoir judiciaire et les organes de la Convention.  Par conséquent ces questions seront régies par le nouvel article 8a selon lequel la correspondance de ces personnes ne peut être soumise à la censure et doit être remise sans retard à leur destinataire. La correspondance ne peut faire l'objet d'un contrôle que s'il existe des soupçons qu'une lettre contienne des objets dont la possession, la transmission, l'envoi ou la commercialisation sont interdits. Dans de tels cas, la correspondance peut être ouverte en présence du condamné et le juge compétent pour l'exécution des peines doit en être informé.

-           A introduire une règle claire selon laquelle la réglementation applicable aux personnes condamnées s'applique également aux autres catégories de détenus (nouvel article217b§2).

-           Enoncer de nouvelles règles plus simples concernant la correspondance des personnes en détention provisoire (nouvel article 217b) : la correspondance est en général transmise par le biais de l'organe responsable de sa détention. Cependant, la correspondance avec les organes de la Convention doit être remise directement à son destinataire (nouvel article 217b§2).

c) Publication, diffusion et mesures de sensibilisation : Les procureurs et les juges ont été chargés de transmettre la correspondance des détenus, y compris celle avec les organes de la Convention, à leur destinataire.


Par courrier du 28/06/2005, les autorités polonaises ont indiqué que le Ministre de la Justice avait envoyé aux présidents des cours d'appel une circulaire attirant leur attention sur les conclusions de la Cour européenne sur la violation de l'article 8 dans l'affaire Matwiejczuk. Le ministre leur a également demandé de diffuser cet arrêt aux juges de leur ressort administratif ainsi qu'au personnel contrôlant la correspondance des détenus afin que ce personnel évite de tamponner cette correspondance avec la mention « censuré ».

Par courrier du 22/11/2005 les autorités polonaises ont informé le Secrétariat de ce qu'en janvier et en septembre 2005 le ministre de la Justice avait attiré encore une fois l'attention des présidents des cours d'appel sur la nécessité d'adopter des mesures visant à garantir le respect de la correspondance des détenus, notamment en assurant que leur courrier leur soit envoyé dans des enveloppes adressées individuellement. Suite à cette demande, il s'est avéré que des manquements au respect des règles concernant le traitement de la correspondance des détenus avaient eu lieu dans certains cas.

Les arrêts de la Cour européenne dans les affaires Klamecki n° 2 et Matwiejczuk ont été publiés sur le site Internet du Ministère de la Justice (http://www.ms.gov.pl).

Développements récents : par courrier du 4/12/2007, les autorités ont informé le Secrétariat d’une instruction du Directeur général des services de prison du 16/11/2007. En vertu notamment de ce texte, des boîtes aux lettres spéciales prévues uniquement pour la correspondance des détenus avec la Cour européenne et les autres instances internationales devraient être installées dans tous les centres de détention en Pologne. Cette instruction est entrée en vigueur le 01/01/2008. En outre, en février 2008 le Secrétariat a eu des rencontres à haut niveau avec les autorités polonaises en vue de discuter de mesures d’exécution dans ces affaires.

Des informations complémentaires sont attendues sur

- la mise en œuvre de l’instruction du 16/11/2007,

- les suites données au projet d'amendement au Code de l'exécution des peines pénales

       5) Violation du droit au respect de la vie familiale (article 8) dans l'affaire Klamecki n° 2 : Le 25/10/2007, l’Agent du gouvernement a demandé au Ministère de la Justice d’envoyer l’arrêt de la Cour européenne dans l’affaire Klamecki n° 2 aux tribunaux pénaux compétents.

La confirmation de cette diffusion est attendue.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ces points:

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations supplémentaires à fournir sur les mesures générales.

                       - 76 affaires de durée de détention provisoire

                       Résolution intérimaire CM/ResDH(2007)75

                       (Voir Annexe pour la liste d’affaires dans le groupe Trzaska)

Toutes ces affaires concernent la durée excessive de la détention provisoire des requérants vu que, pour justifier leur maintien en détention, les juridictions nationales se sont basées sur des motifs qui n'apparaissaient pas « pertinents et suffisants », à la lumière de la jurisprudence de la Cour européenne, et vu l'absence de diligence spéciale dans la conduite de la procédure (violations de l'article 5§3).

Les affaires Baginski, D.P et G.K. concernent également le maintien des requérants en détention provisoire sans base légale entre le 01/01/1997 et le 24/01/1997 du fait que la demande des autorités polonaises de prolongation de la détention avait été déposée après l’expiration du délai fixé dans les dispositions légales transitoires de 1995 (violations de l’article 5§1).

Dans l’affaire Łatasiewicz, la Cour européenne a conclu que la détention du requérant était irrégulière car non basée sur une décision judiciaire (violation de l'article 5§1).

L’affaire Bagiński a trait également à la violation du droit d'être traduit aussitôt devant un juge, le requérant ayant été placé en détention dans un premier temps sur la base d’une décision du procureur (violation de l’article 5§3).

Dans les affaires Baginski, G.K., Trzaska, Wedler et Wesołowski, la Cour européenne a estimé que les procédures visant à contrôler la légalité de la détention provisoire des requérants n'avaient pas revêtu un caractère contradictoire (violations de l'article 5§4). En outre, les affaires Trzaska, Jabłoński et Iłowiecki concernent également le défaut d'examen à bref délai par les tribunaux internes des demandes de mise en liberté formulées par les requérants entre 1993 et 1996 (violations de l'article 5§4).

Les affaires Jabłoński, Szeloch, Iłowiecki, Kreps et Olstowski concernent également la durée excessive des procédures pénales diligentées contre les requérants (violations de l'article 6§1).

Les affaires Cabała, Cegłowski, Dzyruk, G.K., Gąsiorowski et Góral concernent également une violation du droit des requérants à la correspondance avec les organes de la Convention (violations de l'article 8).


Enfin, l’affaire Bagiñski concerne la violation du droit du requérant au respect de sa vie familiale (violation de l'article 8). La Cour européenne a conclu que les restrictions touchant les visites de la mère du requérant, entre décembre 1995 et mai 1996, étaient allées au-delà de ce qui était nécessaire dans une société démocratique pour « la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales ».

Mesures de caractère individuel :

Informations fournies par les autorités polonaises : dans les affaires Olstowski, Iłowiecki et Pasiñski, les procédures pénales se sont terminées respectivement les 03/02/2004, 14/09/2004 et 08/03/2007. Dans les affaires Jarzyński, Kankowski et Krawczak, les requérants ont été libérés le 19/10/2005.

Des informations sont attendues sur la situation du requérant dans les affaires Kozłowski et Jaworski.

Mesures de caractère général :

            1) Violations de l'article 5§3 :

Informations fournies par les autorités polonaises :

a) Mesures législatives: Avec l'entrée en vigueur le 01/09/1998 du nouveau Code de procédure pénale, les motifs de placement et de maintien en détention provisoire ont été modifiés. La détention provisoire peut être ordonnée lorsqu'il existe une forte probabilité que l'accusé a commis une infraction et, cumulativement, il risque de se soustraire à la justice, de faire obstacle au développement de la procédure ou, dans certains cas, de commettre un autre crime. Selon l'article 258§2 du Code de procédure pénale, la mise en détention provisoire peut être justifiée par le risque pour l'accusé d'être condamné à une peine d'emprisonnement lourde (lorsque l'accusation concerne des actes punissables d'au moins 8 ans d'emprisonnement ou lorsque en première instance, l'accusé a été condamné à une peine d'emprisonnement de 3 ans minimum). La durée maximale de la détention provisoire avant le renvoi de l'affaire au tribunal est limitée à 3 mois et dans des cas exceptionnels à 12 mois. Avant que le tribunal ne rende son arrêt, la durée maximale de la détention provisoire est limitée à 2 ans, sauf si la cour d'appel la prolonge au-delà de cette période pour les motifs mentionnés à l'article 263§4 du Code de procédure pénale.

b) Arrêt de la Cour constitutionnelle du 24/07/2006 : Le 24/07/2006 la Cour constitutionnelle a rendu un arrêt par lequel elle a constaté que l'article 263§4 du Code de procédure pénale était contraire à la Constitution polonaise dans la mesure où il permettait de prolonger, dans le cadre d'une procédure d'instruction, la détention provisoire au-delà de la période de 2 ans en raison « des obstacles qu'il était impossible d'éliminer ». Par conséquent, cet article a été modifié le 12/01/2007 et il n'est plus possible de prolonger la détention provisoire au-delà de la période de deux ans pour le motif invoqué ci-dessus. Ceci se réfère seulement à une détention provisoire appliquée avant la fin de l'enquête préliminaire.

c) Diffusion des arrêts de la Cour européenne et pratique des juridictions : Le 04/06/2004 le Ministère de la justice a envoyé une lettre à tous les Présidents des cours d'appel accompagnée d'une analyse de la jurisprudence de la Cour européenne sur les exigences relatives aux motifs de placement et de maintien d'une personne en détention provisoire. Il a été souligné notamment que le motif évoqué au paragraphe 2 de l'article 258 du Code de procédure pénale ne pouvait justifier le maintien en détention provisoire pour une longue période de temps.

En outre, le Ministère de la justice a envoyé des circulaires, attirant l'attention des tribunaux et des procureurs sur le raisonnement exigé pour des décisions de prolongation de la détention provisoire.

Par lettre du 21/03/2006, les autorités polonaises ont fourni des informations sur la pratique récente des juridictions pénales en matière de placement en détention provisoire et de prolongation de cette détention. Parmi les ressorts administratifs des 11 cours d'appel du pays, dans six d'entre eux les juridictions se sont référées expressément dans leurs décisions à la jurisprudence de la Cour européenne (26 affaires) et parfois aussi à la circulaire diffusée auparavant par le ministère de la Justice. Dans la majorité de ces affaires, les tribunaux ont rendu des décisions mettant à terme la détention provisoire et la remplaçant par d'autres moyens préventifs, notamment la surveillance policière ou l'interdiction de quitter le pays. Dans les ressorts administratifs de deux autres cours d'appel, des décisions similaires ont également été rendues, même si les juridictions n'y ont pas mentionné la jurisprudence de la Cour européenne (trois affaires).

Les autorités polonaises ont aussi fourni des statistiques sur la durée moyenne des détentions provisoires (voir Résolution intérimaire CM/ResDH(2007)75).

Développement récent : en février 2008 des rencontres à haut niveau ont eu lieu à Varsovie entre le Secrétariat et les autorités polonaises en vue de discuter des mesures d’exécution dans ces affaires. De surcroît, les autorités ont fourni récemment des informations par écrit sur les mesures envisagées et/ou adoptées en vue de résoudre ce problème. Le Secrétariat est en train de les examiner.

            2) Violations de l’article 5§1 dans les affaires Baginski, D.P et G.K. :

Informations fournies par les autorités polonaises :

Le Ministre de la Justice a adopté pour l’année 2005 « Les lignes directrices pour l’exercice du contrôle de l’activité des juridictions de droit commun », en vertu du règlement du 25/12/2002 sur le mode de contrôle de l’activité administrative de la magistrature. Conformément à ces lignes directrices, les affaires pénales pendantes pour lesquelles la détention provisoire a été prolongée au-delà de 2 ans, doivent être soumises au contrôle des présidents des cours d’appel qui veilleront à ce qu’elles soient examinées avec célérité.


En février 2006 le Ministre de la Justice a envoyé au parquet une lettre rappelant les principes juridiques régissant l’application de la détention provisoire. Dans sa lettre, le Ministre a souligné notamment que les procureurs devaient conduire les enquêtes avec célérité et qu’ils devaient demander aux juges la prolongation de la détention provisoire en principe dans des affaires pour lesquelles le détenu est soupçonné d’avoir commis un crime ou une infraction passible d’une peine de 8 ans ou plus de prison.

De surcroît, en mars 2007, le Ministre de la Justice a envoyé une circulaire aux Présidents des cours d’appel concernant le constat de la violation dans l’arrêt D.P.

Evaluation : dans ces circonstances, aucune autre mesure ne semble nécessaire.

3) Violation de l'article 5§1 dans l’affaire Łatasiewicz : la Cour européenne a conclu que la pratique interne consistant à maintenir une personne en détention en raison du dépôt d'un acte d'accusation résultait de l'absence de règle précise en droit interne, au moment des faits, régissant la situation d'un détenu pendant la procédure judiciaire, après l'expiration de la période de détention fixée dans la dernière ordonnance de mise en détention rendue au stade de l'enquête. Une telle pratique n'est plus possible à la lumière des dispositions du Code de procédure pénale qui prévoient que toute prolongation de la détention provisoire doit s'effectuer sur la base d'une décision judiciaire.

Evaluation : aucune autre mesure ne semble nécessaire

            4) Violation de l'article 5§3 quant au droit d'être traduit aussitôt devant un juge et violations de l'article 5§4 en raison du caractère inéquitable de la procédure visant à contrôler la légalité de la détention provisoire des requérants: Ces affaires sont à rapprocher de l’affaire Niedbała (arrêt du 04/07/2000), dont l’examen a été clos par la Résolution ResDH(2002)124 à la suite de l’entrée en vigueur le 01/09/1998 du nouveau Code de procédure pénale. Conformément à l'article 249 du code, avant de décider du placement en détention provisoire, le tribunal entendra l’accusé. Son avocat sera également autorisé à prendre part à l’audience.

Evaluation : aucune autre mesure ne semble nécessaire

            5) Violations de l'article 5§4 (examen à bref délai des appels contre la détention provisoire) :

• Informations fournies par les autorités polonaises : En vertu de l'article 252§3 du nouveau Code de procédure pénale toute demande contestant une mesure préventive (y compris le placement ou le maintien en détention provisoire) devait être examinée dans le plus court délai. L'article 254§1 prévoit que les demandes sollicitant la levée ou la modification d'une mesure préventive doivent être traitées par le procureur, au stade de l'enquête préliminaire, ou par le juge, lorsque la procédure pénale est pendante au stade de l'examen de l'affaire par un tribunal, dans un délai de trois jours.

Evaluation : dans ces circonstances, aucune autre mesure d'ordre général ne semble nécessaire.

            6) Violations de l'article 6§1 : Ces affaires sont à rapprocher d'autres affaires concernant la durée excessive des procédures devant les juridictions pénales (voir Kudła, arrêt du 26/10/00, Résolution intérimaire CM/ResDH/(2007)28, 1020e réunion, mars 2008, rubrique 4.2)

7) Violations de l'article 8 : Ces affaires sont également à rapprocher des affaires du groupe Klamecki n° 2 (arrêt du 03/04/2003, rubrique 4.2).

            8) Publication des arrêts de la Cour européenne: Les arrêts dans les affaires Trzaska, Baranowski, Chodecki, Goral et Iłowiecki ont été publiés dans le « Bulletin du Centre d'Information du Conseil de l'Europe » et diffusés aux autorités compétentes.

Les arrêts D.P., Olstowski et Chodecki ont également été publiés sur le site Internet du Ministère de la justice http://www.ms.gov.pl.

Les Délégués décident de reprendre l'examen des ces points lors de la 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur la satisfaction équitable, si nécessaire, ainsi que sur les mesures individuelles, le cas échéant, et les mesures générales.

                       - Affaires de durée de procédures concernant des droits et obligations de caractère civil devant les instances et juridictions administratives

33870/96          Fuchs, arrêt du 11/02/03, définitif le 11/05/03

51837/99          Beller, arrêt du 01/02/2005, définitif le 06/06/2005

49961/99          Bogucki, arrêt du 15/11/2005, définitif le 15/02/2006

4054/03            Boszko, arrêt du 05/12/2006, définitif le 05/03/2007

43702/02          Grabiński, arrêt du 17/10/2006, définitif le 17/01/2007

40732/98          J.S. et A.S., arrêt du 24/05/2005, définitif le 12/10/2005

38049/02          Kaniewski, arrêt du 08/11/2005, définitif le 08/02/2006

52495/99          Koss, arrêt du 28/03/2006, définitif le 28/06/2006

77420/01          Kryszkiewicz, arrêt du 06/03/2007, définitif le 06/06/2007

77795/01          Orzechowski, arrêt du 24/10/2006, définitif le 24/01/2007


77741/01          Piekara, arrêt du 15/06/2004, définitif le 15/09/2004

19607/03          Sito, arrêt du 09/01/2007, définitif le 09/04/2007

36431/03          Skowroński, arrêt du 24/01/06, définitif le 24/04/06

13568/02          Stevens, arrêt du 24/10/2006, définitif le 24/01/2007

67979/01          Szenk, arrêt du 22/03/2005, définitif le 22/06/2005

33777/96          Urbańczyk, arrêt du 01/06/2004, définitif le 01/09/2004

Ces affaires ont trait à la durée excessive de procédures concernant des droits et obligations de caractère civil devant les organes administratifs et la Cour suprême administrative (violations de l'article 6§1).

Dans ces affaires, la Cour européenne a relevé que la longueur des procédures était liée à l'inactivité des autorités administratives (et notamment des autorités administratives locales et territoriales dans les affaires Beller, Grabiński, Kaniewski, Koss et Szenk) examinant les demandes des requérants ainsi qu'à celle de la Cour suprême administrative examinant les appels interjetés contre les décisions administratives.

Mesures de caractère individuel :

            1) Affaire Fuchs : les deux procédures sont terminées.

            2) Affaire Beller : Suite à un appel introduit par la requérante, le 14/10/2005, le tribunal administratif de voïévodie de Varsovie a infirmé la décision du voïévode du 23/07/2001 et l'affaire devait être réexaminée par le maire de Varsovie. Le réexamen de cette affaire exige toutefois l'examen par le voïévode d'un recours introduit par l'Agence de sécurité sociale.

            3) Affaire Szenk : la procédure est toujours pendante devant la mairie de Varsovie, dans l'attente de l'issue de la procédure judiciaire visant à supprimer le statut communal de l'immeuble, un préalable nécessaire à l'avancement de la procédure administrative de la restitution de l'immeuble au requérant. En vue d'instituer une telle procédure judiciaire, la mairie est en train de rassembler la documentation nécessaire à cet effet.

            4) Affaire J.S. et A.S. : les 24/01/2006 et 21/03/2006, le ministre de l'Agriculture et du Développement Rural a rendu desdécisions par lesquelles la nationalisation du terrain litigieux a été déclaré partiellement nulle et non avenue. La décision du 21/03/2006 est exécutoire, mais elle a été attaquée par la partie adverse dont le recours est actuellement examiné par la Cour suprême.

En exécution de cette décision, mais uniquement lorsqu'elle sera devenue définitive, les requérants auront le droit de se voir attribuer une partie du terrain litigieux et d'obtenir une indemnisation pour l'autre partie.

            5) Affaire Skowroński : Le 27/02/2007, le starosta a rendu une décision partielle par laquelle il a refusé d'octroyer une indemnisation au requérant. Par conséquent, ce dernier a fait appel. Le 25/05/2007 le voïévode a maintenu cette décision. Le requérant a fait appel devant le Tribunal administratif de voïévodie.

            6) Affaire Koss : par décision du 12/07/2006, le maire de Varsovie a repris d'office la procédure concernant la demande du requérant concernant l'octroi du droit d'usufruit perpétuel, et par décision du 22/12/2006 l'a rejetée. Suite à un appel du requérant, cette décision a été infirmée et le réexamen de l'affaire a été ordonné.

Des informations complémentairessont attendues dans les affaires Beller, Szenk, J.S et A.S, Koss et Skowrońskisur l'état actuel des procédures internes. Concernant les affaires Grabiński et Kryszkiewicz des informations sont attendues sur l'état d'avancement des procédures internes, et le cas échéant, leur accélération.

Mesures de caractère général :

Mesures adoptées

            1) Publication et diffusion

Les arrêts Fuchs et Piekara ont été diffusés aux autorités compétentes en matière de construction et publiés sur le site Internet du ministère de la Justice (http://www.ms.gov.pl). Les arrêts Beller, Fuchs, Piekara, Szenk et Urbańczyk ont été envoyés aux juges de la Cour suprême administrative et des tribunaux administratifs de voïévodie. L'arrêt J.S. et A.S. a été diffusé auprès des fonctionnaires du ministère de l'Agriculture et du Développement rural et publié sur le site Internet du ministère de la Justice.

            2) Durée excessive des procédures devant la Cour suprême administrative :

- Organisation et fonctionnement des juridictions administratives :

La loi sur l'organisation des tribunaux administratifs et la loi sur la procédure devant les tribunaux administratifs, sont entrées en vigueur le 01/01/2004. Ces lois prévoient l'introduction d'un système de deux degrés de juridiction administrative (les tribunaux administratifs de voïévodie, nouvellement créés, et la Cour suprême administrative) et prévoient des solutions pour l'accélération des procédures, comme la médiation ou des procédures en référé.

Avant l'entrée en vigueur de cette réforme, l'examen d'une requête par la Cour suprême administrative à Varsovie, ou par une de ses 11 antennes dans le pays, nécessitait environ 2 ans, compte tenu de l'arriéré judiciaire augmentant régulièrement (environ 70 000 nouvelles requêtes par an) et du nombre insuffisant de juges (300). Suite à la réforme, seize tribunaux administratifs de voïévodie ont été créés. Les effectifs ont augmenté et comportaient au 30/09/2005 424 magistrats, 125 magistrats stagiaires (asesorzy) et 84 assistants judiciaires (referendarze sądowi).


Le 01/01/2004, environ 92 600 affaires ont été transmises aux tribunaux de voïévodie et dans le courant de l'année 2004 ils ont été saisis d'environ 59 000 nouvelles requêtes. En 2004, ces juridictions ont examiné environ 83 000 affaires. Ainsi à la fin de cette année l'arriéré judiciaire s'est réduit à environ 68 000 affaires. Au 31/12/2005, cet arriéré était d'environ 43 780 affaires. En 2006, les tribunaux administratifs de voïévodie ont été saisis de 62 436 nouvelles requêtes. Au 31/12/2006 l'arriéré judiciaire s'élevait à 27 556 affaires et il s'était réduit de 37% par rapport à celui de l'année précédente.

Actuellement la durée moyenne d'examen d'une requête est estimée à environ 5 mois devant les tribunaux administratifs de voïévodie et à 10 mois devant la Cour suprême administrative (lettre des autorités du 18/05/2007).

Selon le président de la Cour suprême administrative, la durée excessive de certaines procédures administratives qui se sont déroulées dans les années 1990 était également due à la réforme structurelle de l'Etat polonais, mise en œuvre au début de cette décennie.

            - Contrôle exercé par les juridictions administratives sur les autorités administratives :

La loi du 30/08/2002 sur la procédure devant les tribunaux administratifs, entrée en vigueur le 01/01/2004, contient des dispositions visant à assurer le contrôle du fonctionnement des organes administratifs. Elle permet aux parties à la procédure administrative d'introduire un recours en carence des autorités administratives. Conformément à son article 154, en cas de non-exécution d'un arrêt constatant la carence d'un organe administratif ou en cas d'arrêt annulant une décision administrative, la partie peut introduire un nouveau recours devant le juge administratif, en demandant qu'une amende soit infligée à l'organe concerné. De surcroît, en vertu de l'article 155 de cette loi, si lors de l'examen de l'affaire la juridiction administrative a constaté des erreurs juridiques substantielles ou des circonstances pouvant impliquer ces erreurs, elle peut rendre une décision en informant l'autorité concernée ou l'autorité hiérarchiquement supérieure à cette dernière. Par conséquent, l'autorité concernée doit prendre position et en informer la juridiction dans un délai de 30 jours.

En outre, la loi du 17/06/2004 sur le recours contre la durée excessive des procédures judiciaires (analysée dans le cadre de l'affaire Kudła, arrêt du 26/10/2000, Résolution intérimaire CM/ResDH(2007)28, 1020e réunion, mars 2008) couvre également les procédures devant les juridictions administratives.

Dans sa lettre du 11/09/2006, le Président de la Cour Suprême Administrative a estimé que les lois précitées garantiront un recours efficace contre la durée excessive de procédures.

            3) Durée excessive de procédures devant les organes administratifs :

- Procédures relevant du droit de la construction :

Suite à la réforme administrative qui a introduit la décentralisation le 01/01/1999, les compétences de l'organe administratif central de la surveillance des constructions ont été limitées. Les procédures en vertu du droit de la construction se déroulent actuellement en première instance soit devant l'inspecteur de la surveillance de construction de powiat soit devant le starosta, et en seconde instance soit devant l'inspecteur de la surveillance de construction de voïévodie soit devant le voïévode. Un amendement important à cette dernière loi, visant à simplifier et accélérer les procédures, a pris effet le 11/07/2003 et a introduit une nouvelle disposition en matière disciplinaire à l'égard des autorités administratives. En vertu de cette nouvelle disposition, les organes administratifs statuant sur les demandes de permis de construire doivent rendre leur décision dans un délai de 65 jours sous peine d'amende infligée par l'organe supérieur.

            - Procédures concernant l'octroi du droit d'usufruit sur les terrains nationalisés à Varsovie:

Le ministre de l'Intérieur et de l'Administration a demandé au maire de Varsovie d'envoyer les arrêts Szenk et Beller aux fonctionnaires de l'Office municipal de Varsovie-Centre chargés de dossiers similaires.

            - Durée de procédures devant les autorités administratives en général :

Dans sa lettre du 11/09/2006, le Président de la Cour Suprême Administrative a indiqué qu'il n'était pas en mesure de trancher la question de savoir si la durée excessive de procédure devant les autorités administratives résultait d'un problème structurel. Selon lui, il incombe au Ministre de l'Intérieur et de l'Administration d'évaluer ce problème.

Par lettre du 25/04/2007, le ministre de l'Intérieur et des Administration a présenté les modifications législatives éventuellement envisagées en vue d'améliorer la célérité et l'efficacité de procédures administratives. Selon lui, il conviendrait notamment de :

- introduire une « procédure participative », à savoir une obligation de désigner un représentant lorsque le nombre de parties à la procédure administrative excède un certain nombre (par exemple 20) ;

- introduire l'interdiction d'abus de droit administratif, en particulier l'interdiction de prolonger à plusieurs reprises le délai légal pour le traitement d'une affaire (article 36 du Code de la procédure administratif) ;

- raccourcir les délais légaux de l'examen des requêtes ou introduire la possibilité d'infliger des amendes aux organes administratifs ne respectant pas les délais légaux (comme en cas du droit de la construction, voir ci-dessus) ;

- introduire l'institution de « l'accord tacite d'un organe administratif » : lorsqu'un organe administratif ne rend pas de décision dans un certain délai (par exemple 30 jours), il est supposé avoir rendu une décision tacite favorable au requérant, dans certaines conditions.


Selon le ministre de l'Intérieur et de l'Administration, certaines de ces propositions n'entrent pas dans le champ de ses compétences et devront être acceptées par les autres ministres concernés.

En outre, actuellement des travaux législatifs sont en cours au Parlement en vue de renforcer la décentralisation et la répartition de certaines tâches dans l'administration publique.

Développement récent : en février 2008 des contacts de haut niveau ont eu lieu entre le Secrétariat et les autorités polonaises afin de discuter des mesures d’exécution dans ces affaires.

 Des informations sont toujours attenduessur :

- la question de savoir si les arrêts Szenk et Beller ont été envoyés aux fonctionnaires de l'Office municipal de Varsovie-Centre et publiés,

- la suite donnée aux propositions du ministre de l'Intérieur et de l'Administration quant à la réforme de la procédure administrative.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales ainsi que sur les mesures individuelles le cas échéant.

- 7 affaires contre le Portugal

73229/01          Reigado Ramos, arrêt du 22/11/2005, définitif le 22/02/2006

L’affaire concerne le manquement de l’Etat défendeur à son obligation de prendre les mesures adéquates et nécessaires pour assurer la mise en œuvre des droits de visite du requérant à l’égard de sa fille (née en 1995) (violation de l’article 8).

Après leur séparation, le requérant et la mère de l’enfant ont conclu un accord prévoyant que le requérant disposait d’un droit de visite à l’égard de l’enfant. Un an plus tard, la mère n’ayant pas respecté les dispositions de cet accord, le requérant a introduit une action judiciaire en vue d’obtenir son exécution forcée. Pendant plusieurs années, la mère n’a pu être localisée en dépit des mesures prises par les juridictions internes (y compris en faisant appel à la police et aux services de sécurité sociale pour assistance). La procédure s’est terminée par une décision judiciaire imposant une amende modeste à la mère et octroyant au requérant des dommages et intérêts tout aussi modestes.

La Cour européenne a estimé que les mesures prises par les autorités portugaises, en vue de la mise en œuvre de cet accord qui est toujours valide, étaient de nature automatique et stéréotypée et qu’aucune mesure concrète et pratique n’avait été prise pour résoudre cette question. La Cour a observé notamment que ni le ministère public ni le tribunal saisi de l’affaire n’ont essayé de réunir les intéressés ou d’impliquer activement des travailleurs sociaux dans la résolution du problème.

Mesures d’ordre individuel : En février 2007, la délégation portugaise a informé le Comité de ce que la mère et l’enfant avaient pu être localisés avec l’assistance de la police judiciaire. Lors d’une réunion qui a eu lieu le 20/06/2007 devant un juge, il a été convenu entre les parties, qu’avant toute prise de décision sur un nouveau régime en matière de droits de visite, l’enfant et les deux parents devaient faire l’objet d’un examen psychologique. En novembre 2007, les autorités portugaises ont indiqué que, conformément aux instructions du juge, l’objet des examens psychologiques et l’institution en charge avaient été définis. Depuis, les examens psychologiques de l’enfant et des parents ont eu lieu et les conclusions de ces examens ont été versées au dossier. 

Des informations sont attendues sur les mesures envisagées sur la base des résultats des examens psychologiques, dans la perspective d’établir un nouvel accord concernant les droits de visite du requérant.

Mesures d’ordre général : Une copie de l’arrêt de la Cour européenne a été envoyée à toutes les autorités concernées, y compris l’Institut de réinsertion sociale qui est l’organisation chargée des enquêtes sociales ordonnées dans le cadre des procédures judiciaires en matière de droits parentaux. L’arrêt a également été traduit et publié sur le site Internet www.gddc.pt. De plus, l’arrêt a été envoyé au Parquet général et à tous les magistrats compétents en matière de droit de la famille. Enfin, il a été demandé aussi bien au Conseil supérieur de la Magistrature qu’à l’Institut de réinsertion sociale d’adopter des mesures appropriées en vue d’éviter de nouvelles violations similaires. En ce qui concerne l’Institut de réinsertion sociale, les autorités portugaises ont indiqué (05/03/2008) que récemment des compétences en matière d’autorité parentale lui avaient été dévolues. Néanmoins, l’Institut envisage de mettre en œuvre des mesures alternatives, notamment des mesures de médiation, visant à la solution de situations conflictuelles dues à la non-exécution de décisions de justice.


Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées par le Conseil supérieur de la Magistrature, ainsi que sur le contenu des mesures envisagées par l’Institut de réinsertion sociale et sur les progrès accomplis dans leur mise en œuvre. Par ailleurs, une évaluation des autorités serait particulièrement utile sur l’efficacité de l’arsenal juridique existant en droit portugais pour assurer le respect des obligations positives en vertu de l’article 8. 

Les Délégués,

1.             prennent note des développements positifs depuis le début de l’année 2007, qui se sont poursuivis en 2008 concernant les rencontres qui ont eu lieu entre les parents et leur accord pour organiser une rencontre entre le père et son enfant, en terrain neutre et en présence des conseillers sociaux ;

2.             invitent les autorités de l’Etat défendeur à intensifier leurs efforts en vue de conduire les parties à un accord, si approprié, concernant les droits de visite du requérant, tel que requis par l’arrêt de la Cour européenne, et à informer régulièrement le Comité à ce titre ;

3.             prennent note de l’intention des autorités concernées de développer des moyens extra‑judiciaires visant à la résolution de situations conflictuelles en matière d’autorité parentale ;

4.             invitent les autorités à soumettre des informations sur l’efficacité et le caractère approprié des moyens existants, légaux ou autres, pertinentes en matière d’autorité parentale ;

5.             décident de reprendre l’examen de ce point à leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière des informations à fournir sur les mesures individuelles ;

6.             décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations complémentaires à fournir sur les mesures générales.

- Affaires concernant l'insuffisance d'indemnisation de terrains expropriés dans le cadre de la réforme agraire de 1975

30533/03          Carvalho Acabado, arrêt du 18/10/2005, définitif le 15/02/2006

21240/02+        Companhia Agrícola de Penha Garcia, S.A. et 16 autres affaires de « réforme agraire », arrêt du 19/12/2006, définitif le 19/03/2007

31677/04           Sociedade Agrícola Herdade da Palma S.A., arrêt du 10/07/2007, définitif le 12/11/2007

Ces affaires concernent le non-respect par l’Etat défendeur d’un juste équilibre entre l’intérêt général et le droit des requérants ou de leurs sociétés au respect de leurs biens (violations de l’article 1 du Protocole n° 1). Les requérants ont été victimes d’un retard excessif quant à la fixation et au paiement de la compensation pour leurs propriétés qui ont fait l’objet d’une expropriation dans le cadre de la réforme agraire de 1975.

Mesures de caractère individuel :

            1) Carvalho Acabado : La Cour européenne a octroyé une satisfaction équitable en équité couvrant le préjudice matériel et moral, en conséquence du retard de paiement de l’indemnisation et du taux d’intérêt moratoire qui était trop bas par rapport à la dépréciation de la monnaie pendant la période en cause.

En mars 2008, les autorités portugaises ont indiqué que la Cour suprême administrative avait rendu un arrêt ordonnant qu’il soit procédé à un nouveau calcul de l’indemnisation due. Le montant avait été fixé à 49.889,65 euros et il a été procédé à un nouveau calcul ainsi qu’au paiement le 21/05/2007, lorsque l’arrêt interne est devenu définitif. Aucune autre procédure dans laquelle le requérant serait partie n’est pendante devant les juridictions nationales.

Evaluation : aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

            2) Companhia Agrícola de Penha Garcia, S.A. et 16 autres affaires: La Cour européenne a octroyé une satisfaction équitable au titre du préjudice matériel ou moral ou les deux selon la situation de chaque requérant. La satisfaction équitable visait à couvrir le retard de paiement de l’indemnisation et du taux d’intérêt moratoire qui était trop bas par rapport à la dépréciation de la monnaie pendant la période en cause.

Lorsque l’affaire Carneiro Vieira da Silva et autres a été introduite (requête n° 1999/04), les sommes dues au niveau interne (indemnisation et intérêts moratoires) n’avaient pas encore été payées.

Des informations sont attendues sur la question de savoir si l'indemnisation et les intérêts octroyés par les juridictions nationales ont été versés aux requérants.

            3) Sociedade Agrícola Herdade da Palma S.A. : La procédure est terminée. La Cour européenne a octroyé une satisfaction équitable en équité au titre du préjudice matériel subi, en conséquence du délai de paiement de l’indemnisation et du taux d’intérêt moratoire qui était trop bas par rapport à la dépréciation de la monnaie pendant la période en cause.

Ÿ Evaluation : aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général : Ces affaires sont à rapprocher de l'affaire Matos e Silva LDA et autres contre le Portugal (arrêt du 16/09/1996) à la rubrique 6.2, suite à l'entrée en vigueur d'une réforme législative sur les tribunaux administratifs (décret législatif 229/96), visant notamment l'accélération des procédures devant les tribunaux administratifs.


Etant donné que des affaires similaires continuent d’être introduites devant la Cour européenne, il serait utile que le Gouvernement soumette une évaluation de la situation afin que le Comité des Ministres puisse apprécier la nécessité d’éventuelles autres mesures générales.

Ÿ Des informations sont attendues sur l’efficacité de la réforme des tribunaux administratifs (Décret législatif 229/96) visant entre autres à accélérer la procédure administrative (voir l’affaire Matos e Silva Lda et autres précitée) et sur toute autre mesure, le cas échéant, pour prévenir des violations similaires à l’avenir.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales, en particulier sur l’efficacité de la réforme visant à accélérer les procédures administratives.

41537/02          Gregório de Andrade, arrêt du 14/11/2006, définitif le 26/03/2007

Cette affaire concerne le fait que le requérant n'a pu saisir la Cour suprême administrative d'un recours en harmonisation de la jurisprudence à l'encontre d'un arrêt de cette cour en matière de droits à pension dans la mesure où cet arrêt lui avait été notifié trop tard par le ministère public (violation de l'article 6§1).

Cette procédure avait été introduite initialement par le ministère public, agissant au nom du requérant.

La Cour européenne a estimé que le ministère public aurait dû informer le requérant en temps voulu du contenu de l'arrêt en cause pour permettre à ce dernier de s'adresser éventuellement à un avocat en vue de poursuivre la procédure puisque manifestement lui-même n'avait pas eu l'intention de donner suite à cette affaire. La Cour a relevé à cet égard que le requérant avait des motifs pertinents de vouloir soumettre la question litigieuse à la Cour suprême vu l'incertitude qui régnait en la matière, à l'époque des faits.

Mesures de caractère individuel : Le requérant est décédé en 2004. Par ailleurs postérieurement aux faits de la présente affaire, l'assemblée plénière de la Cour suprême administrative a rendu une décision de principe sur les droits à pension en question dans cette affaire, dans le cadre d'un recours en harmonisation de la jurisprudence : cette dernière a rejeté des demandes introduites par des personnes dans la même situation que le requérant.

Evaluation : aucune mesure d'ordre individuel ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général :

Des informations ont été demandées sur la procédure portugaise en matière de notification de décisions judiciaires, en particulier dans ce type de procédures. En outre, des informations ont été demandées sur la publication et la diffusion de l'arrêt de la Cour européenne aux autorités compétentes, en particulier au ministère public.

Les autorités portugaises ont fourni des informations sur la notification des décisions de justice et sur la révision des procédures internes (30/10/2007) et sur la publication (13/03/2008). Elles sont en cours d’examen.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point à leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), aux fins de l'examen des mesures générales.

25053/05           Ferreira Alves n° 3, arrêt du 21/06/2007, définitif le 21/09/2007

7623/04 Antunes et Pires, arrêt du 21/06/2007, définitif le 21/09/2007

Ces affaires concernent la violation du droit des requérants à un procès équitable, du fait de la non-transmission aux requérants de plusieurs documents présentés par le ministère public ainsi que des notes du juge de première instance à l’intention de la juridiction d’appel (violations de l’article 6§1) dans le cadre de procédures civiles.

La Cour européenne a estimé que le droit à un procès équitable avait été violé dans la mesure où ces deux types de documents auraient dû être transmis aux requérants au motif que, d’une part, ceux-ci ont le droit d’être informé et de pouvoir commenter tout acte soumis au cours de la procédure, et d’autre part, ces documents avaient pesé de façon significative sur la décision du tribunal.

Mesures de caractère individuel: Dans les deux affaires la Cour européenne a constaté que le constat d’une violation constituait en soi une satisfaction équitable adéquate au titre du préjudice moral subi par les requérants

Dans l’affaire Ferreira Alves n° 3, le droit de visite du requérant à l’égard de sa fille a été limité, à la suite de la procédure mise en cause. Si le requérant le souhaite, il peut intenter une nouvelle procédure pour la détermination de son droit de visite.

Evaluation : Dans ces circonstances, aucune mesure individuelle ne semble nécessaire.

La procédure mise en cause dans l’affaire Antunes et Pires ne porte pas sur le fond du litige opposant les requérants à des personnes privées mais sur le montant des dommages et intérêts que les requérants ont été condamnés à payer.


Les requérants contestaient notamment le fait que le tribunal ait basé sa décision sur le rapport commun de l’expert du tribunal et de celui de la partie opposée, auquel l’expert désigné par les requérants avait refusé de se joindre. La différence entre le montant retenu par le tribunal et celui indiqué par l’expert désigné par les requérants est d’environ 800 euros. 

Evaluation : Dans ces circonstances aucune mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général: Il apparaît que le droit portugais ne prévoit pas la notification des documents présentés par le ministère public. De plus, il apparaît de l’application conjointe du Code de procédure civile (articles 668§4, 669 et 744) et de la jurisprudence (Cour d’Appel d’Evora, Arrêt du 29/03/1979) qu’il n’y a pas d’obligation de transmettre aux parties les notes rédigées par le juge de première instance à l’intention de la juridiction d’appel.

Des Informations sont attendues sur d’éventuelles mesures, y compris des mesures législatives le cas échéant. En tout état de cause, les autorités sont invitées à envisager la publication des arrêts de la Cour européenne dans ces deux affaires et leur ample diffusion aux autorités compétentes en vue de prévenir de futures violations similaires de la Convention.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales.

- 47 affaires contre la Roumanie

31679/96          Ignaccolo-Zenide, arrêt du 25/01/00

Cette affaire concerne l'absence de mesure adéquate et suffisante prise par les autorités roumaines pour l'exécution d'un jugement en référé (rendu en décembre 1994 en application de la Convention de La Haye) ordonnant la restitution de ses enfants à la requérante. Malgré ce constat de violation, les décisions judiciaires octroyant un droit de visite à la requérante n'ont pas été exécutées en raison notamment de l'attitude du père des enfants qui a refusé de coopérer et a contesté devant les juridictions supérieures les décisions favorables à la requérante, en obtenant un sursis à l'exécution (violation de l’article 8).

Mesures de caractère individuel : Aucune mesure n'est requise, les enfants ayant atteint l'âge de la majorité (la fille cadette en septembre 2002). La Cour européenne a alloué la requérante une satisfaction équitable pour le préjudice moral.

Mesures de caractère général :

            1) Violation de l'article 8 :

- La loi n° 369/2004 sur la mise en œuvre de la Convention de la Haye a été adoptée par le Parlement le 15/09/2004, afin de renforcer l'efficacité des procédures concernant le retour des enfants enlevés. Parmi les nouvelles mesures mentionnées figurent la création d'une juridiction spécialisée (le Tribunal Départemental pour les mineurs et la famille de Bucarest) pour l'examen des demandes de retour d'enfants en vertu de la Convention de la Haye, et la mise en place d'une procédure par laquelle le tribunal peut infliger une amende dissuasive au parent qui refuse d'exécuter volontairement son obligation de rendre l'enfant ou de permettre un droit de visite. L'étude des dispositions et de l'application de la loi n° 369/2004 fait partie de la formation initiale des auditeurs de justice, dans le cadre des disciplines « Droit de la famille » et « Convention européenne des droit de l'homme ». Dans ce cadre, les auditeurs analysent l'arrêt de la Cour dans l'affaire Ignaccolo-Zenide eu égard aux dispositions de la Convention de la Haye. De plus, l'application de la loi n° 369/2004 reste une priorité dans la formation continue et fait partie des sujets de séminaires organisés par l'Institut dans le cycle des formations « La justice pour les mineurs » et « La Convention européenne - aspects civils ».

Pourtant, il semble que la loi ne prévoit pas explicitement la possibilité que l'enfant enlevé soit soumis à une thérapie psychologique en vue de le préparer à renouer des contacts avec le parent avec lequel il ne vit pas, une telle possibilité n'existant que pour le cas où des droits de visite ne peuvent pas être exercés en raison de l'opposition constante de l'enfant qui manifeste des sentiments d'hostilité envers son parent. En outre, la loi ne prévoit pas explicitement la possibilité pour les parents dont les enfants ont été enlevés d'obtenir un droit de visite provisoire alors que les procédures concernant le retour des enfants en vertu de la Convention de la Haye sont pendantes.

Cependant, les autorités roumaines considèrent que ces questions sont réglées, soit indirectement dans la nouvelle loi, soit par d’autres actes juridiques :

- Suivi psychologique : une mesure de suivi psychologique de l'enfant pendant la procédure d'examen de la demande de retour peut être prise par l'instance judiciaire en vertu des dispositions de la loi n° 369/2004. Comme la loi n° 369/2004 prévoit dans son article 9 la présence obligatoire d'un psychologue lors de l'audience de l'enfant, l'instance peut décider que le même psychologue, ou bien un psychologue de la Direction Générale de l'Assistance Sociale, assiste l'enfant.


- Droits de visite : en réponse aux demandes du Conseil Supérieur de la Magistrature, les magistrats roumains ont exprimé une opinion majoritaire en faveur de la possibilité pour le parent qui demande aux autorités roumaines le retour de son enfant déplacé de manière illicite sur le territoire roumain, de se voir octroyer un droit de visite tant pendant l'examen de sa demande qu'en cas de refus de retour. Ce droit sera accordé sur demande en vertu des dispositions du Code de la famille roumain qui prévoit un droit de visite pour le parent qui ne vit pas habituellement avec l'enfant. Cette disposition est également interprétée au bénéfice du parent qui demande aux autorités roumaines de reconnaître le caractère illicite de la présence de son enfant en Roumanie.

De plus, conformément aux dispositions de la loi n° 272/2004 sur la protection et la promotion des droits de l'enfant, l'enfant a le droit de maintenir des relations personnelles et des contacts directs avec ses parents, droit dont l'exercice est établi par l'instance judiciaire. Ce droit est également reconnu aux enfants dont les parents vivent habituellement dans des pays différents (articles 16 et 17 de la loi n° 272/2004).

Les 12-13 mars 2008, le Secrétariat a participé à une réunion bilatérale à Bucarest avec les autorités impliquées dans la mise en œuvre de la Convention de la Haye de 1980.

Les autorités roumaines sont invitées à fournir par écrit les informations présentées pendant cette réunion, en particulier celles relatives à l’application de la nouvelle loi par les autorités internes compétentes.

            2) Publication et diffusion : L'arrêt de la Cour européenne a été publié au Journal Officiel. Par ailleurs, les autorités roumaines ont indiqué que l'arrêt (accompagnée d'une circulaire soulignant les dispositions de la Convention de La Haye) avait été diffusé aux juridictions civiles, aux ministères compétents et aux services sociaux.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard à leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

37284/02          Lafargue, arrêt du 13/07/2006, définitif le 13/10/2006

L'affaire concerne l'atteinte au droit au respect de la vie familiale du requérant en raison du manquement des autorités roumaines à leur obligation de prendre des mesures adéquates et suffisantes pour assurer le respect du droit du requérant de visite et d'hébergement à l'égard de son fils, né en 1995, pendant une période d'environ six ans (violation de l'article 8).

Après le divorce du requérant en 1997, la garde de l'enfant a été attribuée à la mère. Par une ordonnance judiciaire du 16/12/1999 (définitive le 03/05/2000), le requérant s'est vu octroyer un droit de visite et d'ébergement l'autorisant à passer une semaine avec son fils pendant les vacances d'hiver et deux semaines pendant les vacances d'été. Le requérant demanda l'exécution forcée de cette décision au service des huissiers de justice auprès du tribunal d'instance de Bucarest. Il ne put obtenir l'exécution forcée en raison du comportement de la mère qui ne répondit pas aux convocations ou se présenta seule alors qu'elle devait amener l'enfant ou refusa de laisser son ex-mari, accompagné d'un huissier de justice, entrer dans son appartement.

A la suite d'une demande des autorités françaises en vertu de la Convention de la Haye de 1980 concernant les aspects civils de l'enlèvement international des enfants, les autorités roumaines ont introduit une action demandant la mise en place d'un programme détaillé de visite du requérant. Le tribunal de première instance de Bucarest a établi un programme de visite provisoire accordant au requérant un droit de visite tous les deux week-end du mois (de 16 heures le vendredi à 17 heures le dimanche). Cependant, le requérant n'a pu rencontrer son fils qu'au début de 2005 pendant une période de 5 mois et après communication de la présente requête au gouvernement. De plus les autorités roumaines n'ont infligé qu'une seule sanction pécuniaire à l'ex-femme du requérant, d'un montant assez faible.

Mesures de caractère individuel : Selon l’arrêt de la Cour européenne les autorités n'ont pas poursuivi le programme de rencontres entre le requérant et son enfant à l'issue d'une période de 5 mois en 2005, bien que les rapports des psychologues aient attesté de l'efficacité de telles rencontres.

Informations fournies par les autorités roumaines : Le requérant a passé une semaine avec son fils pendant les vacances d'hiver en 2006.

Le 27/03/2007 le Tribunal de première instance de Bucarest a décidé que le fils du requérant devait subir un traitement psychologique de deux mois.

Par décision du 22/06/2006 (définitive en mai 2007) le Tribunal de Bucarest a établi un calendrier de visites pour le requérant. Selon ce calendrier, le requérant peut rendre visite à son fils du vendredi (18 h.) au dimanche (18 h.) pendant la première et troisième semaine de chaque mois. Des séjours ont également été prévus pendant la première semaine des vacances scolaires de Pâques, du 15/07 (18 h.) au 30/08 (18 h.) et pendant la première semaine des vacances de Noël. Cette décision prévoit la possibilité d’envoyer le fils du requérant pendant ces périodes au domicile de ce dernier en France. Par lettre du 4/06/2007, le Ministère de la justice a demandé à un huissier de prendre toutes les mesures nécessaires afin d’assurer l’exécution de cette décision.

Sont attendues des informations complémentaires sur l’exécution effective de ces décisions.


Mesures de caractère général :

            1) Dispositions législatives générales régissant l'exercice du droit de visite

Des informations sont attendues sur toute disposition législative d'ordre général visant à assurer le respect des obligations positives de l'Etat en vertu de l'article 8 au titre des droits de visite. En particulier, des informations seraient utiles en ce qui concerne le caractère adéquat et l'effectivité des moyens prévus à cet effet (par exemple des mesures d'exécution forcée y compris des sanctions, une assistance psychologique et sociale etc.) et leur capacité à assurer la mise en œuvre des droits légitimes des personnes intéressées ainsi que des décisions judiciaires. En outre, des informations seraient utiles sur toute autre mesure éventuelle envisagée par les autorités roumaines à cet égard.

2) Dispositions législatives spécifiques concernant la mise en œuvre de la Convention de la Haye de 1980 s'agissant du respect des droits de visite

a) Le 15/09/2004, la Roumanie a adopté la loi 369/2004 concernant la mise en œuvre de la Convention de la Haye de 1980 concernant les aspects civils de l'enlèvement international des enfants (entrée en vigueur le 29/12/2004). Des dispositions particulières traitent du droit de visite :

- Mesures d'exécution forcée

La loi 369/2004 prévoit que l'Autorité centrale roumaine (le Ministre de la Justice) s'efforcera de trouver une solution à l'amiable pour ce qui est de l'exercice des droits de visite. En cas d'échec d'une solution à l'amiable et sur demande explicite du titulaire de ces droits, l'Autorité centrale roumaine devra prendre toutes les mesures nécessaires pour la mise en œuvre de ces droits. Ainsi, la loi prévoit une sanction civile initiale d'ordre pécuniaire (approximativement de 125 à 625 euros). A défaut d'exécution, les règles générales en matière d'exécution forcée des décisions judiciaires s'appliquent. De plus, le tribunal peut ordonner au défendeur de payer une amende civile de l'ordre de 12 à 25 euros pour chaque jour de retard.

- Préparation de l'enfant à des contacts avec son parent

La loi 369/2004 prévoit explicitement la possibilité d'une thérapie psychologique pour l'enfant, pendant une période maximale de 3 mois, lorsque les droits de visite ne peuvent être exercés en raison de l'opposition constante de l'enfant qui manifeste des sentiments hostiles à l'égard de son parent (article 18).

b) le 05/04/2005, le Ministre de la Justice, sur la base de l'article 24 de loi 369/2004, a adopté l'ordonnance n° 509/C approuvant les règles sur les modalités d'exercice des devoirs du Ministre de la Justice, agissant en tant qu'Autorité centrale conformément à la loi 100/1992 sur l'adhésion de la Roumanie à la Convention de la Haye de 1980.

Les autorités roumaines sont invitées à fournir des exemples de l'application de la loi 369/2004 et de l'ordonnance n° 509/C montrant des changements positifs de la pratique des autorités nationales depuis les faits de cette affaire.

Les 12-13 mars 2008, le Secrétariat a rencontré bilatéralement à Bucarest les autorités impliquées dans la mise en œuvre de la Convention de la Haye de 1980.

Les autorités roumaines sont invitées à fournir par écrit les informations présentées pendant cette réunion.

            3) Publication et la diffusion de l'arrêt de la Cour européenne aux autorités concernées :

Des informations sont attendues à ce titre.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

- 1 affaire contre la Roumanie et 1 affaire contre la Hongrie et la Roumanie

71099/01          Monory, arrêt du 05/04/2005, définitif le 05/07/2005

7198/04            Iosub Caras, arrêt du 27/07/2006, définitif le 11/12/2006

Ces affaires concernent des questions liées à l'application par les autorités roumaines de la Convention de la Haye de 1980 concernant les aspects civils de l'enlèvement international des enfants (violations de l'article 8).

Dans l'affaire Monory, la Cour européenne a condamné la manière dont les autorités roumaines avaient traité la demande du requérant visant le retour en Hongrie de sa fille (âgée de presque 4 ans) qui avait été gardée en janvier 1999 en Roumanie par sa femme sans son consentement. La demande visant le retour de l'enfant formulée par le requérant en vertu de la Convention de 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants a été finalement rejetée en février 2000 par la cour d'appel d'Oradea. Les juridictions roumaines ont notamment conclu que l'enfant n'avait pas été retenu illicitement par sa mère car le requérant ne bénéficiait pas d'un droit de garde exclusif. En outre, elles ont noté que l'enfant était déjà intégré dans son nouvel environnement.


La Cour européenne a conclu que les autorités roumaines n'avaient pas fait d'efforts adéquats et efficaces afin d'assister le requérant dans sa tentative d'obtenir le retour de son enfant, du fait :

- qu'elles avaient mal interprété la Convention de la Haye comme n'étant pas applicable au cas d'espèce, en dépit de son sens évident qui ressort du texte même de la Convention, de son Rapport explicatif et de la pratique commune reconnue des autres Etats européens ;

- qu'elles n'avaient pas répondu à l'urgence de la situation, en laissant s'écouler plus de douze mois avant d'adopter la décision définitive de rejet de la demande du requérant, tout en indiquant que l'enfant s'était adaptée à son nouvel environnement ;

- qu'elles avaient omis de prendre, conformément à l'article 7 de la Convention de la Haye, toutes les mesures provisoires, y compris des mesures extrajudiciaires, qui auraient pu contribuer à prévenir de nouveaux dangers pour l'enfant ou des préjudices pour les parties concernées.

L'affaire Monory concerne également la durée excessive de la procédure concernant le divorce et le droit de garde devant les juridictions hongroises (violation de l'article 6§1). La procédure a été introduite par le requérant le 28/04/1999 et a pris fin le 29/10/2003, lorsque le tribunal de première instance de Vác a prononcé le divorce du couple et a octroyé à la mère le droit de garde de l'enfant.

Dans l'affaire Iosub Caras, en novembre 2001, le Ministre de la Justice roumain a reçu une demande en vertu de la Convention de la Haye en vue du retour de la fille du requérant, ce dernier se plaignant de ce que sa femme retenait illégalement leur fille en Roumanie, sans son consentement. En janvier 2002, le Ministre de la Justice, agissant en tant qu'Autorité centrale aux fins de la Convention de la Haye, a introduit une procédure au nom du requérant en vue du retour de l'enfant. Cette demande a été rejetée en juin 2003 par décision définitive de la Cour d'appel de Bucarest au motif que, depuis l'introduction de la procédure en vertu de la Convention de la Haye, une autre juridiction roumaine avait prononcé le divorce des parents et octroyé la garde de l'enfant à la mère par décision définitive du 18/09/2002.

La Cour européenne a conclu que les autorités roumaines avaient manqué à leurs obligations positives en vertu de l'article 8 au motif que :

- en n'informant pas, dans le cadre de la procédure de divorce, de l'existence d'une procédure en vertu de la Convention de la Haye, elles avaient privé la Convention de la Haye de tout effet utile à savoir d'empêcher l'adoption d'une décision dans l'Etat où l'enfant avait été retenue ;

- le temps requis pour l'adoption d'une décision définitive dans cette affaire (plus de 18 mois depuis l'introduction de la requête en vue du retour de l'enfant jusqu'à l'adoption d'une décision définitive) avait méconnu l'urgence de la situation.

La Cour européenne a également exprimé sa préoccupation du fait que les juridictions nationales, statuant en vertu de la Convention de la Haye, avaient basé leur décision notamment sur le fait que les droits de garde avaient été tranchés au fond alors que la procédure en vertu de la Convention de la Haye était toujours pendante.

Mesures de caractère individuel :

            1) Affaire Monory : Du fait que l'enfant réside actuellement en Roumanie, des informations ont été demandées aux autorités roumaines sur la question de savoir si le requérant bénéficie à présent d'un droit de visite. Par lettre du 30/11/2005, les autorités roumaines ont indiqué que le requérant n'avait effectué aucune démarche en vertu du droit roumain afin d'exercer son droit de visite.

2) Affaire Iosub Caras : Aucune. La Cour européenne a relevé que le refus des juridictions nationales en vertu de la Convention de la Haye d'ordonner le retour de l'enfant ne semblait pas arbitraire dans la mesure où il était également basé sur d'autres arguments constituant une interprétation des faits et des preuves soumises. La Cour européenne a octroyé au requérant une satisfaction équitable au titre du préjudice moral subi

Mesures de caractère général :

            1) Violation de l'article 8 :

- Application adéquate de la Convention de la Haye de 1980

Différentes mesures relatives à l'application adéquate de la Convention de la Haye de 1980 sont examinées dans le contexte de l'affaire Ignaccolo-Zenide (rubrique 4.2). Dans le contexte des présentes affaires, il convient de souligner qu'en vertu de la loi n° 369/2004 sur la mise en œuvre de la Convention de la Haye de 1980, une juridiction spécialisée (le Tribunal Départemental pour les mineurs et la famille de Bucarest) a été créée pour l'examen des demandes de retour d'enfants en vertu de la Convention de la Haye de 1980. De plus, l'étude des dispositions et de l'application de la loi n° 369/2004 fait partie de la formation initiale des auditeurs de justice, dans le cadre des disciplines « Droit de la famille » et « Convention européenne des droit de l'homme ». Dans ce cadre, les auditeurs analysent l'arrêt de la Cour dans l'affaire Ignaccolo-Zenide eu égard aux dispositions de la Convention de la Haye. De plus, l'application de la loi n° 369/2004 reste une priorité dans la formation continue et fait partie des sujets de séminaires organisés par l'Institut dans le cycle des formations « La justice pour les mineurs » et « La Convention européenne - aspects civils ».

Des informations sont attendues sur les autres mesures prises ou envisagées pour prévenir de nouvelles violations similaires résultant en particulier du défaut d'information des juridictions nationales de l'existence d'une procédure en vertu de la Convention de la Haye de 1980.


- Nécessité de répondre à l'urgence de la situation

• Des données statistiques, y compris des exemples pertinents, sont attendues sur la durée des procédures relatives à l'application de la Convention de la Haye de 1980

- Nécessité de prendre les mesures provisoires pertinentes

Un certain nombre d'informations, en particulier relatives au droit de visite, ont été fournies dans le contexte de l'affaire Ignaccolo-Zenide (rubrique 4.2)

Les 12-13 mars 2008, le Secrétariat a participé à une réunion bilatérale à Bucarest avec les autorités impliquées dans la mise en œuvre de la Convention de la Haye de 1980.

Les autorités roumaines sont invitées à fournir par écrit les informations présentées pendant cette réunion.

            2) Publication et diffusion : L'arrêt Monory a été traduit et publié au Journal Officiel en Roumanie et sur le site Internet de la Cour suprême de cassation et justice (http://www.scj.ro/decizii_strasbourg.asp). En outre, il a été transmis au Tribunal de district de Bucarest qui assure à titre transitoire les fonctions de juridiction spécialisée en la matière.

Sont également attendues la publication de l'arrêt de la Cour européenne dans l'affaire Iosub Caras et sa diffusion aux autorités nationales concernées.

            3) Violation de l'article 6§1 dans l'affaire Monory, cette affaire est à rapprocher du groupe Tímár (1020e réunion, mars 2008, rubrique 4.2). L’arrêt dans l’affaire Monory a été publié sur le site Internet du Ministre de justice et exécution hongroise.

Confirmation est attendue de la diffusion de l'arrêt en raison notamment du constat de la Cour européenne selon lequel une diligence particulière est requise quant aux litiges concernant la garde des enfants.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

10337/04          Lupsa, arrêt du 08/06/2006, définitif le 08/09/2006

33970/05          Kaya, arrêt du 12/10/2006, définitif le 12/01/2007

Ces affaires concernent l'atteinte au droit au respect à la vie familiale et privée des requérants en raison de leur expulsion, en août 2003 et en avril 2005, basée sur des considérations de sécurité nationale (violations de l'article 8).

La Cour européenne a estimé que ces mesures n'étaient pas prévues par une loi répondant aux exigences de la Convention. A cet égard, elle a relevé que les requérants, un citoyen serbe et un citoyen turc, avaient été déclarés indésirables et interdits de séjour sur ordonnance du Parquet au motif que le Service de Renseignements roumain avait des informations suffisantes et sérieuses selon lesquelles ils menaient des activités de nature à mettre en danger la sécurité nationale. Or, aucune procédure n'avait été introduite à leur encontre pour avoir participé à la commission d'une quelconque infraction en Roumanie ou dans un autre pays et ils n'avaient reçu aucune précision sur les allégations à leur encontre. De plus, dans l'affaire Lupsa, en violation du droit interne, le requérant n'avait pas reçu l'ordonnance le déclarant indésirable qu'après son expulsion. Enfin, la Cour d'Appel de Bucarest s'était bornée à un examen purement formel des ordonnances du Parquet.

Ces affaires concernent également le non-respect des garanties procédurales dans le cadre de la procédure d'expulsion des requérants (violations de l'article 1 du Protocole 7). La Cour européenne a rappelé que l'ordonnance d'urgence n° 194/2002 qui formait la base légale pour l'expulsion des requérants, n'avait pas offert les garanties minimales contre l'arbitraire des autorités. Par conséquent, bien que l'expulsion des requérants ait eu lieu en exécution de décisions prises conformément à la loi, cette loi ne répondait pas aux exigences de la Convention. En tout état de cause, les autorités ont également méconnu les garanties de l'article 1 a) et b) du Protocole 7.

Mesures de caractère individuel : Les autorités roumaines ont indiqué que les requérants pouvaient demander le réexamen des décisions en question en vertu de l'article 322 (9) du Code de procédure civile. La Cour européenne leur a alloué une satisfaction équitable pour le préjudice moral subi.

Evaluation : aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général :

Le 26/03/2007, l'ordonnance d'urgence n° 194/2002 a fait l'objet de certaines modifications. Ainsi, selon le nouveau libellé de l'article 83, la décision visant à déclarer un étranger indésirable est prise par la Cour d'appel de Bucarest, saisie par le procureur auprès de cette cour sur proposition d'autorités chargées d'assurer l'ordre public et de la sécurité nationale. Les données et les informations sur la base desquelles une telle décision est prise, sont mises à la disposition de l'instance judiciaire dans les conditions prévues par les actes normatifs réglementant le régime des activités relatives à la sécurité nationale et à la protection des informations classifiées. Les soumissions du procureur sont examinées en chambre du conseil, siégeant à huis clos, les parties ayant été notifiées.


L'instance judiciaire porte à la connaissance de l'étranger les faits se trouvant à la base de ces soumissions. Un arrêt motivé doit être prononcé dans un délai de 10 jours à compter des soumissions formulées par le procureur. Il est définitif et doit être communiqué à l'étranger ainsi qu'à l'Autorité pour les étrangers, si l'étranger est déclaré comme étant indésirable, afin que la décision judiciaire soit mise en exécution.

• Tandis que le Secrétariat examine actuellement ces informations, des clarifications supplémentaires sont attendues sur la question de savoirsi la loi modifiée garantit également que la personne concernée bénéfice d'une procédure contradictoire afin de pouvoir présenter son point de vue et réfuter les arguments des autorités (§38 de l'affaire Lupsa). Dans ce contexte, les autorités roumaines devraient tenir compte de ce que, selon la jurisprudence de la Cour européenne, les personnes faisant l'objet de mesures basées sur des considérations de sécurité nationales, ne doivent pas être privées de toutes les garanties contre l'arbitraire.

Les deux arrêts ont été publiés au Journal Officiel et sur le site Internet de la Haute Cour de cassation et Justice après avoir été traduits.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales ainsi que de l’évaluation des informations déjà reçues concernant les mesures générales..

28341/95          Rotaru, arrêt du 04/05/00 - Grande Chambre, Résolution intérimaire ResDH(2005)57

L'affaire concerne une atteinte à la vie privée du requérant du fait que la législation roumaine pertinente ne contenait pas de garanties suffisantes contre des abus concernant la collecte, la détention et l'utilisation d'informations par le service roumain de renseignements (SRI). La Cour européenne a conclu que la détention et l'utilisation par le SRI d'informations sur la vie privée du requérant n'étaient pas « prévues par la loi » au sens de la Convention (violation de l'article 8).

L'affaire concerne également une atteinte au droit à un recours effectif devant une instance nationale qui puisse statuer sur la demande du requérant de modification ou de destruction du fichier (violation de l'article 13).

Enfin, l'affaire concerne une atteinte au droit du requérant à un procès équitable en raison de l'omission d'une Cour d'appel d'examiner une demande en réparation et de remboursement de frais (violation de l'article 6§1).

Mesures de caractère individuel :La délégation roumaine a indiqué qu'il n'y avait pas de fiche individuelle concernant le requérant. Après l'arrêt de la Cour européenne, le document détenu par le SRI, sur la base duquel le requérant avait été par erreur indiqué comme appartenant à une organisation d'extrême droite a été modifié afin d'éviter toute confusion (il s'agissait d'une autre personne portant le même nom que le requérant).

Les autorités roumaines ont indiqué que l'arrêt de la Cour européenne avait été ajouté au dossier du SRI, afin qu'aucune confusion de ce type ne puisse se produire à nouveau.

Mesures de caractère général :

1) Etat d'avancement de la réforme législative :

Des informations ont été demandées sur la réforme législative visant à remédier aux défaillances de la loi n° 14/1992 sur l'organisation et le fonctionnement du service roumain de renseignements constatées par la Cour européenne (en particulier concernant la manière dont le SRI gère les archives reprises des anciens services secrets) ainsi que sur l'état d'avancement de la réforme de la loi sur la sécurité nationale dont certaines dispositions (notamment celles concernant la procédure permettant d'obtenir des informations visant la sécurité nationale) sont pertinentes pour l'exécution de la présente affaire.

Adoption de la Résolution intérimaire : Le 05/07/2005, le Comité des Ministres a adopté la Résolution intérimaire ResDH(2005)57 dans laquelle il a pris note avec intérêt des dispositions de la loi no 535/2004 sur la prévention et la répression du terrorisme. Ces dispositions prévoient une procédure de contrôle judiciaire pour toute mesure de surveillance secrète, également dans les cas impliquant des atteintes à la sécurité nationale. Néanmoins, le Comité a constaté avec regret que, plus de cinq ans après la date de l'arrêt, plusieurs des défaillances relevées par la Cour européenne ne semblaient toujours pas avoir été corrigées, notamment en ce qui concerne la procédure visant l'accès aux archives reprises par le SRI des anciens services de renseignements (autres que la Securitate), l'absence de réglementation quant à l'ancienneté des informations pouvant être consignées par les autorités, ou l'impossibilité de contester la détention de ces informations et, sauf dans les cas prévus par la loi no 187/1999, leur véracité.

Dès lors, le Comité en a appelé aux autorités roumaines d'adopter rapidement les réformes législatives nécessaires afin de répondre aux critiques formulées par la Cour dans son arrêt sur le système roumain de collecte et d'archivage des informations par les services secrets.

• Informations fournies par les autorités roumaines après l'adoption de la Résolution intérimaire ResDH(2005)57 (lettres du 2/02/2006 et du 4/12/2006) : La réforme dans le domaine de la sûreté nationale inclue également les aspects identifiés comme sources de violation dans l'arrêt de la Cour européenne.


Le paquet de projets législatifs comprend notamment :

-           une loi sur la sûreté nationale,

-           une loi sur l'organisation et le fonctionnement du Service des renseignements roumain,

-           une loi sur le Service externe des renseignements,

-           une loi sur l'activité d'information, contre-information et protection des informations et

-           une loi sur le statut professionnel et la carrière des agents de renseignement.

Ce paquet a fait l'objet de consultations lors de débats publics et a ensuite été envoyé aux ministères compétents. Il a par la suite été adopté par la Chambre des Députés et est actuellement examiné par la deuxième chambre (Sénat).

Des informations plus concrètes sont attendues sur les dispositions des projets de loi contenus dans ce paquet législatif, y compris leur traduction, leur pertinence par rapport aux violations constatées par la Cour européenne et le calendrier d'adoption envisagé.

Les 12-13/03/2008, des consultations bilatérales ont eu lieu à Bucarest entre le Secrétariat et les autorités roumaines afin de discuter des dispositions des projets législatifs et d’autres mesures éventuellement susceptibles de prévenir de violations similaires. La prochaine réunion bilatérale est prévue à la mi-mai 2008.

Les autorités roumaines sont invitées à fournir par écrit les informations présentées pendant ces réunions ainsi que les documents pertinents.

       2) Violation de l'article 8 : Selon des informations fournies par les autorités roumaines, en vertu du projet de loi sur l'activité d'information, contre-information et protection des informations, les Services de Renseignements roumains aient l'obligation d'assurer les renseignements et de prendre les mesures nécessaires en vue de garantir l'ordre constitutionnel, les droits de l'homme et les libertés fondamentales (article 2). Il convient de noter également que les objectifs des activités de renseignement incluent : la défense de la démocratie et de l'ordre constitutionnel, les droits et libertés fondamentales des citoyens, ainsi que garantis par la Constitution roumaine, et la protection de l'exercice non limité des droits et libertés fondamentales. Le projet de loi contient des dispositions relatives à la collecte d'informations, en particulier la procédure relative à l'octroi d'une autorisation judiciaire. Il prévoit également l'obligation pour les autorités compétentes d'effacer toutes données personnelles n'ayant pas trait à une menace pour la sécurité nationale (article 70§1). Les informations concernant les données personnelles, la vie privée, l'honneur et la réputation des individus et qui ont été obtenues accidentellement dans le cadre de la collecte d'informations nécessaires pour la protection de la sécurité nationale, ne doivent pas être divulguées, stockées ou archivées. Elles doivent être détruites dès l'instant où il est établi qu'elles ne sont en rien liées à une quelconque menace à l'encontre de la sécurité nationale (article 70§2).

Des contacts bilatéraux sont en cours pour évaluer ces informations.

       3) Violation de l'article 13 : Certaines dispositions du projet de loi sur l'activité d'information, contre-information et protection des informations pourraient suggérer la possibilité de contester la détention de certaines informations relatives à la vie privée par les Services de Renseignements ou de réfuter la véracité de ces informations. Ainsi, toute personne devrait avoir le droit de demander aux autorités compétentes d'avoir accès aux informations qui la concerne exclusivement (article 68). Le projet de loi prévoit également la possibilité de demander aux autorités administratives de vérifier, de rectifier ou d'effacer des données personnelles si elles sont incorrectes, incomplètes ou si elles ont été obtenues de manière illégale (article 69). Les autorités compétentes ont l'obligation de répondre à de telles demandes dans des délais précis (articles 68-69). Enfin, l'article 70 prévoit un recours judiciaire dans les circonstances prévues dans ces articles, y compris en vue d'obtenir des dommages et intérêts.

Des contacts bilatéraux sont en cours pour évaluer ces informations.

       4) Violation de l'article 6§1 : Les autorités roumaines ont observé que les juridictions internes accorderont un effet direct à l'arrêt Rotaru de manière à éviter toute violation similaire à celle constatée dans la présente affaire, à savoir le refus par la Cour d'appel de Bucarest d'examiner la demande d'indemnisation du requérant et de remboursement des frais et dépens encourus pour obtenir la rectification des données en cause.

       5) Publication et diffusion : L'arrêt de la Cour européenne a été traduit et publié au Journal officiel.

Les Délégués,

1.             soulignent que l’arrêt de la Cour européenne dans cette affaire est devenu définitif il y a plus de huit ans ;

2.             rappellent que, tout en notant qu’une vaste réforme législative est en cours, touchant à  la sécurité nationale et aux activités des services de renseignements roumains, le Comité des Ministres a maintes fois souligné la nécessité d’adopter rapidement les mesures requises par cet arrêt (voir notamment la Résolution intérimaire ResDH(2005)57) ;

3.             rappellent également que les autorités roumaines ont été invitées à soumettre une analyse plus précise et détaillée des dispositions contenues dans les différents projets de loi, lesquelles sont susceptibles, selon elles, de répondre aux critiques formulées par la Cour concernant la collecte et le stockage d’informations par les services secrets ;

4.             notent avec intérêt les informations fournies par les autorités roumaines lors de la réunion, portant tant sur le contenu de la réforme en cours, que sur des mesures complémentaires destinées à pallier l’incertitude entourant son calendrier d’adoption et à assurer dans l’intervalle qu’aucune violation similaire ne puisse se reproduire ;

5.             estiment que ces informations requièrent encore une évaluation plus approfondie et encouragent dans l’intervalle les autorités roumaines à poursuivre leurs efforts en ce sens ; notent, dans ce contexte avec intérêt, les consultations bilatérales entre les autorités roumaines et le Secrétariat, qui ont eu lieu à Bucarest (mars 2008) et à Strasbourg (mai 2008) ;

6.             décident de reprendre l’examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations complémentaires à fournir sur les mesures générales.


42860/98           Notar, arrêt du 20/04/04 - Règlement amiable[11]

41138/98+        Moldovan et autres, arrêt n°1 of 05/07/2005 - Règlement amiable[12]

41138/98+        Moldovan et autres, arrêt n° 2, arrêt du 12/07/2005, définitif le 30/11/2005

57884/00          Kalanyos et autres, arrêt du 26/04/2007, définitif le 26/07/2007 - Radiation

57885/00          Gergely, arrêt du 26/04/2007, définitif le 26/07/2007 - Radiation

41124/02          Filip, arrêt du 14/12/2006, définitif le 14/03/2007

Cette affaire concerne l’illégalité de l’internement psychiatrique du requérant, ordonné sur demande du parquet en novembre 2002 en vue d’établir s’il possédait la faculté de discernement. La Cour européenne a estimé que l’aliénation du requérant n’avait pas été établie de manière probante du fait de l’absence d’avis médical requis au préalable et d’indications précises des éléments ayant conduit le parquet à demander la mesure d’internement. Elle a relevé en outre que l’internement n’avait pas respecté les voies légales dans la mesure où la commission médicale compétente aurait dû être saisie au moment de la mise en œuvre de la mesure d’internement. A cet égard, la commission saisie un mois après n’a pas confirmé la nécessité de la mesure d’internement (violation de l’article 5§1).

L’affaire concerne en outre l’absence de contrôle à bref délai de la légalité de la détention psychiatrique du requérant (violations de l’article 5§4). A cet égard, le tribunal compétent n’a pas statué sur la plainte du requérant soumise en décembre 2002, en vertu de l’article 434 du code de procédure pénale, mais l’a transmise au parquet. Le parquet a ordonné la mainlevée de la mesure d’internement en janvier 2003 et a rejeté la plainte sans examen. Les autorités ont ainsi mis 8 semaines avant d’ordonner la mainlevée.

Enfin, l’affaire concerne l’inadéquation de l’enquête menée sur les allégations de mauvais traitements, formulées par le requérant (violation de l’article 3). La Cour européenne a noté que le parquet ne s’était pas prononcé sur ces plaintes et que les autorités roumaines n’avaient fourni aucune information permettant d’établir qu’une enquête pénale avait été ouverte à cet égard.

Mesures de caractère individuel: Après la levée de la mesure d'internement et la remise en liberté du requérant les juridictions roumaines ont ordonné la mise en œuvre de mesures de suivi préconisées par la commission. Le requérant ne forma pas de recours contre cette décision.

Des informations sont attendues sur la possibilité de l’ouverture d’une enquête au sujet des allégations de mauvais traitements dans l’hôpital psychiatrique.

Mesures de caractère général:

Des informations sont attenduessur les mesures prises ou envisagées pour prévenir de nouvelles violations similaires. En particulier, afin d’évaluer la nécessité et la portée de mesures particulières, les autorités sont invitées à clarifier :

- la base juridique de l’ouverture d’enquêtes pénales et les raisons pour lesquelles les plaintes du requérant au sujet de ses mauvais traitements n’ont pas été examinées ;

- les dispositions législatives actuelles réglementant la détention dans les hôpitaux psychiatriques.

Sont également attendues la publication et la diffusion de l'arrêt de la Cour européenne aux juridictions et autorités compétentes afin d'attirer leur attention sur les exigences de la Convention telles qu'elles découlent de cet arrêt.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

67703/01           Hauler, arrêt du 12/07/2007, définitif le 12/10/2007

Cette affaire concerne une violation du droit d’accès de la requérante à un tribunal en raison du refus des tribunaux internes en 1999 et 2000 de contrôler la légalité d’une décision administrative portant sur l’attribution d’un terrain (violation de l’article 6§1)

Mesures de caractère individuel : En vertu de l'article 322§9 du Code de procédure civile, le droit roumain prévoit la possibilité de rouvrir les procédures civiles jugées contraires à la Convention par la Cour européenne. Par ailleurs, la Cour européenne a octroyé à la requérante une satisfaction équitable au titre du préjudice moral subi.

Evaluation : Aucune autre mesure ne semble nécessaire.


Mesures de caractère général : Cette affaire est à rapprocher de l’affaire Glod (rubrique 6.2) pour laquelle le Comité de Ministres a noté, que suite aux changements législatifs opérés en 1997 et 2000, les tribunaux jouissent de la plénitude de juridiction en ce qui concerne les contestations de décisions administratives portant sur la restitution de propriétés foncières. Néanmoins, dans cette affaire la Cour européenne a observé que la jurisprudence interne relative à la compétence des tribunaux pour déterminer la légalité de l’allocation de terrains par la commission administration ne permettait pas de conclure que cette question avait été tranchée de manière définitive (§§20-21 de l’arrêt).

Sont par conséquence attendues la publication et la diffusion de l'arrêt de la Cour européenne à l'attention des juridictions et des autorités compétentes, afin d'attirer leur attention sur les exigences de la Convention telles qu'elles découlent de cette affaire.

Des informations sur d’autres éventuelles mesures seraient appréciées.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales, en particulier la publication et diffusion de l’arrêt de la Cour européenne.

60868/00          Vasilescu Grigore, arrêt du 08/06/2006, définitif le 08/09/2006

L'affaire concerne l'iniquité de procédures concernant la demande en restitution des biens du requérant dans la mesure où les tribunaux nationaux n'ont pas pris en compte des soumissions décisives du requérant (violation de l'article 6§1).

A cet égard, par décision du 26/06/1998, le tribunal de première Instance de Buftea avait fait droit à la demande du requérant en restitution de ses biens saisis après 1945. Cette décision a été par la suite annulée par le tribunal départemental de Bucarest (08/02/1999) et enfin par la Cour d'appel de Bucarest (13/12/1999). Ces deux dernières juridictions n'ont pas examiné les arguments du requérant selon lesquels les décrets n° 218/1960 et 712/1966 qui étaient à la base de la saisie des biens du requérant, avaient été déclarés inconstitutionnels par la Cour de Justice Suprême en 1993.

Mesures de caractère individuel :

A l'issue d’autres procédures, introduites en vertu de la loi n° 10/2001, le requérant a récupéré une partie de ses biens (une parcelle de terrain de 5425 m² sur 15000 m² et les constructions). Les procédures administratives concernant la restitution du reste du terrain étaient pendantes lorsque la Cour européenne a rendu son arrêt.

Des informations sont attendues sur la situation actuelle du requérant.

Mesures de caractère général : Vu que la violation en question ne semble pas revêtir un caractère structurel, la publication et la diffusion de l'arrêt de la Cour européenne aux tribunaux et aux autorités pertinentes sembleraient suffire comme mesures générales pour empêcher de nouvelles violations semblables.

Des informations sont attendues à cet égard.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

1434/02+          Lupaş et autres, arrêt du 14/12/2006, définitif le 14/03/2007

L'affaire concerne la violation du droit d'accès à un tribunal des requérants en raison de l'application de la règle de l'unanimité requise pour faire établir leur droit de propriété sur des biens indivis qui avaient été nationalisés pendant le régime communiste (violation de l'article 6§1).

Les 19 requérants sont les héritiers de certains des copropriétaires d'un terrain de cinquante hectares au bord de la Mer noire qui avait été exproprié en 1950 en vue de la construction d'une base militaire. En 1998 et 1999, trois actions en revendication de propriété avaient été introduites par certains des requérants, sans le consentement des héritiers de deux anciens copropriétaires. Entre 2001 et 2002, ces trois actions ont été rejetées en dernière instance par la Haute Cour de cassation et de justice en application de la règle de l'unanimité, du fait du refus d'un des héritiers et des difficultés pour identifier tous les héritiers d'un ancien copropriétaire.

La Cour européenne a estimé que la règle de l'unanimité satisfaisait aux critères d'accessibilité et de prévisibilité et qu'elle poursuivait un but légitime, à savoir la protection de tous les héritiers des anciens copropriétaires. Cependant, l'application stricte de cette règle constitue un obstacle insurmontable pour toute future tentative de faire établir le droit de propriété des requérants, compte tenu des circonstances de l'espèce, et a imposé aux requérants une charge disproportionnée les privant de toute possibilité claire et concrète de voir les tribunaux statuer sur leur demande.


Mesures de caractère individuel : L'article 322§9 du Code de procédure civile roumain prévoit la possibilité de rouvrir les procédures civiles pour lesquelles la Cour européenne a constaté une violation de la Convention. Compte tenu de l'effet direct de la jurisprudence de la Cour européenne en droit roumain, les juridictions ne manqueront pas d'adapter leur jurisprudence mise en cause dans la présente affaire.

En outre la Cour a octroyé une satisfaction équitable au titre du préjudice moral.

Evaluation : Par conséquent aucune autre mesure ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général : Bien que la règle de l'unanimité appliquée dans la présente affaire n'ait aucune base dans la législation interne, elle a été appliquée par la plupart des juridictions. Dans son arrêt, la Cour européenne a relevé avec intérêt l'existence d'un projet de loi amendant le code civil et écartant expressément la règle de l'unanimité.

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées pour prévenir de nouvelles violations similaires, en particulier sur le projet de loi écartant la règle de l'unanimité en la matière ainsi qu'un éventuel calendrier d'adoption de ce texte.

Sont également attendues la publication et la diffusion de l'arrêt de la Cour européenne à l'attention des autorités et juridictions concernées afin de les sensibiliser aux exigences de la Convention découlant de cette affaire.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

27086/02           Popescu et Toader, arrêt du 08/03/2007, définitif le 08/06/2007[13]

Affaires concernant le manquement ou le retard substantiel

de l’administration à se conformer à des arrêts internes définitifs :

- Affaires concernant la non-exécution de décisions judiciaires définitives ordonnant la restitution de certains biens immobiliers nationalisés ou perdus pendant la période communiste

48102/99          Popescu Sabin, arrêt du 02/03/04, définitif le 02/06/04, rectifié le 05/07/2004

77195/01          Abăluţă, arrêt du 15/06/2006, définitif le 15/09/2006

7114/02            Acatrinei, arrêt du 26/10/2006, définitif le 26/03/2007

57810/00          Costin, arrêt du 26/05/2005, définitif le 26/08/2005

54400/00          Croitoriu, arrêt du 09/11/2004, définitif le 30/03/2005

2239/02            Dobre, arrêt du 15/03/2007, définitif le 15/06/2007

1818/02            Dorneanu, arrêt du 26/07/2007, définitif le 26/10/2007

78047/01          Dragne et autres, arrêt du 07/04/2005, définitif le 07/07/2005 et of 16/11/2006, définitif le 16/02/2007

18037/02          Gavrileanu, arrêt du 22/02/2007, définitif le 09/07/2007

58318/00          Georgi, arrêt du 24/05/2006, définitif le 13/09/2006

2611/02            Grosu, arrêt du 28/06/2007, définitif le 28/09/2007

18013/03          Ioachimescu et Ion, arrêt du 12/10/2006, définitif le 12/01/2007

38113/02          Matache et autres, arrêt du 19/10/2006, définitif le 19/01/2007

2726/02            Nerumberg, arrêt du 01/02/2007, définitif le 09/07/2007

54369/00          Peter Maria et autres, arrêt du 31/05/2007, définitif le 31/08/2007

8402/03            Pietro et autres, arrêt du 20/07/2006, définitif le 20/10/2006

7234/03            Pop, arrêt du 21/12/2006, définitif le 21/03/2007

2911/02            Popescu Mihai-Iulian, arrêt du 29/09/2005, définitif le 29/12/2005

31442/02          Rădulescu, arrêt du 28/06/2007, définitif le 28/09/2007

67289/01          Sandor, arrêt du 24/03/2005, définitif le 24/06/2005

746/02              Tacea, arrêt du 29/09/2005, définitif le 29/12/2005

                       CM/Inf/DH(2007)33

Toutes ces affaires concernent la non-exécution par des autorités administratives, pendant plusieurs années, de décisions judiciaires, rendues entre 1992 et 2001, ordonnant la restitution de certains biens immobiliers perdus pendent la période communiste (Popescu Sabin, Costin, Croitoriu, Dobre, Dorneanu, Dragne, Gavrileanu, Grosu, Nerumberg, Maria Peter et autres, Popescu Mihai-Iulian, Rădulescu, Tacea, Abǎluţǎ, Georgi, Acatrinei, Ioachimescu et Ion, Pop) et/ou le paiement par l'Etat de compensations pour non-restitution (Dragne, Sandor, Pietre et autres, Matache et autres).


La Cour européenne a constaté des violations de l'article 6§1 dans toutes les affaires, à l'exception de l'affaire Pop, et des violations de l'article 1 du Protocole n° 1 dans toutes les affaires, à l'exception de l'affaire Costin.

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a alloué aux requérants une satisfaction équitable au titre du préjudice matériel (Popescu Sabin, Dragne), moral (Costin, Abǎluţǎ, Dorneanu, Georgi, Pietro, Acatrinei, Ioachimescu et Ion, Pop) ou matériel et moral (Croitoriu, Dobre, Nerumberg, Sandor, Popescu Mihai-Iulian, Rădulescu, Sandor, Tacea).

Dans certaines affaires (Abǎluţǎ, Dobre, Ioachimescu et Ion, Rădulescu, Nerumberg, Pop) la Cour européenne a ordonné l'exécution de la décision interne concernant la restitution de la propriété ou le paiement d'une satisfaction équitable au titre du préjudice matériel.

Dans les affaires Grosu, Matache et Maria Peter et autres la Cour européenne a estimé que la question de la satisfaction équitable ne se trouvait pas en état et l'a réservé en conséquence.

Dans l'affaire Gavrileanu la Cour européenne a ordonné l'exécution de la décision judiciaire en question et a décidé de réserver la question de la satisfaction équitable en ce qui concerne la compensation pour le manque à gagner en raison de l'exécution tardive de l'arrêt du 2/10/1997 ainsi que le préjudice moral.

Les décisions internes ont été exécutées dans les affaires Popescu Sabin, Costin, Dragne, Sandor, Tacea, Georgi, Pietro et autres. Dans les affaires Abǎluţǎ, Dobre, Ioachimescu et Ion, Pop les autorités ont décidé de payer les sommes en question.

Des informations sont attendues sur la situation actuelle des requérants dans des affaires Croitoriu, Gavrileanu, Nerumberg et Rădulescu.

Mesures de caractère général :

            1) Modification législative : Le 19/07/2005 le parlement a adopté la loi n° 247/2005 sur la réforme de la propriété et justice. Cette loi modifie la loi n° 18/1991 et les lois suivantes concernant la restitution de terrains. Selon le gouvernement, elle contribue à améliorer et à accélérer les procédures. De même, elle impose des sanctions pour les représentants d'autorités locales qui ne respectent pas ses dispositions.

Selon les informations complémentaires fournies par les autorités roumaines par courrier du 9/09/2006, des rapports statistiques datés de mars et août 2006 et une analyse préliminaire concernant l'application de la loi n° 247/2005 révèlent une augmentation significative du nombre d'affaires résolus par les commissions locales, soit par l'admission soit par rejet des demandes.

En outre, les commissions départementales ont validé un nombre croissant de propositions des commissions locales. Il convient également de souligner qu'une préférence a été accordée à la restitution des terrains (augmentation de la surface validée par les commissions départementales). Enfin, la réforme a également visé la vérification de la validité des titres de propriété.

Par ailleurs, pour assurer le respect des dispositions légales par l'administration, un « Corps de contrôle » a été mis en place dans le cadre de la « Direction pour la coordination et le contrôle de l'application de la législation dans le domaine de la restitution de la propriété foncière ». Durant les huit premiers mois de 2006, cette institution a effectué plus de 300 contrôles et a sanctionné approximativement 6% des maires en fonction en Roumanie, la valeur des amendes qui leur ont été imposées s'élevant à 1 330 000 RON (380 000 euros).

Les 21 et 22 juin 2007, une Table ronde à haut niveau (organisée par le Département de l'exécution des arrêts de la Cour européenne des Droits de l'Homme) réunissant des représentants du Conseil de l'Europe et les autorités des Etats membres concernées s'est tenue pour discuter des solutions à apporter aux problèmes structurels de la non-exécution des décisions judiciaires internes. Dans ce contexte, les représentants des autorités roumaines ont fait partager leur expérience s'agissant des mesures prises ou en cours pour prévenir des violations similaires et ont examiné les éventuelles réformes à adopter.

Les 12-13/03/2008, des consultations bilatérales ont eu lieu à Bucarest entre le Secrétariat et les autorités roumaines afin de discuter des mesures déjà prises et encore envisagées par les autorités roumaines.

Les autorités roumaines sont invitées à fournir par écrit les informations présentées pendant cette réunion ainsi que les documents pertinents.

            2) Publication et diffusion des arrêts de la Cour européenne :

L'arrêt Popescu Sabin a été traduit et publié au Journal Officiel en août 2005. En outre, le sommaire de l'arrêt a été publié dans le premier numéro de Themis, la revue de l'Institut National de Magistrature, et distribué gratuitement auprès de toutes les juridictions. Enfin, les autorités administratives compétentes ont reçu une copie de l'arrêt.

L'arrêt Costin été traduit et envoyé au Journal Officiel en vue de sa publication (lettre des autorités roumaines du 27/03/2006).

Par ailleurs, le Ministère des Finances Publiques a adressé une lettre circulaire à toutes les Directions des Finances Publiques Locales les informant de l'affaire Sandor dans le but d'éviter des violations similaires. Le texte de l'arrêt a été traduit et envoyé au Journal Officiel aux fins de publication.

Enfin, dans une lettre circulaire du 18/11/2005 adressée aux préfets de tous les départements, les autorités roumaines ont expliqué les principes de la jurisprudence de la Cour européenne concernant l'exécution des décisions judiciaires en matière de biens fonciers. Elles ont également souligné la nécessité d'exécuter les décisions judiciaires ordonnant la mise en possession et/ou la délivrance du titre de propriété et l'importance d'un dialogue transparent avec les bénéficiaires des jugements en matière de biens fonciers.


Les préfets ont été invités par les autorités roumaines, en leur qualité de présidents des commissions départementales pour l'application des lois sur le fonds foncier, de transmettre cette lettre circulaire aux commissions locales.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales ainsi que sur les mesures individuelles le cas échéant.

- Affaires concernant la non-exécution par l’administration de décisions judiciaires définitives ordonnant aux autorités locales de prendre certaines actions

5050/02            Pântea Elisabeta, arrêt du 15/06/2006, définitif le 15/09/2006

28333/02          SC Ruxandra Trading SRL, arrêt du 12/07/2007, définitif le 12/10/2007

                       CM/Inf/DH(2007)33

Ces affaires concernent la violation du droit d'accès des requérantes à un tribunal du fait de la non-exécution de décisions judiciaires finales ordonnant aux autorités locales de prendre certaines actions (violations de l'article 6§1).

Dans l’affaire Pântea Elisabeta, il avait été ordonné à la mairie de Grivita, par décision du 02/04/2001, d'inscrire le droit de propriété de la requérante sur le registre agricole et la radiation du droit de propriété d'une tierce personne sur le même bien immobilier. La mairie a refusé d'exécuter la deuxième partie de cette décision

Dans l’affaire SC Ruxandra Trading SRL, il avait été ordonné à la mairie de Bucarest, par décision du 8/06/2000, de délivrer à la société requérante un permis de construire permanent, ainsi que de conclure avec elle un contrat de concession sur le terrain litigieux.

Dans l’affaire SC Ruxandra Trading SRL, la Cour européenne a également constaté qu’en refusant de se conformer à l’arrêt du 8/06/2000, les autorités nationales avaient privé la société requérante de la possibilité d’utiliser le terrain en cause, sans lui fournir de justification (violation de l’article 1 du Protocole n° 1).

Mesures de caractère individuel :

1) Pântea Elisabeta : La Cour européenne a ordonné la pleine exécution de l'arrêt du 02/04/2001 ainsi que le versement d'une satisfaction équitable au titre préjudice moral.

Des informations sont attendues sur les mesures prises en vue d'exécuter cet arrêt, notamment, concernant la radiation du droit de propriété d'une tierce personne sur le même bien immobilier.

2) SC Ruxandra Trading SRL : La Cour européenne a estimé que la question de l’application de l’article 41 (satisfaction équitable) ne se trouvait pas en état.

Mesures de caractère général : Le problème du non-respect ou du retard substantiel de l'administration à se conformer à des arrêts internes définitifs a déjà été abordé dans le cadre de la restitution de propriété par une administration interne (Popescu Sabin, arrêt du 02/03/04). Ces affaires concernent d’autres aspects des activités de l'administration.

Les 21 et 22 juin, une Table ronde à haut niveau (organisée par le Département de l'exécution des arrêts de la Cour européenne des Droits de l'Homme) réunissant des représentants du Conseil de l'Europe et les autorités des Etats membres concernées s'est tenue pour discuter des solutions à apporter aux problèmes structurels de la non-exécution des décisions judiciaires internes. Dans ce contexte, les représentants des autorités roumaines ont fait partager leur expérience s'agissant des mesures prises ou en cours pour prévenir des violations similaires et ont examiné les éventuelles réformes à adopter.

Des informations sont attendues sur l’évaluation des autorités sur la question de savoir si les violations constatées par la Cour européenne dans ces affaires ont un caractère structurel et sur les mesures spécifiques prises ou envisagées pour garantir l'exécution des décisions judiciaires dans des situations similaires, sachant que tout refus ou retard dans l'exécution des décisions doit être sanctionné à ce titre. Dans le cadre de la mise en œuvre de cet arrêt, les autorités roumaines pourraient prendre en compte l'expérience d'autres pays confrontés au même problème de non-respect ou de retard dans l'exécution des arrêts (voir les conclusions de la Table ronde mentionnée ci-dessus CM/Inf/DH(2007)33).

L'arrêt de la Cour européenne dans l’affaire Pântea Elisabeta a été traduit et publié au Journal Officiel et sur le site Internet de la Cour suprême de justice et de cassation (http://www.scj.ro/decizii_strasbourg.asp).


Confirmation est également attendue de la diffusion de l’arrêt dans l’affaire Pântea Elisabeta aux autorités et aux tribunaux concernés et de la publication et la diffusion de l’arrêt dans l’affaire SC Ruxandra Trading SRL.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales ainsi que sur les mesures individuelles, le cas échéant.

                       - Affaires concernant la non-assistance des autorités internes dans le cadre de l'exécution forcée de décisions judiciaires définitives imposant des obligations à l'égard de tiers

34647/97          Ruianu, arrêt du 17/06/03, définitif le 17/09/03

22626/02          Schrepler, arrêt du 15/03/2007, définitif le 15/06/2007

                       CM/Inf/DH(2007)33

Ces affaires concernent le défaut d’assistance du requérant par l’administration interne en vue d’obtenir l’exécution forcée des décisions judiciaires définitives relatives à certaines obligations imposés à des tiers privés (violations de l’article 6§1).

L'affaire Ruianu concerne la non-exécution de deux décisions judiciaires définitives (rendues en 1993 et 1995) enjoignant les défendeurs à démolir un bâtiment illégalement construit sur le terrain du requérant. La Cour européenne a conclu que, en dépit des demandes répétées du requérant, l'unique tentative adéquate d'exécution avait eu lieu seulement en 2000. Suite à cette tentative, les demandes du requérant concernant l'exécution sont restées sans suite.

L’affaire Schrepler concerne la non-exécution d’une décision judiciaire de 1998 ordonnant le payement d’une certaine somme au requérant.

Mesures de caractère individuel :

1) Ruianu : Suite au règlement amiable conclu avec les voisins, les héritiers de la requérante (elle est décédée le 10/03/2005) leur ont vendu le terrain sur lequel la construction litigieuse avait été édifiée.

2) Schrepler : La décision de 1998 était toujours inexécutée lorsque la Cour européenne a prononcé son arrêt.

Des informations sont attendues sur la situation actuelle du requérant.

Mesures de caractère général :

Information fournies par les autorités roumaines dans le contexte de l’affaire Ruianu (lettre du 31/05/2004) : Les autorités roumaines ont fourni des indications sur les moyens prévus par le droit roumain afin de forcer le débiteur à exécuter les obligations fixées par décisions judiciaires, telles que les astreintes, les amendes comminatoires, ou les sanctions pénales.

Bien que ces informations soient pertinentes, le Secrétariat note que les moyens invoqués par le Gouvernement n'ont pas été susceptibles d'empêcher la violation de la Convention dans cette affaire. Dès lors, au vu des obligations des autorités nationales, en tant que dépositaires de la force publique en matière d'exécution (voir notamment les paragraphes 59, 72 et 73 de l'arrêt) des informations supplémentaires ont été sollicitées sur les moyens disponibles en droit interne afin d'assurer l'exécution des décisions judiciaires internes dans des situation similaires.

Le 1/01/2007, la loi n° 459, modifiant le Code de procédure civile en matière d'exécution des décisions judiciaires, est entrée en vigueur.

Les contacts bilatéraux sont en cours afin d’évaluer les dispositions pertinentes du Code de procédure civile telles que modifiées par la loi n° 459. En outre, des informations sont attendues sur l'évaluation des autorités sur la question de savoir si les violations constatées par la Cour européenne dans ces affaires ont un caractère structurel (dans ce contexte voir les conclusions de la Table ronde, tenue les 21‑22 juin 2007, CM/Inf/DH(2007)33).

L'arrêt de la Cour européenne dans l’affaire Ruianu a été publié au Journal Officiel le 02/12/2004, ainsi que dans un ouvrage contenant les arrêts prononcés contre la Roumanie entre 1998 et 2004, ouvrage destiné principalement aux tribunaux et dont 2000 exemplaires ont été distribuées gratuitement. Il a été également transmis au Conseil Supérieur de la Magistrature.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.


- Affaires concernant l’exécution tardive de décisions judiciaires définitives ordonnant à un établissement public de payer certaines sommes

73970/01          Sacaleanu, arrêt du 06/09/2005, définitif le 06/12/2005

1486/02            Orha, arrêt du 12/10/2006, définitif le 12/01/2007

                       CM/Inf/DH(2007)33

Ces affaires concernent l’exécution tardive de décisions judiciaires définitives ordonnant à des établissements publics de payer certaines sommes aux requérants (violations de l’article 6§1).

Dans l'affaire Sacaleanu il a été ordonné à l’employeur de la requérante (l'Inspection d'Etat pour les personnes handicapées), de lui verser les salaires dus, des astreintes (jusqu'à la réintégration de la requérante à son poste qui a eu lieu en 2000) ainsi que des frais de justice. Les sommes en question ont été versées à la requérante avec retard et par des versements échelonnés sur des périodes allant jusqu'à vingt mois, la somme totale lui étant payée uniquement le 22/02/2002. La Cour européenne a relevé que l'employeur de la requérante, en tant qu'institution publique financée par l'Etat, ne pouvait utiliser, afin de payer ses dettes, que des sommes spécialement affectées à cet effet par le Ministère des Finances. Or, le retard dans le versement des sommes dues à la requérante avait été causé à plusieurs reprises par le fait que le Ministère n'avait, à ce moment-là affecté aucune somme à l'employeur de la requérante. Dans ces conditions, la Cour européenne a conclu que l'Etat, par ses propres actes, avait rendu impossible le recouvrement immédiat par la requérante des sommes octroyées par des décisions judiciaire définitives.

Dans l’affaire Orha, il a été ordonné aux autorités municipales de payer aux requérants certaines sommes pour l’expropriation de leur propriété. La Cour européenne a noté que la décision rendue en octobre 1999 n'avait été ni exécutée, ni annulée ou modifiée à la suite de l'exercice d'une voie de recours prévue par loi. D'ailleurs, elle a également noté que la loi n° 33/1994 sur l'expropriation ne prévoyait pas de procédure par laquelle les juridictions internes devaient être saisies afin de fixer les modalités et délais de paiement.

Dans l’affaire Orha la Cour européenne a également estimé qu’en refusant d’exécuter la décision les autorités avaient privé les requérants de la jouissance de leur droit de propriété (violation de l’article 1 du Protocole n° 1).

Mesures de caractère individuel :

1) Sacaleanu : Aucune. Les sommes en cause ont été payées à la requérante le 22/02/2002. Le préjudice moral subi par la requérante a été compensé par la Cour européenne sous l'angle de l'article 41 de la Convention.

2) Orha : La Cour européenne a estimé que la question de la satisfaction équitable n’était pas en état et l’a réservé en conséquence.

Mesures de caractère général : Les 21 et 22 juin 2007, une Table ronde à haut niveau (organisée par le Département de l'exécution des arrêts de la Cour européenne des Droits de l'Homme) réunissant des représentants du Conseil de l'Europe et les autorités des Etats membres concernées s'est tenue pour discuter des solutions à apporter aux problèmes structurels de la non-exécution des décisions judiciaires internes. Dans ce contexte, les représentants des autorités roumaines ont fait partager leur expérience s'agissant des mesures prises ou en cours pour prévenir des violations similaires et ont examiné les éventuelles réformes à adopter.

Des informations sont attendues sur l’évaluation des autorités sur la question de savoir la violation constatée par la Cour européenne dans cette affaire a un caractère structurel et sur les mesures prises ou envisagées afin de créer un système permettant le paiement immédiat par les institutions publiques de dettes établies à leur charge en vertu des décisions judiciaires définitives (voir les conclusions de la Table ronde mentionnée ci‑dessus CM/Inf/DH(2007)33).

Dans le contexte de l’affaire Orha la Cour européenne a également relevé certaines lacunes dans la loi n° 33/1994 sur l’expropriation (§25 de l’arrêt).

Sont également attendues la publication et la diffusion des arrêts de la Cour européenne auprès des tribunaux et autorités nationaux concernés.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.


- Affaires concernant l’exécution tardive de décisions judiciaires définitives ordonnant la réintégration des requérants à leur poste dans des établissements publics ainsi que le paiement de salaires dus pendant la période de chômage

23878/02          Strungariu, arrêt du 29/09/2005, définitif le 29/12/2005

6098/03            Durdan, arrêt du 26/04/2007, définitif le 24/09/2007

5060/02            Mihaescu, arrêt du 02/11/2006, définitif le 26/03/2007

                       CM/Inf/DH(2007)33

Ces affaires portent sur l'exécution tardive des décisions judiciaires ordonnant la réintégration des requérants dans leurs postes dans le cadre des institutions publiques ainsi que le paiement des salaires dus pour la période pendant laquelle ils avaient été licenciés (violations de l'article 6§1).

Mesures de caractère individuel :Dans l'affaire Strungariu la décision (octobre 2001) ordonnant sa réintégration à son poste dans le cadre de l'Autorité pour la privatisation et l'administration des participations de l'Etat et le paiement des salaires a été exécutée en 2003.

Dans l’affaire Durdan, suite à la décision d’un tribunal interne d’octobre 1997, le requérant a été réintégré à son poste dans le cadre de la Direction sanitaire vétérinaire en mai 1998 et ses arriérés de salaires ont été payé en février 2000.

Dans l'affaire Mihaescu les décisions ordonnant sa réintégration à son poste dans le cadre de l'Université de médecine et pharmacie d'Iaşi (mars 2000) et le paiement des salaires (juin 2003) ont été exécutées en 2006.

De plus, la Cour européenne leur a alloué une satisfaction équitable pour le préjudice moral subi.

Mesures de caractère général :Dans l'affaire Strungariu, l'arrêt de la Cour européenne est en cours de traduction et devrait ensuite être publié au Journal Officiel. Il a également été porté à la connaissance de l’Agence Nationale des Fonctionnaires Publics qui a été informée des principes généraux découlant de la jurisprudence de la Cour européenne en matière de non-exécution ou d’exécution tardive de décisions internes définitives, ainsi que des implications de cet arrêt.

Les 21 et 22 juin 2007, une Table ronde à haut niveau (organisée par le Département de l'exécution des arrêts de la Cour européenne des Droits de l'Homme) réunissant des représentants du Conseil de l'Europe et les autorités des Etats membres concernées s'est tenue pour discuter des solutions à apporter aux problèmes structurels de la non-exécution des décisions judiciaires internes. Dans ce contexte, les représentants des autorités roumaines ont fait partager leur expérience s'agissant des mesures prises ou en cours pour prévenir des violations similaires et ont examiné les éventuelles réformes à adopter.

Des informations sont attendues sur l’évaluation des autorités sur la question de savoir si les violations constatées par la Cour européenne dans ces affaires ont un caractère structurel et sur d’éventuelles mesures spécifiques prises ou envisagées pour garantir l'exécution des décisions judiciaires dans des situations similaires, sachant que tout refus ou retard dans l'exécution des décisions doit être sanctionné à ce titre. Dans le cadre de la mise en œuvre de cet arrêt, les autorités roumaines pourraient prendre en compte l'expérience d'autres pays confrontés au même problème de non-respect ou de retard dans l'exécution des arrêts (voir les conclusions de la Table ronde mentionnée ci-dessus CM/Inf/DH(2007)33).

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

- 50 affaires contre la Fédération de Russie

67099/01          Solodyuk, arrêt du 12/07/05, définitif le 30/11/05[14]

77617/01          Mikheyev, arrêt du 26/01/2006, définitif le 26/04/2006[15]

65859/01          Sheydayev, arrêt du 07/12/2006, définitif le 23/05/2007

78145/01          Kovalev, arrêt du 10/05/2007, définitif le 12/11/2007

59261/00          Menesheva, arrêt du 09/03/2006; définitif le 09/06/2006[16]


4353/03            Tarariyeva, arrêt du 14/12/2006, définitif le 14/03/2007

L’affaire concerne le manquement des autorités à leur obligation de protéger le droit à la vie du fils de la requérante, décédé dans un établissement pénitentiaire de Khadyzhensk, en raison du défaut de suivi médical approprié de sa maladie et de soins post-opératoires ainsi que de l’assistance médicale défectueuse dont il avait fait objet à l’hôpital public (violation de l’article 2).

La Cour européenne a également constaté que l’enquête concernant le décès du fils de la requérante était lente et son objet trop limité, laissant de côté de nombreux aspects des événements d’une importance cruciale, le droit de la requérante à la participation effective dans l’instruction n’était pas non plus assuré. Enfin, après l’acquittement d’un des responsables médicaux en raison de la gestion inadéquate des éléments de preuves, la requérante a été privé de toute action civile en indemnisation, autant parce qu’une telle action était rendue impossible par le jeu de la loi que parce qu’elle n’avait pas de chance de succès en l’état actuel de la jurisprudence (violation procédurale de l’article 2).

L’affaire concerne enfin les traitements inhumains infligés au fils de la requérante du fait qu’il avait été menotté à son lit à l’hôpital civil et des conditions de son transport dans le fourgon de la prison (violations de l’article 3).

Mesures de caractère individuel : Il résulte de l’arrêt que seul le chef du service de chirurgie de l’hôpital public a été traduit devant les tribunaux dans cette affaire. Pour des raisons inconnues, le rapport des experts médicaux du 19/06/2003 concluant à la faute du défendeur a été rejeté par la cour et le défendeur a été en conséquence acquitté. Les poursuites engagées contre les autres médecins de l’hôpital de la prison et de l’hôpital public ont été abandonnées par les procureurs au motif que la prétendue infraction n’avait pas été commise.

• Informations fournies par la requérante : La requérante a indiqué qu’elle avait déposé en vain plusieurs demandes auprès d’un certain nombre d’autorités compétentes, notamment auprès du Procureur Général de la Fédération de Russie.

Elle a indiqué que le 25/05/2007, la Chambre civile de la Cour Suprême de la République d’Adyugeya avait annulé la décision du tribunal de première instance approuvant la décision du procureur de classer sans suite l’affaire concernant les médecins de LPU-5 et avait renvoyé l’affaire devant le tribunal de première instance pour un nouvel examen. Il semble cependant que cette procédure était déjà pendante lorsque la Cour européenne a rendu son arrêt.

• Informations fournies par les autorités russes : Lors de la 1007e réunion (octobre 2007), les autorités russes ont indiqué que le 15/06/2007, le tribunal de première instance avait annulé le refus du Procureur d’ouvrir une enquête pénale et avait invité le premier adjoint au Procureur de la République d’Advugeva à réparer les violations constatées. Ceci a été réalisé par une décision du Procureur-adjoint de la République en date du 6/07/2007. Dans cette même décision, le Procureur-adjoint a refusé d’ouvrir une enquête pénale à l’encontre des médecins de l’hôpital pénitencier au motif que les infractions alléguées n’avaient pas été commises.

Evaluation du Secrétariat : Ces informations sont actuellement en cours d’évaluation par le Secrétariat qui va rapidement contacter les autorités russes.

Mesures de caractère général : A une date non précisée, l’arrêt de la Cour européenne a été diffusé par la Représentante de la Fédération de Russie devant la Cour européenne : à la Cour suprême, au Bureau du parquet général et au Ministre de la santé et du développement social aux fins de l’adoption des mesures requises dans leur secteur respectif de compétences et en vue d’une mise en œuvre dans leur pratique quotidienne.

            1) Violation de l’article 2 en rapport avec l’absence de soins médicaux nécessaires: voir l’affaire Popov (Rubrique 4.2)

            2) Violation procédurale de l’article 2 en rapport avec l’action civile d’indemnisation: voir les affaires Khashiyev et autres (1007e réunion, octobre 2007, rubrique 4.3; CM/Inf/DH(2006)32 révisé).

            3) Violation de l’article 3 en rapport avec le fait que le fils de la requérante a été menotté à l’hôpital civil

Les autorités russes ont indiqué qu’il n’existait pas de règles spécifiques régissant la situation de personnes condamnées hospitalisées. Les condamnés et le personnel pénitentiaire assurant leur protection sont assujettis au Code pénal de l’exécution des peines, à la loi fédérale du 21/10/2005 sur les institutions et instances responsables de l’exécution des peines privatives de liberté ainsi qu’à d’autres réglementations sectorielles telles que :

- l’ordonnance conjointe du Ministre de la santé et du Ministre de la Justice du 17/10/2005 (n° 640/190) sur l’organisation des soins médicaux des personnes purgeant leur peine ou en détention provisoire ;

- l’ordonnance du Ministre de la Justice du 15/02/2006 (n° 21-дсп) portant approbation de Instruction relative à la sécurité des institutions pénitentiaires.

Ces informations sont en cours d’examen par le Secrétariat.

A cet égard, une copie de ces documents serait particulièrement utile.


            4) Violation de l’article 3 en rapport avec le transport du fils de la requérante: Il semblerait que dans cette affaire le transport du fils de la requérante ait été assuré par l’institution pénitentiaire.

Des informations sont donc attendues sur les règles et principes régissant le transport de détenus malades à destination d’un hôpital public.

Des informations sont également attendues sur la publication de l'arrêt de la Cour européenne en général et dans la presse spécialisée.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

184/02              Kuznetsov et autres, arrêt du 11/01/2007, définitif le 11/04/2007

10519/03          Barankevich, arrêt du 26/07/2007, définitif le 26/10/2007

Les affaires concernent l'ingérence des autorités dans une manifestation religieuse organisée par les membres de la communauté des témoins de Jéhovah de Tcheliabinsk (affaire Kuznetsov) ingérence que la Cour européenne a estimé non prévue par la loi (violation de l’article 9) et l’interdiction imposée à l’organisation d’un service de culte de l’Eglise de « Grâce du Christ » de l’église des chrétiens évangéliques dans un parc de la ville (Barankevich) (violation de l’article 11, interprété à la lumière de l’article 9).

Dans l’affaire Kuznetsov, la Cour européenne a également constaté que les tribunaux internes en refusant les plaintes civiles des requérants ne s'étaient pas conformés à leur devoir de motiver leur décision et n'avaient pas démontré que les parties avaient été entendues de façon juste et équitable (violation de l'article 6).

Mesures de caractère individuel :

            1) Affaire Barankevich : La Cour européenne a octroyé au requérant la satisfaction équitable au titre de préjudice moral. D’après les informations fournies par les autorités, aucune autre demande d’autorisation de célébration en public n’a été reçue de la part du requérant.

Evaluation : Aucune autre mesure ne semble nécessaire.

            2) Affaire Kuznetsov et autres: Le 04/05/2007, les requérants ont informé le Secrétariat de ce que les locaux des témoins de Jéhovah avaient fait l'objet d'une intervention policière en avril 2006 à Moscou et en avril 2007 à Satka (région de Tcheliabinsk). Ils ont également indiqué que l'arrêt de la Cour européenne avait été ignoré par les tribunaux internes de Moscou saisis par les membres des témoins de Jéhovah.

Les autorités russes ont indiqué qu’à la suite des observations des requérants au Comité des Ministres, le département territorial du Ministère de l’Intérieur à Satka avait diligenté une enquête interne à propos des faits ayant eu lieu le 2/04/2007 à Satka (région de Tcheliabinsk). A la suite de cette enquête, le premier adjoint du chef du département territorial, le chef de la police criminelle, M. Tsivilev et l’officier de police de l’arrondissement, M. Spiridonov, ont fait l’objet de sanctions disciplinaires.

Le 16/11/2007, le représentant des requérants a envoyé des observations informant le Comité des Ministres du manquement des juridictions russes à leur obligation de se conformer à l’arrêt Kuznetsov dans le cadre de l’examen des affaires similaires en particulier à Moscou.

Le 6/12/2007, ces observations ont été envoyées aux autorités russes.

Leurs commentaires restent attendus.

Mesures de caractère général :

            1) Amendements législatifs : A l’époque des faits, la législation nationale disposait que toute personne souhaitant tenir une assemblée ou célébrer un culte dans un endroit public devait obtenir une autorisation des autorités. En 2004, une nouvelle loi sur les rassemblements, réunions, manifestations, marches et piquets est en entrée en vigueur. L’obligation d’autorisation a été remplacée par une simple notification.

            2) Publication et diffusion : L’arrêt Kuznetsov a été envoyé à toutes les juridictions nationales, par lettre du Vice-Président de la Cour Suprême de la Fédération de Russie.

Informations attendues sur la diffusion de l’arrêt Barankevich et la publication des deux arrêts.

            3) Autres mesures : Suite à l’arrêt Kuznetsov, le Ministère de l’Intérieur a pris des mesures afin de renforcer le contrôle des activités de ses officiers et de prévenir de nouvelles violations similaires, notamment une formation complémentaire a été organisée pour les officiers de police du département territorial de Satka au cours de laquelle ils ont étudié des documents relatifs à la liberté de conscience et de religion ainsi que la législation applicable aux manifestations et aux réunions.

En outre, le Ministère de l’Intérieur a notifié tous les départements territoriaux à propos de leur obligation inconditionnelle de se conformer à l’arrêt de la Cour européenne.

La nécessité de mesures complémentaires est actuellement évaluée par le Secrétariat.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.


*72881/01         Bureau moscovite de l'Armée du salut, arrêt du 05/10/2006, définitif le 05/01/2007

*18147/02         Eglise de scientologie de Moscou, arrêt du 05/04/2007, définitif le 24/09/2007

Les affaires concernent le refus de réenregistrement des associations requérantes, ce qui a entraîné la perte de personnalité juridique (violations de l’article 11, lu à la lumière de l’article 9). La loi sur les religions, entrée en vigueur en 1997, avait imposé à toutes les associations religieuses ayant la personnalité juridique d’amender leur statut en conformité avec la nouvelle loi, afin de pouvoir être « réenregistré » avant la fin de l’année 2000.

Bureau moscovite de l’Armée du salut : La Cour européenne a estimé que les motifs du rejet de la demande de réenregistrement de l'organisation requérante étaient incohérents tout au long de la procédure. La Cour a estimé que le premier motif, à savoir l'origine étrangère de l'association, n'était ni pertinent ni suffisant et encore moins prévu par la loi. S'agissant du second motif, à savoir l'absence d'indication précise sur ses affiliations religieuses et ses pratiques, la Cour a estimé que la loi sur les religions ne contenait aucune ligne directrice sur la manière dont les affiliations religieuses ou la dénomination devaient être décrites dans les statuts. S'agissant du motif selon lequel l'enregistrement ne pouvait être accordé à une organisation paramilitaire en raison de l'utilisation du mot « Armée » et du port d'un uniforme par ses membres, la Cour a estimé que rien ne permettait de suggérer que l'association requérante faisait l'apologie de la violence, n'avait pas respecté le droit russe ou avait poursuivi des motifs autres que ceux énumérés dans son statut. Eglise de scientologie de Moscou : La Cour a noté que le Ministère de Justice avait refusé quatre demandes de réenregistrement au nom de la requérante, en alléguant que le dossier était incomplet. Le Ministère n’a toutefois pas spécifié quelle information ou document manquait, mais s’est borné à indiquer que le dossier n’était pas complet. Ainsi, la requérante n’a pu ni modifier sa demande ni la déposer à nouveau. De plus, la loi nationale prévoyant que tout refus devait être justifié, la Cour a conclu que le refus n’était pas conforme à la loi. La Cour a également conclu que le tribunal interne n’avait pas expliqué en quoi le dossier soumis ne contenait pas d’informations suffisantes sur les principes religieux et pratiques de l’Eglise de Scientologie, et ainsi avait manqué à son obligation de clarifier les obligations légales et de donner à la requérante des indications claires sur la façon de préparer et de compléter correctement une demande. Concernant le non‑respect par la requérante de la date limite de soumission de réenregistrement, la Cour a constaté qu’il s’agissait d’une conséquence directe du rejet arbitraire des demandes précédentes. La Cour a également conclu à l’illégalité des exigences ultérieures de production de document attestant de la présence de la requérante à Moscou depuis 15 ans au moins.

Mesures de caractère individuel :

1) Bureau moscovite de l'Armée du salut: Selon les informations fournies par les autorités, le Service fédéral d’enregistrement a invité les représentants de l’organisation religieuse « Bureau moscovite de l’Armée du salut » à soumettre, en vertu de la nouvelle procédure prévue par la loi, les documents requis pour enregistrer les modifications à son statut. Les représentants de cette organisation n’ont soumis aucun document.

2) Eglise de scientologie de Moscou : Dans son arrêt la Cour a établi l’obligation pour le Gouvernement de prendre des mesures appropriées afin de remédier à la situation individuelle de la requérante. De plus, il a été noté que si ces mesures impliquent l’autorisation de réenregistrement de la requérante, le retrait de l’exigence d’obtenir un réenregistrement selon la loi sur les religions, la réouverture des procédures nationales ou la combinaison de ces mesures et autres, le choix entre ces différentes mesures incombait à l’Etat défendeur.

Selon les informations fournies par la requérante le 29/04/2008, la demande de réouverture de la procédure a été rejetée par le tribunal de district de Nikulinsky, le 11/03/008. Le tribunal de district a conclu qu’il n’y avait pas de disposition dans la loi nationale permettant la réouverture d’une procédure sur le fondement d’une violation constatée par la Cour européenne. La communication de la requérante a été transmise aux autorités. Leurs commentaires sont attendus.

Mesures de caractère général :

Publication et diffusion : La Représentante de la Fédération de Russie devant la Cour européenne a porté l’arrêt de la Cour européenne dans l’affaire Bureau moscovite de l'Armée du salut à l’attention du Service fédéral d’enregistrement ainsi que de la Cour suprême de la Fédération de Russie afin que ces instances puissent adopter les mesures individuelles et générales requises et prendre en compte les constats de la Cour européenne dans leur pratique quotidienne.

Le Service fédéral d’enregistrement a résumé la pratique suivie par ses bureaux territoriaux en matière de refus de documents soumis par des organisations religieuses. Ces informations ont été notifiées à tous les bureaux territoriaux en vue de leur utilisation dans la pratique quotidienne, ceci afin de prévenir de nouvelles violations similaires.

Ces questions, y compris l’arrêt de la Cour européenne dans l’affaire Bureau moscovite de l'Armée du salut, ont également fait l’objet de discussions dans le cadre d’un séminaire réunissant tous les dirigeants des bureaux territoriaux les 27-28 septembre 2007.


Des informations sont attendues sur la publication et la diffusion de l’arrêt dans l’affaire Eglise de scientologie de Moscou. Des détails supplémentaires seraient utiles sur les mesures concrètes prises suite à l’arrêt de la Cour européenne (instructions, lettres circulaires etc.) et en particulier sur la question de savoir si les arrêts ont été diffusés à toutes les juridictions nationales par le biais d’une lettre circulaire de la Cour suprême.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

                       - Affaires concernant la détention illégale et sa longueur excessive ainsi que l’insuffisance de motifs invoqués justifiant la détention

                       CM/Inf/DH(2007)4[17]

46082/99          Klyakhin, arrêt du 30/11/05, définitif le 06/06/05

21153/02          Bednov, arrêt du 01/06/2006, définitif le 01/09/2006

72967/01          Belevitskiy, arrêt du 01/03/2007, définitif le 01/06/2007

11886/05          Dolgova, arrêt du 02/03/2006, définitif le 03/07/2006

31008/02          Fedorov et Fedorova, arrêt du 13/10/2005, définitif le 13/01/2006

70276/01          Gusinskiy, arrêt du 19/05/2004, définitif le 10/11/2004

27193/02          Ignatov, arrêt du 24/05/2007, définitif le 24/08/2007

19126/02          Komarova, arrêt du 02/11/2006, définitif le 02/02/2007

59696/00          Khudobin, arrêt du 26/10/2006, définitif le 26/01/2007

6847/02            Khudoyorov, arrêt du 08/11/2005, définitif le 12/04/2006

75039/01          Korchuganova, arrêt du 08/06/2006, définitif le 08/09/2006

7064/05            Mamedova, arrêt du 01/06/2006, définitif le 23/10/2006

36911/02          Mishketkul et autres, arrêt du 24/05/2007, définitif le 12/11/2007

55669/00          Nakhmanovitch, arrêt du 02/03/2006, définitif le 02/06/2006

45100/98          Panchenko, arrêt du 08/02/2005, définitif le 08/05/2005

28957/02          Pshevecherskiy, arrêt du 24/05/2007, définitif le 24/08/2007

54071/00          Rokhlina, arrêt du 07/04/2005, définitif le 12/10/2005

64140/00          Rozhkov, arrêt du 19/07/2007, définitif le 12/11/2007

7649/02            Shcheglyuk, arrêt du 14/12/2006, définitif le 14/03/2007

65734/01          Shukhardin, arrêt du 28/06/2007, définitif le 28/09/2007

4459/03 Sidorenko, arrêt du 08/03/2007, définitif le 08/06/2007

46133/99+        Smirnova, arrêt du 24/07/2003, définitif le 24/10/2003

2708/02            Solovyev Vladimir, arrêt du 24/05/2007, définitif le 12/11/2007

- Affaires concernant principalement l'annulation de décisions judiciaires définitives à la suite de nouvelles circonstances découvertes

69529/01          Pravednaya, arrêt du 18/11/2004, définitif le 30/03/2005

69524/01          Bulgakova, arrêt du 18/01/2007, définitif le 18/04/2007

67579/01          Kuznetsova, arrêt du 07/06/2007, définitif le 12/11/2007

L'affaire concerne l’annulation de décisions judiciaires définitives en faveur des requérants en raison de la découverte d'éléments nouveaux (article 333 du Code de procédure civile), à savoir, une instruction du Ministère du travail et du développement social établissant un taux de retraite individuelle inférieur à celui prévu par la loi.

La Cour européenne a relevé que la partie défenderesse avait eu connaissance de cette instruction au stade de l'appel mais que rien ne permettait d'établir qu'elle avait invoqué ce texte en appel. Dès lors la procédure de révision introduite une fois l'arrêt de la Cour d'appel devenu définitif constituait en fait un appel déguisé. En conséquence, la Cour a jugé que l'annulation des décisions judiciaires définitives avait violé le principe de sécurité juridique et, partant, le droit des requérants à un tribunal (violations de l'article 6§1).

Par ailleurs, la Cour européenne a estimé que la révision des décisions définitives avait eu pour conséquence de priver les requérants de leur droit à une pension de retraite au taux fixé par les décisions judiciaires définitives (violations de l'article 1 du Protocole no 1).

Mesures de caractère individuel :

                   1) Affaire Pravednaya : la Cour européenne n'a pas octroyé de satisfaction équitable à la requérante dans la mesure où cette dernière n'a formulé aucune demande à ce titre dans le délai imparti. D'après les autorités russes, les droits (à pension) au titre de la retraite de la requérante ont changé depuis les faits de la présente affaire.


Les autorités ont été invitées à fournir des clarifications sur la situation actuelle de la requérante afin de déterminer si d'autres mesures spécifiques d'ordre individuel sont nécessaires.

Le 3/03/2006, la requérante a indiqué au Secrétariat que les autorités russes n'avaient entrepris aucune démarche afin d'exécuter l'arrêt de la Cour européenne l'obligeant ainsi à introduire, le 18/02/2005, une nouvelle procédure devant la Cour fédérale de Zaeltsevskiy en vue de rétablir ses droits. Il semblerait que la requérante demande les dommages et intérêts moraux ainsi que le montant sa retraite soit recalculé. Selon la requérante, cette procédure a été retardée par le défaut de réponse par le Gouvernement à son assignation. La lettre de la requérante a été transmise aux autorités le 23/03/06.

Le 21/04/2006 la Cour fédérale de Zaeltsevskiy a ordonné aux autorités de payer à la requérante une indexation, les arriérés de la retraite et les frais et dépens. Le 13/07/2006 cette décision a été confirmée par la Cour régionale de Novosibirsk en appel. L’arrêt a été pleinement exécuté le 14/08/2006.

Des informations sont attendues sur la question de savoir si la requérante a également été indemnisée pour le préjudice moral et les intérêts.

2) Affaire Bulgakova : la question de satisfaction équitable est pendante devant la Cour européenne.

3) Affaire Kuznetsova : la Cour européenne a alloué une satisfaction équitable au titre de préjudice moral et de préjudice matériel.

• La necessité d’autres mesures de caractère individuel est en cours d’évaluation par la Secrétariat.

Mesures de caractère général : La Cour européenne a indiqué que la procédure de révision des décisions judiciaires définitives en raison d'éléments nouveaux (article 333 du Code de procédure civile) n’était pas en soi contraire au principe de la sécurité juridique dans la mesure où elle est utilisée pour corriger des erreurs judiciaires. L'interprétation de cette disposition par les tribunaux russes doit néanmoins être adaptée aux exigences de la Convention, ainsi qu'établies dans cet arrêt, pour prévenir de nouvelles violations similaires. Il s'avère donc approprié d'attirer l'attention de tribunaux internes (par exemple, par le biais d'une circulaire de la Cour suprême) sur l'obligation de respecter l'exigence de la sécurité juridique dans l'interprétation des dispositions légales pertinentes.

Des informations sont attendues à cet égard.

L’arrêt Pravednaya a été publié au Bulletin de la Cour européenne (version russe) n° 5 et 11, 2005 et l’arrêt Kuznetsova dans Konsultant +, une base de données électronique. Les deux arrêts ont été diffusés auprès du Ministère de la Santé et du développement social, l’Agence des fonds de pension et le Service Fédéral des Huissiers de justice. L’arrêt Kuznetsova a également été envoyé à la Cour Suprême et aux Cours constitutionnelles, ainsi qu’au Bureau du Procureur Général. La Cour Suprême a renvoyé l’arrêt aux cours régionales.

Les autorités russes ont également fourni des clarifications au sujet des « coefficients individuels de pension ». Elles ont également indiqué que la législation régissant le calcul des retraites individuelles avait été changée par la loi fédérale du 17/12/2001 n°173-FZ, entrée en vigueur depuis le 01/01/2002.

• Le Secrétariat est en train d’évaluer ces informations.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales ainsi que d’une évaluation des informations déjà envoyées.

49790/99          Trubnikov, arrêt du 05/07/2005, définitif le 30/11/2005[18]

71933/01          Gartukayev, arrêt du 13/12/2005, définitif le 13/03/2006

55762/00+        Timishev, arrêt du 13/12/2005, définitif le 13/03/2006

Ces affaires concernent les restrictions au droit à la libre circulation des requérants en ce que, le 27/01/2000 et le 19/06/1999 respectivement, ils n’avaient pas été autorisés à entrer en Kabardino-Balkaria en provenance de la Tchétchénie à cause de leur origine ethnique tchétchène. Dans l’affaire Gartukayev, la restriction a été imposée par une instruction du Ministère de l’Intérieur de Kabardino-Balkaria en violation du droit interne, à savoir la loi sur la liberté de circulation (N° 52-42-I du 25/06/93). Dans l’affaire Timishev, la restriction, bien que fondée sur la loi sur la police (article 11(22)) qui permet à la police de limiter la liberté de circulation dans l’intérêt public, a résulté d’une instruction orale du Chef Adjoint de la police de sécurité publique. La Cour européenne a estime dans ces deux affaires que les restrictions n’étaient pas conformes à la loi (violations de l’article 2 du Protocole n° 4).

Dans l’affaire Timishev, la Cour européenne a également estimé que la restriction critiquée avait été uniquement fondée sur l’origine tchétchène du requérant et ne pouvait dès lors pas être objectivement justifiée dans une société démocratique (violation de l’article 14 combiné à l’article 2 du Protocole n° 4).


Enfin, l’affaire Timishev concerne le refus des autorités russes de scolariser les enfants du requérant au motif que ce dernier n’était plus résident à Nalchik depuis qu’il avait dû rendre sa carte de migrant, un document local confirmant sa résidence à Nalchik, en échange de la compensation pour la propriété qu’il avait perdue en Tchétchénie. La Cour européenne a rappelé que le droit à l’éducation était absolu et a relevé que la législation russe ne prévoyait aucune exigence de résidence à cet égard (violation de l’article 2 du Protocole 1).

Mesures de caractère individuel : Les deux requérants ont pu traverser la frontière le jour même en passant par un autre poste de contrôle.

Dans le cadre de l’affaire Timishev, les autorités russes ont indiqué que les enfants du requérant avaient été admis à l’école municipal n°28 à Nalchik. Quant à l’enregistrement en tant que résident, aucune demande n’a été déposée par le requérant ni auprès du département territorial du Service fédéral de migration ni auprès du Ministère de l’Intérieur.

Mesures de caractère général :

            1) Violations de l’article 2 du Protocole n° 4 et de l’article 14 : Les autorités russes ont fourni des informations en réponse aux questions soulevées par le Secrétariat sur l’état actuel de la législation russe et sur les mesures prises, notamment celles ayant pour objet l’amélioration de la formation continue, afin de prévenir de nouvelles violations similaires. Ces informations sont en train d’être examinées par le Secrétariat.

            2) Violation de l’article 2 du Protocole 1: Le gouvernement a déclaré devant la Cour européenne que la loi russe sur l’éducation garantissait le droit à l’éducation indépendamment du lieu de résidence (§ 62 de l’arrêt).

            3) Publication et diffusion. L’arrêt de la Cour européenne a été diffusé à toutes les autorités concernées, notamment

- à tous les procureurs par lettre du Procureur Général Adjoint de la Fédération de Russie ;

- à tous les départements régionaux et municipaux du Ministère de l’éducation et de la science et à tous les établissements d’enseignement par lettre du Service fédéral du contrôle dans le domaine de l’éducation et de la science du 24/07/2006 n°01-678/07-01 attirant leur attention sur l’illégalité des demandes faites par les chefs d’établissements scolaires de présentation par les parents de certificats d’enregistrement du Ministère de l’Intérieur. Cette lettre est également disponible sur le site Internet www.obrnadzor.gov.ru;

- à tous les chefs des départements territoriaux du Service fédéral de migration par lettre du Chef du Directoire des migrants et des réfugiés du 24/07/2006 n°MD-3/13605;

- au Ministère de l’Intérieur de la République de Kabardino-Balkaria Republic par lettre du Directeur du Département de la sécurité routière du Ministère de l’Intérieur de la Fédération de Russie donnant pour instruction d’inclure les arrêts de la Cour européenne dans la formation continue.

L’arrêt Timishev a été publié dans le Bulletin de la Cour européenne (version russe) en 2006, n°10.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ces points au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière de l'évaluation qui sera faite par le Secrétariat concernant les mesures prises.

55565/00          Bartik, arrêt du 21/12/2006, définitif le 21/03/2007

L'affaire concerne la restriction de la liberté de circulation du requérant en raison du refus des autorités de l'autoriser à voyager à l'étranger à titre privé pendant vingt ans au seul motif qu'il avait eu accès à des informations classifiées (« secrets d'Etat ») au cours de sa carrière professionnelle.

La Cour européenne a constaté qu'une restriction inconditionnelle du droit du requérant de voyager à l'étranger imposée par la loi sur la procédure d'entrée et de sortie de la Fédération de Russie pendant un laps de temps considérable était disproportionnée et n'était pas nécessaire dans une société démocratique (violation de l'article 2 du Protocole n° 4).

Mesures de caractère individuel : Aucune. La restriction du droit du requérant de quitter le pays a expiré le 14/08/2001. Le requérant réside actuellement aux Etats-Unis. Le préjudice moral subi a été indemnisé par la Cour européenne. Le requérant a informé le Secrétariat qu’il avait payé aux Etats-Unis des impôts sur le montant de la satisfaction équitable et sur la somme versée au titre des frais et dépens. Cette information a été transmise aux autorités.

Mesures de caractère général : La Cour européenne a indiqué que la Fédération de Russie, au moment de son entrée au Conseil de l'Europe, s'était engagée à abolir la restriction sur les voyages internationaux pour des raisons privées (§50 de l'arrêt).


Des informations sont par conséquent attendues sur les mesures prises ou envisagées en vue de la modification des dispositions critiquées par l'arrêt.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point :

1.             si nécessaire, lors de leur 1035e réunion (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, à savoir le remboursement des taxes exigibles sur le montant de la satisfaction équitable ainsi que prévu par l’arrêt ;

2.             au plus tard à la 1043e réunion (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

73225/01          Fedotova, arrêt du 13/04/2006, définitif le 13/09/2006

5433/02            Shabanov et Tren, arrêt du 14/12/2006, définitif le 14/03/2007

Ces affaires ont trait à la composition illégale des tribunaux russes en 2000 en raison du non-respect par les autorités des dispositions de la loi sur les juges assesseurs. Cette loi exige l'établissement d'une liste de juges assesseurs par les autorités locales élues et la sélection de ces juges se fait par tirage au sort à partir de cette liste, la durée maximum de leur service étant limitée à deux semaines. En conséquence, la Cour européenne a estimé que les tribunaux qui avaient statué dans les affaires des requérants n’étaient pas « établis par la loi » (violations de l'article 6§1).

L’affaire Fedotova concerne également une violation du droit de requête individuelle de la requérante dans la mesure où une enquête sur les affaires fiscales de l’avocat et de la traductrice de la requérante avait été ouverte au cours de laquelle ils avaient été notamment interrogés à propos de leurs relations avec la requérante par la police régionale plutôt que par les autorités fiscales compétentes. La Cour européenne a constaté une ingérence dans l’exercice du droit de requête individuelle dans la mesure où une telle enquête avait été ouverte après que la requérante avait soumis sa demande au titre de la satisfaction équitable et en rapport avec les documents qu’elle avait produits à cet effet (violation de l’article 34).

Mesures de caractère individuel : D’après les autorités russes, les requérants n’ont pas introduit de recours consécutif à l’arrêt de la Cour européenne dans l’affaire Shabanov et Tren.

Des informations sont attendues sur la situation actuelle de la requérante dans l’affaire Fedotova.

Mesures de caractère général:

            1) Violation de l'article 6§1 : Cette affaire est à rapprocher de l'affaire Posokhov (clôturée par la Résolution finale ResDH(2004)46) pour laquelle la même question a été soulevée dans le cadre d’une procédure pénale. En ce qui concerne la procédure civile, il semblerait que l’institution des juges assesseurs n’existe plus, à savoir depuis l’entrée en vigueur le 1/02/2003 du nouveau Code de procédure civile. En outre, le 18/06/2004, la Cour constitutionnelle a rejeté une demande ayant pour objet le rétablissement des juges assesseurs dans le cadre de la procédure civile.

Selon les autorités russes, la loi fédérale du 02/01/2000 n°37-FZ sur les juges assesseurs des tribunaux fédéraux de compétence générale, telle que modifiée le 14/11/2002, est devenue caduque à partir du 01/02/2003 en ce qui concerne les procédures civiles, après l’entrée en vigueur du Code de procédure civile. En vertu de l’article 14 de ce Code, les affaires civiles sont examinées en première instance par un seul juge ou par trois juges professionnels, si cela est expressément prévu par la loi.

            2) Violations de l’article 34:

Des informations sont attendues sur les règles actuellement applicables à la conduite d’une enquête concernant les déclarations des revenus des personnes physiques, notamment sur les circonstances dans lesquelles une telle enquête peut être ouverte, les autorités compétentes, les garanties contre l’arbitraire, des sanctions possibles, etc.

Des informations sont également attendues sur les mesures prises ou envisagées afin de prévenir de nouvelles violations similaires de la Convention.

            3) Publication et diffusion : Par lettre de l’Agent du Gouvernement russe, l’arrêt Fedotova a été diffusé auprès de la Cour Suprême de la Fédération de Russie et du Ministère de l’Intérieur. Le 21/12/2006, l’arrêt Fedotova a été diffusé auprès de tous les tribunaux par une circulaire du Vice-Président de la Cour Suprême de la Fédération de Russie. Le 5/07/2007, l’arrêt Shabanov et Tren a également été diffusé auprès de tous les tribunaux.

L’arrêt Fedotova a été publié au Bulletin de la Cour européenne (version russe), 2007, n°2.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

33132/02          Metelitsa, arrêt du 22/06/2006, définitif le 23/10/2006

L’affaire concerne le caractère inéquitable d’une procédure en appel, initiée par le requérant devant la Cour régionale de Krasnoiarsk en janvier 2002, en raison de la réception de la convocation à l’audience un an et demi après que son appel avait été jugé et du défaut de réception de cette convocation par son avocat.


La Cour européenne a constaté que les autorités internes avait failli à leur obligation d’assurer au moins la présence de l’avocat à l’audience, notamment en raison de la participation d’un procureur (violation de l’article 6§3 (c) combiné avec l’article 6§1).

Mesures de caractère individuel : La condamnation du requérant à six ans d’emprisonnement a été confirmée en appel. Cependant, la même cour, lors de l’audience à laquelle ni le requérant ni son avocat n’étaient présents, a réduit la condamnation de ses co-accusés et a modifié la qualification des faits pour l’un d’eux. A cet égard, il convient de noter que le Code de procédure pénale russe (article 413) prévoit qu’une procédure pénale peut être rouverte à la suite d’un arrêt de la Cour européenne constatant une violation de la Convention.

• Informations fournies par les autorités russes: Le 19/12/2001, le requérant a été condamné par décision du tribunal de la ville Nazarov de la région de Krasnodar. Il a été libéré sur parole le 5/10/2005, soit un an, onze mois et onze jours avant la fin de sa peine.

A ce jour, le requérant n’a formulé aucune autre demande.

Mesures de caractère général : Cette affaire est à rapprocher de l’affaire Mokrushina (rubrique 4.2) pour laquelle la même question est soulevée dans le cadre d’une procédure civile. Les dispositions du Code de procédure pénale russe applicable semblent être en conformité avec les exigences de la Convention dans la mesure où elles prévoient que l’absence de l’accusé ou de son avocat constitue un obstacle à l’examen de l’affaire. Cependant, il semblerait que dans cette affaire les autorités internes n’aient pu démontrer que les convocations avaient été effectivement envoyées au requérant et à son avocat.

Des informations seraient dès lors utiles sur les règles actuellement applicables à l’envoi de convocations (lettre recommandée avec accusé de réception, etc…) et, le cas échéant, sur les mesures prises afin de garantir la traçabilité des convocations envoyées.

L’arrêt de la Cour européenne a été diffusé auprès de tous les tribunaux de la région de Krasnodar par lettre de la cour régionale de Krasnodar. Cette lettre a également été publiée en 2007 dans une revue juridique régionale « La lettre de la loi ». L’arrêt lui-même a été publié au Bulletin de la Cour européenne (édition russe), 2006, n°12.

Selon les autorités russes, la Cour Suprême de Fédération de Russie continue à attirer l’attention des tribunaux sur la nécessité de garantir la conformité avec les exigences du Chapitre 33 du Code de la procédure pénale.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales, en particulier s’agissant des règles applicables à l’envoi des convocations.

- Affaires concernant la violation du droit d'accès à un tribunal ou à un procès équitable en raison de la notification tardive d'un acte judiciaire dans le cadre de procédures civiles

23377/02          Mokrushina, arrêt du 05/10/2006, définitif le 12/02/2007

70142/01          Dunayev, arrêt du 24/05/2007, définitif le 24/08/2007

3354/02            Gorbachev, arrêt du 15/02/2007, définitif le 15/05/2007

74286/01          Larin et Larina, arrêt du 07/06/2007, définitif le 07/09/2007

8630/03            Prokopenko, arrêt du 03/05/2007, définitif le 03/08/2007

Ces affaires concernent une violation du droit des requérants à un procès équitable en raison de la notification tardive d'une convocation à l'audience en violation du droit interne, les privant ainsi de la possibilité d'être présent à l'audience. La Cour européenne a également relevé que les juridictions internes avaient omis d'examiner si les requérants avaient été dûment convoqués et, en l'absence d'une telle notification, de reporter l'examen de l'affaire (violation de l'article 6§1).

Mesures de caractère individuel : Le préjudice subi par les requérants a été indemnisé par la Cour européenne dans le cadre de la satisfaction équitable.

Concernant l'affaire Mokruchina, la procédure de contrôle en révision engagée par la requérante à la suite de l'arrêt de la Cour européenne est actuellement pendante devant la cour de la ville de Moscou

Des informations sont attendues sur l'issue de cette procédure.

Des informations sont attendues sur la question de savoir si les autres requérants ont demandé la réouverture à la suite des arrêts de la Cour européenne.

Mesures de caractère général : Ces affaires sont à rapprocher notamment des affaires Yakovlev et Groshev closes à la suite de mesures de diffusion prises dans ces affaires et à l'envoi de lettres circulaires attirant l'attention des tribunaux sur ces affaires (voir Résolution CM/ResDH(2008)17). Un problème similaire concernant la procédure pénale est examiné dans le cadre de l'affaire Metelitsa (rubrique 2).


La Cour européenne a constaté que les dispositions pertinentes du droit interne n'étaient pas, en elles-mêmes, incompatibles avec les garanties du procès équitable inscrites dans l'article 6§1. Cependant, les tribunaux ne les ont pas appliquées comme il se doit dans ces affaires. Etant donné le nombre sans cesse croissant d'affaires similaires, des mesures complémentaires semblent être nécessaires.

L'arrêt Mokruchina a été diffusé à toutes les juridictions par une lettre de l'Adjoint du Président de la Cour Suprême de la Fédération de Russie. Une discussion générale sur les questions soulevées par cet arrêt a été prévue le 11/10/2007 au sein de la Cour Suprême.

Des informations sont attendues sur des mesures d'ordre logistique prises afin de garantir que les parties à la procédure soient convoquées et les décisions de justice notifiées dans les délais et sur la question de savoir comment leur traçabilité est assurée.

Des informations sont également attendues sur la question de savoir si les juges sont tenus d'examiner les raisons pour lesquelles une partie n'a pas comparu et quelles en sont des conséquences procédurales.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ces points au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

12365/03          Krasulya, arrêt du 22/02/2007, définitif le 22/05/2007[19]

71362/01           Smirnov, arrêt du 07/06/2007, définitif le 12/11/2007

L’affaire concerne des violations des droits du requérant, un avocat, commises en relation avec la perquisition de son domicile en mars 2000 et la saisie subséquente de son ordinateur par les autorités chargées de l’instruction criminelle ouverte contre certains de ses clients.

La Cour européenne a estimé que la perquisition avait été menée sans fondement suffisant et pertinent et en l’absence de garanties contre l’atteinte au secret professionnel, car le libellé excessivement général du mandat donnait toute latitude à la police pour déterminer ce qui était à saisir. Par conséquent, l’ingérence des autorités avec le droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale n’était pas « nécessaire dans une société démocratique » (violation de l’article 8).

La Cour européenne a également observé que l’unité centrale de l’ordinateur du requérant était toujours entre les mains des autorités russes, plus de six ans après les faits. Elle a noté que la rétention de l’ordinateur avait non seulement causé des désagréments personnels à l’intéressé mais avait également entravé ses activités professionnelles et avait même eu des conséquences sur l’administration de la justice. Dès lors, la Cour a estimé que les autorités russes n’avaient pas ménagé un « juste équilibre » entre les exigences de l’intérêt général et les impératifs de la protection du droit du requérant au respect de ses biens (violation de l’article 1 du Protocole no 1). De plus, la Cour a considéré que l’intéressé n’avait pas eu de recours effectif permettant de contester la rétention de ses biens devant un juge (violation de l’article 13 combiné avec l’article 1 du Protocole no 1).

Mesures de caractère individuel :

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées afin de fournir réparation au requérant pour des violations constatées.

Mesures de caractère général :

Le nouveau Code de procédure pénale a été adopté en 2001. Cependant, il reste à évaluer dans quelle mesure les nouvelles dispositions répondent aux exigences de la Convention identifiées dans cet arrêt.

Des informations sont donc attendues :

-           sur les règles actuellement applicables aux perquisitions (l’autorité chargée de délivrer le mandat de perquisition, les exigences spécifiques quant à son contenu, la possibilité d’examen judiciaire, etc) et aux saisies pratiquées dans les locaux d’un avocat et en particulier sur l’existence de dispositions particulières (du Code de procédure pénale ou autres) visant à protéger les documents couverts par le secret professionnel ;

-           sur le fait de savoir si les décisions de rétention font désormais l’objet d’un examen judiciaire ;

-           sur la publication et une large diffusion de l’arrêt de la Cour européenne à toutes les juridictions ainsi qu’aux procureurs, accompagné des instructions appropriées du Procureur général.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.


- 2 affaires contre Saint-Marin

40786/98          Beneficio Cappella Paolini, arrêts du 13/07/2004 et du 03/05/2007, définitif le 13/10/2004 et on 03/08/2007 - Règlement amiable

Cette affaire concerne la durée excessive d'une procédure civile (plus de 9 ans et 9 mois), introduite en vue d'obtenir la restitution partielle d'un terrain appartenant à l'institution requérante et qui avait fait l'objet d'une expropriation pour cause d'utilisation publique (violation de l'article 6§1).

Cette affaire concerne également la violation du droit d'accès à un tribunal dans la mesure où ni les juridictions civiles ni les juridictions administratives ne s'étaient prononcées sur la question du droit de la requérante à la restitution des terrains, ces derniers n'ayant pas fait l'objet de travaux publics (violation de l'article 6§1). À cet égard, la Cour européenne a également constaté que le défaut de restituer les terrains avait rompu le juste équilibre entre les exigences de l'intérêt général et les impératifs de protection du droit au respect des biens de l'institution requérante (violation de l'article 1 du Protocole nº 1).

Mesures de caractère individuel : Le 28/11/2006, la Cour européenne a reçu une déclaration conjointe de l’Etat défendeur et de la requérante concernant la question de l’article 41. S’étant déclarée satisfaite par les termes de cet accord, la Cour a décidé dans son arrêt du 3/05/2007 de radier l’affaire.

• Le Secrétariat est en train d’examiner si d’autres mesures individuelles sont nécessaires.

Mesures de caractère général :

1) Durée de la procédure : Cette affaire est à rapprocher de l'affaire Tierce Vanessa (rubrique 4.2).

2) Respect des biens :

Des informations sont attendues sur les mesures envisagées par le gouvernement défendeur en vue d'établir des règles claires en matière de restitution de biens expropriés et non utilisés.

En novembre 2004, Le Secrétariat a adressé une lettre à l'Etat défendeur sur ces questions. En réponse à cette lettre, la délégation a indiqué que l'arrêt de la Cour européenne avait été rendu public par affichage ad valvas palatii (moyen traditionnel de rendre un document formellement public à Saint-Marin) et diffusé aux différentes autorités concernées.

• Le Secrétariat est en train d’examiner si d’autres mesures générales sont nécessaires.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), aux fins de l’examen des mesures générales.

69700/01          Tierce Vanessa, arrêt du 17/06/03, définitif le 03/12/03

Cette affaire concerne la durée excessive d’une procédure civile, de 1993 à 2001 (environ 8 ans et 9 mois pour deux degrés de juridiction) (violation de l’article 6§1). La Cour européenne a noté que la cause de cette longueur résidait principalement dans la complexité de la procédure civile saint‑marinaise, marquée par la nécessité de respecter plusieurs délais légaux, et dans le fait que le juge civil n’avait pas de pouvoir d’initiative en cas d’inactivité des parties.

Mesures de caractère individuel : Aucune. La procédure est terminée.

Mesures de caractère général :

Informations soumises par les autorités de Saint-Marin :

Un groupe de travail a été constitué afin de prendre des mesures en vue de réduire la durée des procédures. Ce groupe est composé notamment de représentants du Ministère de la Justice et du Ministère des Affaires Etrangères, de magistrats et d’avocats. Le groupe se réunit depuis le début de l’année 2005. Le groupe de travail a conclu son travail au début de l’année 2006 et ses conclusions seront bientôt publiées.

Au même temps, une nouvelle loi (n° 145) a été adoptée le 28/10/2005 qui introduit des modifications procédurales et matérielles afin de réduire la durée des procédures. La loi prévoit, inter alia, que les procès civils peuvent maintenant être éteints aussi ex officio et pas seulement sur demande des parties. L’objectif de cet amendement est d’empêcher que les parties prolongent la durée des procédures en restant inactives. La charge de travail du Commissario della legge a également été réduite en élargissant les compétences des juges de conciliation (Giudici Conciliatori) et en adressant des appels concernant ses décisions aux juges d’appel (Guidici delle Appellazioni) et non plus au Commissario della legge.

Des informations sont attendues : sur les suites à donner à ces propositions et le calendrier d’adoption prévu pour cette éventuelle réforme ainsi que sur le recours effectif dans les affaires concernant la durée des procédures. 

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard à leur 1043e réunion (2‑4 décembre  2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales.


- 5 affaires contre la Serbie

- Affaire concernant le manquement ou le retard substantiel de l’administration à se conformer à des arrêts internes définitifs

3102/05 EVT Company, arrêt du 21/06/2007, définitif le 21/09/2007

L’affaire concerne la violation du droit de la société requérante à un procès équitable et du droit au respect de ses biens dans la mesure où, depuis 1996, les autorités serbes ont manqué leur obligation d’assurer l’exécution forcée d’une décision judiciaire définitive à l’encontre du débiteur de la société requérante, la police ayant expressément refusé d’assister les huissiers à plusieurs reprises (violation de l’article 6§1 et de l’article 1 du Protocole n° 1).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé une satisfaction équitable au titre du préjudice moral subi par la société requérante. Elle a en outre indiqué que la réparation du préjudice matériel incombait au gouvernement, par des moyens appropriés, en vue de l’exécution intégrale de l’arrêt définitif du 7/05/1996 de la Cour commerciale, tel que modifié par des décisions en matière d’exécution forcée du 17/10/1996 et 21/12/1998 (§60 de l’arrêt).

Information fournies par les autorités Serbes (lettres du 04/12/2007, 05/03/2008, 09/04/2008 et 17/04/2008): Un certain nombre de mesures procédurales ont été prises afin d’exécuter l’arrêt interne. En particulier, la juridiction nationale a tenu cinq audiences dans le cadre de la procédure en exécution forcée, la requérante n’était pas présente à trois de ces audiences. La juridiction nationale a établi les faits s’agissant des biens des sociétés débitrices, lesquels semblent être largement insuffisants pour couvrir la demande de la requérante. Au vu de l’état actuel de la procédure en exécution, le 11/03/2008 la requérante a soumis au une demande visant à modifier les biens saisissables au titre de l’exécution forcée. Cependant, il s’avère que le bien immobilier indiqué par la requérante a fait l’objet d’une précédente procédure en exécution forcée impliquant plus de 80 autres créditeurs. La requérante est informée de la situation et a le droit d’indiquer d’autres biens immobiliers exempts de charge. La demande de la requérante n’a pu être satisfaite en raison de l’absence de biens du débiteur.

Des informations sont attendues sur tout développement et mesures complémentaires prises ou envisagées en vue de l’exécution intégrale de cet arrêt.

Mesures de caractère général :

Des informations sont attendues  sur les mesures éventuelles, prises ou envisagées par les autorités en vue de prévenir de nouvelles violations similaires, en particulier pour faciliter l’assistance de la police dans le cadre des procédures en exécution forcée. Des informations seraient utiles sur les dispositions applicables pour accélérer les procédures internes ainsi que sur l’obligation pour la police d’assister le cas échéant les huissiers de justice.

Mesures prises : L’arrêt de la Cour européenne a été traduit en serbe et publié au Journal officiel n° 63/07 du 09/07/2007 ainsi que sur le site Internet de l’Agent du gouvernement (www.zastupnik.sr.gov.yu). Il a également été publié sur le CD édité par le journal Paragraf et sur le site Internet de ce journal, avec des commentaires d’experts. L’Agent du gouvernement a transmis l’arrêt à la Haute Cour de Commerce et la Cour suprême de Serbie en lui demandant de le diffuser à toutes les juridictions serbes. Il a également fait quelques déclarations publiques sur cet arrêt. Le Bureau de l’Agent du gouvernement est en train de préparer un ouvrage comprenant des traductions de quatre arrêts rendus contre la Serbie, dont celui-ci.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles, en particulier sur l’exécution forcée de l’arrêt définitif du 07/05/1996, ainsi que sur les mesures générales.

Affaires de durée de procédures judiciaires

39177/05          V.A.M., arrêt du 13/03/2007, définitif le 13/06/2007

L’affaire concerne la durée excessive d’une procédure initiée en 1999 par la requérante, atteinte du virus VIH, devant le Quatrième tribunal de Belgrade en vue de la dissolution de son mariage, de l’obtention de la garde de sa fille née en 1995 et de l’obtention d’une pension alimentaire (violation de l’article 6§1).

La Cour européenne a rappelé qu’une diligence exceptionnelle était requise lorsque les plaignants étaient atteints du virus VIH ainsi que dans les affaires de garde d’enfant (§§101, 105 et 106 de l’arrêt).

L’affaire concerne également la violation du droit de la requérante à la vie familiale en raison de la non-mise en œuvre depuis 1999 de l’ordonnance provisoire rendu par le tribunal national établissant les droits de visite de la requérante à l’égard de sa fille, ainsi que la durée excessive de la procédure civile y afférant (violations de l’article 8). L’enfant n’a pas vu sa mère depuis août 1998 et l’ordonnance provisoire relative aux droits d’accès n’a pas été exécutée en raison de l’attitude peu coopérative du père ainsi que de l’impossibilité de lui notifier des décisions judiciaires en raison de ses fréquents changements d’adresse, y compris à l’étranger au Monténégro.


Enfin, l’affaire concerne le défaut de recours effectif en droit national au titre de la durée excessive de la procédure (violation de l’article 13).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a rappelé l’obligation pour l’Etat défendeur d’assurer » par des moyens appropriés » la mise en œuvre de l’ordonnance provisoire du 23/07/1999 ainsi que « la conclusion, avec une diligence particulière, de la procédure civile en cours «  (§166 de l’arrêt).

• Informations fournies par les autorités serbes et par la requérante : La procédure relative au droit de garde et à la pension alimentaire s’est achevée le 14/12/2007 et la décision a été confirmée en appel le 12/03/2008. Cette décision est donc devenue définitive et a annulé l’ordonnance provisoire de 1999. L’arrêt a laissé la garde de l’enfant au père et a confirmé les droits de visite de la requérante. Toutefois, le père de l’enfant a persisté à empêcher la requérante d’exercer ses droits de visite. A ce jour, aucun contact n’a été établi entre la requérante et son enfant. Le Centre de protection sociale a été chargé par le ministère compétent de prendre certaines mesures légales jusqu’au 20/05/2008, y compris d’agir au plan pénal à l’encontre du père, d’introduire une action en vue de la déchéance de ses droits parentaux, de nommer un tuteur pour l’enfant et d’entamer une procédure en vue de l’exécution des droits de visite en vertu du jugement du 14/12/2007.

Le tribunal a condamné le père à des amendes, à deux reprises, ce dernier n’ayant pas amené l’enfant aux fins de la mise en œuvre de l’ordonnance provisoire sur les droits de visite.

Evaluation : Le Secrétariat relève que depuis que l’arrêt de la Cour européenne est devenu définitif en juin 2007, il ne semble pas que les autorités serbes aient pris toutes les mesures requises en vertu de la Convention pour assurer l’exercice des droits de visite de la requérante. Il ne semble pas par ailleurs que la requérante dispose d’autres moyens pour faire valoir ses droits de visite.

Des informations sont par conséquent attendues urgemment sur les mesures prises en vue de permettre à la requérante d’exercer ses droits de visite sans plus de retard.

Mesures de caractère général : Les autorités serbes ont fournies les informations suivantes concernant les mesures de caractère général prises :

            1) Durée excessive des procédures: La Constitution serbe énonce le droit à un procès équitable dans un délai raisonnable (article 32). De la même façon, la loi de 2005 sur la procédure civile prévoit que les tribunaux doivent se prononcer dans un délai raisonnable sur toutes les demandes formulées par les parties (article 10).

Les autorités serbes ont fourni des extraits de nombreux dossiers en matière de droit de la famille, y compris notamment des procédures relatives au droit de garde, attestant de la mise en œuvre en pratique de la législation ainsi que de la loi de 2005 sur la procédure civile (§61 et 62 de l’arrêt) et de la loi de 2005 sur le droit de la famille (§§57 et 58 de l’arrêt) de manière à éviter des durées de procédures excessives.

Evaluation: Considérant les exemples fournis, il apparaît que les dispositions réglementaires pertinentes, ayant pour but de garantir la rapidité des procédures civiles relatives au droit de la famille, ont été mises en œuvre en pratique. Cependant, dans quelques arrêts rendus par la Cour européenne (voir par exemple les affaires en rubrique 4.2) et dans des affaires pendantes devant la Cour concernant la durée excessive des procédures, il semble que des problèmes persistent à cet égard.  

Des informations sont donc attendues sur les mesures éventuelles prises ou envisagées visant à remédier à la durée excessive des procédures. En particulier, des informations seraient utiles sur les mesures envisagées pour faciliter l’accélération des procédures civiles. Ces mesures pourraient comprendre des mesures organisationnelles, telles que la construction et/ou la rénovation des palais de justice, l’informatisation des tribunaux, l’augmentation des postes pour juges et agents judiciaires, des mesures de formation et de sensibilisation, l’amélioration de la gestion de l’organisation et de la gestion des tribunaux, l’augmentation du budget consacré à la justice.

            2) Violation du droit au respect de la vie familiale (non exécution des décisions de justice) : En vertu de la loi de 2004 sur les procédures d’exécution forcée, les tribunaux doivent agir très rapidement dans le cadre de toutes les procédures en exécution et trancher toute demande d’exécution forcée dans les 3 jours. Toute décision prise par les tribunaux en méconnaissance de cette loi sera considéré comme un « comportement non-professionnel d’un juge » au sens de la loi sur les juges.

La loi de 2004 sur les procédures d’exécution forcée prévoit une période initiale de 3 jours pour la mise en œuvre volontaire d’une ordonnance relative à la garde d’enfant. Au-delà de cette période des amendes sont imposées et en dernier lieu l’enfant peut être retiré par la force, si nécessaire, en coopération avec les services sociaux. Lorsque dans des circonstances exceptionnelles, la vie de l’enfant, sa santé ou son développement sont mis en danger, l’enfant sera retiré et confié à une autre personne sans qu’il soit nécessaire d’attendre l’expiration de la période d’exécution volontaire ou de recourir à des amendes.

Les autorités serbes ont transmis au Secrétariat des extraits de nombreux dossiers internes démontrant la mise en œuvre de la loi de 2004 sur la procédure en matière d’exécution dans les affaires relatives aux droits de garde des enfants.


Evaluation : Les informations fournies sont indicatives d’une tendance positive dans l’application efficace de la loi de 2004. Cependant, il semble que il y ait un certain nombre d’affaires similaires où la Cour européenne a constaté la violation du droit au respect de la vie familiale (voir par exemple les affaires Tomić et Jevremović), ainsi qu’un certain nombre d’affaires similaires pendantes devant la Cour européenne. Dans ces circonstances, le Secrétariat estime qu’une évaluation à ce stade est prématurée sur la question de savoir si les exemples fournis démontrent ou non une mise en œuvre de la loi conforme aux standards de la Convention.  

Des informations sont donc attendues sur la mise en œuvre efficace de cette législation. Des informations sont également attendues sur l’application du Code pénal (voir §74 de l’arrêt) afin de garantir l’exécution des décisions dans des situations semblables.

            3) Défaut de recours effectif : Le projet de loi sur la Cour constitutionnelle a été adopté en 2007. Il prévoit un recours devant la Cour constitutionnelle pour se plaindre de la durée excessive d’une procédure sans avoir à épuiser les autres recours. La loi n’a pas établi dans quel délai une décision doit être rendue sur les plaintes déposées dans ce cadre. Elle a cependant fixé un terme impératif de 15 jours à l’issue duquel l’Etat et les autres autorités, les personnes morales et physiques doivent répondre. De plus, la Cour constitutionnelle n’a pas encore rendu de décision démontrant que le recours en question permet de réduire la durée excessive des procédures. Il est à noter que la Cour constitutionnelle a adopté en février 2008 son Règlement interne (Journal officiel, n°24/08), conformément au nouveau cadre légal.

La loi sur la Cour constitutionnelle prévoit en outre, que si une plainte individuelle devant la Cour constitutionnelle est acceptée, l’intéressé aura le droit de demander des dommages et intérêts à une Commission spéciale d’indemnisation. La Commission devra rendre ses décisions en la matière dans un délai de 30 jours. A défaut, l’intéressé sera habilité à saisir les tribunaux de sa demande en indemnisation. En mars 2008, les membres de la Commission spéciale ont été nommés par le Ministre de la Justice et le règlement interne de cet organe a été adopté (Journal officiel, n°27/08).

Evaluation : Nonobstant l’introduction de cette législation, aucune preuve n’a été apportée quant à l’existence d’un recours effectif en pratique, conforme aux normes de la Convention.

Des informations sont par conséquent attendues sur le texte de la loi et sa mise en œuvre ainsi que sur lefficacité en pratique de ce mécanisme, y compris le premier bilan de fonctionnement de la Cour constitutionnelle et la Commission spéciale d’indemnisation à cet égard.

A cet égard, l’attention des autorités a été attirée sur la Recommandation du Comité des Ministres aux Etats membres, Rec(2004)6 sur l'amélioration des recours internes et sur les mesures adoptées dans ce domaine par les autres Etats (voir par exemple Kudła contre la Pologne, Résolution intérimaire ResDH(2007)28 ; Jóri contre la République slovaque, Résolution finale ResDH(2005)67 ; Horvat contre la Croatie, Résolution finale ResDH(2005)60 et Lukenda contre la Slovénie, 992e réunion, avril 2007, rubrique 4.2).

            4) Diffusion : L’Agent du gouvernement a publié rapidement un communiqué de presse sur l’arrêt de la Cour européenne, lequel a fait l’objet d’une large couverture médiatique en Serbie. Il a également transmis la traduction de l’arrêt de la Cour à la Cour suprême de Serbie en vue de sa distribution à toutes les juridictions internes. Lors de ses visites à certaines juridictions, l’Agent du gouvernement leur a transmis des copies de l’arrêt traduit. Enfin, l’arrêt a été distribué et discuté lors d’un séminaire organisé pour les membres du judiciaire et les autorités étatiques les 14 et 15 juin 2007 par le service des Droits de l’Homme et des Minorités du gouvernement et l’Agent du gouvernement, en coopération avec le Conseil de l’Europe. Les membres du judiciaire et des autorités de l’Etat ont participé à ce séminaire. 

            5) Publication : L’arrêt de la Cour européenne a été immédiatement traduit et publié au Journal officiel de la République de Serbie, n° 53 du 13/06/2007, ainsi que sur le site Internet de l’Agent du gouvernement (www.zastupnik.sr.gov.yu). Un commentaire de l’arrêt rédigé par l’Agent du Gouvernement a été publié dans une édition juridique spécialisée Paragraf y compris dans son édition électronique, ainsi que dans le journal Izbor sudske prakse (Sélection de jurisprudence), n° 5/2007.

Les Délégués,

1.             notent que le droit d’accès de la requérante octroyé par l’ordonnance provisoire de 1999 est maintenant confirmé par un jugement rendu en décembre 2007, devenu définitif en mai 2008 ;

2.             notent que la requérante a initié une procédure visant à obtenir l’exécution de son droit de visite conformément à ce jugement définitif ;

3.             prient instamment les autorités serbes de s’assurer que toutes les mesures nécessaires soient prises afin de veiller à la mise en œuvre diligente de la procédure d’exécution ;

4.             prennent note du recours mis en place contre la durée excessive des procédures par la loi sur la Cour constitutionnelle, laquelle prévoit que la Cour constitutionnelle a le pouvoir d’évaluer si le droit à un procès dans un délai raisonnable a été violé ou non ;

5.             invitent les autorités serbes à fournir des informations sur l’efficacité de ce recours ;

6.             prennent note des informations fournies concernant les mesures prises pour mettre un terme à la durée excessive des procédures ;

7.             notent que des informations sont attendues sur les développements postérieurs concernant les mesures envisagées pour mettre un terme à la durée excessive des procédures ainsi que pour assurer l’exécution efficace des arrêts ;

8.             décident de reprendre l’examen de ce point à leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures individuelles et au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales.


3150/05            Jevremović, arrêt du 17/07/2007, définitif le 17/10/2007

L’affaire concerne la durée excessive d’une procédure introduite en 1999 par les requérantes devant le quatrième tribunal municipal de Belgrade en vue d’établir la filiation de la première requérante et les droits à pension alimentaire (violation de l’article 6§1). La filiation de la requérante a été confirmée par décision du 09/05/2007 de la Cour suprême mais la question des droits à pension alimentaire était toujours pendante lorsque la Cour européenne a rendu son arrêt. La Cour européenne a rappelé qu’une diligence particulière était requise dans toutes les affaires concernant l’état civil et le régime des capacités (§81 de l’arrêt).

L’affaire concerne en outre la violation du droit au respect de la vie familiale de la première requérante en raison de la durée excessive de la procédure en établissement de filiation, la laissant ainsi dans un état prolongé d’incertitude quant à son identité (violation de l’article 8).

Enfin, l’affaire concerne l’absence de recours effectif en droit interne au titre de la durée excessive des procédures civiles (violation de l’article 13).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a rappelé l’obligation pour l’Etat défendeur de régler les litiges en suspens en matière de droit à pension alimentaire avec une diligence particulière et de manière appropriée (§135 de l’arrêt).

Informations fournies par les autorités serbes: La 4° Cour municipale de Belgrade a rendu un autre arrêt le 16/01/2008 confiant la garde de la mineure, Ina Jevremović, à sa mère, et ordonnant au père de payer une pension alimentaire. Cet arrêt a été reformé le 26/03/2008 par arrêt de la Cour régionale de Belgrade seulement en ce qui concerne la pension alimentaire. Les autorités ont confirmé que ce dernier arrêt est devenu définitif et que la procédure est donc terminée.

Evaluation: Vu que la procédure concernant la pension alimentaire est terminée, aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général :

            1) Durée excessive de procédure civile: Cette affaire est à rapprocher del’affaire V.A.M. (rubrique 4.2), pour laquelle des informations sont attendues à ce titre.

2) Violation du droit de respect de la vie de famille  (durée excessive de la procédure): Voir l’affaire V.A.M.

3) Absence de recours efficace: Voir l’affaire V.A.M.

4) Diffusion et publication de l’arrêt de la Cour européenne : l’Agent du gouvernement a transmis la traduction de l’arrêt à la Cour suprême en vue de sa distribution à toutes les juridictions internes. En outre, il a fait plusieurs déclarations publiques sur l’arrêt, dont la dernière a eu lieu lors d’une conférence organisée par la Cour suprême de Serbie à Vrnjačka Banja, le 08/10/2007. L’arrêt a été immédiatement traduit et publié au Journal officiel de la République de Serbie, n° 72 du 31/07/2007, ainsi que sur le site Internet de l’Agent du gouvernement (www.zastupnik.sr.gov.yu). Pour plus de détails sur la publication avec la revue Paragraf et la préparation d’un livre pour inclure cet arrêt, voir l’affaire EVT Company (rubrique 4.2, 1028e DH).

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), aux fins de l’examen des mesures générales.

28443/05          Samardžić et AD Plastika, arrêt du 17/07/2007, définitif le 17/10/2007

Cette affaire concerne la durée excessive de procédures concernant des droits et obligations de caractère civil en matière commerciale, pendante depuis 1991 (violation de l'article 6§1).

La Cour européenne a noté que la durée des procédures était due en particulier au fait que la procédure initiale avait été suspendue après l’ouverture d’une procédure en faillite contre le second requérant.

Mesures de caractère individuel :

Informations fournies par les autorités serbes : La procédure en faillite ouverte contre la deuxième requérante est toujours pendante. La répartition définitive des biens ne pourra être mise en œuvre qu’à l’issue du processus judiciaire.

Des informations sont attendues sur l’état des procédures pendantes relatives à cette affaire et, le cas échéant, sur leur accélération.

Mesures de caractère général :

1) Durée excessive des procédures civiles : Cette affaire est à rapprocher de l’affaire V.A.M. (rubrique 4.2), pour laquelle des informations sont attendues à ce titre.

2) Publication et diffusion de l’arrêt de la Cour européenne : L’arrêt a été immédiatement traduit et publié au Journal officiel de la République de Serbie (n° 72 du 31/07/2007) et placé sur le site Internet de l’Agent du gouvernement (www.zastupnik.sr.gov.yu)). L’Agent du gouvernement a transmis la traduction de l’arrêt à la Cour suprême de Serbie et à la Cour d’appel commerciale en vue de sa distribution à toutes les juridictions internes.


Il a également fait l’objet de discussions dans le cadre d’une conférence organisée par la Cour suprême de Serbie à Vrnjačka Banja le 08/10/2007.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

25959/06           Tomić, arrêt du 26/06/2007, définitif le 26/09/2007

L’affaire concerne la violation du droit de la requérante à un procès équitable dans la mesure où les autorités serbes n’ont pas pris de mesures suffisantes entre le 18/03/2005 et le 14/03/2007 en vue de la mise en œuvre d’un arrêt interne du 25/02/2004 attribuant à la requérante le droit de garde à l’égard de sa fille. La garde de l’enfant a été attribuée par la suite au père par arrêt du 14/03/2007, dans le cadre d’une autre procédure (violation de l’article 6§1).

L’affaire concerne en outre la violation du droit de la requérante au respect de la vie familiale eu égard à la non-exécution de cet arrêt définitif. La requérante a été privée de tout contact avec sa fille depuis mars 2005 (violation de l’article 8).

L’affaire concerne enfin l’absence de recours effectif en droit interne au titre de la durée excessive des procédures en exécution forcée (violation de l’article 13).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé une satisfaction équitable au titre du préjudice moral subi par la requérante. La Cour a en outre constaté que le père de l’enfant avait pu de facto utiliser le système judiciaire à son avantage jusqu’à ce que la situation soit suffisamment altérée par le passage du temps pour lui permettre d’obtenir la garde de l’enfant par le biais d’une procédure judiciaire séparée (§104 de l’arrêt).

Informations fournies par les autorités serbes : La requérante n’a pas demandé à ce jour la réouverture de la deuxième procédure, même si les autorités l’ont informé par écrit le 13/11/2007 de cette possibilité. Le 06/06/2007, la cour municipale de Loznica a rendu un arrêt attribuant des droits de visite à la requérante et l’obligeant à payer une pension alimentaire. Le 23/10/2007, le tribunal de Šabac a confirmé cette décision s’agissant des droits de visite. L’arrêt du tribunal municipal de Loznica du 06/06/2007 est devenu définitif dans l’intervalle dans tous ses aspects.

La première entrevue entre la requérante et son enfant a eu lieu le 24/11/2007 à Krupanj dans les locaux du centre des services sociaux. La suivante a eu lieu le 27/12/2007. L’entrevue programmée pour le 26/01/2008 a cependant été reportée, sur demande de la requérante. Le Service social n’a pas d’informations sur d’éventuels contacts entre la requérante et son enfant après cette période. En outre, le 26/11/2007, une procédure a été introduite visant à retirer l’affaire au juge qui en avait la charge dans le cadre de la procédure en exécution au motif de prévarication.

Evaluation : Il apparaît que la requérante a désormais établi des contacts avec son enfant. Par conséquent aucune autre mesure individuelle n’est requise.

Mesures de caractère général :

            1) Non-exécution d’une décision judiciaire : Cette affaire à rapprocher de l’affaire V.A.M. (rubrique 4.2) pour laquelle des informations sont attendues à sujet.

            2) Violation du droit de respect de la vie de famille (non-exécution d’une décision judiciaire): voir l’affaire V.A.M..

            3) Absence d’un recours efficace: voir l’affaire V.A.M..

            4) Diffusion : L’Agent du gouvernement a transmis l’arrêt de la Cour européenne à la Cour suprême de Serbie en lui demandant de le diffuser à toutes les juridictions serbes. Il a également fait plusieurs déclarations publiques sur cet arrêt.

            5) Publication : L’arrêt a été traduit en serbe et publié au Journal Officiel n° 67/07 du 20/07/2007 ainsi que sur le site officiel de l’Agent du gouvernement (www.zastupnik.sr.gov.yu). Il a également été publié sur le CD édité par le journal Paragraf et sur le site Internet de ce journal, avec des commentaires d’experts. Le Bureau de l’Agent du gouvernement est en train de préparer un ouvrage comprenant des traductions de quatre arrêts rendus contre la Serbie, y compris cet arrêt.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), aux fins de l'examen des mesures générales.

- 3 affaires contre la République slovaque

7510/04 Kontrová arrêt du 31/05/2007, définitif le 24/09/2007

Cette affaire concerne le manquement des autorités de l’Etat à leur obligation positive de protéger la vie des deux enfants de la requérante (violation de l’article 2).


Bien que la situation de la famille de la requérante ait été connue du poste de police local à la suite d’une plainte pénale et de ses appels d’urgence concernant le comportement menaçant de son mari, les policiers n’ont pas pris des mesures pour éviter qu’il ne tue leurs deux enfants le 31/12/2002. En fin de compte les tribunaux internes ont constaté que la tragédie était une conséquence directe de l’inaction des policiers et ils ont été reconnus coupables d’abandon négligent de leurs tâches le 14/03/2006. Cependant, la plainte de la requérante devant la Cour constitutionnelle en vue d’une indemnisation pour préjudice moral n’a pas abouti.

La Cour européenne a noté qu’en réponse à la situation de la requérante, la police était tenue notamment en vertu des dispositions applicables du Code de procédure pénale et du règlement de la police, d’enregistrer la plainte pénale de la requérante, d’ouvrir sur-le-champ une enquête et une procédure pénale contre le mari de la requérante, de noter scrupuleusement les appels d’urgence et d’informer les équipes suivantes de l’évolution de la situation et, enfin, de prendre des mesures au suet de l’allégation selon laquelle le mari de la requérante avait une arme à feu et menaçait de s’en servir. Au contraire, l’un des policiers impliqué a aidé la requérante et son mari à modifier sa plainte pénale déposée le 02/11/2002 pour que celle-ci puisse être traitée comme une infraction mineure n’appelant pas d’autre mesure. Telle que constatée par les tribunaux internes, la conséquence directe de ces négligences fut la mort des enfants de la requérante (violation de l’article 2).

De plus, la Cour européenne a constaté que la requérante n’avait pas bénéficié d’un recours effectif lui permettant de demander une indemnisation pour le préjudice moral subi (violation de l’article 13 combiné avec l’article 2).

Mesures individuelles : La Cour européenne a accordé à la requérante la satisfaction équitable pour dommage moral subi (25 000 euros).

Evaluation dans ces circonstances, aucune autre mesure ne semble nécessaire.

Mesures générales :

1) Violation de l’article 2: La Cour européenne a observé que, en vertu de la rubrique 2 (1) (a) et (b) de la loi de 1993 sur la police, l’une des principales tâches de la police consiste à protéger les libertés et droits fondamentaux, la vie et la santé. Dans cette affaire la police n’a pas fait en sorte de respecter les obligations découlant de cette loi, du Code de procédure pénale et du règlement de la police.

Des informations sont attendues sur la publication et la diffusion aux autorités compétentes (police, tribunaux pénaux) de l’arrêt de la Cour européenne ainsi que sur les autres mesures destinées à assurer que les obligations légales mentionnées ci-dessus soient respectées par la police dans des situations similaires.

2) Violation de l’article 13 combiné avec l’article 2: La Cour européenne a constaté que l’action en matière de protection de l’intégrité personnelle en vertu des articles 11 et suivants du Code civil n’avait pas fourni à la requérante un recours effectif lui permettant d’obtenir une indemnisation pour préjudice moral. Elle a noté que les développements de la jurisprudence concernant cette protection datent de 2006 et concernent les décisions de tribunaux de la juridiction la plus inférieure.

Des informations sont attendues sur les développements récents de la jurisprudence mentionnée ci-dessus, la diffusion de l’arrêt de la Cour européenne aux tribunaux compétents ainsi que sur les autres mesures visant à assurer un recours effectif fournissant une indemnisation pour dommage moral dans des situations similaires.

Développement récent: par lettres des 12/02/2008 et 18/03/2008, les autorités ont fourni des informations sur les mesures générales. Le Secrétariat est en train de les évaluer.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière des informations fournies concernant le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), aux fins d’une évaluation détaillée des mesures générales.

10699/05           Paulík, arrêt du 10/10/2006, définitif le 10/01/2007[20]

65559/01          Nešták, arrêt du 27/02/2007, définitif le 27/05/2007

L'affaire concerne le non-respect du principe du contradictoire dans le cadre de procédures diligentées par le requérant en vue de contester la légalité de sa détention provisoire (violation de l'article 5§4). Entre 2000 et 2001, les décisions judiciaires ont été prises dans le cadre d'audiences à huis clos auxquelles ni le requérant ni son avocat ne pouvaient participer, alors que le procureur y était présent.


De plus, l'affaire concerne la violation de la présomption d'innocence du requérant dans la mesure où dans sa décision du 11/10/2000 sur la prolongation de sa détention provisoire, la Cour régionale a estimé que le requérant était coupable des infractions qui lui étaient reprochées alors que la procédure pénale n'était pas terminée (violation de l'article 6§2).

L'affaire concerne enfin le défaut d'impartialité du tribunal ayant condamné le requérant (violation de l'article 6§1). A cet égard, la chambre de la Cour régionale, saisie en dernier ressort de l'appel du requérant à l'encontre de sa condamnation, était composée des mêmes juges ayant rendu la décision du 11/10/2000.

La Cour européenne a estimé que dans ces conditions la précédente prise de position de la chambre pouvait légitimement et objectivement soulever des doutes quant à l'impartialité de cette juridiction.

Mesures de caractère individuel : Le 10/01/2001, le requérant a été condamné à une peine de cinq ans d'emprisonnement par la chambre de la Cour régionale mise en cause. Le 25/03/2003, il a été libéré sur parole.

De surcroît, le Code de procédure pénale (en vigueur depuis le 01/01/2006) prévoit la possibilité de rouvrir une procédure suite à un arrêt de la Cour européenne selon lequel les droits ou les libertés fondamentaux de l'accusé ont été violés par une décision d'un procureur ou d'une juridiction de la République slovaque ou dans une procédure l'ayant précédé, s'il n'est pas possible de remédier autrement aux effets négatifs de cette décision (article 394§4).

La Cour européenne a octroyé au requérant une satisfaction équitable au titre du préjudice moral subi.

Des informations sont attendues sur la situation actuelle du requérant ainsi que sur la question de savoir si les dispositions du Code de procédure pénale sur la réouverture s'appliquent en l'espèce.

Mesures de caractère général :

            1) Violation de l'article 5§4 : La Cour européenne a relevé que la législation slovaque applicable au moment des faits ne permettait pas au requérant ou à son avocat de participer aux audiences à huis clos à l'issue desquelles des décisions ont été prises sur son maintien en détention provisoire. Ces dispositions ont cependant été modifiées à compter du 01/10/2002 (§78, selon les informations soumises par le Gouvernement).

Des informations sont attendues sur les dispositions applicables à l'heure actuelle s'agissant du déroulement de ces audiences.

            2) Violation des articles 6§1 et 6§2 : Etant donné l'effet direct de la Convention en République slovaque et le caractère isolé de cette affaire, la publication de l'arrêt de la Cour européenne et sa diffusion, accompagné d'une circulaire, aux juridictions pénales semblent des mesures suffisantes pour prévenir de nouvelles violations similaires.

Par conséquent, des informations sont attendues à ce sujet.

Développement récent : Par lettres des 17/12/2007 et 18/03/2008, les autorités ont fourni des informations sur les mesures individuelles et générales. Le Secrétariat est en train de les évaluer.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), afin de faire l’évaluation détaillée des mesures individuelles et générales.

- 190 affaires contre la Slovénie

75617/01           Švarc et Kavnik, arrêt du 08/02/2007, définitif le 08/05/2007

L’affaire concerne la durée excessive d’une procédure civile introduite en 1992 par les requérants à l’encontre d’une compagnie d’assurance autrichienne à la suite d’un accident de voiture (violation de l’article 6§1) et l’absence de recours effectif à cet égard (violation de l’article 13).

Par ailleurs, l’affaire concerne la violation du droit des requérants à un procès équitable devant un tribunal impartial dans le cadre de la procédure relative à la recevabilité de leur recours constitutionnel (violation de l’article 6§1). A cet égard, en 2000 la Cour constitutionnelle dont le président était le juge qui avait rendu une expertise dans le cadre de la procédure en première instance, déclara irrecevable le recours des requérants contre la décision rendue en première instance ayant établi le défaut de compétence des cours slovènes. La Cour européenne a estimé que l’impartialité de la Cour constitutionnelle soulevait objectivement des doutes en raison de l’implication antérieure de ce juge dans l’affaire.

Mesures de caractère individuel : La procédure s’est terminée par la décision de la Cour constitutionnelle du 24/03/2000 déclarant le pourvoi des requérants irrecevable. La Cour européenne a octroyé une satisfaction équitable aux requérants au titre du préjudice subi par la durée excessive de la procédure.

Les requérants n’ont saisi la Cour européenne d’aucune demande de satisfaction équitable au titre de la partialité de la Cour constitutionnelle. Apparemment, les requérants ne subissent pas de conséquences graves de cette violation.

Evaluation : dans ces circonstances, aucune autre mesure d’ordre individuel ne semble nécessaire.


Mesures de caractère général :

            1) Durée excessive de la procédure (article 6§1) et absence de recours effectif à cet égard (article 13) : Cette affaire est à rapprocher du groupe Lukenda (rubrique 4.2) dans le cadre duquel les autorités slovènes sont en train de prendre des mesures pour accélérer les procédures judiciaires et résorber l’arriéré d’affaires. En outre, une nouvelle loi sur la protection du droit à un procès sans retard injustifié a été adoptée le 26/04/2006 et est entrée en vigueur le 01/01/2007.

            2) Partialité de la Cour constitutionnelle (article 6§1) : En vertu de l’article 31§2 de la loi sur la Cour constitutionnelle de 1994, le fait pour un juge d’avoir exprimé un avis scientifique sur des questions de droit présentant un intérêt pour une procédure judiciaire ne constitue pas un motif de récusation de ce juge dans le cadre de cette procédure. Ainsi, dans cette affaire, la Cour européenne a reconnu, avec le Gouvernement, qu’en vertu de cette disposition tout recours formulé par les requérants, en vue de la récusation du juge au motif qu’il avait rendu un avis dans cette même affaire en première instance, n’avait aucune chance d’aboutir (§27 de l’arrêt).

Information fournies par autorités slovènes (15/04/2008) : La Cour constitutionnelle estime que les clauses statutaires pertinentes, notamment l’article 31§2 de la loi sur la Cour constitutionnelle ne saurait en aucune manière être interprétée comme ne permettant pas de récuser un juge dans le cadre d’une affaire donnée si ce dernier a auparavant rendu un avis juridique dans la même affaire (avant son élection au poste de juge de la Cour constitutionnelle).

Les autorités ont confirmé que la Cour constitutionnelle avait déjà accepté une demande de récusation d’un juge au motif qu’il avait rendu un avis juridique dans une affaire dont était saisie cette cour. Elles estiment que lorsqu’un tel avis figure dans le dossier, la Cour constitutionnelle se prononce sur la question de savoir si le juge doit ou non être récusé. Une demande de récusation peut être formulée par les parties à une procédure ou par le juge concerné. Récemment dans deux procédures distinctes, la Cour constitutionnelle s’est prononcée en faveur de la récusation du juge de la Cour constitutionnelle, M. Franc Grad, car ce dernier avait rendu un avis juridique sur une question soulevée par ces procédures dans le cadre de ses activités en tant que professeur à la Faculté de droit.

Conformément à son Règlement de procédure, la Cour constitutionnelle doit publier sur son site Internet (www.us-rs.si) des informations concernant l’organisation des réunions de chambres, les allocations d’affaires aux différents juges, la distribution du travail entre les chambres et la composition des différentes chambres. Ces informations doivent également être publiées au Journal officiel de la République de Slovénie. La nomination du juge rapporteur dans une affaire donnée doit être notifiée aux parties dans un délai de quelques jours après le dépôt d’un recours constitutionnel.

Evaluation : Au vu des informations fournies, aucune mesure générale ne semble requise.

Les Délégués :

1.             décident de reprendre l’examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             prennent note de l’adoption des mesures individuelles et générales requises.

                       - Affaire de durée de procédures pénales et d’absence de recours effectif

19611/04           Šubinski, arrêt du 18/01/2007, définitif le 18/04/2007

Cette affaire concerne la durée excessive d’une procédure pénale diligentée contre la requérante en août 1998 (violation de l’article 6§1) et l’absence de recours effectif à cet égard (violation de l’article 13).

Mesures de caractère individuel : La procédure nationale était toujours pendante devant la Cour constitutionnelle lorsque la Cour européenne a rendu son arrêt.

Informations fournies par les autorités slovènes (14/01/2008) : La procédure devant la Cour Constitutionnelle s’est achevée le 14/06/2007 et la demande de la requérante dans cette procédure a été rejetée.

Evaluation : Vu les informations fournies, aucune autre mesure individuelle n’apparaît nécessaire.

Mesures de caractère général :

            1) Violation de l’article 6§1 : La question de la durée excessive des procédures pénales a déjà été examinée dans le cadre de l’affaire Majarič (arrêt du 08/02/2000, rubrique 6.2), pour laquelle la Cour européenne avait constaté une violation de l’article 6§1 en raison de la durée excessive de la procédure pénale qui s’était terminée en 1998. Les autorités slovènes ont adopté un certain nombre de mesures pour accélérer les procédures pénales, à savoir une large diffusion et publication de l’arrêt de la Cour européenne, des amendements en 1998 à la loi sur les procédures pénales (avec l’introduction de procédures de règlement des affaires), et des mesures de formation des juges.

Néanmoins, dans la mesure où le présent arrêt a été rendu presque 7 ans après l’arrêt Majarič, des informations seraient utiles sur la tendance relative à la durée des procédures pénales (et de préférence des statistiques pour la période 2003-2008).


Informations fournies par les autorités slovènes (lettre du 22/04/2008) : La modernisation de l’infrastructure informatique dans le secteur de la justice pénale est en cours. Elle vise à assurer la surveillance des procédures pénales en temps réel, des enquêtes pénales et des procédures pénales devant les tribunaux de première instance ; à remplacer la gestion manuelle des documents par un mécanisme informatique moderne ; à mettre en œuvre des outils informatiques pour faciliter le travail des juges et du personnel des tribunaux. Conformément au programme prévu, la mise en œuvre pourrait être achevée terminée dans la deuxième partie de 2008.

Evaluation: Les informations fournies par les autorités slovènes sont appréciées en tant qu’indication des mesures récentes prises dans le but de réduire la durée excessive des procédures pénales. 

Des informations sont également attendues sur les développements futurs de ce projet et ses effets en termes de réduction de la durée des procédures pénales, ainsi que sur la diffusion et la publication de l’arrêt de la Cour européenne.

            2) Violation de l’article 13 : Cette affaire est à rapprocher du groupe Lukenda (rubrique 4.2), pour lequel des informations sont attendues à ce titre.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales.

                       - 186 affaires de durée de procédures judiciaires et d’absence de recours effectif

                       (See Appendix for the list of cases in the Lukenda group)

Ces affaires concernent la durée excessive de procédures civiles entre 1994 et 2004 (violations de l'article 6§1). La plupart de ces affaires concernent en outre l'absence de recours effectif à cet égard, la Cour européenne ayant constaté que les moyens juridiques invoqués par le gouvernement slovène (action administrative, procédure en responsabilité civile, demande de contrôle ou recours constitutionnel) ne représentent pas un recours effectif contre la durée excessive de procédures (violations de l'article 13).

Dans les affaires Bauer, Cundrič et Golenja, la Cour européenne a relevé en outre que les autorités judiciaires auraient dû agir avec une célérité particulière étant donné que les procédures litigieuses concernaient un conflit en droit du travail.

Mesures de caractère individuel : Un grand nombre de ces affaires étaient toujours pendantes lorsque la Cour européenne a rendu ses arrêts. Dans l'une d'elle, l'affaire Cundrič, concernant un conflit en droit du travail, la Cour européenne a considéré qu'une diligence spéciale était requise.

• Informations fournies par les autorités (lettre du 31/07/2007 et du 22/04/2008): Dans 54 de ces affaires, y compris l'affaire Cundrič, les procédures internes ont été terminées. Des informations ont été fournies sur l'état de 10 autres procédures. Toutes les juridictions concernées ont été informées de la nécessité d'accorder une priorité au traitement de ces affaires.

Des informations sont attendues sur l'état de ces procédures et sur les mesures prises ou envisagées pour leur accélération, si elles sont toujours pendantes.

Mesures de caractère général : Dans l'arrêt Lukenda, sous l'angle de l'article 46, la Cour a souligné qu'au vu de l'arriéré qui perdure devant les tribunaux slovènes, la durée des procédures judiciaires continue de constituer un problème majeur dans ce pays.

En réponse à la lettre du Secrétariat du 27/03/2006, les autorités slovènes ont fourni un plan d'action pour la mise en œuvre des mesures visant à éviter des nouvelles violations similaires (lettres des 06/06/2006, 04/10/2006, 27/03/2007 et 31/07/2007).

1) Violations de l'article 6§1 :

- Arriéré judiciaire devant les tribunaux slovènes

Les autorités slovènes ont fourni des données statistiques sur l'arriéré judiciaire pour la période 2002-2006.

Dans un contexte statistique, l'arriéré judiciaire se réfère aux affaires pendantes devant une certaine juridiction et dont le nombre excède la moitié de la charge annuelle de travail d'une juridiction en Slovénie.

Quant au nombre de toutes les affaires pendantes, il s'élevait à 566 588 à la fin de 2004; à 613 274 en 2005 et à 606 208 en 2006 (les chiffres pour 2005 et 2006 comprennent également les affaires concernant les contraventions). Le nombre de nouvelles affaires en 2005 excédait le nombre de nouvelles affaires en 2002 d'environ 72%, en raison notamment de l'augmentation du nombre d'affaires concernant l'exécution des décisions judiciaires et les contraventions. Ce nombre s'élevait à 627 638 en 2004, à 763 767 en 2005 et à 800 792 en 2006. Pour la même période le nombre d'affaires terminées était le suivant : 652 001 en 2005; 873 853 en 2005 et 806 818 en 2006. Quant à l'examen des affaires de droit civil entre 2004 et 2006 devant les juridictions de première et de seconde instance, le nombre d'affaires terminées excédait le nombre de nouvelles affaires.

En ce qui concerne l'arriéré judiciaire dans un contexte matériel (à savoir les affaires pendantes devant une certaine juridiction qui n'ont pas été terminées dans un délai prescrit par la loi, et plus précisément l'article 50 du Règlement de la Magistrature), des informations ont été fournies pour la période de 2000 à 2006. En 2004, le nombre d'affaires définies en tant qu' « arriéré judiciaire » s'élevait à 314 894; alors qu'il était de 308 686 en 2005 et s'élevait en 2006 à 294 676. Ainsi, l'arriéré judiciaire a diminué.


De plus, à la fin de 2006, le nombre des affaires de l'arriéré judiciaire ayant « une plus grande importance » (les affaires concernant l'exécution des décisions judiciaires et le registre foncier ne sont pas incluses) s'élevait seulement à 43 509 et était inférieur de 10% à celui de 2005.

- Augmentation du personnel judiciaire et nouveaux locaux :

Les autorités ont également fourni des informations sur le nombre du personnel judiciaire. En 2006, le nombre de magistrats était de 1 002, celui d'experts de 276 et celui d'autres catégories de personnel judiciaire de 2 705. Conformément aux budgets prévus pour les années 2007 et 2008, le nombre de magistrats devra être augmenté respectivement de 90 et 15 et celui des autres catégories de personnel judiciaire respectivement de 250 chacune.

Le ministère de la Justice est en train de compléter une documentation en vue d'acquérir de nouveaux locaux pour la magistrature.

- Projet Lukenda :

Les autorités slovènes ont préparé un « projet Lukenda » en vue d'assurer un traitement plus rapide des affaires ainsi que la réduction de l'arriéré judiciaire devant les juridictions et le Parquet. Le texte de ce projet a été soumis au Secrétariat par courrier du 31/07/2007.

La mise en œuvre du projet Lukenda n'implique pas de soi une diminution de la durée de procédures judiciaires. Néanmoins, ce projet vise à réduire de moitié le nombre des affaires de l'arriéré judicaire avant le 31/12/2010, dans le contexte statistique, soit jusqu'à 284 000 affaires. Dans le contexte matériel, le délai pour le traitement d'une affaire par une juridiction sera déterminé suite à un accord conclu entre la Cour Suprême, le Conseil de la Magistrature et le Ministère de la Justice pour chaque type d'affaires et pour chaque année civile. Par conséquent, le Règlement de la Magistrature sera modifié. Le nombre d'affaires non closes ne devra pas excéder 155 000 après le 31/12/2010.

En outre, le projet Lukenda prévoit plusieurs mesures complexes en vue d'augmenter l'efficacité des juridictions et résoudre le problème de l'arriéré judiciaire. Les principales mesures envisagées sont les suivantes :

- assurer des conditions de travail conformément à la stratégie de développement spatial du système judiciaire,

- attribution des ressources humaines ou du personnel professionnel supplémentaires et leur organisation  pendant une période fixe allant jusqu'au 31/12/2010,

- introduction d'un système de motivation du personnel judiciaire par le biais d'une rémunération majorée pour le travail additionnel à visant d'éliminer l'arriéré judiciaire,

- simplification de la législation pertinente et uniformisation des procédures judiciaires,

- informatisation des tribunaux et des procédures judiciaires,

- formation supplémentaire des magistrats,

- réorganisation et meilleure gestion des tribunaux.

Autres mesures adoptées :

- Mesures en vue d'accélérer les procédures devant les juridictions de travail :

Une nouvelle loi sur les juridictions du droit du travail et du droit social est entrée en vigueur le 01/01/2005 mettant en place des juridictions spécialisées en droit du travail et droit social. Cette loi contient également une disposition spéciale concernant la procédure en appel dans ces affaires (article 30) : en cas d'erreur ou de constatation incomplète des faits ou en cas de violation substantielle de dispositions procédurales, la juridiction d'appel peut elle-même corriger l'irrégularité du jugement de première instance en administrant des preuves supplémentaires ou nouvelles ou par le biais d'autres actes procéduraux.

- Séminaires pour les magistrats et les conseillers d'Etat :

En septembre et en octobre 2006, le ministère de la Justice a organisé, en collaboration avec le Conseil de l'Europe, deux séminaires sur la pratique des organes de la Convention quant aux articles 6 et 13 de la Convention.

• Des informations sont attendues sur : la mise en œuvre du « projet Lukenda ». En outre, des statistiques seraient utiles sur la durée moyenne des procédures judiciaires, notamment devant les tribunaux civils et du travail, pour les années 2002-2008.

            2) Violations de l'article 13 : Dans son arrêt, la Cour européenne a invité l'Etat défendeur soit à amender les dispositions sur les recours existant soit à prévoir de nouveaux recours afin de garantir un recours réellement effectif contre la durée excessive des procédures (§ 98).

Mesures adoptées : Une nouvelle loi sur la protection du droit à un procès dans un délai raisonnable, a été adoptée le 26/04/2006 (publiée au Journal Officiel de la République de Slovénie, n° 49/2006, en date du 12/05/2006) et est entrée en vigueur le 01/01/2007. Cette loi introduit des recours contre la durée excessive de procédures judiciaires.

- Recours en vue d'accélérer les procédures :

La nouvelle loi prévoit deux types de recours :

1) une demande de supervision pour l'accélération de la procédure : en cas de durée excessive de procédure, l'intéressé doit au préalable déposer une telle demande (article 5). Si la demande est fondée, le président de la juridiction concerné peut ordonner au juge chargé de l'affaire en question d'effectuer certains actes de procédure dans un délai précis et/ou d'accorder la priorité à cette affaire.


2) une demande en vue de fixer un délai : elle peut être déposée au président de la juridiction supérieure dans l'hypothèse où une demande de supervision aurait été rejetée, non examinée ou si les actes de procédures ordonnés par la président du tribunal n'ont pas été effectués dans les délais prescrit (article 8 section 1). Si cette demande est fondée, le président de la juridiction supérieure à celle devant laquelle la procédure incriminée se déroule, peut ordonner au juge chargé de l'affaire concernée d'effectuer certains actes de procédure dans un délai précis et/ou d'accorder la priorité à cette affaire (article 11§4).

- Recours indemnisation : La nouvelle loi prévoit les recours suivants :

1) une demande de satisfaction équitable : la satisfaction équitable peut consister en une compensation pécuniaire, une déclaration écrite du bureau du Conseiller d'Etat confirmant que le droit de la partie à un procès dans un délai raisonnable a été violé ou une publication de la décision judiciaire constatant que le droit à un procès dans un délai raisonnable a été violée (sur le site Internet de la juridiction concernée).

La compensation pécuniaire s'élève de 300 à 5 000 euros et elle est octroyée suite à une procédure à l'amiable menée devant le bureau du Conseiller d'Etat (article 19§1 de la loi). Cette procédure peut être intentée dans les 9 mois suivant la date à laquelle un arrêt définitif a été rendu.

2) une action en justice en dommages et intérêts dans l'hypothèse où un règlement amiable devant le Conseiller d'Etat n'aurait pas été conclu (article 20§1) :; une demande à cette fin doit être faite dans le 18 mois suivant la date à laquelle l'arrêt est devenu définitif ;

3) une action en justice introduite sur la base des dispositions du Code des obligations : une compensation pour le préjudice matériel causé suite à une durée excessive de procédure peut être réclamée dans le cadre d'une action en indemnisation introduite conformément à ces dispositions, dans un délai de 18 mois suivant un arrêt définitif (article 21 de la loi).

La disposition de l'article 23 de la loi prévoit que les compensations dont il est question ci-dessus seront payées sur budget de l'Etat, et plus précisément sur le budget du Bureau du Conseiller d'Etat.

- Champ d'application de la nouvelle loi : Les recours prévus par la loi du 26/04/2006 sont accessibles aux parties à toute procédure judiciaire, aux parties à des procédures non contentieuses ainsi qu'aux personnes lésées en cas de procédures pénales (article 2). Ils peuvent être utilisés également dans des procédures pendantes devant les juridictions administratives et la Cour suprême, mais pas devant la Cour constitutionnelle.

• Informations fournies sur les premières expériences du fonctionnement des recours en pratique en 2007 (lettre du 22/04/2008): Au total, 3 058 demandes de supervision ont été introduites dont 964 ont été déclarées mal-fondées et donc rejetées et 118 ont été envoyées pour examen au président de la cour compétente. En outre, 468 demandes de supervision ont été rejetées et 1 275 ont été admises par les présidents des cours et les requérants ont reçu une notification leur indiquant que la cour prendrait les mesures procédurales requises dans un délai déterminé. Au total, 835 demandes en vue de la fixation d’un délai ont été également déposées dont 603 ont été déclarées mal-fondées, 146 ont été rejetées et 18 demandes ont été admises en tant que raisonnables et bien-fondées.

Evaluation de la nouvelle législation par la Cour européenne : Dans l'affaire Grzinčič (arrêt du 03/05/2007, définitif le 03/08/2007), la Cour européenne s'est déclarée satisfaite du caractère efficace de la totalité des recours introduits par la loi de 2006 pour les affaires de durée excessive de procédures pendantes devant les juridictions de première ou de seconde instance, dans la mesure où, en principe, ces recours sont en mesure de prévenir des violations alléguées du droit à un procès dans un délai raisonnable et d'assurer une compensation adéquate pour toute violation qui aurait déjà eu lieu (§ 98). Il n'existe aucune raison permettant de douter de son efficacité à ce stade, mais la position de la Cour peut être revue à l'avenir et la charge de la preuve quant à l'efficacité de ces recours pèse sur le gouvernement slovène (§108). La Cour a également souligné que les autorités nationales devaient assurer une application de la loi de 2006 en conformité avec la Convention s'agissant aussi bien de la jurisprudence future que de l'administration générale de la justice (§ 109).

Des informations complémentaires sont attendues sur le fonctionnement pratique de ces recours.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles, à savoir l'état des procédures internes pendantes et leur accélération, si nécessaire, ainsi que sur les mesures générales, notamment sur la durée moyenne des procédures judiciaires en Slovénie, la mise en œuvre du « projet Lukenda » et le fonctionnement des nouveaux recours contre la durée excessive des procédures judiciaires.


- Affaires de durée de procédures concernant des droits et obligations de caractère civil essentiellement devant les autorités et juridictions administratives

47825/99          Krisper, arrêt du 23/03/2006, définitif le 23/06/2006

14852/03          Gluhar, arrêt du 21/12/2006, définitif le 21/03/2007

Ces affaires concernent la durée excessive de procédures concernant des droits et obligations de caractère civil devant les organes et les juridictions administratifs (violations de l’article 6§1). 

Dans la première affaire, le requérant réclamait la restitution des biens immobiliers appartenant à ses parents dont la nationalité restait à clarifier. La procédure relative à l’établissement de la nationalité des parents du requérant a duré 11 ans et 7 mois pour 6 et 7 degrés et n’a pas encore pris fin.

La deuxième affaire concerne une procédure en matière de succession, intentée en 1996 et ensuite suspendue dans l’en attente de l’issue d’une procédure de dénationalisation (plus de 9 ans et 10 mois). Lorsque la Cour européenne a rendu son arrêt, les deux procédures étaient encore pendantes.

Mesures de caractère individuel :

Informations fournies par les autorités slovènes (lettre du 22/04/2008) : Les procédures nationales dans les affaires Krisper Gluhar devant les autorités administratives sont achevées.

Evaluation : aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général :

            1) Durée excessive des procédures devant les juridictions administratives :le problème général de la durée excessive des procédures judiciaires est examiné dans le contexte du groupe Lukenda (rubrique 4.2).

Informations fournies par les autorités slovènes (lettre du 27/03/2007) : Depuis le 01/01/2007 un amendement à la loi générale sur la procédure administrative est en vigueur. Il restreint les possibilités de faire appel de certaines décisions et devrait entraîner une diminution du nombre d’appels.

2) Durée excessive des procédures devant les organes administratifs :

Informations fournies par les autorités slovènes (lettre du 27/03/2007 et du 22/04/2008) : Selon les autorités slovènes, le problème soulevé dans l’affaire Krisper est spécifique en raison du caractère particulier de la procédure en établissement de la nationalité yougoslave.

Les deux de la Cour européenne ont été traduits en slovène et envoyés à la Cour suprême et aux autorités compétentes. De plus, ils sont disponibles sur le site Internet du Bureau du Procureur d’Etat (www.dp-rs.si).

Evaluation : aucune autre mesure générale ne semble nécessaire.

Les Délégués :

1.             décident de reprendre l'examen de ces points lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations complémentaires à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             notent que les mesures individuelles et générales ont été prises.

- 7 affaires contre l’Espagne

1483/02            Panella Puig, arrêt du 25/04/2006, définitif le 25/07/2006

Cette affaire concerne une violation du principe de présomption d'innocence du requérant. A cet égard, suite à l'annulation, en mai 1992 par le Tribunal constitutionnel, d'une procédure pénale militaire à l'issue de laquelle le requérant avait purgé une peine d'emprisonnement, ce dernier avait formulé une demande d'indemnisation. Cette demande a été rejetée par le Ministère de la Justice et les juridictions administratives en raison d'un doute sur sa culpabilité, la condamnation du requérant ayant été annulée pour atteinte à la présomption d'innocence au regard de l'insuffisance des preuves produites à son encontre (violation de l'article 6§2).

La Cour européenne a constaté que les autorités nationales avaient appliqué l'article 294(1) de la loi organique relative au pouvoir judiciaire (LOPJ) qui prévoit que seules ont droit à une indemnisation, au titre de la détention provisoire subie, les personnes ayant été acquittées ou ayant fait l'objet d'un non-lieu définitif en raison de l'inexistence des faits qui leur étaient reprochés. La Cour a estimé à cet égard que les autorités nationales avaient fait preuve d'une sévérité excessive à l'encontre du requérant, dans la mesure où le requérant ne se plaignait pas de sa détention provisoire mais de la peine qu'il avait purgée et qu'en outre il n'avait bénéficié ni d'un non-lieu ni d'un acquittement. L'application de cet article les avait donc conduit à examiner si l'absence de participation du requérant aux faits reprochés avait été suffisamment établie et donc à se prononcer sur sa culpabilité.

Or elles auraient pu appliquer l'article 292 qui vise des situations plus générales concernant des erreurs judiciaires ou un mauvais fonctionnement de la justice. En outre, la Cour a souligné que la condamnation du requérant figurait depuis plus de 13 ans sur son casier judiciaire bien qu'elle ait été définitivement annulée par le Tribunal constitutionnel.

Mesures de caractère individuel : Le casier judiciaire du requérant a été effacé.


Des informations sont attendues sur la situation actuelle du requérant, en particulier, la possibilité de rouvrir la procédure d'indemnisation.

Mesures de caractère général : Etant donné que les autorités nationales ont appliqué une mauvaise disposition de la loi, la publication et la diffusion de l'arrêt de la Cour européenne aux autorités compétentes et aux tribunaux, éventuellement accompagné d'une circulaire ou d'une note expliquant les problèmes identifiés par la Cour européenne, semblent suffisantes.

• Des informations, fournies par les autorités espagnoles le 02/04/2008, sont en cours d’examen.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière de l’évaluation des informations fournies sur les mesures générales, ainsi que des informations à fournir sur les mesures individuelles.

24668/03          Olaechea Cahuas, arrêt du 10/08/2006, définitif le 11/12/2006

Cette affaire concerne le manquement des autorités espagnoles à leur obligation de se conformer à une mesure provisoire indiquée en vertu de l'article 39 du règlement de la Cour européenne (violation de l'article 34).

Le requérant, contre qui un mandat d'arrêt international avait été délivré, fut arrêté en juillet 2003 à Almeria (Espagne) lors d'un contrôle de routine. Le Pérou demanda son extradition sur la base d'un délit de terrorisme. Placé sous écrou extraditionnel, le requérant accepta « l'extradition simplifiée » (être renvoyé immédiatement vers le pays demandeur) et le bénéfice de la spécialité extraditionnelle (n'être jugé que pour les faits objet de la demande d'extradition). Relevant l'assujettissement du gouvernement péruvien aux normes internationales de protection des droits fondamentaux, telle la Convention américaine des Droits de l'Homme, et l'engagement de celui-ci de ne pas condamner le requérant à la peine de mort ni à la prison à perpétuité, l'Audiencia Nacional autorisa l'extradition du requérant le 18/07/2003. Le requérant forma un recours contre cette décision sans succès.

Le requérant introduisit une requête devant la Cour européenne qui indiqua au Gouvernement espagnol le 06/08/2003, en application de l'article 39 (mesures provisoires) du règlement, de ne pas extrader le requérant vers le Pérou avant l'examen de l'affaire, soit le 26/08/2003. Cependant, le lendemain, le requérant fut extradé vers le Pérou. Il fut mis en liberté conditionnelle en novembre 2003 en raison du manque de preuves suffisantes. 

La Cour européenne a indiqué qu'une mesure conservatoire est, de par sa nature même, provisoire, et dont la nécessité est évaluée dans un moment historique précis en raison de l'existence d'un risque qui pourrait entraver l'exercice effectif du droit de recours garanti par l'article 34. Si l'Etat concerné ne respecte pas la mesure provisoire décidée, le risque d'entraver l'exercice effectif du droit de recours continue et ce seront les faits postérieurs à la décision de la Cour et à l'inobservation du Gouvernement qui détermineront si le risque est devenu réalité ou s'il n'a pas été confirmé. Même dans ce dernier cas, la force de la mesure provisoire doit être jugée obligatoire. En effet, la décision de l'Etat quant au respect de la mesure ne peut pas être reportée dans l'attente d'une éventuelle confirmation de l'existence d'un risque. La simple inobservation d'une mesure provisoire décidée par la Cour en fonction de l'existence d'un risque est, en soi, une grave entrave, à ce moment précis, à l'exercice effectif du droit de recours individuel.

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé au requérant une satisfaction au titre préjudice moral subi.

• D'autres mesures individuelles ne semblent pas nécessaires dans cette affaire.

Mesures de caractère général :

Les autorités espagnoles ont été invitées à présenter un plan d'action sur les mesures prises ou envisagées, de nature législative ou autre, visant à assurer le respect à l'avenir par toutes les autorités compétentes de leur obligation en vertu de la Convention de se conformer aux décisions de la Cour imposant des mesures provisoires, assurant ainsi l'exercice effectif du droit de requête individuelle garanti par l'article 34 de la Convention. Etant donné l'importance particulière de ce droit, il semblerait important d'assurer la publication et une large diffusion de l'arrêt à toutes les autorités concernées.

• Des informations reçues des autorités espagnoles le 25/04/2008 sont en cours d’examen.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière des informations fournies sur les mesures générales.


423/03              Díaz Ochoa, arrêt du 22/06/2006, définitif le 22/09/2006

41745/02          Lacárcel Menéndez, arrêt du 15/06/2006, définitif le 11/12/2006

Ces affaires concernent la violation du droit d'accès des requérants à un tribunal (violations de l'article 6§1).

Dans l'affaire Díaz Ochoa, le requérant, n'ayant pas été informé de la procédure engagée à son encontre en tant que codéfendeur en 1992 devant le tribunal du travail, avait été condamné au versement de certains montants dus. Le requérant n'eut connaissance de la procédure dirigée contre lui qu'en octobre 1998 quand ses salaires commencèrent à être saisis en vue du paiement des sommes dues. Il introduisit une action en nullité du jugement rendu à son encontre en arguant qu'il n'avait pas reçu notification des actes de la procédure litigieuse mais son action fut rejetée pour tardiveté. Le requérant forma en outre un recours en révision et un recours d'amparo, tous les deux sans succès.

La Cour européenne a mis l'accent sur la combinaison très particulière des faits dans cette affaire dans la mesure où le requérant ne pouvait pas se douter de la procédure entamée à son encontre alors que son adresse figurait dans le dossier soumis pour jugement au juge du fond. Par ailleurs, les juridictions saisies dans le cadre de l'action en nullité et du recours d'amparo n'ont pas remédié à une telle absence de participation dans la procédure principale en procédant à une interprétation excessivement restrictive du droit.

Dans l'affaire Lacárcel Menéndez, la requérante était propriétaire de l'appartement dans lequel elle vivait à Murcie au sein d'une copropriété. Ne s'étant pas acquittée des charges communes, les copropriétaires engagèrent contre elle une procédure afin d'obtenir le recouvrement d'un montant équivalent à 877 euros. En décembre 1995, la requérante a été condamnée au paiement de la somme due. Afin d'exécuter ce jugement, l'appartement de la requérante a été saisi puis vendu aux enchères.

Dans l'intervalle, à savoir depuis le 27/11/1995, deux juges de Murcie, estimant que la requérante était « présumée incapable », avaient autorisé et renouvelé l'autorisation d'internement psychiatrique de l'intéressée. En janvier 2000, la requérante a été déclarée incapable et l'une de ses sœurs devint sa tutrice. Cette dernière a demandé la nullité de la procédure ayant abouti à la vente de l'appartement de la requérante. Son action a été rejetée en première instance au motif qu'au moment des faits la requérante n'avait pas été déclarée incapable par un arrêt définitif. Par ailleurs, le tribunal constitutionnel a rejeté le recours d'amparo formé par la sœur de l'intéressée.

La Cour européenne a estimé que la manière dont les juridictions avaient examiné la cause de la requérante avait eu pour effet de la priver d'un accès effectif à un tribunal. En effet, lors de sa comparution en 1995, aucune mesure de protection de la requérante ne fut prise en dépit de ses propos fantaisistes. Par ailleurs, en rejetant la demande d'annulation de la procédure, les juridictions saisies ont fait preuve d'un formalisme excessif. En effet déclarer que la déclaration d'incapacité n'avait aucun effet rétroactif ne se conciliait pas avec l'internement psychiatrique de la requérante contre son gré, décrété par deux autres juges de la même ville.

Mesures de caractère individuel : Dans les deux affaires, la Cour européenne a octroyé aux requérants une satisfaction au titre préjudice moral subi. Dans l’affaire Diaz-Ochoa, l’avocat du requérant a indiqué qu’il n’avait pas encore été remédié à la violation (03/03/2008).

Les autorités espagnoles sont invitées à soumettre des informations sur la situation actuelle des requérants, afin de pouvoir évaluer si des mesures individuelles supplémentaires sont nécessaires.

Mesures de caractère général : Le problème du formalisme excessif dans l'application des règles procédurales par les tribunaux espagnols a été soulevé dans plusieurs affaires antérieures qui ont été closes ou sont encore examinées par le Comité, notamment sur la base de l'octroi d'un effet direct à la jurisprudence de la Cour européenne par les tribunaux espagnols, prévenant ainsi de nouvelles violations similaires (voir Pérez Rada Cavanilles contre l'Espagne, arrêt du 28/10/1998, Résolution ResDH(2001)84, et Stone Court Shipping Company S.A. contre l'Espagne, rubrique 4.2). Cependant, ces mesures ne semblent pas régler les problèmes particuliers soulevés dans ces arrêts.

Les autorités espagnoles sont donc invitées à soumettre des informations sur les mesures prises ou envisagées pour prévenir des nouvelles violations similaires. En tout état de cause, la publication et la diffusion de l'arrêt de la Cour semblent nécessaires.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ces points au plus tard lors de leur 1ère réunion DH de 2009 (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

77837/01          Saez Maeso, arrêt du 09/11/2004, définitif le 09/02/2005

55524/00          Stone Court Shipping Company S.A., arrêt du 28/10/03, définitif le 28/01/04

25779/03          Salt Hiper, S.A., arrêt du 07/06/2007, définitif le 12/11/2007

Ces affaires concernent la violation du droit d’accès des requérants à un tribunal en raison de l’interprétation problématique ou particulièrement rigoureuse des règles de procédure (violations de l’article 6§1).


Dans l’affaire Stone Court Shipping Company S.A., le droit d’accès de la société requérante à un tribunal avait été violé en raison de l’interprétation particulièrement rigoureuse des règles de procédure faite par le Tribunal suprême, en 1997, ayant conduit au rejet de son pourvoi en cassation pour tardiveté. Alors que le recours avait été présenté au tribunal de garde la veille de l’expiration du délai imparti, il ne fut transmis au greffe du Tribunal suprême qu’après l’expiration du délai. Le Tribunal suprême a motivé sa décision de rejet en se référant aux textes applicables selon lesquels seuls peuvent être déposés auprès des tribunaux de garde les recours dont le délai de présentation expire le même jour que celui où ils sont présentés devant ces juges et en dehors des heures d’audience du tribunal devant lequel ils doivent être présentés.

Dans l’affaire Saez Maeso, l’appel du requérant, à l’encontre d'une décision de l'université de Valence refusant de lui délivrer son diplôme de professeur, ayant été rejeté par le tribunal supérieur, le requérant avait formé un pourvoi en cassation devant le tribunal suprême. Ce tribunal a déclaré son pourvoi recevable le 10/06/1993. Le 26/06/2000, soit sept ans après la décision de recevabilité, le tribunal suprême a rejeté son appel, déclarant que le pourvoi aurait dû être déclaré irrecevable, en vertu des dispositions juridiques concernées, parce que le requérant n'avait pas précisé les motifs de son recours. En avril 2001, le tribunal constitutionnel a confirmé cette décision du tribunal suprême.

Dans l’affaire Salt Hiper S.A., le droit d’accès de la société requérante à un tribunal a été violé en raison de l’interprétation particulièrement rigoureuse des règles de procédure en appel par le Tribunal suprême. En 2001, le Tribunal suprême a rejeté le pourvoi en cassation pour irrecevabilité du fait d’un défaut dans sa présentation, alors qu’il avait été déclaré recevable cinq ans auparavant. Le Tribunal constitutionnel a confirmé la décision en 2003.

La Cour européenne a estimé dans toutes ces affaires que l’interprétation particulièrement rigoureuse faite par les juridictions d’une règle de procédure avait privé les requérants de son droit d’accès à un tribunal.

Mesures de caractère individuel : Dans ces affaires, la Cour européenne a octroyé aux requérants une satisfaction équitable au titre préjudice moral. Il serait utile que le Gouvernement soumette une évaluation de la situation de chaque requérant afin que le Comité des Ministres puisse apprécier la nécessité d’éventuelles autres mesures individuelles.

Des informations sont attendues sur l’évaluation de la situation des requérants.

Mesures de caractère général :

Des informations sont attendues sur des exemples de changement dans la jurisprudence du Tribunal suprême en réponse aux arrêts de le Cour européenne. Des informations seraient également utiles sur d’autres mesures éventuelles prises ou envisagées pour prévenir des nouvelles violations similaires, telles que des mesures de sensibilisation. En tout état de cause, les autorités sont invitées à envisager la publication des arrêts de la Cour européenne dans ces affaires et leur ample diffusion aux autorités compétentes en vue de prévenir de futures violations similaires de la Convention.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

- 1 affaire contre la Suède

62332/00          Segersted-Wiberg et autres, arrêt du 06/06/2006, définitif le 06/09/2006

Cette affaire concerne l'ingérence injustifiée dans le droit des requérants au respect de leur vie privée en raison de la conservation de certaines informations par la Sûreté suédoise concernant leurs activités politiques passées, en vertu de la loi de 1998 sur les données de la police (violation de l'article 8).

La Cour européenne a estimé que cette ingérence était prévue par la loi et qu'elle poursuivait un but légitime, à savoir la défense de l'ordre et la prévention des infractions pénales, et la protection de la sécurité nationale. Elle a cependant estimé que si cette ingérence était proportionnée à l'égard du premier requérant elle ne l'était pas à l'égard des autres requérants.

Cette affaire concerne en outre l'ingérence injustifiée dans la liberté d'expression et le droit d'association des requérants à l'exception du premier requérant (violations des articles 10 et 11). La Cour européenne a estimé que la conservation de données personnelles ayant trait à des opinions, affiliations ou activités politiques qui avait été jugée injustifiée au regard de l'article 8§2 constituait ipso facto une ingérence injustifiée dans l'exercice des droits protégés par les articles 10 et 11.


L'affaire concerne enfin l'absence de recours effectif au titre de ces violations à l'égard de tous les requérants (violation de l'article 13). La Cour européenne a observé dans le contexte d'une affaire précédente que le médiateur parlementaire et le Chancelier de la Justice sont compétents pour recevoir des plaintes de particuliers et ont le devoir de les instruire afin de s'assurer que les lois pertinentes ont été correctement appliquées. Toutefois, aucun d'eux n'a le pouvoir de rendre de décision juridiquement contraignante ; ils n'ont en outre aucune compétence spécifique pour enquêter sur les activités de surveillance secrète ou la collecte et la conservation d'informations dans le fichier des services secrets. Dans l'intervalle, un certain nombre de mesures ont été prises pour améliorer les recours, par exemple, la commission des fichiers (organe chargé de contrôler au quotidien la consignation et la conservation d'informations par les services secrets et le respect par ceux-ci de la loi sur les données de la police) et la commission d'inspection des données ont été instaurées. La Cour a relevé toutefois que la commission des fichiers n'est pas compétente pour ordonner la destruction de dossiers, ou la suppression ou la rectification d'informations conservées dans les fichiers. La commission d'inspection des données dispose de pouvoirs plus étendus mais aucune information mettant en lumière le caractère effectif de la commission d'inspection des données dans la pratique n'a été fournie à la Cour.

Mesures de caractère individuel : Des informations, fournies par les autorités suédoises le 22/04/2008, sont en cours d’examen.

Les autorités suédoises ont été invitées à confirmer que les informations en question ne sont plus conservées dans les dossiers de la Sûreté suédoise.

Mesures de caractère général : Des informations fournies par les autorités suédoises le 22/04/2008, sont en cours d’examen.

1) Violation de l'art. 8: Afin d'empêcher de nouvelles violations similaires, les autorités suédoises devraient assurer que l'interprétation des lois pertinentes par la Sûreté suédoise est conforme aux exigences de la Convention.

Des informations ont été demandées: sur la publication et diffusion de l'arrêt de la Cour européenne à la Sûreté suédoise.

2) Violation des articles 10 et 11: La publication et diffusion sont également des mesures suffisantes à cet égard.

3) Violation de l'article 13:

Les autorités suédoises ont été invitées à soumettre des informations sur le fonctionnement de la Commission d'inspection des données et/ou sur l'introduction éventuelle d'un autre recours effectif. 

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière des informations fournies concernant les mesures individuelles et générales.

- 2 affaires contre l’ « ex-République yougoslave de Macédoine »

                       - Affaires de durée de procédures devant les organes et juridictions administratifs

13898/02          Dumanovski, arrêt du 08/12/2005, définitif le 03/07/2006

66907/01          Docevski, arrêt du 01/03/2007, définitif le 01/06/2007

Ces affaires concernent la durée excessive de procédures, principalement devant des organes administratifs tels que l’Agence pour l’emploi de Kumanovo et le Ministère de l’emploi et de la politique sociale, les organes compétents en 1e et 2e instance en matière d’allocation pour handicapés et la Commission d’Etat d’appel, procédures relatives à des indemnisations des requérants en matière de sécurité sociale. Chaque requérant a introduit une procédure administrative contentieuse devant la Cour suprême soit en raison de l’inaction des autorités administratives soit pour contester leurs décisions. Les procédures ont duré entre 1995 et 2001 dans l’affaire Dumanovski et entre 1996 et 2005 dans l’affaire Docevski.

La Cour européenne a établi que des retards substantiels étaient imputables aux autorités et résultaient essentiellement des réexamens des affaires ou de l’inactivité des autorités administratives. La Cour a en outre indiqué qu’une diligence spéciale était requise en cas de perte de moyens de subsistance, ou d’emploi (§48 de l’arrêt dans l’affaire de Dumanovski), ainsi que dans le cadre de procédure relatives aux retraites (§35 de l’arrêt dans l’affaire de Docevski) (violations de l’article 6§1).

Mesures de caractère individuel : Aucune, les procédures sont closes.

Mesures de caractère général :

• Informations fournies par autorités  (26/03/2008): L’Agent du gouvernement a indiqué que la nouvelle loi sur les tribunaux avait été adoptée le 22/06/2006, mettant en place une cour administrative spécialisée à compter de décembre 2007. La compétence de la Cour suprême sur les litiges en droit administratifs, tels que dans les présentes affaires, ont été transférés à la cour administrative.


La loi de 2006 sur la procédure administrative énonce les cas dans lesquels la cour administrative statuera in meritum après avoir annulé une décision administrative. De plus, elle prévoit la possibilité de suspendre et de déclarer responsable toute personne qui n’a pas respecté les décisions et instructions de la cour administrative, y compris lorsque les faits relatifs à des retards procéduraux ont été établis dans le cadre de procédures administratives. Cette loi sera applicable aux litiges en droit administratif, comme en l’espèce. 

Des informations sont attendues sur l’effectivité de la législation introduite et sa mise en œuvre en pratique, en particulier s’agissant de son impact sur la durée des procédures administratives.

Les arrêts de la Cour européenne dans les deux affaires ont été publiés sur le site Internet du Ministère de la Justice (www.pravda.gov.mk). Dans l’affaire Dumanovski, l’arrêt a été envoyé à la Cour Suprême. 

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales, notamment s’agissant de l’efficacité de la législation introduite.

- 152 affaires contre la Turquie

38187/97          Adalı, arrêt du 31/03/2005, définitif le 12/10/2005

L'affaire concerne le défaut d'enquête effective au sujet de la mort du mari de la requérante, tué devant sa maison à Nicosie (c'est à dire dans la partie située au nord de la « ligne verte ») le 06/07/1996 (violation des articles 2 et 13).

La Cour européenne a constaté les lacunes suivantes lors de l'enquête :

-           la négligence des autorités menant l'enquête, ces dernières n'ayant relevé d'empreintes digitales ni sur la terrasse ni à l'intérieur de la maison de la requérante, et l'absence de réelle coordination ou de contrôle de la scène du crime ;

-           l'insuffisance de l'expertise balistique ;

-           le fait que les autorités chargées de l'enquête avaient omis de prendre en compte les témoignages de témoins clés (bien que des témoignages additionnels aient été recueillis en 2002, après communication de la présente requête au gouvernement) ;

-           le défaut d'enquête suffisante sur les mobiles du meurtre du mari de la requérante, et

-           le défaut de contrôle public lors de l'enquête et le manque d'informations transmises à la famille du défunt.

L'affaire concerne également une ingérence dans la liberté d'association de la requérante, du fait du refus de lui accorder l'autorisation de passer du nord vers la partie sud de Chypre pour assister à une réunion bi-communale le 20/06/1997 (violation de l'article 11).

Mesures de caractère individuel :

Informations fournies par les autorités turques : Une nouvelle enquête a été conduite sur le décès de M. Adalı. Tous les points que la Cour européenne a jugés insuffisants et constitutifs d’une violation dans le cadre de l’enquête initiale ont été examinés dans le cadre de la nouvelle enquête. Ainsi, de nouveaux témoins ont été entendus et des dossiers ont été établis. Le téléphone portable de la victime a fait l’objet de recherches mais n’a pu être trouvé. Le rapport balistique existant n’a pu être obtenu et n’a donc pas été soumis dans le cadre de cette nouvelle enquête. Les autorités ont conclu qu’en dépit des actes d’enquête supplémentaires effectués, il n’était pas possible d’obtenir de nouveaux documents, de nouvelles informations ou témoignages.

Le Secrétariat évalue à l’heure actuelle les informations fournies par les autorités turques et des contacts bilatéraux sont en cours pour clarifier notamment :

1. la question de savoir si un nouvel examen a été effectué s‘agissant des mobiles du meurtre de M. Adalı après le prononcé de l’arrêt de la Cour européenne et,

2. la question de savoir si la requérante a été informée de la nouvelle enquête conduite sur les circonstances du décès de son mari après le prononcé de l’arrêt de la Cour européenne.

Mesures de caractère général :

Informations fournies par les autorités turques : Les autorités turques ont fourni un plan d'action en ce qui concerne les mesures d'ordre général prises ou envisagées dans cette affaire.

            1) Violations des articles 2 et 13 : Elles ont souligné que les lacunes de l'enquête interne constatées par La Cour, découlent généralement de la pratique et non de la législation en vigueur. Elles ont produit à l'appui de cette affirmation un exemplaire de la loi sur les coroners et de la loi sur les procédures pénales de la « RTCN », en soulignant notamment l'article 14 de la loi sur les coroners qui prévoit que toute partie intéressée peut paraître à une « inquest » (enquête judiciaire).


Mesures adoptées : L'article 29 de la loi sur le Ministère Public (Act on the Law Office) a été amendée le 13/03/2006 en vue de permettre à l'Attorney General, s'il l'estime nécessaire, de surveiller ou de diriger des enquêtes menées par le directorat général de la police et de donner des ordres dans ce contexte. Par conséquent, le rôle de l'Attorney General est devenu plus important dans les enquêtes policières.

Selon les autorités turques, l'arrêt a été traduit en turc et sera prochainement diffusé aux autorités concernées. En outre, un article intitulé « L'affaire Ilkay Adalı et certains aspects du droit à la vie » a été publié dans le périodique du barreau de Lefkoşa.

Des informations complémentaires sont attendues sur la diffusion de l’arrêt de la Cour européenne à la police, aux autorités de poursuite et aux juges dans la mesure où cette diffusion est estimée essentielle pour la prévention de nouvelles violations similaires.

            2) Violation de l'article 11 :

Mesures adoptées : les mesures nécessaires ont été prises dans le cadre de l'affaire Djavit An (Rubrique 6.2). A la suite de l'arrêt de la Cour européenne dans cette affaire, le « Conseil des Ministres de la RTCN » a adopté différentes décisions dans le but de donner une base légale régulant le passage de la « ligne verte » dans les deux sens.

Selon les termes de la décision n° E-762-2003, le passage du nord vers le sud est autorisé après présentation d'une pièce d'identité ou d'un passeport et enregistrement électronique du passage des véhicules et des personnes. Chaque personne peut transporter des effets personnels. De plus, les dispositions selon lesquelles le passage était autorisé sur une base journalière avec retour avant minuit, ont été révoquées par une décision du « Conseil des Ministres de la RTCN » n° T-820-2004.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière de l’évaluation des informations déjà fournies et à la lumière d’informations complémentaires à fournir sur les mesures individuelles et générales.

40073/98          Bilgin Ihsan, arrêt du 27/07/2006, définitif le 27/10/2006

Cette affaire concerne le manquement des autorités nationales à leur obligation de protéger le droit à la vie du père du requérant, eu égard à l'organisation et au déroulement d'une opération armée par des gardes villageois dans le Sud-Est de la Turquie, en 1994 (violation de l'article 2).

Une enquête pénale a été ouverte et les gardes villageois ont été mis en accusation pour homicide volontaire. La procédure a cependant été suspendue au motif que les gardes devaient être qualifiés de « fonctionnaires » et dès lors toute poursuite nécessitait l'aval du comité administratif. Sur décision du comité administratif, les poursuites ont été abandonnées.

La Cour européenne a relevé tout d'abord qu'il n'y avait aucune indication d'éventuelles instructions écrites ou orales données aux gardes dans le cadre de leurs fonctions, en particulier en cas d'arrestation de suspects. Elle a également relevé que les gardes ne disposaient pas de l'équipement nécessaire, comme des jumelles à infrarouge et des talkie-walkie, leur permettant d'identifier des suspects sans le moindre doute. Elle a conclu que dans les circonstances de l'affaire, le recours à la force par les gardes villageois n'avait pas été rendu absolument nécessaire pour assurer la défense d'autrui.

L'affaire concerne en l'outre l'inadéquation de l'enquête. La Cour européenne a rappelé la nécessité d'assurer l'indépendance des enquêteurs par rapport aux personnes impliquées pour qu'une enquête sur des allégations d'homicide par des agents de l'Etat puisse être effective. Dans cette affaire, l'inspecteur, un officier de la gendarmerie, relevait de la même hiérarchie que les gardes villageois (violation de l'article 2).

Enfin l'affaire concerne l'absence de recours effectif à la disposition du requérant, eu égard en particulier au fait que les comités administratifs ne pouvaient être considérés comme étant en mesure de mener des enquêtes effectives (violation de l'article 13).

Mesures de caractère individuel : Il convient de noter que selon la pratique bien établie du Comité des Ministres, le gouvernement de l'Etat défendeur a l'obligation continue de mener des enquêtes effectives a fortiori en cas de violation de l'article 2 (voir en particulier la Résolution intérimaire ResDH(2005)20 dans les affaires McKerr et autres affaires contre le Royaume-Uni, l'affaire Scavuzzo Hager et autres contre la Suisse, les affaires concernant les forces de sécurité en Fédération de Russie

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées par les autorités turques pour assurer une nouvelle enquête sur le décès du père du requérant, à la lumière des lacunes identifiées par la Cour européenne.

Mesures de caractère général : Les autorités turques ont fourni un plan d’action précisant les mesures générales prises dans le cadre de cette affaire. Le plan d’action est en cours d’examen par le Secrétariat.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière des informations fournies par les autorités sur les mesures générales ainsi que d’informations à fournir sur les mesures individuelles visant à assurer une nouvelle enquête sur les faits en question, à la lumière des lacunes identifiées par la Cour européenne.


- Affaires concernant le recours excessif à la force en vue de réprimer une émeute au sein d'une prison et l'absence d'enquête effective

35962/97          Gömi et autres, arrêt du 21/12/2006, définitif le 21/03/2007

36672/97          Kurnaz et autres, arrêt du 24/07/2007, définitif le 24/10/2007

Ces affaires concernent l’absence d'enquête effective sur le décès des requérants dans l’affaire Gömi et autres (violation procédurale de l'article 2) ainsi que sur les blessures infligées à plusieurs requérants en 1995-1996, à la suite de raids lancés pour réprimer des émeutes dans des prisons et secourir des otages retenus par les insurgés (violation procédurale de l'article 3). L’affaire Kurnaz et autres concerne également les sévices subis par M. Kurnaz lors du raid (violation substantielle de l’article 3).

Dans l’affaire Gömi et autres, la Cour européenne a estimé qu’elle n'était pas en mesure d'établir au-delà de tout doute raisonnable que le recours à la force meurtrière par les gardiens, les gendarmes et les policiers avait été disproportionné au regard du but poursuivi, à savoir « la répression d'une émeute » et/ou « la défense de toute personne contre la violence ». Toutefois, s’agissant de l’enquête sur les décès survenus, la Cour a estimé que les autorités turques n’avaient pas agi avec une promptitude suffisante et une diligence raisonnable. Pour ce qui est des allégations de mauvais traitement, la Cour n’a pas trouvé motif à critiquer les autorités pour les mesures prises en l'espèce. Elle a cependant considéré qu’il y avait eu violation de l'article 3 en ce qui concerne certains des requérants, du fait qu’aucune enquête effective n’avait été diligentée par les autorités pour établir les faits.

Dans l’affaire Kurnaz et autres, la Cour européenne a estimé que le dossier ne contenait aucun élément de preuve indiquant que les autorités de la prison avaient véritablement tenté de rétablir l’ordre ou que l’opération avait été correctement organisée et contrôlée de manière à réduire au minimum le risque de blessures infligées aux détenus. La Cour a donc conclu que la force utilisée contre M. Kurnaz avait été excessive. La Cour a relevé par ailleurs que le dossier ne mentionnait pas l’issue de la procédure dirigée contre les gendarmes et que l’enquête menée par les conseils administratifs, hiérarchiquement subordonnés aux préfets, ne pouvait passer pour indépendante.

Mesures de caractère individuel : Conformément à la pratique bien établie du Comité des Ministres, il est rappelé que l'État défendeur a l'obligation continue de conduire des enquêtes effectives, a fortiori dans une affaire emportant violation de l'article 2 (voir en particulier la Résolution intérimaire ResDH(2005)20 dans l'affaire McKerr et autres contre le Royaume-Uni, l'affaire Scavuzzo-Hager et autres contre la Suisse, les affaires concernant l'action des forces de sécurité en Fédération de Russie).

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées par les autorités turques pour octroyer une réparation adéquate aux requérants.

Mesures de caractère général : Par courrier du 11/09/2007, les autorités turques se sont référées à de multiples amendements législatifs effectués dans le contexte du group d’affaires « actions des forces de sécurité contre la Turquie ». Ces dispositions incluent notamment les articles 94, 95 et 96 du nouveau Code pénal n° 5237 concernant le crime de torture et de mauvaise traitement, l’article 2 (amendé) de la loi n° 4483 sur les poursuites pénales des fonctionnaires pour des infractions commises dans l’exercice de leurs fonctions, et l’article 161 du nouveau Code de procédure pénale régissant la compétence des parquets pour intenter des procédures contre les membres des forces de sécurité (pour une présentation détaillée de ces mesures, voir CM/Inf/DH(2006)24 révisé 2).

Par ailleurs, les autorités ont signalé l’article 85 de la loi n° 5275, réglementant les conditions de droit de visite en prison et les rencontres avec les détenus.

Enfin, les autorités ont informé le Secrétariat que le Ministre de la justice (Direction des affaires pénitentiaires) avait adressé une circulaire aux parquets en date du 20/08/2002, par laquelle il leur était recommandé de faire preuve de diligence et de vigilance dans l’application des lois d’harmonisation avec l’Union européenne.

Ces informations sont en cours d’évaluation par le Secrétariat.

Des informations sont attendues sur la publication et la diffusion de l'arrêt de la Cour européenne auprès des autorités concernées.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire, sur les mesures individuelles ainsi que sur les mesures générales, à savoir la publication et la diffusion de l’arrêt de la Cour européenne.

38595/97          Kakoulli, arrêt du 22/11/2005, définitif le 22/02/2006

L'affaire concerne le meurtre, en 1996, de l'époux et père des requérants, Petros Kakoulli, par des soldats turcs en faction le long des lignes de cessez-le-feu à Chypre, ainsi que l'absence d'enquête efficace et impartiale sur ce meurtre (violations de l'article 2).


La Cour européenne a constaté que le meurtre de Mr Kakoulli n'était ni proportionné ni absolument nécessaire aux fins de protéger toute personne contre une violence illégale ou de procéder à une arrestation légale: en effet, M. Kakoulli ne faisait peser aucun risque imminent de mort ou de blessure sérieuse sur quiconque puisque le coup de feu fatal a été tiré après qu'il avait été blessé ; il ne constituait donc plus une menace et une arrestation pouvait être menée à bien.

La Cour a également constaté qu'en dépit de la gravité de l'incident, il y avait eu un certain nombre d'omissions significatives créant des doutes quant à l'efficacité et l'impartialité de l'enquête menée immédiatement après le meurtre. A l'issue de cette enquête, aucune procédure pénale ou disciplinaire n'a été menée à l'encontre du soldat qui a abattu Mr Kakoulli. S'agissant de l'enquête, la Cour a constaté les défauts suivants :

-           Le rapport d'autopsie initiale n'a pas fait état de toutes les blessures sur le corps de Petros Kakoulli. Ceci a entravé leur évaluation par rapport à celles reçues lors des coups de feu, ainsi que la détermination de sa position par rapport aux soldats en faction ;

-           les enquêteurs ont basé leurs conclusions uniquement sur la version des faits des soldats, sans émettre le moindre doute, et sans rechercher d'autres témoins ;

-           ces mêmes enquêteurs n'ont pas cherché à savoir si la victime, prétendument en possession d’arme à feu, avait constituéune menace sérieuse pour les soldats situés à grande distance ou si les soldats auraient pu éviter l'usage d'une force excessive et fatale ;

-           les enquêteurs n'ont pas vérifié si le soldat qui a abattu Mr Kakoulli s'était conformé aux règles d'intervention établies dans les instructions militaires concernant le poste de garde Haşim 8.

Mesures de caractère individuel :

• Informations fournies par les autorités turques : Le Procureur général a conclu dans sa décision du 28/03/2007 qu’il n’était pas possible de rouvrir l’enquête dans cette affaire. Les points principaux suivants ont été mis en avant :

1) l’examen d’une réouverture éventuelle, complétée par la décision du Procureur général, a commencé sans retard suite à l’arrêt définitif de la Cour européenne ;

2) la décision du Procureur général est basée sur un examen préliminaire, effectué le 7/07/2006 par les forces de sécurité, ces dernières ayant considéré, de manière détaillée et sans préjugé, toutes les déficiences identifiées par la Cour européenne aux fins d’une éventuelle réouverture;

Le Procureur général a conclu qu’une enquête supplémentaire ne serait pas en mesure de modifier les témoignages déjà donnés et étant donné que c’est sur la base de ces témoignages qu’il a été établi que le soldat ayant tiré avait réagi conformément aux ordres et instructions, une réouverture éventuelle reviendrait à juger une personne pour avoir commis un acte légal.

Evaluation : Les informations fournies présentent un examen très détaillé et complet de toutes les principales défaillances relevées par la Cour européenne dans le cadre de l’enquête initiale. Il convient de relever cependant que cet examen porte sur les mêmes actes d’enquête qui ont été déclarés insuffisants par la Cour européenne et qui étaient à l’origine de la violation de l’article 2 dans son aspect procédural. A cet égard il convient de souligner en particulier que la conduite d’une nouvelle enquête effective viserait à établir si le soldat en question a agi conformément aux ordres et instructions, et par voie de conséquence déterminera les responsables du meurtre de M. Kakoulli, ce qui constitue un élément inhérent de la notion d’enquête effective.

Mesures de caractère général : Un article sur l'arrêt a été publié dans la « Revue chypriote turque du Barreau » et la diffusion de l'arrêt a été faite à l’attention de toutes les autorités concernées, y compris les forces de sécurité et le « Président de la RTCN ».

Les autorités turques ont récemment fourni un grand nombre d'informations supplémentaires sur le cadre juridique de la « RTCN » relatif à l'utilisation des armes à feu par les forces de sécurité. Les informations concernent à la fois la législation applicable à toutes les forces de sécurité et les instructions applicables aux forces de sécurité affectées le long de la « ligne verte ». Plusieurs lois ont élaboré un régime juridique relatif aux sanctions imposées en cas d'utilisation injustifiée d'armes à feu, aux situations dans lesquelles l'usage des armes à feu est autorisé, à l'obligation de coups de semonce avant l'usage d'armes à feu, à la responsabilité des agents de grade supérieur, à la formation de base des agents des forces de sécurité, aux enquêtes sur des incidents, ainsi qu'au devoir de respecter les ordres, y compris les exceptions à ce devoir. Les instructions générales et spécifiques pour les gardes en faction au poste en question dans la présente affaire, énoncent le cadre réglementaire en ce qui concerne les actions à prendre par les gardes dans certaines circonstances spécifiques ainsi que la manière dont les armes à feu doivent être portées et utilisés. Les dispositions du cadre législatif fournies par les autorités turques peuvent être résumées comme suit :

Dispositions législatives:

- Responsabilité pour l’usage des armes : ni les soldats ni leur commandant ne peuvent être jugés responsables pour avoir usé de leurs armes à condition d’avoir agi conformément aux dispositions législatives applicables, en particulier la loi n° 35/1986 sur le service interne des forces de sécurité. Soldats et commandants peuvent voir leur responsabilité engagée en cas de non-respect de la loi.


Lorsqu’un militaire a causé des blessures ou a tué une personne suite à un acte négligent ou illégal, il engage sa responsabilité en vertu du Code pénal. Lorsqu’un officier militaire décide de ne prendre aucune mesure à l’encontre d’un subordonné ayant commis un délit, il commet une infraction et encourt jusqu’à 6 mois de prison. Les militaires doivent obéir aux ordres de leur supérieur qui sont eux-mêmes responsables pour les ordres qu’ils donnent concernant l’application des lois et instructions.

- Usage des armes : lorsqu’un militaire est en service, y compris lorsqu’il assure le maintien de l’ordre public, il peut utiliser des armes pour repousser une agression, caractérisée par acte de résistance physique ou par une menace dangereuse ; pour contraindre des personnes qui n’obtempèrent pas aux ordres d’abandonner leurs armes ou instruments de résistance ; pour arrêter des personnes, détenues légalement, qui s’enfuient ou essayent de s’enfuir et qui refusent d’obtempérer, ceci à condition qu’il n’y ait aucun autre moyen de les arrêter ; pour empêcher toute agression contre une personne ou un bien dont il a la garde ; et en cas de légitime défense.

Les armes peuvent être utilisées uniquement en l’absence d’autre moyen. Face à des personnes non armées qui font preuve d’agression, de résistance, de violence ou de menace, les militaires sont autorisés à utiliser leurs armes, à condition d’avoir procédé aux sommations d’usage. Le recours à la force doit être proportionné et viser seulement à obtenir que les personnes concernées obéissent aux ordres qui ont été donnés.

- Formation du personnel militaire : les militaires sont astreints à cinq semaines de formation initiale et à deux semaines de formation spécifique aux tâches assignées. Les militaires suivent une formation en vertu des instructions générales et particulières sur le port et l’usage des armes.

- Enquête : militaires ou civils peuvent déposer une plainte devant le supérieur d’un militaire, ou le parquet militaire, concernant toute infraction qu’un militaire aurait commis. Des telles plaintes sont traitées immédiatement en vue d’ouvrir une enquête. Le tribunal compétent dans de tels cas est le tribunal des forces de sécurité.

- Droits des victimes : les droits des victimes sont couverts par les dispositions pertinentes de la législation pénale et civile.

Instructions concernant d’usage des armes :

- Usage des armes : les militaires ont le droit d’utiliser une arme à feu en respectant des règles d’engagement. Ils ont le droit de tirer sans sommation lorsque des militaires de la partie adverse, armés ou non, entrent ou ont l’intention d’entrer dans la zone tampon.

- Formation des forces de sécurité : depuis 1998, les soldats et leurs commandants suivent également une formation dans le domaine des droits de l’homme, formation assurée par des enseignants de haut niveau, y compris pendant la formation initiale. De plus, depuis 2004, une formation en matière de droits de l’homme est également assurée dans le cadre d’un cours sur la citoyenneté. Toutes ces formations ont pour but spécifique de prévenir des négligences et des omissions susceptibles d’être à l’origine de violations des droits de l’homme. L’ensemble du personnel du Commandement des Forces de Sécurité a été informé de ce que tout acte donnant lieu a des violations des droits de l’homme constitue une infraction disciplinaire ou pénale selon le cas, et sera poursuivi conformément à la loi.

Evaluation : Il convient de noter que dans les textes présentés il n’apparaît pas que les armes doivent être utilisées strictement en proportion avec la situation, uniquement en cas de risque imminent de mort ou de blessures graves et en l’absence d’autre moyen.

Le point de vue des autorités à cet égard serait utile. Par ailleurs, des informations seraient utiles sur les dates d'entrée en vigueur des législations et instructions citées. Des clarifications sont nécessaires sur la manière concrète dont la formation dispensée aux forces de sécurité peut contribuer à la prévention de nouvelles violations de la Convention dues à l’utilisation excessive d’armes à feu.

Les Délégués,

1.             invitent le gouvernement de l’Etat défendeur à fournir des informations sur les mesures individuelles et générales en suspens ;

2.             décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

52955/99           Huylu, arrêt du 16/11/2006, définitif le 23/05/2007

L’affaire concerne le manquement des autorités nationales à leur obligation de protéger le droit à la vie du fils du requérant, ce dernier souffrant de plusieurs maladies avant son emprisonnement. La Cour européenne a relevé en premier lieu que les problèmes de santé du fils du requérant ne pouvaient pas avoir été ignorés par les autorités pénitentiaires, ce dernier ayant un long passé médical. En second lieu, la Cour s’est référée à la Recommandation du Comité des Ministres (98) 7 relative aux aspects éthiques et organisationnels des soins de santé en milieu pénitentiaire, et a relevé que les détenus malades nécessitant des soins médicaux particuliers devaient être transférés vers des hôpitaux spécialisés et accompagnés de membres du personnel soignant lors de leur transfert.


La Cour a cependant constaté que les autorités nationales n’avaient pas fait tout ce qui était en leur pouvoir pour faire face à l’état de santé du fils du requérant, en particulier lors de son transfert à l’hôpital, en dépit de leur obligation en la matière. Les autorités nationales n’ont pas pris les mesures requises pour lui prescrire un traitement approprié (violation de l’article 2 sous son volet substantiel).

L‘affaire concerne également le défaut d’enquête effective sur les circonstances du décès du fils du requérant en raison de l’entrée en vigueur de la loi n° 4616 (relative à la liberté conditionnelle, à l’ajournement des procès et à l’exécution des peines pour les infractions commises avant le 23/04/1999) durant la procédure introduite à l’encontre du personnel pénitentiaire pour négligence ayant entraîné la mort du fils du requérant. La Cour a estimé que l’application de cette loi avait abouti à la reconnaissance d’une immunité légale aux personnes poursuivies (violation de l’article 2 sous son volet procédural).

Mesures de caractère individuel : Il convient de relever qu’en vertu de la pratique bien établie du Comité des Ministres, l’Etat défendeur a l’obligation continue de mener des enquêtes effectives, a fortiori dans le cas d’une violation de l’article 2 (voir en particulier la Résolution ResDH(2005)20 dans l’affaire McKerr et autres contre le Royaume-Uni) ; l’affaire Scavuzzo-Hager et autres contre la Suisse ; les affaires concernant les actions des forces de sécurité contre la Fédération de Russie).

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées par les autorités turques sur les circonstances du décès à la lumière des lacunes identifiées par la Cour européenne.

Mesures de caractère général : Les autorités turques ont fourni un plan d’action concernant les mesures prises, détaillées ci-dessous :

-           En vertu du règlement concernant l’Administration des établissements pénitentiaires, d’exécution des peines et des mesures de sécurité, tous les établissements carcéraux doivent disposer de centres médicaux appropriés. Les médecins des établissements pénitentiaires doivent examiner régulièrement les détenus. Si l’état de santé d’un détenu nécessite un transfert à un hôpital, le médecin doit informer l’administration pénitentiaire et le transfert doit être effectué immédiatement.

-           Une brochure a été préparée en 2006 avec le support de l’Union européenne afin de maintenir une bonne administration des soins de santé en tenant compte des normes internationales. Cette brochure a été distribuée aux personnes et établissements concernés et un programme de formation sur l’application de ces normes a été mis en place pour les médecins des établissements pénitentiaires.

-           Une autre brochure a été préparée et distribuée en mai 2007, contenant les règles acceptées par les organisations internationales (y compris la Recommandation de la Comité des Ministres N° R(98)7). En outre, cette brochure fait partie des programmes dans les centres de formation. Le programme de formation se poursuit.

Une traduction turque de l’arrêt de la Cour est aussi publiée sur le site Internet du Ministère de la Justice à :

www.inhak-bb.adalet.gov.tr/aihm/karar/huylu.doc.

Evaluation : A la lumière des informations soumises, aucune autre mesure générale ne semble nécessaire.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures individuelles.

32597/96           Dinç Halit et autres, arrêt du 19/09/2006, définitif le 19/12/2006

Cette affaire concerne le décès du proche des requérants, un sergent-chef, sous les balles tirées par un autre sergent, A.A. Le feu avait été ouvert lors du passage illégal d’un groupe de contrebandiers à la frontière entre la Turquie et la Syrie en 1994. La procédure pénale diligentée contre A.A. est toujours pendante devant les juridictions militaires.

La Cour européenne a relevé que la Cour de cassation militaire avait estimé fondé l’ordre donné par le commandant de régiment d’ouvrir le feu sans sommation dans le cadre de la surveillance de nuit de la frontière. La Cour européenne a estimé cependant qu’une telle instruction ne renfermait aucune garantie visant à empêcher que la mort ne soit infligée de manière arbitraire et qu’un tel cadre juridique était bien en deçà du niveau de protection par la loi du droit à la vie requis par la Convention et les sociétés démocratiques aujourd’hui en Europe. Elle a conclu que les autorités militaires turques n’avaient pas, à l‘époque, fait tout ce qu’on pouvait raisonnablement attendre d’elles pour offrir aux citoyens le niveau de protection requis dans le cas de recours à la force potentiellement meurtrière et pour parer aux risques réels pour la vie engendrés par des opérations militaires dans la zone frontalière (violation de l’article 2).

La Cour a en outre estimé que les autorités avaient manqué à leur obligation de mener une enquête effective dans la mesure où les déficiences initiales de l’enquête avaient rendu impossible l’identification, au-delà de tout doute raisonnable de l’identité de la personne responsable du décès du proche des requérants, après 12 ans de procédure (toujours pendante). La Cour a estimé que les requérants ne disposaient pas de recours effectif pour faire valoir leurs griefs au titre de la Convention (violations des articles 2 et 13).


Mesures de caractère individuel : Il convient de relever que suivant la pratique bien établie du Comité des Ministres, l’Etat défendeur a l’obligation continue de conduire des enquêtes effectives, a fortiori dans des cas où une violation de l’article 2 a été constatée (voir en particulier les affaires McKerr et autres affaires similaires contre le Royaume-Uni, Résolution intérimaire ResDH(2005)20, l’affaire Scavuzzo et autres contre la Suisse, les affaires concernant les actions des forces de sécurité contre la Fédération de Russie).

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées par les autorités turques pour assurer une nouvelle enquête sur les circonstances de cette affaire à la lumière des défaillances identifiées par la Cour européenne. Des informations sont également attendues sur l’issue de la procédure interne.

Mesures de caractère général :

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées par les autorités turques en vue de prévenir de nouvelles violations similaires. A priori, la publication et la diffusion de l’arrêt de la Cour européenne aux autorités concernées semblent appropriées.

Le Secrétariat a adressé un courrier de phase initiale aux autorités turques le 05/04/2007. Une réponse à cette lettre est attendue.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

28290/95          Güngör, arrêt du 22/03/2005, définitif le 22/06/2005

Cette affaire concerne le défaut d'enquête efficace sur les circonstances du meurtre du fils du requérant dans l'appartement de fonction du requérant (député au moment des faits) au sein de la cité parlementaire d'Ankara en 1991. Le fils, alors âgé de 21 ans, a été retrouvé mort dans son lit, atteint de plusieurs coups de poignards et d'une balle dans la tête. Les enquêtes pénales et parlementaires menées à l'époque n'ont pas permis d'identifier les auteurs du crime.

La Cour européenne a relevé les insuffisances suivantes dans ces enquêtes : en premier lieu, certains éléments de preuve, notamment des objets visibles sur l'enregistrement vidéo effectué juste après le crime, n'ont pas été retrouvés et n'ont pu être versés au dossier de l'enquête. Ensuite, des divergences entre les différents rapports d'expert ont démontré que les forces de sécurité n'avaient pas pris assez de mesures pour préserver les preuves. De plus, aucun élément du dossier ne montre que les enquêteurs ont pris des mesures sérieuses afin d'éprouver la véracité des hypothèses sur l'identité des auteurs et les circonstances du crime, pourtant signalées aux autorités par différentes sources.

La Cour a également noté que les enquêteurs avaient estimé nécessaire de recourir aux témoignages des députés qui résidaient dans la cité parlementaire à la date du meurtre. Or, en dépit de l'absence d'obstacle juridique, tous les témoignages nécessaires n'ont pas été recueillis (violation des articles 2 et 13).

Mesures d'ordre individuel : Une commission a été mise en place par le Parlement en février 2005 pour conduire une nouvelle enquête sur les circonstances du meurtre du fils du requérant.

Informations fournies par les autorités turques : Dans leur réponse du 22/11/2005 à la lettre de phase initiale du 13/10/2005 du Secrétariat, les autorités turques ont confirmé l'établissement de la Commission d'enquête parlementaire ; cependant ils n'ont pas fourni d'information sur les mesures prises par la Commission jusqu'à présent. Lors de la 992e réunion (décembre 2006), les autorités turques ont indiqué la Commission avait conduit une nouvelle enquête, avec l'audition de témoins et un examen sur place de la scène du crime.

Des informations sont attendues sur l'issue de l'enquête menée par la Commission parlementaire.

Mesures d'ordre général : La Cour européenne a considéré que la Turquie devait mettre en œuvre en temps utile des mesures appropriées pour satisfaire à ses obligations d'assurer une clarification de la législation de manière à ce que l'immunité parlementaire ne puisse plus empêcher dans la pratique la poursuite des délits de droit commun lorsque des parlementaires et leurs proches sont concernés en tant qu'éventuels témoins ou accusés (voir § 111 de l'arrêt).

Informations fournies par les autorités turques : Dans leur réponse du 22/11/2006 les autorités turques ont indiqué que le seul but de l'immunité parlementaire était de protéger les parlementaires au titre de leurs actions exercées dans le cadre de leur fonction ; elle n'empêche pas les autorités d'enquêtes de conduire une enquête sur les parlementaires. Quoi qu'il soit, les membres de la famille ne bénéficient pas de la protection de l'immunité parlementaire et les autorités sont libres de prendre toute mesure d'enquête nécessaire à leur égard dans le cadre des enquêtes pénales. Le Secrétariat note que ces informations ont été réfutées par la Cour qui s'est explicitement référée aux mesures que la Turquie devait prendre pour éviter de futures violations.

Des informations sont donc attendues sur les mesures envisagées par les autorités turques pour que l'immunité parlementaire ne constitue plus un obstacle en pratique à la conduite des enquêtes pénales.


Informations fournies : Le Secrétariat est en train d’examiner les informations fournies par les autorités turques sur les mesures de caractère général et individuel.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière de l'examen des informations fournies sur les mesures individuelles et générales.

48939/99          Ôneryıldız, arrêt du 30/11/2004 - Grande Chambre

Cette affaire concerne l'explosion de méthane survenue en avril 1993 dans une décharge d'ordures ménagères d'Ümraniye, à Istanbul. Cette explosion avait provoqué un glissement de terrain et entraîné le décès de 9 proches du requérant, ainsi que la destruction de son habitation et de ses biens.

La maison du requérant était située dans un bidonville où des habitations avaient été construites sans aucune autorisation sur les terrains avoisinant la décharge, laquelle était utilisée conjointement par quatre districts de la ville, sous l'autorité et la responsabilité du Conseil municipal d'Istanbul. Un rapport d'expertise établi en mai 1991 avait attiré l'attention des autorités entre autres sur le fait qu'aucune mesure n'avait été prise dans la décharge en question pour prévenir une explosion du méthane produit par la décomposition des ordures. Les autorités n'ont cependant pas donné suite à ce rapport.

Après l'explosion, des enquêtes administrative et judiciaire ont été diligentées et les maires d'Ümraniye et d'Istanbul ont été traduits devant les tribunaux, après que le Comité administratif avait autorisé les poursuites. En avril 1996, les deux maires ont été jugés coupables de « négligence dans l'exercice de leurs fonctions » en vertu de l'article 230 du Code pénal et condamnés à une amende et à la peine minimum d'emprisonnement de trois mois. Cette peine a été par la suite commuée en une peine d'amende, à l'exécution de laquelle il a été sursis. Le requérant a par la suite intenté une procédure en dommages et intérêts, rendant les autorités responsables du décès de ses proches et de la destruction de ses biens. En novembre 1995, les autorités ont été condamnées à verser au requérant  des sommes qui équivalaient à l'époque à 2 077 euros au titre du préjudice moral et 208 euros au titre du préjudice matériel. Ces sommes n'ont jamais été payées au requérant.

S'agissant de la responsabilité de l'Etat dans les décès, la Cour européenne a conclu que les autorités turques savaient ou auraient dû savoir, au moins après le rapport de mai 1991, qu'il existait un risque réel et immédiat pour plusieurs personnes vivant près de la décharge municipale d'Ümraniye et qu'elles avaient omis de prendre les mesures nécessaires et suffisantes pour protéger la vie de ces personnes (violation de l'article 2).

S'agissant de la responsabilité de l'Etat quant à la nature de l'enquête, la Cour a conclu que les juridictions nationales avaient failli à leur devoir de diligenter une enquête appropriée sur le décès des proches du requérant, de nature à garantir la mise en cause pleine et entière de la responsabilité des autorités ou l'application effective des dispositions de droit interne garantissant le respect du droit à la vie, en particulier de la fonction dissuasive du droit pénal. A cet égard, la Cour a critiqué le fait que le Comité administratif ait abandonné les charges pesant sur le ministère de l'Environnement et les autorités gouvernementales et qu'il ait cherché à limiter l'accusation à la « négligence », visée à l'article 230 du Code pénal qui ne traite pas d'actes mettant en danger la vie d'autrui, ni de la protection du droit à la vie (violation de l'article 2).

Pour ces raisons, la Cour a également conclu que les autorités turques avaient failli à l'obligation positive qui leur incombait de prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter la destruction de l'habitation du requérant (violation de l'article 1 du Protocole n° 1).

Enfin, la Cour a estimé que les procédures administratives n'offraient pas au requérant un recours effectif, à la fois eu égard à l'incapacité de l'Etat à protéger la vie de ses proches et à la destruction de ses biens, puisque le dédommagement qui lui a été accordé par les juridictions nationales ne lui a jamais été versé (violation de l'article 13).

Mesures de caractère individuel : Les préjudices causés par ces violations, y compris les sommes impayées octroyées par les juridictions internes, ont été couverts par l'octroi d'une satisfaction équitable par la Cour européenne.

Mesures de caractère général : Les autorités turques ont soumis le 10/06/2005 et le 08/04/08 les informations suivantes, en réponse à la lettre du Secrétariat du 01/03/2005 demandant un plan d'action pour l'exécution de cet arrêt :

1. Après l'explosion, la décharge de Ümraniye a été recouverte de terre sur décision du conseil local qui a également fait installer un conduit d'air au dessus. De plus, un projet de réhabilitation a été mis en place par la communauté urbaine d'Istanbul qui a fait planter des arbres sur l'ancien site de la décharge et y a fait installer des terrains de sports.

2. Le nouveau Code pénal, entré en vigueur le 01/06/2005, sanctionne le dépôt de substances dangereuses, qu'il soit intentionnel ou accidentel, s'il y a un risque pour l'environnement. Toute personne déposant ce genre de substances risquera une peine d'emprisonnement de 2 mois à 2 ans. Le Code prévoit également une peine plus sévère dans le cas où le dépôt des substances dangereuses provoque un préjudice permanent pour la santé humaine et pour l'environnement.


3. L'article 257 du nouveau Code prévoit que tout agissement contraire à l'intérêt public d'un fonctionnaire d'Etat risquant de porter préjudice au public ou de causer un dommage à un particulier, sera punissable d'une peine d'emprisonnement de un à trois ans. Si un fonctionnaire néglige son devoir ou s'en acquitte avec retard, il encourra une peine d'emprisonnement de 6 mois à 2 ans.

4. Les autorités turques ont fourni au Secrétariat le texte intégral du règlement sur les déchets solides de 1991 tel qu'amendé par la suite.

5. Un plan stratégique pour une gestion des déchets à Istanbul, inspiré des lignes directrices des réglementations en matière de l’environnement de l’Union européenne, a été préparé et mis en œuvre.

6. Concernant la prévention de l’apparition des bidonvilles, les articles 154 et 184 du Nouveau Code pénal (entré en vigueur le 1/06//2005) prévoient des sanctions pénales contre les personnes qui occupent, utilisent, altèrent ou construisent des immeubles sans autorisation, en changent les délimitations ou empêchent l’accès aux espaces publics. Toute personne encourageant ces activités en fournissant des services pour toute occupation illégale est également passible de sanctions pénales.

7. L’arrêt de la Cour européenne a été publié et distribué. Il est également disponible sur les sites Internet du Ministère de la Justice et de la Cour de cassation.

Concernant la violation de l’article 13, les mesures prises afin de garantir l’exécution des décisions des tribunaux internes, sont en cours d’examen dans le cadre du groupe d’affaires Kılıç Ahmet (rubrique 4.2).

Informations attendues : Eu égard au constat de la Cour du manque d'efficacité de l'enquête menée au niveau interne suite à l'explosion, il a été demandé aux autorités turques d'apporter des clarifications sur les mesures prises ou  envisagées pour la mise en place d'un système effectif d'enquête capable d'établir la responsabilité d'agents de l'Etat (y compris la question de l'effectivité des poursuites même lorsque des autorisations administratives sont nécessaires à cette fin).

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales, en particulier les mesures visant à mettre en place un système effectif d'enquête capable d'établir la responsabilité d'agents de l'Etat (y compris la question de l'effectivité des poursuites même lorsque des autorisations administratives sont nécessaires à cette fin).

39437/98          Ülke, arrêt du 24/01/2006, définitif le 24/04/2006

                       Résolution intérimaire CM/Res/DH(2007)109

Cette affaire concerne le traitement dégradant subi par le requérant en raison de ses condamnations et emprisonnements répétitifs pour avoir refusé de faire son service militaire (violation de l'article 3).

Le requérant a été appelé sous les drapeaux en août 1995, mais a refusé d'effectuer son service militaire au motif qu'il était un pacifiste convaincu. Il a brûlé sa feuille d'appel publiquement lors d'une conférence de presse. En janvier 1997, le requérant a été condamné à une peine d'emprisonnement de six mois et à une amende. Entre mars 1997 et novembre 1998, le requérant a été condamné à 8 reprises pour « désobéissance persistante » du fait de son refus de porter l'uniforme militaire. Durant cette période, il a également été condamné à deux reprises pour désertion car il n'avait pas rejoint son régiment. Au total, le requérant a purgé 701 jours d'emprisonnement.

La Cour européenne a noté en premier lieu que chaque fois que le requérant avait été libéré après avoir purgé sa peine, il avait à nouveau été condamné et transféré à la prison pour avoir refusé d'effectuer son service militaire ou de porter l'uniforme. De plus, il doit faire face au risque de se voir imposer des peines d'emprisonnement successives jusqu'à la fin de sa vie s'il persiste dans son refus d'accomplir le service militaire obligatoire.

La Cour a en outre noté que le droit turc ne contenait aucune disposition spécifique réglementant les sanctions prévues pour les personnes refusant de porter l'uniforme pour des motifs de conscience ou de religion. Les règles applicables en la matière sont, semble-t-il, les dispositions du code pénal militaire qui répriment de manière générale la désobéissance aux ordres des supérieurs. Selon la Cour, ce cadre juridique n'est évidemment pas suffisant pour réglementer de manière adéquate les situations découlant du refus d'effectuer le service militaire pour des raisons de convictions personnelles. Les multiples poursuites pénales dirigées contre le requérant et le risque d'être poursuivi tout au long de sa vie équivalaient presque à la « mort civile », incompatible avec un régime de répression dans une société démocratique au sens de l'article 3. 

Mesures de caractère individuel : Le requérant est en fuite et est recherché par les forces de sécurité en vue de l'exécution de sa peine. Il n'a pas d'adresse officielle et n'a plus aucun contact avec les autorités administratives.

En réponse aux mesures spécifiques demandées par le requérant, la Cour européenne a indiqué qu'il appartenait en premier à l'Etat concerné, sous le contrôle du Comité des Ministres, de choisir les moyens à mettre en œuvre dans son ordre juridique interne pour s'acquitter de ses obligations en vertu de l'article 46 de la Convention.


            1) Evénements ayant eu lieu après que l'arrêt de la Cour européenne était devenu définitif : Le 12/07/2007, les représentants du requérant ont indiqué au Secrétariat que le 09/07/2007 ce dernier avait reçu une assignation à se présenter en vue de purger la peine résultant de sa précédente condamnation (cette information a été communiquée à toutes les délégations le 03/08/2007, DD(2007)440). Plusieurs ONG, en Turquie et à l'extérieur de la Turquie, ont manifesté leur intérêt et fait part de leurs préoccupations à l'égard de la situation du requérant.

Dans l'intervalle, la demande de sursis à exécution, déposée par le requérant, a été rejetée par le tribunal militaire de Eskişehir le 27/07/2007. Dans son arrêt, le tribunal s'est référé à la décision du Comité adoptée lors de la 997e réunion (juin 2007) et aux engagements pris par la Turquie à cette réunion concernant le projet de loi en cours visant à trouver une solution à la situation du requérant. Cependant, selon ce tribunal, les engagements des autorités turques ne peuvent aboutir à un sursis à l'exécution de la peine du requérant dans la mesure où le projet de loi en cours n'est pas connu, y compris la question de savoir s'il contient ou non des dispositions qui seraient applicables en faveur ou au détriment du requérant. Le tribunal a par conséquent condamné le requérant à une peine de 17 mois et 15 jours d'emprisonnement sur la base de ses précédentes condamnations. Le requérant a introduit une demande en objection devant la Cour militaire de cassation le 03/08/2007. Cette affaire est toujours pendante.

            2) Résolution intérimaire adoptée lors de la 1007e réunion (octobre 2007) : En l'absence d'information sur les mesures individuelles prises et en dépit de la déclaration des autorités turques selon laquelle un projet de loi était en cours de préparation en vue de couvrir les mesures individuelles requises dans cette affaire (voir ci-dessous), le Comité a adopté la Résolution intérimaire CM/ResDH(2007)109 priant instamment les autorités turques à prendre, sans plus de retard, toutes les mesures nécessaires en vue de mettre un terme à la violation du droit du requérant en vertu de la Convention et d'adopter rapidement la réforme législative nécessaire pour prévenir des violations similaires de la Convention. Le Comité a décidé en outre d'examiner la mise en œuvre du présent arrêt à chacune de ses réunions « Droits de l'Homme » jusqu'à ce que les mesures urgentes nécessaires aient été adoptées.

Mesures de caractère général :

• Informations fournies par les autorités turques (997e réunion) : Un projet de loi est en cours de préparation par les autorités turques compétentes en vue de prévenir de nouvelles violations de l'article 3, similaires à celle constatée dans la présente affaire. Ce projet sera transmis au Bureau du Premier Ministre aux fins de soumission au Parlement. Cette loi, une fois adoptée permettra d'éviter des poursuites pénales et des condamnations à répétition pour « désobéissance persistante » à des ordres militaires à l'encontre de ceux qui refusent de faire leur service militaire pour des motifs religieux ou de conscience. Selon les autorités turques, ce projet de loi vise à remédier toutes les conséquences négatives de la violation subies par le requérant.

Les autorités turques ont également donné des informations sur la publication et diffusion de l'arrêt aux autorités compétentes. L'arrêt de la Cour européenne a également reçu une grande couverture médiatique.

Lors de la même réunion, le Comité a invité les autorités turques à transmettre une copie de ce projet de loi et les ont encouragé à prendre toutes les mesures nécessaires en vue de son adoption rapide par le Parlement. Aucune information n'a été reçue à ce jour sur l'adoption de cette loi, y compris la copie du texte.

Les Délégués,

1.             rappellent la Résolution intérimaire CM/ResDH(2007)109 adoptée en octobre 2007 dans laquelle le Comité a prié instamment les autorités turques « de prendre, sans plus de retard, toutes les mesures nécessaires en vue de mettre un terme à la violation du droit du requérant en vertu de la Convention et d’adopter rapidement la réforme législative nécessaire pour prévenir des violations similaires de la Convention » ;

2.             réaffirment leur forte préoccupation concernant le fait que, depuis l’adoption de la résolution intérimaire, la situation du requérant est restée inchangée et qu’il court toujours un risque réel d’être emprisonné sur la base d’une précédente condamnation ;

3.             appellent les autorités turques à prendre, sans plus de délai, les mesures nécessaires telles qu’identifiées dans la résolution intérimaire ;

4.             décident, conformément à la résolution intérimaire précitée, de reprendre l’examen de cette affaire lors de leur 1035e réunion (16–18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

70417/01          Avcı et autres, arrêt du 27/06/2006, définitif le 27/09/2006

2778/02 Yıldırım Hüseyin, arrêt du 03/05/2007, définitif le 03/08/2007

Ces affaires concernent les traitements dégradants infligés aux requérants durant leur détention en prison (violations de l’article 3).


Dans l’affaire Avcı et autres, les requérants ont été entravés à leur lit par la cheville alors qu’ils étaient dans le coma dans le service des soins intensifs. La Cour européenne a estimé que les mesures d'entrave étaient disproportionnées au vu de l’état de santé des requérants et de l'absence réaliste de risque de fuite.

Dans l’affaire Yıldırım Hüseyin, le requérant souffrait de paralysie pendant sa détention. Il a été maintenu en détention provisoire pendant presque trois ans en dépit de son incapacité physique et de rapports médicaux attestant qu’il n’était pas en mesure de subir une peine d’emprisonnement.

L’affaire Avcı et autres concerne également la violation du droit des requérants à un recours effectif étant donné la décision des autorités nationales de ne pas poursuivre les gendarmes responsables (violation de l’article 13).

Mesures de caractère individuel :

1) Avcı et autres : Le 11/05/2007 les autorités turques on répondu à la lettre de première phase du Secrétariat du 09/03/2007. Elles ont indiqué qu’aucune enquête n’avait été ouverte par le Procureur d’Izmir.

            2) Yıldırım Hüseyin: le requérant a été gracié en juin 2004 en vertu de l’article 104 b. de la Constitution.

Des informations sont toujours attendues sur les mesures envisagées par les autorités turques afin de remédier aux carences des enquêtes diligentées contre les gendarmes présumés responsables.

Mesures de caractère général : Les autorités turques se sont référées en premier lieu au Règlement relatif à l’administration pénitentiaire, à l’exécution des peines et aux mesures de sécurité. En deuxième lieu, elles ont soumis des informations concernant un protocole d’accord conclu le 30/10/2003 entre les Ministères de l’Intérieur et de la Santé, couvrant les conditions d’hospitalisation des détenus en établissement civil, les mesures de sécurité à prendre dans de telles circonstances et la création d’unités sanitaires carcérales au sein des hôpitaux. Toutefois, aucun des deux textes ne semble inclure de disposition en matière de mesures de contrainte.

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées pour prévenir de nouvelles violations semblables.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ces points au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

26050/04          Gürbüz, arrêt du 10/11/2005, définitif le 10/02/2006

24040/04          Kuruçay, arrêt du 10/11/2005, définitif le 10/02/2006

7454/04            Uyan, arrêt du 10/11/2005, définitif le 10/02/2006

22913/04          Yıldız Tekin, arrêt du 10/11/2005, définitif le 10/02/2006

Dans toutes ces affaires, la Cour européenne a estimé qu’il y aurait violation de l’article 3 si les autorités turques décidaient de réincarcérer les requérants, précédemment libérés pour raison de santé, sans qu’il y ait un net changement dans leur aptitude médicale à endurer une telle mesure.

Les requérants avaient été initialement condamnés à différentes périodes de réclusion en raison de leur appartenance à des organisations terroristes. Durant leur détention, ils ont été diagnostiqués comme souffrant du syndrome de Wernicke-Korsakoff (encéphalopathie consistant en une perte de certaines fonctions cérébrales et résultant d’une carence en vitamine B1 (thiamine)) en raison d’une grève de la faim. La Cour européenne a constaté que le diagnostic médical initial avait été confirmé par les plusieurs contrôles médicaux, y compris les résultats du comité d’experts désigné par la Cour, et que l’état de santé des intéressés avait été jugé incompatible avec leur détention. En outre, il existait chez les requérants des signes cérébelleux importants qui pouvaient être considérés comme étant définitifs.

En outre dans l’affaire Yıldız Tekin, la Cour européenne a estimé que la réincarcération du requérant entre le 21/11/2003 et le 27/07/2004 avait constitué un traitement inhumain et dégradant au vu de son état de santé (violation de l’article 3).

Mesures de caractère individuel :

Informations fournies par les autorités turques (08/06/2006) : Les condamnations de tous les requérants ont été suspendues : le 28/04/2004 dans l’affaire Gürbüz, le 11/03/2005 dans l’affaire Yıldız Tekin et le 15/09/2004 dans l’affaire Uyan. Cette mesure de suspension s’applique pour une durée illimitée jusqu’à ce que les requérants soient guéris du syndrome de Wernicke-Korsakoff (guérison devant être attestée par un rapport médical), et soient ainsi en mesure de purger leur peine d’emprisonnement. Par conséquent, les requérants ne courent plus le risque d’être emprisonné. La requérante, dans l’affaire Günnaz Kuruçay est en fuite et sa condamnation est toujours valide.

De plus, le 24/07/2006, les autorités turques ont indiqué qu’à la suite de l’entrée en vigueur du nouveau Code pénal en juin 2005, les requérants avaient saisi les tribunaux pour bénéficier de la nouvelle législation qui prévoit des sanctions inférieures à celles qui leur ont été imposées.

Le 21/08/2007, les autorités ont informé le Secrétariat de ce que le 10e Cour d’assise d’Istanbul avait pris une nouvelle décision concernant l’exécution de la sentence de M Tekin Yıldız. La Cour a décidé qu’au vu de la durée de sa détention antérieure, le requérant avait exécuté la totalité de sa peine. Pour cette raison, le requérant ne peut pas faire l’objet d’un mandat d’arrêt ou être emprisonné.

Evaluation : Dans ces circonstances, aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.


Mesures de caractère général : A la lumière des conclusions de la mission d’enquête de la Cour européenne en Turquie concernant 53 affaires similaires, la Cour a estimé devoir indiquer au gouvernement les mesures qui lui semblaient aptes à pallier certains problèmes relevés dans ces affaires, ceci pour l’aider ce dernier à remplir ses obligations au titre de l’article 46 de la Convention. Selon la Cour, le problème majeur est surtout lié à la pratique des magistrats consistant à délivrer des mandats impliquant l’arrestation d’une personne condamnée, mais qui bénéficie d’une libération provisoire pour motif médical. Il ressort des dossiers que de telles mesures ont été prises dans l’un ou l’autre des trois cas suivants : (i) lorsqu’il fallait faire réexaminer l’intéressé par l’institut médico-légal (par exemple, l’affaire Uyan), (ii) lorsqu’il fallait évaluer la situation de l’intéressé à l’expiration du délai de sursis qui lui avait été accordé, ou bien (iii) lorsqu’il fallait procéder à la réincarcération de l’intéressé, suite à un rapport médico-légal ultérieur et défavorable de l’institut médicolégal (par exemple, l’affaire Gürbüz).

Or, dans les deux premiers cas, le but recherché pouvait être atteint au moyen d’invitations judiciaires ou de mandats à comparaître qui sont des possibilités prévues par le code pénal. S’agissant du troisième cas, la Cour observe une lacune procédurale. En effet, d’après l’article 15 de la loi no 2659 sur l’institut médico-légal, seul un procureur ou un juge est autorisé à remettre en cause les conclusions d’un rapport d’expertise devant la chambre plénière de l’institut.

Informations fournies par les autorités turques (24/07/2006) :

La loi sur l’exécution des peines et les mesures de sûreté (loi n° 5275) prévoit que les prisonniers qui refusent de s’alimenter quel qu’en soit le motif, doivent être informés par les médecins de la prison des dangers qu’ils encourent aussi bien sur le plan physique que psychologique. Les services sociaux doivent s’assurer que les prisonniers ne soient pas encouragés à refuser de s’alimenter. En cas de refus persistant, leur régime alimentaire doit être déterminé par les médecins de la prison. Les prisonniers qui persistent à refusent de s’alimenter et dont la santé se détériore doivent être pris en charge par le personnel médical de la prison ou hospitalisés le cas échéant, y compris contre leur gré si leur vie est en danger.

En tout état de cause, toutes les mesures indiquées visant à la protection de la santé des prisonniers doivent être prises sous le contrôle du personnel médical.

Evaluation : Les informations fournies par les autorités turques semblent utiles dans la mesure où elles montrent que le droit turc contient désormais des garanties supplémentaires pour la protection de la santé des prisonniers, en particulier ceux qui décident de faire une grève de la faim.

Des informations sont attendues néanmoins sur la question de savoir si la pratique d’émettre des mandats d’arrêt à l’encontre de personnes condamnées mais libérées pour raisons de santé est toujours suivie.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations complémentaires à fournir concernant les mesures générales.

46827/99          Mamatkulov et Askarov, arrêt du 04/02/2005 - Grande Chambre

L'affaire concerne l'extradition des requérants le 27/03/1999 vers l'Ouzbékistan à la suite d'un décret pris par le Conseil des Ministres turcs le 27/03/1999, ceci malgré la demande de mesures provisoires formulée par la Cour européenne (article 39 du règlement de la Cour) indiquant le 18/03/1999 au Gouvernement turc qu'« il serait souhaitable, dans l'intérêt des parties et du bon déroulement de la procédure devant la Cour, de ne pas extrader les requérants vers la République d'Ouzbékistan avant la réunion de la chambre compétente, soit le 23 mars, afin que la Cour ait la possibilité d'examiner la requête des requérants ». Les requérants qui étaient soupçonnés en Ouzbékistan d'homicide et de tentative d'attentat contre le président de la République, ont été déclarés coupables par les cours ouzbeks qui les ont condamnés à des peines d'emprisonnement respectivement de 20 ans et 11 ans.

Dans l'attente de leur extradition, les requérants ont allégué auprès de la Cour européenne qu'il existait des motifs sérieux de croire qu'ils subiraient des traitements contraires à l'article 3. Ils se sont plaints en outre de l'iniquité de la procédure d'extradition suivie en Turquie ainsi que de la procédure pénale diligentée à leur encontre en Ouzbékistan, en invoquant l'article 6.

Le 19/04/1999 le Gouvernement turc a informé la Cour de ce qu'il avait obtenu des garanties des autorités ouzbeks qu'il n'y aurait pas de confiscation générale des biens des requérants et que ces derniers ne seraient pas soumis à des actes de torture ou condamnés à la peine capitale. Les autorités ouzbeks ont noté en outre que la République d'Ouzbékistan était partie à la Convention des Nations Unies contre la torture et qu'elle acceptait et réaffirmait son obligation de respecter les exigences des dispositions de cette Convention.

La Cour européenne, rappelant que les Etats contractants s'engagent à s'abstenir de tout acte ou à se garder de toute omission qui entraverait l'exercice effectif du droit de recours d'un requérant, a conclu que l'inobservation des mesures provisoires par un Etat contractant doit être considérée comme empêchant la Cour d'examiner efficacement le grief du requérant et entravant l'exercice efficace de son droit (violation de l'article 34). La Cour a également conclu qu'elle n'avait pu évaluer les plaintes des requérants au titre des articles 3 et 6 de la Convention en raison du non-respect par la Turquie de l'indication donnée en vertu de l'article 34.


Mesures de caractère individuel : Cette affaire soulève la question générale de savoir dans quelle mesure l'Etat défendeur peut et devrait rectifier les conséquences de son non-respect des mesures provisoires ordonnées par la Cour, étant donné en particulier que ce non-respect a eu pour conséquence l'impossibilité pour la Cour de se prononcer sur le bien-fondé des plaintes des requérants. Cette question est d'autant plus pertinente à la lumière de la nouvelle conclusion de la Cour selon laquelle le non-respect des mesures provisoires entraîne une violation de la Convention.

Lors de la 922e réunion (avril 2005) les autorités turques ont informé le Comité de ce que l'ambassadeur de la Turquie en Ouzbékistan suivait la situation des requérants et que le Comité serait informé de tout nouveau développement.

Paiement de la satisfaction équitable : Les autorités turques ont payé le montant de la satisfaction équitable octroyée par la Cour européenne sur un compte bloqué car les requérants n'ont pas fourni de procuration valide aux autorités (un des requérants avait utilisé un faux nom basé sur un faux passeport et le nom de l’autre requérant n'était pas orthographié correctement). Par lettre du 09/03/2007, les représentants des requérants ont informé le Secrétariat qu'ils n'étaient pas en mesure de retirer l'argent du compte en question car ils ne pouvaient rencontrer leurs clients en Ouzbékistan pour des raisons de sécurité. Cette lettre a été transmise aux autorités turques le 13/03/2007. Cependant, aucune réponse n'a été reçue à ce jour. Le 30/10/2007, le Secrétariat a demandé aux autorités turques si elles pouvaient obtenir des déclarations des requérants, désignant des personnes qui pourraient soit retirer les sommes déposées sur le compte bloqué soit fournir des procurations valides au nom des représentants des requérants en Turquie pour qu’ils puissent retirer ces sommes.

Des informations sont attendues en écrit sur la question de savoir si les autorités turques peuvent envisager cette option.

Mesures de caractère général :

Des informations sont attendues sur les mesures envisagées, législatives ou autres, visant à assurer que toutes les autorités compétentes respectent à l'avenir leur obligation en vertu de la Convention de se conformer aux décisions de la Cour imposant des mesures provisoires, permettant ainsi l'exercice effectif du droit de recours individuel en vertu de l'article 34.

Dans ce contexte, il convient d'attirer l'attention des autorités sur les Résolutions ResDH(2001)66 et ResDH(2006)45 du Comité soulignant que le principe de coopération avec la Cour, contenu dans la Convention, revêt une importance fondamentale pour le fonctionnement correct et efficace du système établi en vertu de la Convention, et appelant les gouvernements des Etats contractants à s'assurer que les autorités compétentes se conforment strictement à cette obligation.

Des informations sont également attendues sur la publication et la diffusion large de l'arrêt de la Cour européenne, en particulier au Conseil des Ministres et à toutes les autres autorités concernées.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire, ainsi que sur les mesures générales.

                       - Affaires concernant la non-exécution de décisions judiciaires dans des affaires relatives à la protection de l’environnement

1) 46117/99      Taşkın et autres, arrêt du 10/11/2004, définitif le 30/03/2005, rectifié le 01/02/2005

2) 46771/99      Öçkan et autres, arrêt du 28/03/2006, définitif le 13/09/2006

3) 17381/02      Lemke, arrêt du 05/06/2007, définitif le 05/09/2007

4) 36220/97      Okyay Ahmet et autres, arrêt du 12/07/2005, définitif le 12/10/2005 - Résolution intérimaire CM/ResDH(2007)4

1) 2) et 3) Affaires Taşkin et autres, Ökçan et autres et Lemke : Ces affaires concernent la violation du droit des requérants au respect de leur vie privée et familiale et droit à un procès équitable en raison des décisions des autorités administratives de permettre à Bergama la poursuite d'une exploitation de mine d'or par traitement au cyanure de sodium, contrairement à la décision du Conseil d'Etat du 13/05/1997. En effet, le Conseil d'Etat avait annulé le permis d'exploitation en raison des risques posés par le cyanure de sodium sur l'écosystème local et sur la santé et sécurité humaine.

En 1994, le Ministère de l'environnement avait octroyé une autorisation d'exploitation de cette mine et avait autorisé le recours à la technique de lessivage de l'or au cyanure, à la suite d'une consultation publique préliminaire et sur la base d'un rapport d'évaluation de l'impact sur l'environnement conformément à la loi sur l'environnement.

Suite à la décision du Conseil d'Etat de mai 1997, un rapport préparé à la demande du Premier ministre avait conclu que les risques sur l'écosystème énoncés par le Conseil d'Etat avaient été ramenés à un niveau inférieur aux limites acceptables. Sur la base de ce rapport, les autorités ont provisoirement autorisé la poursuite de l'exploitation ainsi que la technique de lessivage au cyanure. Les juridictions ont néanmoins invalidé le report et ont imposé le sursis à exécution des décisions administratives prises sur la base de ce rapport.


Par une « décision de principe » qui n'a pas été rendue publique, le Conseil des ministres a décidé que la mine d'or pouvait poursuivre ses activités. En mars 2004, le Conseil d'Etat a ordonné le sursis à exécution de cette décision dans la mesure où elle n'avait pas été publiée au Journal Officiel ni rendue publique. Un recours en annulation concernant la décision du Conseil des ministres est pendant devant le Conseil d'Etat.

La Cour européenne a estimé que le Gouvernement avait failli à son obligation de garantir le droit des requérants au respect de leur vie privée familiale et leur droit à un procès équitable en privant de tout effet utile les garanties procédurales dont ces derniers disposaient en vertu de la législation applicable et des décisions judiciaires rendue. A cet égard, la Cour s'est basée en particulier sur le fait que les autorités administratives n'avaient pas ordonné immédiatement la fermeture de la mine après l'arrêt du Conseil d'Etat et avaient continué d'octroyer des permis d'exploitation en dépit des décisions judiciaires rendues et de la législation applicable, avec en dernière date la décision du Conseil des ministres (violation de l'article 8).

La Cour européenne a également constaté que le refus de l'administration de se conformer à l'arrêt du Conseil d'Etat, dans les délais prévus par la législation applicable et le fait qu'un nouveau permis d'exploitation avait été délivré en conséquence immédiate de l'intervention du Conseil des Ministres équivalaient à contourner une décision de justice et avaient porté atteinte au droit des requérants à une protection judiciaire effective (violation de l'article 6§1).

Mesures de caractère individuel : Les requérants ont indiqué au Secrétariat que le 26/08/2004, le Ministère de l'environnement avait octroyé un nouveau permis à la même société privée. Dans l'intervalle, les requérants dans ces affaires, ainsi que plus de 1 500 autres requérants, ont introduit des requêtes devant la Cour européenne en se plaignant d'une violation des articles 2, 6 et 13 de la Convention du fait de la reprise des activités de la mine à Bergama.

            - Octroi d'un nouveau permis :

• Informations soumises par les autorités turques (933e réunion (juillet 2005) et courrier du 11/07/2007) : Les autorités turques ont indiqué au Comité que le permis en question octroyé par le Ministère de l'environnement était basé sur un nouveau rapport d'évaluation de l'impact sur l'environnement afin d'éliminer le danger possible de l'exploitation de la mine d'or, rapport daté du même jour.

Le 14/09/2005 les autorités turques ont indiqué que le Tribunal administratif d'Izmir avait décidé le 14/03/2005 de surseoir à l'exécution de la décision octroyant un nouveau permis. Cette décision a été annulée par le Tribunal Régional d'Izmir le 14/04/2005 à la suite d'un appel interjeté par l'entreprise minière.

Dans le contexte de ces procédures trois experts se sont rendus sur place le 27/11/2006 et un rapport technique a été préparé le 26/03/2007 pour évaluer si le fonctionnement de la mine respectait les standards de protection de l'environnement depuis l'obtention du nouveau permis sur la base du nouveau rapport d'évaluation de l'impact sur l'environnement.

Selon ce rapport technique :

- le nouveau rapport d'évaluation de l'impact sur l'environnement, soumis en 2004 à la société minière par les autorités, est suffisamment détaillé pour couvrir toutes les questions relatives aux risques éventuels dans le fonctionnement de la mine ;

- les procédés d'extraction et d'épuration sont appliqués en conformité avec les méthodes les plus avancées reconnues en la matière ;

- la mise en œuvre du projet et sa surveillance sont pleinement compatibles avec les exigences techniques et juridiques ;

- pour éviter toute fuite de matériaux dangereux, les déchets sont isolés du sol par le biais d'une couche spéciale et les eaux souterraines sont analysées.

Les trois experts ont également recommandé que les vérifications les plus strictes soient effectuées sur les eaux souterraines et que la couche d'isolation des déchets soit renouvelée à l'avenir pour éviter toute fuite.

Les autorités turques ont souligné que le rapport des experts jouerait un rôle décisif dans le cadre d'un certain nombre d'affaires pendantes devant les juridictions administratives, y compris les procédures en question dans ces affaires.

Le 13/04/2007, le Ministère de l'environnement a informé la Cour administrative d'Izmir de ce que la compagnie minière s'était engagée à effectuer les vérifications nécessaires dans la zone minière pendant une période de dix ans. Au vu de l'évaluation qui sera faite par les autorités à l'issue de ces dix ans, la compagnie minière pourrait être appelée à continuer les vérifications pour une période de temps illimitée.

Le 09/05/2007, la Cour administrative d'Izmir a rejeté la demande de sursis à exécution à l'égard de la décision d'octroyer un nouveau permis, demande formulée par les requérants.

Le représentant des requérants a indiqué le 17/03/08 que le tribunal administratif d'Izmir avait rejeté le 12/12/07 la contestation des requérants à l’égard du nouveau permis d’exploitation. Le tribunal aurait basé sa décision sur le fait que les trois experts désignés par ce tribunal avaient estimé suffisants le « rapport d’évaluation de la situation écologique » et les mesures prises. Les requérants ont fait appel de cette décision en faisant valoir que le « rapport d’évaluation de la situation écologique », à la base du nouveau permis d’exploitation, était dépourvue de base juridique. Les requérants ont indiqué qu'un récent arrêt de la 6e Chambre de la Cour Administrative Suprême (Conseil d’Etat) le 31/10/07 avait annulé l'article 6 provisoire du Règlement sur l'Etude d'Impact Environnemental, qui prévoyait ce rapport d’évaluation de la situation écologique. L’appel est en cours.


            - Annulation du plan d'urbanisme pour la zone minière :

Le 21/04/2006, la Cour administrative d'Izmir a annulé le plan d'urbanisme réalisé le 01/11/2004 pour la zone minière.

Le 20/05/2006, le Bureau du Gouverneur d'Izmir a saisi la Cour suprême administrative en vue de l'annulation de la décision du 21/04/2006 et a demandé le sursis à exécution de cette décision.

Le 08/06/2006, le Bureau du Gouverneur d'Izmir a informé les autorités concernées (y compris le Gouverneur du District de Bergama et la compagnie minière) de la décision de la Cour administrative d'Izmir du 21/04/2006 et a demandé la mise en œuvre de la décision de cette juridiction.

Le 11/07/2006 le Gouverneur d'Izmir a demandé la rectification de la décision de Cour administrative d'Izmir du 21/04/2006 au motif de l'absence de clarté sur la question de savoir si la décision la décision d'annulation entraînait l'obligation pour l'administration d'annuler également le permis de construire, la démolition du site minier et la fermeture de la mine.

Le 14/07/2006, la Cour administrative d'Izmir a rejeté la demande de rectification au motif que la décision était suffisamment claire pour permettre sa mise en œuvre.

En juillet 2006, le Gouverneur d'Izmir a écrit au Bureau du Premier ministre en vue d'une saisine du Conseil d'Etat pour clarifier la question de savoir si la mise en œuvre de la décision du 21/04/2006 entraînait l'annulation du permis de construire, la démolition des bâtiments miniers et la fermeture de la mine.

Le 23/05/2007 le Conseil d'Etat a confirmé la décision de la Cour administrative d'Izmir du 21/04/2006 d'annulation du plan d'urbanisme pour la zone minière.

Des informations sont attendues en premier lieu sur l'issue de l’appel de la décision de la Cour administratif d’Izmir du 12/12/07 rejetant l'annulation du nouveau permis. Des informations sont également attendues sur la manière dont les autorités vont mettre en œuvre la décision de la Cour administrative d'Izmir du 21/04/2006. Enfin, des informations sont attendues sur la question de savoir dans quelle mesure les requérants ou les individus concernés ont été impliqués dans le processus décisionnel relatif au rapport de l'impact sur environnement (voir §§ 118 et 119 de l'arrêt de la Cour).

Mesures de caractère général : Voir ci-dessous.

4) Affaire Okyay Ahmet : L'affaire concerne la non-exécution par les autorités nationales de décisions judiciaires ordonnant la fermeture de centrales thermiques, sources de pollution environnementale dans la province de Muğla, au sud ouest de la Turquie. Les autorités administratives n'ont pas respecté l'ordonnance de référé adoptée en juin 1996 en vue de la suspension des activités des centrales. Elles n'ont pas davantage mis en œuvre, dans les délais fixés, les décisions de la Cour suprême administrative de décembre 1996 confirmant les arrêts des juridictions de première instance selon lesquels les centrales thermiques polluaient l'environnement. Bien au contraire, en septembre 1996, le Conseil des Ministres a décidé que les trois centrales thermiques devaient continuer à fonctionner en dépit des décisions judiciaires.

La Cour européenne a constaté que les autorités nationales n'avaient pas mis en œuvre dans un délai raisonnable les décisions judiciaires. Elle a estimé en particulier que la décision du Conseil des Ministres, dépourvue de base légale et manifestement illégale en droit interne, visait à contourner les décisions judiciaires. Elle a estimé par conséquent que cette décision portait atteinte aux principes de l'Etat de droit tels que la prééminence du droit et de la sécurité juridique (violation de l'article 6§1).

Mesures de caractère individuel : Lors de la 955e réunion (février 2006) ainsi que dans leur réponse du 09/03/2006 à la lettre de phase initiale du Secrétariat, la délégation de la Turquie a informé le Comité de ce que des systèmes de filtrage (désulfurisation) étaient en voie d'installation dans les trois centrales. Les centrales fonctionnent à un régime minimal en vue de maintenir les émissions de gaz à un faible niveau. Les niveaux d'émission sont contrôlés régulièrement et les centrales seront fermées si les émissions de gaz dépassent les niveaux autorisés.

Le 25/10/2006, les autorités turques ont indiqué au Secrétariat que la centrale de Yatağan avait été condamnée à un certain nombre d'amendes administratives en raison de la pollution qu'elle avait causée. Quatre de ces amendes ont été infligées respectivement en février, juin, juillet et août 2006. Les autorités turques ont également donné des informations sur les procédures en indemnisation introduites à l'encontre des 3 centrales au titre du préjudice occasionné par la pollution des centrales.

Résolution intérimaire CM/ResDH(2007)4 : En raison de l'absence de progrès dans l'exécution de cette affaire, les Délégués ont adopté une résolution intérimaire lors de leur 987e réunion (février 2007) invitant instamment les autorités turques à exécuter sans plus attendre l'ordonnance judiciaire imposant soit la fermeture des usines soit l'installation de système de filtrage nécessaire.

Réponse à la Résolution intérimaire : Lors de la 1020e réunion (mars 2008) les autorités turques ont indiqué que des mécanismes de filtrage avaient été installés dans toutes les trois centrales. Jusqu'à l’installation de ces mécanismes, les usines avaient fonctionné à capacité réduite sans mettre en danger l'environnement.

Evaluation : A la lumière de cette information, aucune autre mesure individuelle n’est nécessaire dans l’affaire Ahmet Okyay.


Mesures de caractère général concernant les quatre affaires :

Informations fournies par les autorités turques : Elles ont attiré l'attention du Comité sur l'article 138 de la Constitution et ont à nouveau indiqué que le pouvoir exécutif et les autorités devaient respecter les décisions judiciaires.

De plus l'article 28§3 de la loi sur les procédures judiciaires administratives prévoit la possibilité de saisir le Conseil d'Etat de demandes en dommages et intérêts à l'encontre de l'administration ou de fonctionnaires en cas de refus délibérément de respecter des décisions judiciaires. A cet égard, les autorités turques ont également fourni des exemples de jurisprudence du Conseil d'Etat. Enfin, les autorités turques ont fourni des informations sur les dispositions relatives aux sanctions pénales à l'encontre des agents de l'Etat refusant d'exécuter leurs obligations ou des décisions judiciaires, ainsi que des exemples de jurisprudence en la matière.

Dans leur lettre du 11/07/2007, les autorités turques on attiré l'attention sur les articles 181 et 182 du Code pénal (en vigueur depuis le 01/06/2007) lesquels sanctionnent la mise au rebut de substances dangereuses d'une manière polluante, avec ou sans élément d'intentionnalité. Toute personne jetant des substances dangereuses encourt une peine d'emprisonnement allant de 6 mois à deux ans. Le Code prévoit également la possibilité d'infliger une peine d'emprisonnement plus importante si le rejet des substances dangereuses occasionne des dégâts permanents à la santé des hommes et à l'environnement.

Les arrêts de la Cour européenne ont été traduits et diffusés. Ils sont également accessibles depuis le site Internet du Ministère de la Justice http://www.inhak-bb.adalet.gov.tr/aihm/aihmtkliste.asp

Enfin, lors de la 1020e réunion (mars 2008), les Délégués ont pris note des informations fournies par les autorités turques au sujet de la nouvelle disposition de la loi sur l'environnement qui assure la participation des personnes, telles que les habitants de zones pertinentes, des institutions de la société civile etc, dans le processus décisionnel relatif aux questions d'environnement, ainsi que de l'introduction récente de la responsabilité pénale pour mise au rebut de substances dangereuses. Les Délégués ont noté également que les autorités turques se pencherait, en coopération avec le Secrétariat, sur la question de la nécessité de mesures générales complémentaires.

Evaluation des informations fournies par les autorités turques : La législation applicable (en particulier l’article 138 de la Constitution et l’article 28§3 de la loi sur les procédures judiciaires administratives) ainsi que les exemples de sanctions judiciaires attestent du cadre juridique approprié en matière d’exécutions judiciaires relatives à l’environnement. En outre, les sanctions législatives, récemment promulguées, à l’encontre des pollueurs constituent également des développements positifs. Cependant, ces garanties procédurales peuvent s’avérer inefficaces en cas de non-respect à un haut niveau politique, ainsi que critiqué par la Cour européenne dans ces affaires. Par conséquent, les autorités pourraient souhaiter attirer l'attention du Conseil des ministres et du Ministère de l'environnement sur leurs obligations en vertu de la Convention en vue d'éviter de nouvelles violations similaires. Des informations sont également attendues sur la réaction de ces autorités face à ces deux affaires ainsi que sur les éventuelles mesures envisagées ou adoptées.

Les Délégués :

1.             invitent les autorités, dans les affaires Taşkin et autres, Öçkan et autres et Lemke, à prendre toutes les mesures individuelles requises, prenant en compte :

- l'issue de la procédure en annulation du nouveau permis d'exploitation de la mine d'or, et soulignant dans ce contexte l'importance de conclure rapidement ces procédures pendantes,

- les conséquences découlant de l'annulation du plan d'urbanisme pour la zone où la mine d'or est située ;

2.             décident de reprendre l'examen de ces affaires lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations complémentaires à fournir sur :

(a) les mesures individuelles, à savoir, à la lumière de l’issue de l’appel formé contre la décision de la Cour administrative d'Izmir du 12/12/07 (dans les affaires Taşkın et autres, Öçkan et autres et Lemke) ;

(b) la possibilité de mesures générales complémentaires, en particulier pour prévenir de manière plus efficace la non-exécution des décisions judiciaires internes dans le domaine de la législation sur l'environnement (dans toutes ces affaires) ; et

(c) le paiement de la satisfaction équitable dans l'affaire Öçkan et autres, si nécessaire.

29986/96          A.D., arrêt du 22/12/2005, définitif le 22/03/2006

Cette affaire concerne la mise aux arrêts du requérant, infligée en 1994 par un lieutenant-colonel pour désobéissance militaire alors que le requérant servait dans les forces armées en qualité de sergent. La mise aux arrêts et la détention du requérant pendant 21 jours ont été ordonnées en vertu de l’article 171 du code pénal militaire qui autorise les lieutenants colonels à ordonner de telles sanctions disciplinaires en cas de désobéissance militaire. Le recours du requérant a été rejeté au motif qu’en vertu de l’article 21 de la loi sur la Cour suprême militaire administrative (loi n° 1602), de telles sanctions disciplinaires ne peuvent faire l’objet d’un recours judiciaire.


La Cour européenne a constaté que le requérant avait été privé de sa liberté en exécution d’une décision ordonnée par son supérieur militaire. Elle a relevé que ce dernier exerçait son autorité dans la hiérarchie militaire, relevait d’autres autorités supérieures et ne jouissait donc pas d’indépendance par rapport à elles. Rappelant que les privations de liberté doivent résulter d’un tribunal compétent présentant les garanties judiciaires, la Cour a conclu que la procédure disciplinaire devant le supérieur militaire ne fournissait pas les garanties judiciaires requises (violation de l’article 5§1a).

Mesures de caractère général:

Informations fournies par les autorités turques : Dans leur réponse du 27/09/2006 à la lettre de phase initiale du Secrétariat du 06/06/2006, les autorités turques ont donné les informations suivantes :

1. L’article 171 du Code militaire a été amendé le 26/03/2006 pour ramener la peine de 21 à 7 jours de détention en cas de désobéissance.

2. L’arrêt de la Cour européenne a été traduit en turc et diffusé aux autorités compétentes. La traduction turque de l’arrêt est par ailleurs accessible sur le site de la Cour de cassation (http://www.yargitay.gov.tr/aihm/pdf/29986_98pdf).

Lors de la 1013e réunion (décembre 2007) les autorités turques ont indiqué qu’un amendement avait été proposé au Code pénal militaire en vue de modifier l’article 171.

Des informations sont attendues sur les progrès accomplis dans l’adoption de ce projet de loi.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures de caractère général.

47533/99           Ergin n° 6, arrêt du 04/05/2006, définitif le 04/08/2006

56827/00           Düzgören, arrêt du 09/11/2006, définitif le 09/02/2007

65344/01           Onaran, arrêt du 05/06/2007, définitif le 05/09/2007

L’affaire Ergin n° 6 concerne la violation du droit du requérant à sa liberté d’expression en raison de sa condamnation pénale, par un tribunal militaire, à une amende, en 1999, en vertu de l’article 155 de l’ancien code pénal, pour avoir publié, en tant que rédacteur en chef d’un journal, des propos qui furent considérés comme incitant autrui à se soustraire au service militaire qui est obligatoire en Turquie. De la même façon, les affaires Düzgören et Onaran concernent la condamnation des requérants par des juridictions militaires pour avoir distribué des tracts en faveur de l’objection de conscience.

A cet égard, la Cour européenne, ayant pris note du fait que les actions des requérants n’incitaient pas à la haine ou à la violence et qu’elles ne visaient pas à provoquer une désertion immédiate, a conclu que les condamnations n’était pas « nécessaires dans une société démocratique » (violations de l’article 10).

En outre, vu que les requérants, en tant que civils, avaient été jugés par des juridictions militaires, entièrement composées de militaires, la Cour européenne a conclu que ces juridictions ne pouvaient passer pour des juridictions indépendantes et impartiales (violations de l’article 6§1).

Mesures de caractère individuel:

            1) Affaire Ergin n° 6 : le Secrétariat a reçu la confirmation de l’effacement de la condamnation pénale du casier judiciaire du requérant.

            2) Affaires Düzgören et Onaran:

Confirmation est attendue de l'effacement de toutes les conséquences de la violation constatée est attendue, et en particulier la suppression de la condamnation des requérants de leur casier judiciaire.

Mesures de caractère général : Le Secrétariat a adressé le 11/10/2006 un courrier aux autorités turques, les invitant à présenter un plan d’action pour l’exécution de l’affaire Ergin n° 6. Les autorités ont adressé un plan d’action le 12/01/2007.

            1) Violation de l’article 10 : Un nouveau code pénal a été adopté en juin 2005, mais il ne semble pas avoir dépénalisé l’expression non violente d’opinions sur l’objection de conscience. Inciter autrui à se soustraire au service militaire est toujours prévu comme une infraction à l’article 318 du nouveau Code pénal, même si cet article a ajouté un élément actif selon lequel pour qu’il y ait infraction, il faut que l’incitation soit de nature à permettre d’aboutir au résultat escompté. Pourtant, cet article ne semble pas considérer nécessaire l’existence des éléments indiqués par la Cour européenne, à savoir, « incitation à la haine ou à la violence » et « viser à provoquer une désertion immédiate ». Il est a noter en outre que le §34 de l’arrêt a souligné le fait que l’article litigieux dans l’affaire Ergin n° 6 avait été publié dans un journal et était destiné à un large public. Selon la Cour, l’article ne pouvait dès lors pas être considéré comme une provocation à la désertion immédiate. L’alinéa 2 de l’article 318, au contraire, considère l’incitation commise par voie de presse comme un facteur aggravant.

Par conséquent, des informations sont attendues sur les changements législatifs requis ainsi que toutes autres mesures générales prises ou envisagées par les autorités turques afin de mettre en conformité avec la Convention les dispositions pertinentes.


Par ailleurs, les arrêts de la Cour européenne ont été traduits et diffusés avec une circulaire à l’attention des instances judiciaires pour que les juridictions concernées puissent prendre en compte les exigences de la Convention lorsqu’elles appliquent la législation interne relative à l’incitation à se soustraire au service militaire.

            2)Violation de l'article 6§1 : depuis l’entrée en vigueur en juillet 2003 de la loi n° 4963 (soit postérieurement aux faits à l’origine de ces affaires), les tribunaux militaires ne peuvent plus juger des civils accusés en vertu de l’ancien article 155 du code pénal. Une nouvelle loi (n° 5530), entrée en vigueur le 5/07/2006, a ultérieurement restreint la compétence des tribunaux militaires à l’égard des civils.

Il apparaît que désormais une seule exception subsiste (ainsi que décrite dans le Code pénal militaire à la différence du Code pénal général) qualifiée d’infraction militaire commise par un civil avec la complicité d’un militaire (article 12 de la loi n° 363 telle qu’amendée par la loi n° 5530).

Evaluation : Concernant le jugement des civils par les tribunaux militaires, les mesures ci-dessus semblent suffisantes.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

- Affaires concernant l’indépendance et l’impartialité des tribunaux militaires disciplinaires

39429/98           Bayrak, arrêt du 03/05/2007, définitif le 24/09/2007

27341/02           Veyisoğlu, arrêt du 26/06/2007, définitif le 26/09/2007

Ces affaires concernent le défaut d'indépendance et d'impartialité des tribunaux disciplinaires militaires dans le cadre de procédures disciplinaires diligentées contre les requérants en vertu des articles 56 et 38 de la loi n° 477 (violations de l'article 6§1). Les requérants ont été condamnés respectivement à des peines d'emprisonnement de 75 jours et 40 jours.

La Cour européenne a constaté que les membres du tribunal étaient tous placés sous les ordres de la hiérarchie militaire et que la durée de leur mandat était limitée à 1 an. En outre, elle a constatédans l'arrêt İrfan Bayrak que le tribunal supérieur (d'appel) n'offrait pas de garanties propres à remédier à ces lacunes.

Mesures de caractère individuel : Les requérants ne sont plus détenus.

Mesures de caractère général : Le 13/02/2008, les autorités turques ont indiqué que les travaux préparatoires se poursuivaient en vue d’adopter les mesures nécessaires.

Des informations sont attendues sur les mesures prises en vue de prévenir de nouvelles violations similaires.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ces points au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

                       - 71 affaires concernant la liberté d’expression

                       Résolutions intérimaires ResDH(2001)106 et ResDH(2004)38; CM/Inf/DH(2003)43

                       (Voir Annexe pour la liste d’affaires dans le groupe Inçal)

                       CM/Inf/DH(2008)26

Toutes ces affaires concernent des ingérences injustifiées dans la liberté d’expression des requérants, notamment en raison de leur condamnation par des cours de sûreté de l’Etat à la suite de la publication d’articles et de livres ou de la préparation de messages destinés au public (condamnations en vertu des anciens articles 159 et 312 du Code pénal et des anciens articles 6 et 8 de la loi sur la lutte contre le terrorisme).

Dans l’affaire Özgür Gündem, la Cour européenne a également conclu que l'opération de perquisition telle qu'elle avait été menée dans les locaux du journal du requérant n’avait pas été nécessaire dans une société démocratique, et que le gouvernement défendeur avait manqué à son obligation positive de protéger la liberté d’expression du journal du requérant. En outre, les affaires Alinak, Öztürk Ayşe et Çetin et autres concernent spécifiquement la saisie de publications (violations de l’article 10)[21].

Mesures de caractère individuel : Depuis juin 1998, la nécessité d’adopter des mesures d’ordre individuel a été constamment soulignée au sein du Comité. Le 23/07/2001, le Comité des Ministres a adopté la Résolution intérimaire ResDH(2001)106 (voir Cm/Inf/DH(2003)43). De plus ont été régulièrement demandées des informations mises à jour sur la situation actuelle des requérants ainsi que les mesures concrètes de suivi à la Résolution ResDH(2001)106.


Mesures prises : Les autorités turques ont indiqué (voir également CM/Inf/DH(2003)43 et la Résolution intérimaire ResDH(2004)38) que des mesures avaient été prises afin d’assurer l’effacement des condamnations et de leurs conséquences

-               ex officio, pour les affaires concernant des condamnations en vertu de l’article 8 de la loi sur la lutte contre le terrorisme n° 3713, suite à l’abrogation de cette disposition le 19/07/2003 (par la loi n° 4928), ce qui implique également la suppression ex officio de toute mention dans le casier judiciaire (conformément à l’article 8 de la loi sur le casier judiciaire telle qu’amendée par la loi n° 4778 du 02/01/2003) et des éventuelles restrictions aux droits civils et politiques des requérants ;

-               sous certaines conditions, pour les affaires concernant la liberté d’expression en général, (loi n° 4809 de 2003 sur la suspension des procédures et des peines concernant les infractions commises par le biais de la presse).

En outre, la réouverture des procédures internes est possible (sur la base de la loi n° 4793 de 2003) pour toutes les affaires déjà tranchées par la Cour européenne avant le 04/02/2003 et pour toutes les affaires portées devant la Cour européenne après cette date. La réouverture n’est pas possible pour toutes les affaires qui étaient pendantes devant la Cour européenne à la date du 04/02/2003 ainsi que pour les affaires qui se sont conclues par un règlement amiable.

Pour une évaluation détaillée des mesures individuelles prises et des questions en suspens dans ces affaires, ainsi que pour la liste des affaires dans lesquelles confirmation est attendue de l’effacement de toute conséquence des violations, voir le CM/Inf/DH(2007)20 révisé.

Mesures de caractère général : La nécessité d’adapter la législation turque aux exigences de la Convention afin d’éviter de nouvelles violations similaires à celles constatées a été évoquée depuis 1988. L’attention a notamment été attirée sur la nécessité d’évaluer la proportionnalité des restrictions à la liberté d’expression à la lumière de l’existence d’une « incitation à la violence ». En outre, depuis 1999, les autorités turques ont été invitées à introduire un critère général de vérité et d’intérêt public dans la loi sur la lutte contre le terrorisme et à amender ou abroger l’article 6 de cette loi, à réexaminer les peines minimales encourues pour les infractions liées à la liberté d’expression, et à adopter des mesures spécifiques visant à garantir la protection de la liberté d’expression.

Mesures prises : pour une évaluation détaillée des mesures générales adoptées en des questions en suspens dans ces affaires voir CM/Inf/DH(2008)26.

- 9 Règlements amiables concernant la liberté d’expression et impliquant des engagements par le gouvernement turc

                       Résolutions intérimaires ResDH(2001)106 et ResDH(2004)38; CM/Inf/DH(2003)43

                       (Voir Annexe pour la liste d’affaires dans le groupe Inçal)

Ces affaires concernent notamment des allégations d’ingérences non justifiées dans la liberté d’expression des requérants, en raison de leurs condamnations par des Cours de sûreté de l’Etat à la suite de discours publics ou de la publication d’articles, de dessins et de livres (griefs tirés de l’article 10 et 6§1).

La Cour européenne a pris acte des règlements amiables auxquels les parties avaient abouti. Le gouvernement turc s’est engagé à verser des sommes d’argent aux requérants, à opérer toutes les modifications du droit et de la pratique internes nécessaires pour mettre le droit turc en conformité avec les exigences de la Convention en matière de liberté d’expression et à adopter, afin d’effacer rapidement et intégralement les conséquences de la condamnation des requérants, les mesures de caractère individuel visées dans la Résolution intérimaire ResDH(2001)106, du 23/07/2001 (annexée au CM/Inf/DH(2003)43).

Ces affaires sont à rapprocher des affaires de liberté d'expression contre la Turquie ci-dessus.

Mesures de caractère individuel :

Des informations sont attendues sur la situation actuelle des requérants ainsi que sur les mesures envisagées, conformément aux engagements souscrits dans le règlement amiable, afin d’effacer rapidement et intégralement les conséquences des condamnations.

Les informations disponibles concernant la situation du casier judiciaire des requérants apparaissent à l’addendum 4.


Mesures de caractère général : Voir ci-dessus (affaires concernant la liberté d’expression).

Les Délégués,

1.             se félicitent de la circulaire du Ministère de la Justice de mai 2008, adressée aux juges et procureurs, laquelle souligne la pertinence de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme et de l’article 90 de la Constitution turque qui prévoit la primauté de la Convention européenne des droits de l’Homme sur le droit national ;

2.             prennent note des informations fournies par les autorités turques concernant un certain nombre de décisions d’acquittement des juridictions internes, rendues en se limitant à une simple référence à l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’Homme ;

3.             rappellent à cet égard que les exemples fournis ne permettent pas de conclure que les critères utilisés par la Cour européenne, comme l’« incitation à la violence » ou l’« intérêt public », sont utilisés de manière cohérente par les juges et les procureurs, notamment dans les décisions des juridictions supérieures ;

4.             invitent les autorités turques à fournir des informations complémentaires sur l’évolution de la jurisprudence nationale, notamment la jurisprudence des juridictions supérieures, en conformité avec les exigences de la Convention, telles que définies dans les arrêts de la Cour ;

5.             invitent les autorités turques à poursuivre leurs efforts, afin de s’assurer que toutes les conséquences des violations sont éradiquées à l’égard des requérants ;

6.             décident de reprendre l’examen de ces points lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière des informations complémentaires à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire, et au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les progrès dans l’adoption de mesures à caractère général et individuel ;

7.             décident de déclassifier le Mémorandum préparé par le Secrétariat CM/Inf/DH(2008)26.

56566/00          Kaplan Yaşar, arrêt du 24/01/2006, définitif le 24/04/2006

Cette affaire concerne une ingérence injustifiée dans la liberté d’expression du requérant, un journaliste, en raison des poursuites pénales dirigées contre lui, en 1998, en vertu de l’article 95 du code pénal militaire pour avoir publié des articles qui furent considérés par le tribunal militaire porter atteinte à la confiance des troupes dans leurs supérieurs.

Etant donné le haut niveau de protection à accorder à l’expression politique et le fait que les articles du requérant n’insultaient ou ne critiquaient personne en particulier, la Cour européenne a conclu que les poursuites pénales contre le requérant avaient constitué une ingérence disproportionnée dans son droit à la liberté d’expression, d’autant plus qu’il avait également subi 42 jours de détention provisoire (violation de l’article 10).

Mesures de caractère individuel : Conformément à la loi n° 4454 sur le sursis aux procédures et à l’exécution des peines relatives aux infractions commises par la presse, entrée en vigueur le 3/09/1999, la condamnation pénale du requérant a été annulée le 31/12/2003. Toute autre conséquence de la violation est couverte par la satisfaction équitable octroyée par la Cour européenne.

Mesures de caractère général : Cette affaire est à rapprocher, dans une certaine mesure, des autres affaires contre la Turquie concernant des violations de la liberté d’expression (voir le groupe Inçal, rubrique 4.2). Il s’agit cependant de la première affaire mettant en cause l’interprétation du code pénal militaire.

            1) Mesures législatives : Les autorités turques ont indiqué qu’après l’arrêt de la Cour européenne, le Code sur l’établissement et la procédure pénale des tribunaux militaires avait été amendé dans une large mesure le 5/07/2006. L’article 4 des amendements prévoit que la plupart des infractions– y compris celle à l’origine de l’affaire Yasar Kaplan – commises par des civils en temps de paix seront jugées par des juridictions civiles. En outre, l’article 53 des amendements permet de rouvrir des affaires lorsque la Cour européenne a constaté des violations de la Convention européenne par les juridictions militaires.

Evaluation : Les informations fournies sont en train d’être évaluées par le Secrétariat.

            2) Publication et diffusion : L’arrêt de la Cour a été traduit en turque et diffusé aux autorités compétentes, y compris le Ministère turque de la Justice et l’Etat major des armées turques.

La confirmation de la publication est attendue.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

75510/01           Artun et Güvener, arrêt du 26/06/2007, définitif le 26/09/2007, rectifié le 12/11/2007

L’affaire concerne l’atteinte à la liberté d’expression des requérants par voie de presse. Les requérants, journaliste et rédacteur en chef du quotidien Milliyet, ont été condamnés à des peines d’emprisonnement d’un an et quatre mois, sur le fondement de l’article 158 de l’ancien Code pénal, pour avoir dénigré le Président de la République. La peine de Meral Artun a été prononcée avec sursis et celle du rédacteur en chef, commuée en une amende d’environ 1 665 euros.

La Cour européenne a considéré que les restrictions imposées aux requérants n’étaient pas nécessaires dans une société démocratique (violation de l’article 10).


Mesures de caractère individuel : Une satisfaction équitable a été octroyée pour le préjudice moral.

Des informations sont attendues sur l’effacement des conséquences des condamnations des requérants de leur casier judiciaire.

Mesures de caractère général :  

Des informations sont attendues sur les dispositions du nouveau Code pénal relatives aux peines prévues en cas de déclaration diffamatoire à l’égard du chef de l’Etat.

• Le 7/4/2008 les autorités turques ont fourni des informations sur les mesures de caractère général et individuel. Le Secrétariat est en train d’examiner ces informations.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 Décembre 2008) (DH), à la lumière des informations fournies sur les mesures individuelles et générales.

35839/97          Pakdemirli, arrêt du 22/02/2005, définitif le 22/05/2005

Cette affaire concerne le montant disproportionné des dommages et intérêts auxquels le requérant a été condamné dans le cadre d’une procédure en diffamation intentée contre lui (violation de l’article 10). La procédure a été intentée en 1995 à l’encontre du requérant, membre du Parlement et vice-président du parti d’opposition au moment des faits, par le Président de la République en raison d’un discours prononcé par le requérant où ce dernier traitait le Président, entre autres épithètes, de menteur et de calomniateur.

Le Président a demandé une indemnité pour diffamation et insultes à la fois pour le préjudice subi à titre personnel ainsi que dans sa capacité de Président de la République, en vertu de l’article 49 du Code des obligations. En juillet 1995, la cour civile de première instance d’Ankara a ordonné au requérant de payer une somme approximative de 55 000 euros au titre des dommages et intérêts. Suite au rejet de sa requête en appel, le requérant a payé la somme à laquelle il avait été condamné, ce qui correspondait à l’époque, avec les intérêts, à environ 60 000 euros.

La Cour européenne a relevé que les juridictions turques avaient appliqué le critère du « statut socio-économique des parties » prévu à l’article 49 d’une manière qui s’écartait de la pratique habituelle et sans prendre en compte le principe de proportionnalité énoncé à l’article 4 du Code civil, en l’utilisant non pas pour préserver l’équilibre entre les situations respectives des parties, mais pour fixer le montant le plus élevé possible. De plus, dans la détermination du montant de l’indemnité, les juridictions internes se sont basées sur l’absence de procédure pénale diligentée contre le requérant, ce dernier bénéficiant de l’immunité parlementaire, et ont ainsi transformé les dommages et intérêts en une amende civile. Par ailleurs, la détermination du montant de l’amende civile a été faite, non pas à la lumière du préjudice subi par le demandeur, mais de manière à surprotéger le statut du Président de la République.

La Cour européenne a conclu en conséquence que le montant de l’amende à laquelle le requérant avait été condamné ne pouvait pas être considéré comme « nécessaire dans une société démocratique » et qu’il n’était pas proportionné au but poursuivi par la législation nationale.

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a accordé la somme globale de 35 000 euros pour couvrir les préjudices matériel et moral, de manière à compenser le caractère disproportionné de l’amende infligée par les juridictions internes.

Mesures de caractère général :

Des informations sont attendues sur les éventuelles mesures envisagées par les autorités turques pour s’assurer que les juridictions évaluent de manière proportionnée les montants de dommages et intérêts dans le cadre de procédures en diffamation impliquant des personnalités politiques publiques. A priori, la publication et large diffusion de l’arrêt de la Cour européenne semblent être nécessaires.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard à leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

48176/99          Turhan, arrêt du 19/05/2005, définitif le 19/08/2005, rectifié le 30/03/2006

L’affaire concerne une procédure civile en diffamation introduite contre le requérant en 1993 (et définitivement conclue en 1998) par le Ministre d’Etat de l’époque, ce dernier estimant que certaines remarques contenues dans le livre écrit par le requérant portaient atteinte à sa réputation.

La Cour européenne a noté que les remarques contestées s’analysaient en des jugements de valeur, que leur véracité n’était donc pas susceptible de preuve et qu’elles étaient basées sur des informations qui étaient déjà de l’ordre du domaine public. Par conséquent, la Cour européenne a estimé que les juridictions internes n’avaient pas établi de manière convaincante l’existence d’un besoin social impérieux justifiant de faire prévaloir la protection de la réputation d’un personnage public sur la liberté d’expression du requérant. En outre les déclarations du requérant n’avaient affecté ni la carrière politique du Ministre ni sa vie privée (violation de l’article 10).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé une satisfaction équitable au titre du préjudice moral et matériel subi par le requérant, dédommageant ainsi le requérant des dommages et intérêts auxquels il avait été condamné au plan interne.


Mesures de caractère général :

Des informations sont attendues sur les éventuelles mesures envisagées pour remédier aux problèmes soulignés par la Cour européenne (à savoir, l’interprétation des dispositions en matière de diffamation, y compris la distinction entre jugements de valeur et allégations factuelles, dans des affaires impliquant des personnalités publiques). A priori, la publication et large diffusion de l'arrêt de la Cour européenne semblent être nécessaires.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

64178/00+        Özgür Radyo-Ses Radyo Televizyon Yayın Yapım Ve Tanıtım A.Ş., arrêt du 30/03/2006, définitif le 30/06/2006

L’affaire concerne la violation de la liberté d’expression de la partie requérante, une société de radiodiffusion, du fait des avertissements et suspensions du permis de diffusion que le Conseil supérieur de l’audiovisuel turc (RTÜK) lui ont imposées en 1998 et 1999, en vertu des articles 4 a), g) et j) de la Loi sur l’audiovisuel n° 3984, concernant la diffamation et l’incitation à la violence et au séparatisme.

Contrairement au RTÜK et aux juridictions administratives turques, la Cour européenne a conclu que les déclarations en question n’incitaient pas à la violence ou à la haine et couvraient des sujets d’intérêt général. De surcroît, la Cour a pris en considération le fait que la radio requérante avait cité les sources des déclarations, lesquelles avaient déjà été publiées par d’autres media sans faire l’objet de poursuites. Enfin, la Cour a estimé que les sanctions avaient été d’une sévérité disproportionnée, ce qui n’était pas nécessaire dans une société démocratique (violation de l’article 10).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé à la société requérante une satisfaction équitable au titre du préjudice moral subi mais elle n’a pas octroyé de satisfaction équitable au titre du préjudice matériel, la société requérante n’ayant pas soumis d’éléments permettant de le quantifier.

Evaluation : Aucune mesure d’ordre individuel supplémentaire ne semble être nécessaire.

Mesures de caractère général : Cette affaire concerne, pour la première fois, le système audiovisuel turc et l’interprétation de l’article 4 de la loi n° 3984 par le RTÜK et les juridictions administratives.

A la lumière des mesures nombreuses et significatives, législatives ou non, prises au cours des dernières années pour améliorer la liberté d’expression en Turquie (voir le groupe Inçal, rubrique 4.2), des informations sont nécessaires concernant l’impact de ces mesures sur l’application actuelle des dispositions à l’origine de cette affaire.

Informations fournies sur les amendements apportés à la loi sur audiovisuel ainsi qu’aux dispositions relatives aux sanctions, introduits par la loi n° 4756 en mai 2002 : A la lumière de ces amendements la suspension de la licence de diffusion est prévue en dernier recours. La première sanction possible consiste à adresser des avertissements ou en l’obligation pour la société de radiodiffusion de présenter des excuses. Toutefois si la société de radiodiffusion continue de violer les dispositions de la loi sur la radiodiffusion, telles qu’elles sont précisées à l’article 4 de la loi n° 4756, le programme en question peut être suspendu. Si une telle violation est répétée, des amendes administratives peuvent être imposées de manière progressive. Néanmoins ce mécanisme de sanction accrue de manière graduelle ne s’applique pas si la violation concerne les dispositions de l’article 4§2 a), b) et c). Dans ce cas, s’il y a une violation répétitive la radiodiffusion sera suspendue pour une durée indéfinie et la licence de diffusion sera révoquée.

Evaluation : le Secrétariat est en train d’évaluer les informations fournies.

Les autorités ont indiqué que l’arrêt de la Cour avait été traduit et publié sur le site Internet du Ministère de la Justice.

Des informations sont toujours attendues sur la diffusion de l’arrêt de la Cour européenne, accompagné d’une circulaire aux juridictions administratives et au RTÜK.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales.

34797/03           Ulusoy et autres, arrêt du 03/05/2007, définitif le 24/09/2007

L’affaire concerne le refus du préfet d’Ankara d’autoriser la mise en scène d’une pièce de théâtre en langue kurde par décision fondée sur les articles 17 de la loi n° 2911, 8 de la loi n° 3713,11 de la loi n° 5442 et 1 de la loi n° 2559.

La Cour européenne a considéré que le refus fondé sur les dispositions mentionnées ci-dessus n’était pas « nécessaire dans une société démocratique » (violation de l’article 10). La Cour européenne a relevé que le droit turc n’indiquait pas avec assez de clarté l’étendue et les modalités d’exercice du pouvoir d’appréciation des autorités dans le domaine des autorisations préalables et que la législation concernée n’offrait pas de sauvegarde adéquate contre les éventuels abus dans l’application de telles restrictions.

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé une satisfaction équitable pour le préjudice moral.


Evaluation : aucune mesure individuelle supplémentaire ne parait nécessaire.

Mesures de caractère général :

La réponse des autorités est attendue à la lettre phase initiale du Secrétariat du 12/12/2007.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’information à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) à la lumière d’information à fournir sur les mesures générales.

74552/01          Ataman Oya, arrêt du 05/12/2006, définitif le 05/03/2007

L'affaire concerne la violation du droit à la liberté de réunion en raison de la dispersion par les autorités, avec emploi de la force, d'une manifestation illégale mais pacifique, en 2000, à laquelle participaient entre 40 et 50 personnes, y compris la requérante.

La requérante a organisé cette manifestation à Istanbul, consistant en une marche suivie d'une déclaration à la presse, destinée à protester contre un certain plan du gouvernement. Lorsque les manifestants ont refusé de se séparer, la police les a dispersés, empêchant ainsi la déclaration à la presse d'avoir lieu.

La Cour européenne a établi que la réunion était illégale. Cependant, elle a expliqué qu'une situation illégale ne pouvait justifier une atteinte à la liberté de réunion. La Cour a souligné qu'il n'y avait pas lieu de penser que les manifestants représentaient un quelconque danger pour l'ordre public, hormis une éventuelle perturbation de la circulation. Le rassemblement a pris fin avec l'arrestation du groupe, en une demi-heure seulement. La Cour a été particulièrement frappée par l'impatience manifestée par les autorités pour mettre fin à la manifestation organisée sous l'autorité d'une association de droits de l'homme. De l'avis de la Cour, il est important que les autorités publiques fassent preuve d'un certain degré de tolérance à l'égard de rassemblements pacifiques lorsque les manifestants ne commettent pas d'actes de violence. Dans ces circonstances, la Cour a considéré que l'emploi de la force par la police était disproportionné et n'était pas nécessaire à la prévention de troubles (violation de l'article 11).

Mesures de caractère individuel : Etant donné les circonstances de l'affaire, aucune mesure de caractère individuel ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général : Le 21/04/08 les autorités ont soumis des informations qui sont en cours d’évaluation par le Secrétariat.

L’arrêt de la Cour européenne a été publié et diffusé. L’arrêt a également été placé sur le site Internet du Ministère de la Justice à www.inhak-bb.adalet.gov.tr/aihm/karar/oyaataman10032008.doc ainsi que sur celui de la Cour de Cassation : www.yargitay.gov.tr/aihm/upload/74552-01.pdf.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière des informations fournies sur les mesures générales.

52658/99           Yiğit Mehmet et Suna, arrêt du 17/07/2007, définitif le 17/10/2007

L’affaire concerne la violation du droit d’accès des requérants à un tribunal, dans le cadre d’une demande en indemnisation pour erreur médicale, en raison du refus des juridictions internes de leur octroyer l’aide judiciaire pour couvrir les frais de justice qu’ils n’étaient pas en mesure de payer (violation de l’article 6§1). A ce titre, le tribunal administratif de Diyarbakır a refusé d’octroyer l’aide judiciaire sur la base d’une jurisprudence bien établie de la Cour suprême selon laquelle les plaignants représentés par un avocat (ce qui était le cas des requérants) ne pouvaient être considérés comme nécessitant une aide judiciaire. Le 16/04/1999, la procédure en indemnisation a été classée car les requérants ne pouvaient payer les frais de justice. Le 16/10/2001, la Cour suprême administrative a confirmé cette décision.

La Cour européenne a estimé qu’exiger des requérants qui n’avaient aucun revenu, de payer des frais de justice équivalant à quatre fois le revenu minimum, avait constitué une restriction disproportionnée à leur droit d’accès à un tribunal.

Mesures de caractère individuel: La Cour européenne a estimé que le moyen le plus approprié de réparation serait d’annuler ou de ne pas tenir compte des décisions des juridictions administratives du 16/04/1999 et du 16/10/1999, et de redémarrer la procédure devant le tribunal administratif de Diyarbakır, conformément aux exigences de l’article 6§1 de la Convention, si les requérants le souhaitaient.

L’article 445§11 du Code de procédure civile semble permettre la réouverture des procédures suite à une violation établie par la Cour européenne.

Evaluation : aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général: Il convient de relever que le raisonnement suivi par les juridictions pour refuser l’octroi de l’aide judiciaire est fondé sur la jurisprudence plutôt que sur des dispositions du droit procédural. Par conséquent, la publication et diffusion de l’arrêt de la Cour européenne auprès des juridictions supérieures et autorités concernées semblent nécessaires.


Dans ce contexte, il est noté que l’arrêt de la Cour a été publié et diffusé par les autorités. Une traduction turque de l’arrêt a également été publiée sur le site web du Ministère de la Justice :

www.inhak-bb.adalet.gov.tr/aihm/karar/mehmetvesunayigit.doc.

Evaluation : aucune autre mesure générale ne semble nécessaire.

Les Délégués :

1.             décident de reprendre l’examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             notent que les autres mesures d’exécution nécessaires ont été adoptées.

59741/00           Aksoy (Eroğlu), arrêt du 31/10/2006, définitif le 31/01/2007

59739/00           Güner Çorum, arrêt du 31/10/2006, définitif le 31/01/2007

60366/00           Kahraman, arrêt du 31/10/2006, définitif le 31/01/2007

Ce groupe d'affaires concerne la violation du droit des requérantes à un procès équitable.

Les trois requérantes exerçaient en tant qu'infirmières dans l'armée. En avril 1999, suite à des enquêtes disciplinaires, le Haut Conseil de Discipline du Ministère de la Défense nationale décida de les révoquer pour avoir troublé l'ordre de leur établissement en menant des activités idéologiques et politiques, en tant que sympathisantes d'une organisation illégale. Les requérantes contestèrent en vain leur révocation devant la haute cour administrative militaire. Lors des audiences, le Ministère de la défense soumit les dossiers des enquêtes administratives sous pli séparé dans une enveloppe portant la mention « secret ». Ces dossiers ne furent pas transmis aux requérantes.

La Cour européenne a établi que la non transmission des dossiers classés « secret » aux requérantes découlait directement de l'article 52§4 de la loi n° 1602 qui interdit l'examen des documents secrets par les parties ou leurs représentants. La Cour a par conséquent constaté une violation du principe de l'égalité des armes (violation de l'article 6§1).

Mesures de caractère individuel :

Informations fournies par les autorités turques (20/09/07) : Les requérantes ont la possibilité de demander la réouverture des procédures sur le fondement de la violation constatée par la Cour européenne, selon les articles 56 et 64 de la loi n°1602 et de l’article 53 du Code de procédure administrative. A ce jour, les requérantes n’ont pas saisi cette possibilité d’introduire un recours.

Evaluation : Dans ces circonstances, aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général : Etant donné que la violation dans ces affaires découle directement de l'interdiction contenue à l'article 52§4 de la loi n° 1602, les autorités sont invitées à examiner l'adoption de mesures visant soit à exclure des procédures judiciaires toute pièce ne pouvant pas légalement être révélée aux parties soit à introduire une exception en faveur des parties concernées.

Informations fournies par les autorités turques (20/09/07) : Un amendement à l’article52§4 de la loi n°1602 est en cours d’examen à la lumière de l’arrêt de la Cour européenne.

Des informations sont attendues sur l’état d’avancement de cet amendement.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ces points au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

24632/02          Ünsal, arrêt du 20/02/2007, définitif le 20/05/2007

L'affaire concerne l'iniquité d'une procédure pénale diligentée contre le requérant en 2000. Ce dernier était détenu dans une ville alors que la procédure pénale s'est déroulée dans une autre ville. De ce fait, la déposition du requérant a été recueillie sur commission rogatoire, par une autre cour pénale située dans la ville ou il était incarcéré. Bien que son avocat ait été présent aux audiences devant la cour qui a par la suite condamné le requérant, ce dernier n'a jamais été invité à comparaître aux audiences devant cette cour.

Le Cour européenne a noté que l'audition « indirecte » ou la présence de son avocat à l'audience ne pouvaient pallier l'absence de l'intéressé en personne (violation de l'article 6§§1 et 3(c)).

Mesures de caractère individuel :La Cour a indiqué que lorsqu'un particulier a été condamné à l'issue d'une procédure entachée de manquements aux exigences de l'article 6, un nouveau procès ou une réouverture de la procédure, à la demande de l'intéressé, représente en principe un moyen approprié de redresser la violation constatée.

Des informations sont donc attendues sur la possibilité d'un nouveau procès ou d'une réouverture de la procédure ou de toute autre possibilité de réparation adéquate à la disposition du requérant.

Il convient également de noter que requérant a été condamné à 12 ans et six mois d'emprisonnement en 2001 et que sa peine a été par la suite réduite de moitié. Il ressort néanmoins de l'arrêt que le requérant réside à Ankara, et donc il ne serait plus en prison. Pourtant, l'arrêt de la Cour européenne ne contient aucune mention de la date à laquelle et des conditions dans lesquelles il aurait été libéré.

Des clarifications sont donc attendues sur la situation actuelle du requérant.


Mesures de caractère général :

• Informations fournies par les autorités (l07/03/08) : Au moment où l’arrêt a été rendu, l’article 226§4 de l’ancien Code de procédure pénale prévoyait que lorsque l’accusé était détenu dans une prison ou un centre de détention situés en dehors de la juridiction du tribunal chargé de l’affaire, son témoignage ou ses moyens de défense pouvaient être pris par le tribunal de l’endroit où il était détenu. Selon l’article 180§3 du Nouveau Code de procédure pénale, en vigueur depuis 01/06/05, l’accusé doit être entendu directement par le tribunal chargé de l’affaire, sauf en cas de nécessité absolue.

L’arrêt de la Cour européenne a été traduit et publié. La traduction en turque est disponible sur le site web du Ministère de la Justice www.inhak-bb.adalet.gov.tr/aihm/karar/unsal.doc.

Evaluation: aucune autre mesure générale ne semble nécessaire.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles.

70830/01          Ern Makina Sanayi ve Ticaret A.Ş, arrêt du 03/05/2007, définitif le 03/08/2007

Cette affaire concerne la violation du droit à un procès équitable de la société requérante. La requérante se plaignait de n'avoir pu participer à la procédure d'exequatur (en tant que défendeur) d'une sentence arbitrale étrangère du fait de la notification par les juridictions turques à son ancien siège social. Il s'est avéré par la suite que l'erreur avait été causée par le greffe de registre de commerce qui avait perdu le dossier de la requérante contenant l'adresse actuelle de son siège social. La Cour de cassation a cependant rejeté le pourvoi de la requérante introduit après que la décision accordant l'exequatur était devenue définitive.

La Cour européenne a estimé que le refus de la Cour de cassation de prendre en compte la défaillance du greffe du registre de commerce avait privé la requérante du droit d'accès à un tribunal (violation de l'article 6).

Mesures de caractère individuel : L'article 445§11 du Code de procédure civile semble permettre la réouverture des procédures à la suite d'un arrêt de la Cour européenne constatant une violation. Ainsi, la société requérante peut, si elle le souhaite, obtenir la rouverture des procédures.

Evaluation : aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général : La violation dans cet arrêt est survenue du refus de la Cour de cassation de prendre en considération la défaillance du greffe du registre de commerce. L’arrêt de la Cour européenne a été publié et diffusé. La traduction en turque est également disponible sur le site web du Ministère de la Justice : www.inhak-bb.adalet.gov.tr/aihm/karar/ernmakina21022008.doc.

Evaluation : aucune autre mesure générale ne semble nécessaire.

Les Délégués :

1.             décident de reprendre l'examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             notent que les autres mesures d’exécution nécessaires ont déjà été adoptées.

                       - Affaires concernant le contrôle de la correspondance des prisonniers

6289/02            Tamer Fazıl Ahmet, arrêt du 05/12/2006, définitif le 05/03/2007

77097/01          Ekinci et Akalın, arrêt du 30/01/2007, définitif le 30/04/2007

73520/01          Kepeneklioğlu, arrêt du 23/01/2007, définitif le 23/04/2007

39862/02          Koç Ali, arrêt du 05/06/2007, définitif le 05/09/2007

9460/03            Tan, arrêt du 03/07/2007, définitif le 03/10/2007

Ces affaires concernent la violation du droit des requérants au respect de leur vie privée du fait de l'ingérence injustifiée des autorités pénitentiaires dans leur correspondance durant leur détention (violation de l'article 8).

Dans l’affaire Tamer Fazıl Ahmet, le requérant, durant sa détention de décembre 2000 à mai 2001, avait adressé à son avocat plusieurs courriers dans lesquels il se plaignait soit du refus des autorités pénitentiaires de faire suivre ses lettres soit de passages supprimés dans ses lettres. Les autorités pénitentiaires ont également détruit une lettre adressée à un journal en vue de la publication d'un article écrit par le requérant pour protester contre les prisons de type F. Les deux autres affaires concernent également une ingérence similaire par les autorités pénitentiaires dans la correspondance des requérants avec leurs avocats.

Vu l'ampleur du contrôle exercé sur la correspondance des requérants et l'absence de recours effectif à ce titre, la Cour européenne a estimé que l'ingérence dans le droit des requérants avait été disproportionnée et ne pouvait passer pour « nécessaire dans une société démocratique ».

Mesures de caractère individuel : Il découle de l'arrêt de la Cour européenne que les requérants ne sont plus en détention. Par conséquent aucune autre mesure individuelle n’est nécessaire.


Mesures de caractère général :

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées pour éviter de nouvelles violations similaires. En tout état de cause, semblent nécessaires la publication de l'arrêt de la Cour européenne et sa diffusion aux autorités concernées (en particulier les autorités pénitentiaires).

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ces points au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

25321/02           Ülger, arrêt du 26/06/2007, définitif le 26/09/2007

Cette affaire concerne une violation du droit d’accès du requérant à un tribunal ainsi qu’au respect de ses biens.

En mars 2001, une juridiction du travail, statuant sur un litige entre le requérant et son employeur, avait rendu un arrêt en faveur du requérant et ordonné à son employeur de payer les frais de justice encore dus. Les frais ne furent pas acquittés. Le requérant demanda au tribunal de lui notifier l’arrêt afin de pouvoir initier une procédure en exécution forcée. Il fut cependant informé par le tribunal qu’en vertu de l’article 28(a) de la loi sur les frais de justice, il n’était pas possible de notifier l’arrêt tant que les frais encore dus n’avaient pas été acquittés. Le tribunal invita par conséquent le requérant à les régler afin d’obtenir une copie de l’arrêt, étant entendu qu’il serait remboursé au stade de l’exécution. Le requérant n’ayant pas les moyens de s’acquitter de ces frais au moment des faits, il fut donc dans l’impossibilité d’obtenir l’exécution forcée de l’arrêt.

La Cour européenne a estimé qu’en faisant peser sur le requérant l’entière responsabilité du paiement des frais, l’Etat n’avait pas assumé son obligation positive d’organiser un système efficace d’exécution forcée des arrêts (violations de l’article 6§1 et de l’article 1 du Protocole n° 1).

Mesures de caractère individuel: La Cour européenne a octroyé au requérant une satisfaction équitable au titre du préjudice matériel subi équivalant au montant dû en vertu de l’arrêt interne, ainsi qu’au titre du préjudice moral et des frais et dépens.

Evaluation : dans ces circonstances, aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général:

Des informations sont attendues sur la possibilité d’amender l’article 28(a) de la loi sur les frais de justice afin de le rendre conforme aux exigences de la Convention, ainsi que sur toutes autres mesures prises ou envisagées par les autorités pour prévenir de nouvelles violations similaires.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

50939/99           Bakan, arrêt du 12/06/2007, définitif le 12/09/2007

Cette affaire concerne le refus d’un tribunal administratif d’octroyer l’aide judiciaire aux requérants au motif qu'à ce stade de l'affaire et eu égard aux éléments de preuve présentés devant lui, l'action pour dédommagement résultant du décès d’un des proches des requérants était mal fondée.

Le tribunal a donc demandé aux requérants de payer, sous 30 jours, les frais de procédure afférents à la procédure, lesquels s'élevaient à environ 170 euros. En novembre 1998, le tribunal a considéré l'action des requérants non introduite pour non-paiement des frais de procédure.

La Cour européenne a relevé que le montant des frais de procédure demandés représentait une somme considérable pour les requérants qui ne disposaient plus d'aucun revenu à la suite du décès de leur proche. La Cour a relevé notamment que le rejet de la demande d'aide judicaire avait totalement privé les requérants de la possibilité de faire entendre leur cause par un tribunal. Au vu de ces éléments, et notamment du fait que la restriction est intervenue au stade initial de la procédure, la Cour a estimé que l'Etat n'avait pas satisfait à ses obligations de réglementer le droit d'accès à un tribunal d'une manière conforme aux exigences de l'article 6§1.

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé aux requérants une satisfaction équitable significative au titre du préjudice subi.

Evaluation : dans ces circonstances, aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général :

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées par les autorités pour prévenir de nouvelles violations similaires.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.


- Affaires concernant le manquement ou le retard substantiel de l'administration à se conformer à des arrêts internes définitifs

38473/02           Kılıç Ahmet, arrêt du 25/07/2006, définitif le 25/10/2006

75845/01           Aydın et Şengül, arrêt du 03/05/2007, définitif le 03/08/2007

35075/97           Baba, arrêt du 24/10/2006, définitif le 24/01/2007

74069/01+         Çiçek et Öztemel et 6 autres affaires, arrêt du 03/05/2007, définitif le 03/08/2007, rectifié le 23/10/2007

28152/02           Demirhan, Görsav et Çelik, arrêt du 05/06/2007, définitif le 05/09/2007

77361/01           Dildar, arrêt du 12/12/2006, définitif le 12/03/2007

31277/03           Kranta, arrêt du 16/01/2007, définitif le 16/04/2007

14710/03           Yerebasmaz, arrêt du 10/10/2006, définitif le 10/01/2007

Ces affaires concernent la violation du droit des requérants à un procès équitable, ainsi que de leur droit au respect de leurs biens dans certaines affaires, en raison de la non-exécution par les organes administratifs, d’une décision judiciaire leur octroyant des indemnités et d’autres droits pécuniaires (violations de l’article 6§1 et de l’article 1 du Protocole n° 1).

L’affaire Kılıç Ahmet concerne en outre la durée excessive de la procédure devant les juridictions administratives (violation de l’article 6§1).

Mesures de caractère individuel :

1) Non-exécution des arrêts internes : Dans le contexte de l’affaire Kılıç Ahmet, le gouvernement a fourni la copie d’une déclaration signée par le requérant indiquant qu’il avait reçu, le 06/11/2006, le montant intégral des indemnités octroyées au plan interne, y compris les intérêts moratoires. Dans l’affaire Yerebasmaz, la décision interne a été exécutée par un ordre de paiement émis par l’administration compétente, et le montant total a été mis à la disposition du requérant. De même, dans les affaires Çiçek and Öztemel et 6 autres affaires, le 11/02/08 confirmation a été reçue du paiement des sommes allouées par les décisions internes, soit au représentant des requérants, soit par dépôt sur un compte bloqué au nom des requérants. Dans les affaires Baba, Dildar et Kranta, les montants octroyés au titre du préjudice matériel par la Cour européenne ont été payés aux requérants. Dans l’affaire Aydın et Şengül aucune mesure individuelle n’est nécessaire.

Des informations sont attendues sur l’exécution des décisions internes dans l’affaire Demirhan, Görsav et Çelik.

2) Durée de la procédure (affaire Kılıç Ahmet) : Aucune mesure n’est nécessaire vu que la procédure est terminée.

Mesures de caractère général :

1) Non-exécution de l’arrêt interne: Dans ces affaires les requérants n’ont pas été en mesure d’obtenir l’exécution forcée de l’arrêt interne rendu en leur faveur en raison d’obstacles existant à l’heure actuelle en droit turc. A cet égard, un individu ou une entité privée ne peut légalement faire saisir les biens d’une municipalité affectés à un service public, en vue d’obtenir un paiement dû en vertu d’une décision judiciaire.

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées afin de prévenir des violations similaires, en particulier en vue d’assurer l’exécution effective des décisions judiciaires et dans les meilleurs délais.

Informations fournies par les autorités turques (08/04/08) : Depuis les arrêts de la Cour européenne dans ces affaires, le nouveau Code de procédure pénale est entré en vigueur. L’article 257 du Code qualifie d’infraction le fait que les agents de l’Etat ne s’acquittent pas de leurs obligations par omission ou retard.

Evaluation: Bien que cette disposition soit positive, il est improbable qu’elle puisse prévenir des violations semblables à l’avenir, car la cause de la violation ne réside pas dans la non-exécution de leur obligations par les agents de l’Etat, mais dans l’absence de fonds publics suffisants et l’impossibilité de saisir les biens des entités administratives dans le cadre des procédures en exécution (saisie, forclusion, etc.).

Par conséquent, des informations sont attendues sur les mesures de caractère général susceptibles de permettre aux futurs créditeurs des entités administratives d’obtenir les montants alloués en leur faveur par décisions judiciaires. À cet égard, les autorités turques sont invitées à prendre en considération l’expérience des autres pays qui ont été confrontés au même problème dans le passé (voir par exemple, les affaires Hornsby contre la Grèce ou Dierckx contre la Belgique.

2) Durée de la procédure devant les juridictions administratives (affaire Kılıç Ahmet): Des mesures générales sont examinées dans le contexte du groupe Ormancı (rubrique 5.1).

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire, ainsi que sur les mesures individuelles et générales, en particulier visant à assurer l’exécution effective et dans les meilleurs délais des décisions judiciaires.


- Affaires concernant l’absence d’indemnisation suite à l’annulation d’un titre de propriété en vertu de la loi sur le littoral

37451/97           N.A. et autres, arrêt du 11/10/2005, définitif le 15/02/2006 et of 09/01/2007, définitif le 23/05/2007

36166/02+         Asfuroğlu et autres, arrêt du 27/03/2007, définitif le 09/07/2007

35973/02+         Aslan et Özsoy, arrêt du 30/01/2007, définitif le 30/04/2007

1262/02            Doğrusöz et Aslan, arrêt du 30/05/2006, définitif le 23/10/2006

16480/03+         Katayıı et autres, arrêt du 17/07/2007, définitif le 17/10/2007, rectifié le 13/12/2007

75606/01           Miçooğulları Mehmet Ali, arrêt du 10/05/2007, définitif le 24/09/2007

40217/02+         Moğul, arrêt du 09/01/2007, définitif le 09/04/2007

36531/02           Özdemir Adil, arrêt du 10/05/2007, définitif le 10/08/2007

18367/04           Taci et Eroğlu, arrêt du 10/05/2007, définitif le 10/08/2007, rectifié le 13/11/2007

29128/03           Tozkoparan et autres, arrêt du 17/07/2007, définitif le 10/12/2007

1250/02 Tuncay, arrêt du 12/12/2006, définitif le 23/05/2007

21850/03           Yurtöven, arrêt du 17/07/2007, définitif le 17/10/2007

Ces affaires concernent l’atteinte au droit des requérants au respect de leurs biens en raison de l’absence d’indemnisation pour l’annulation de l’inscription de leurs biens immobiliers au registre foncier ainsi que dans l’affaire N.A. la destruction de l’hôtel en construction sur cette propriété, ordonnées par décisions judiciaires respectivement de juin 1987 et décembre 1999. Ces décisions étaient fondées sur le fait les parcelles concernées faisaient partie du littoral et n’étaient pas susceptibles de faire l’objet d’une acquisition. Les requérants ont vainement tenté d’obtenir des dommages et intérêts pour le préjudice subi par la perte de leurs biens.

La Cour européenne a constaté que les décisions de privation de propriété relevaient d’une cause d’utilité publique, les terrains se situant sur le bord de mer et faisaient partie de la plage, lieu public ouvert à tous, et poursuivaient donc un but légitime. Elle a cependant estimé que l’absence totale d’indemnisation, non justifiée par des circonstances exceptionnelles, avait rompu le juste équilibre entre la protection de la propriété privée et l’intérêt général (violations de l’article 1 du Protocole n° 1).

Mesures de caractère individuel : Dans toutes ces affaires, la Cour européenne a indemnisé le préjudice matériel subi par les requérants.

Evaluation : aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général :

Informations fournies par les autorités turques : Dans leur réponse du 27/09/2006 au courrier de phase initiale du Secrétariat, daté du 06/06/2006, les autorités turques ont indiqué qu’un projet de loi amendant la loi sur le littoral était en cours de préparation et que le Comité serait dûment informé une fois le texte prêt. L’arrêt dans l’affaire précédent « N.A. et autres » a été traduit en turc et a été porté à l’attention des autorités.

Le 06/03/08, les autorités ont indiqué que le projet de loi était toujours en cours de préparation.

Informations attendues : sur l’état d’avancement du projet de loi et sur son contenu.

Les Délégués conviennent de reprendre l’examen de ces points :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales, en particulier l’état d’avancement du projet de loi sur le littoral ainsi que son contenu.

33663/02           Mörel, arrêt du 14/06/2007, définitif le 14/09/2007

Cette affaire concerne la violation du droit de requérant au respect de sa propriété du fait du rejet par les tribunaux nationaux de l’action du requérant en indemnisation additionnelle pour expropriation au motif qu'elle avait été intentée hors délai, même si l'expropriation ne lui avait pas été notifiée de manière adéquate.

En 1988, les autorités avaient décidé d'exproprier un bien immobilier appartenant au requérant. Elles n'ont cependant pas pu identifier son propriétaire dans la mesure où les déclarations fiscales y afférent étaient introuvables et que le titre de propriété dans le registre foncier n’indiquait que son propriétaire initial et a donc n’était plus à jour. Etant donné qu’une notification directe n'était pas possible, l'expropriation a été annoncée dans les journaux locaux ainsi que par haut-parleurs dans la ville, conformément à l'article 10 de la loi sur l'expropriation n° 2942. En 1996, lorsque le requérant a pris connaissance de l'expropriation, il a intenté une action d'indemnisation, en se fondant sur un principe de droit turc selon lequel la période de prescription ne court pas en l'absence d’une notification valable. Cependant les tribunaux ont estimé que la manière dont l'expropriation avait été notifiée était justifiable, et que donc le délai de prescription avait déjà expiré.


La Cour européenne a estimé que les autorités n'avaient pas fait preuve de diligence suffisante dans le cadre de la notification au requérant de l'expropriation de sa propriété. Elle a donc estimé que le requérant avait été privé de son bien sans indemnisation adéquate (violation de l'article 1 du Protocole n° 1).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé au requérant une satisfaction équitable significative au titre du préjudice matériel subi.

Evaluation : dans ces circonstances, aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général :

Des informations sont attendues sur les mesures prises ou envisagées par les autorités, notamment la publication et diffusion de l’arrêt de la Cour européenne aux autorités judiciaires, pour prévenir de nouvelles violations similaires.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

45628/99          Apostolidi et autres, arrêt du 27/03/2007, définitif le 24/09/2007

L’affaire concerne l’illégalité de l’ingérence dans le droit au respect des biens des requérants, cinq ressortissants grecs.

En 1990, les requérants avaient hérité d’un appartement de leur tante, une ressortissante turque. Cet appartement était situé à Beyoğlu, Istanbul. Les requérants enregistrèrent l’appartement à leur nom au cadastre, sur la base du certificat d’héritiers délivré par une juridiction civile. Ce certificat fut cependant annulé en 2001 après qu’un autre héritier, de nationalité turque, avait revendiqué des droits sur cet appartement. Les juridictions ont estimé que les ressortissants turcs ne pouvaient acquérir de biens immobiliers par voie de succession en Grèce et que par conséquent la condition de réciprocité prévue à l’article 35 du Code foncier n’était pas remplie en l’espèce. Suite à l’annulation du titre d’héritiers des requérants, l’héritier turc plaignant fut désigné comme unique héritier et fit enregistrer l’appartement à son nom.

Sans remettre en question la clause de réciprocité, la Cour européenne a estimé qu’il n’avait pas été établi que les ressortissants turcs n’avaient pas la faculté d’acquérir des biens immobiliers en Grèce, par voie de succession. A cet égard, des documents officiels, tel qu’un rapport de 1995 du Ministre de la Justice turc, démontraient que les ressortissants turcs avaient acquis des biens immobiliers en Grèce par voie de succession. Par conséquent, la Cour a estimé cette ingérence n’était pas suffisamment prévisible (violation de l’article 1 du Protocole n° 1).

Cette affaire concerne en outre la durée excessive de la procédure civile concernée, à savoir plus de dix ans (violation de l’article 6§1)

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a réservé la question de la satisfaction équitable pour tenir compte de l’éventualité d’un accord entre les autorités et les requérants. La Cour a invité les parties à lui soumettre leurs observations sur la satisfaction équitable.

La procédure civile est par ailleurs terminée.

Mesures de caractère général : La Cour européenne n’a pas estimé que la clause de réciprocité contenue à l’article 35 du Code foncier était en soi incompatible avec la Convention. Cependant, la violation résulte d’une erreur des juridictions internes dans l’appréciation de la législation grecque en vue de déterminer si la clause de réciprocité était bien remplie.

Des informations sont par conséquent attendues sur les mesures générales prises ou envisagées par les autorités, en particulier la publication et diffusion de l’arrêt de la Cour européenne aux autorités judiciaires.

En ce qui concerne la durée de la procédure, les mesures générales sont examinées dans le cadre du groupe Ormancı (rubrique 5.1).

Les Délégués décident de reprendre l’examen :

1.             des éventuelles mesures individuelles une fois que la Cour aura rendu son arrêt sur la satisfaction équitable ;

2.             des mesures générales au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH) à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales prises ou envisagées par les autorités, en particulier la publication et diffusion de l’arrêt de la Cour européenne.


- 9 affaires contre l’Ukraine

34056/02          Gongadze, arrêt du 08/11/2005, définitif le 08/02/2006

L’affaire concerne la disparition et l’assassinat du mari de la requérante, M. Gongadze, un journaliste politique, en septembre 2000.

La Cour européenne a constaté que malgré la lettre adressée par M. Gongadze au Procureur Général pour se plaindre de sa surveillance par des personnes inconnues ainsi que de l’intérêt inexplicable manifesté à son égard par les forces de l’ordre, les autorités n’avaient entrepris aucune démarche afin de vérifier ces informations et de protéger sa vie (violation de l’article 2). La Cour a également constaté que l’enquête sur sa disparition avait souffert d’une série de retards et déficiences (violation procédurale de l’article 2).

La Cour a en outre constaté que l’attitude des autorités d’enquête envers la requérante et sa famille, en particulier l’incertitude résultant de nombreuses déclarations contradictoires à propos du sort du mari de la requérante et leur refus constant de lui accorder pleinement accès au dossier, lui avait causé une importante souffrance équivalant à un traitement dégradant (violation de l’article 3).

Enfin, la Cour a considéré que l’absence d’enquête effective pendant plus de 4 ans et l’impossibilité de demander une indemnisation devant le juge civil pendant l’enquête pénale en cours avaient privé la requérante d’un recours effectif (violation de l’article 13).

Mesures de caractère individuel:

Etat de la procédure lorsque la Cour européenne a rendu son arrêt : Durant l’enquête pénale, le Parquet général a identifié quatre anciens officiers du Ministère des affaires intérieures prétendument impliqués dans ce crime, et en février 2005 il a initié une procédure pénale à l’encontre de ces personnes. L’enquête pénale contre trois d’entre eux a par la suite était séparée en procédures distinctes, et ces derniers étaient sur le point d’être traduits en justice. Des enquêtes pénales contre le quatrième officier, M. P. (qui a pris la fuite et avait été inscrit sur la liste des personnes recherchées), ainsi que contre les personnes non identifiées qui auraient commandé l’enlèvement et le meurtre de M. Gongadze ont été diligentées par le Parquet général.

• Développements ultérieurs.

1) Procédures judiciaires : Depuis janvier 2006, la procédure pénale à l’encontre de trois anciens officiers du Ministère des affaires intérieures accusés de meurtre prémédité est pendante devant la Cour d’appel de Kiev. Durant cette période, un certain nombre de démarches a été accompli (interrogatoires des témoins, victimes et accusés ; analyses médico-légales ordonnées, documents examinés etc.).

Le 15/03/08, la Cour a rendu un verdict par lequel elle a reconnu les accusés coupables des faits qui leur étaient reprochés et les a condamnés à 12 ans (deux des accusés) et 13 ans de réclusion.

2) L’enquête : L’enquête préliminaire dans l’affaire criminelle contre M. P et d’autres personnes non identifiées ayant commandité l’enlèvement et le meurtre de M. Gongadze, est toujours pendante, y compris une autre action pénale, introduite contre une certaine Mme. S. contre laquelle des accusations graves et très sérieuses ont été portées : elle aurait aidé M. P à se soustraire à l’enquête et au procès. Des mesures ont été prises pour retrouver M. P et Mme S.

Les opérations de recherche visant à identifier les personnes ayant commandité l’enlèvement et le meurtre de M. Gongadze continuent également. Ainsi, le Parquet général fait savoir que le rapport du comité d’enquête ad hoc du Parlement a été pris en compte.

• Informations fournies par les autorités ukrainiennes le 30/11/2007 : En juillet 2007, une série d’actions relatives à l’enquête ont été menées, avec la collaboration de Melnychenko, y compris la reconstitution des événements dans les locaux du Secrétariat du Président de l’Ukraine. Ainsi, des analyses ont été demandées et accomplies.

Le Parquet général a décidé de ne pas entamer de poursuites pénales contre les principaux fonctionnaires ukrainiens concernés, puisque l’original de l’enregistrement audio fait par Melnychenko et qui concerne inter alia l’affaire Gongadze n’a jamais été saisi. Par conséquent, il a été impossible d’établir en toute légalité l’identité des voix enregistrées ou de prouver l’authenticité de l’enregistrement. La prochaine étape dans l’enquête sera d’obtenir les enregistrements originaux ainsi que les appareils enregistreurs de Melnychenko.

Informations fournies par les autorités ukrainiennes le 30/11/2007 et le 22/01/2008 : Selon les Résolutions de l’Assemblée parlementaire n° 1239 (2001), 1262 (2001), 1346 (2003), 1466 (2005) ainsi que les Résolutions n° 2154-III du 21/12/2000 et. 2970-III of 10/01/2002 de la Verkhovna Rada de l’Ukraine, des experts internationaux devraient être associés en vue d’une analyse phonoscopique objective des enregistrements effectués par Melnychenko durant l’année 2000 dans le bureau de l’ancien Président Kuchma.

A cette fin, le Parquet général a accepté la proposition de la Commission des questions juridiques et des droits de l’homme de l’Assemblé pour constituer un group international d’experts d’enquête. La Commission des questions juridiques et des droits de l’homme a conclu un accord avec le gouvernement des Etats-Unis aux fins de participation des experts compétents du FBI. Depuis mai 2007, le Bureau du Procureur Général s’est employé à contacter l’APCE, le Ministère de la Justice des Etats-Unis et l’Ambassadeur des Etats-Unis en Ukraine, leur demandant de désigner des experts afin d’accélérer l’enquête.


Des informations sont attendues sur l’état d’avancement de l’enquête en cours diligentée afin d’identifier les commanditaires et les auteurs du meurtre du mari de la requérante, en particulier sur les mesures prises afin de l’accélérer.

Mesures de caractère général: Il apparaît que les violations ont été dues au contexte politique particulier existant à l’époque en Ukraine. Le 16/01/2007 les autorités ukrainiennes ont fourni certaines informations sur les règles applicables à la procédure d’enquête en particulier s’agissant de l’indépendance des enquêteurs, du délai raisonnable dans la conduite des enquêtes et du droit d’accès au dossier pendant l’enquête pour la partie lésée.

1) Indépendance des enquêteurs : Selon l’avis de la Commission de Venise et les Recommandations de l’Assemblé parlementaire, le 06/10/2006 la Verkhovna Rada a renoncé à l’examen du projet de loi sur les amendements à la loi sur le Parquet général – qui avait passé le stade de la première lecture le 04/03/2003 – puisque ses dispositions n’étaient pas entièrement conformes au rôle du Parquet dans une société démocratique. La commission parlementaire compétente a été chargée de constituer un groupe de travail pour la rédaction du nouveau projet de loi (résolution de la Verkhovna Rada de l’Ukraine du 6/10/2006 n° 207-V).

Les autorités ukrainiennes ont informé le Secrétariat de ce que conformément au décret présidentiel du 20/01/2006 n° 39 sur le Plan d’action de l’Ukraine en vue d’honorer ses obligations et engagements à l’égard du Conseil de l’Europe, la nouvelle rédaction de la loi sur le Parquet général sera préparée par le ministère de la Justice, après approbation par le Président de l’Ukraine du Concept de l’ensemble des réformes de la justice pénale, préparé par la Commission nationale pour le renforcement de l’Etat de droit et de la démocratie. Le Concept est la dernière étape de l’élaboration.

Des informations sont attendues sur le calendrier d’adoption de préparation et d’adoption de ces projets de lois.

2) Recours contre la durée excessive de l’enquête : Dans le cadre de l’examen de l’affaire Merit et du groupe d’affaires Zhovner, les autorités ukrainiennes ont informé le Comité au sujet du projet de loi sur les amendements à certains actes législatifs de l’Ukraine (sur la protection des droits durant la phase d’enquête et durant la procédure judiciaire ainsi que l’exécution des décisions judiciaires dans un délai raisonnable). Le projet prévoit la possibilité d’introduire un nouveau recours devant les juridictions administratives pour se plaindre de la violation des droits procéduraux, y compris de la notion du délai raisonnable dans le cadre de l’enquête. Ce recours inclut un droit à indemnisation pour les retards et des sanctions contre les responsables.

Evaluation :Il reste à clarifier la question de savoir si le projet de loi comporte des dispositions relatives à l’accélération des procédures. En attendant l’adoption du projet de loi et des amendements susmentionnés, les autorités judiciaires sont invitées à accorder une indemnisation pour les retards dans l’exécution des décisions directement sur la base des dispositions de la Convention et de la jurisprudence de la Cour. Une impulsion en ce sens de la Cour suprême aux cours inférieures serait utile.

Des informations sont attendues sur le calendrier d’adoption du projet de loi et des amendements, ainsi que la dernière version officielle du projet.

3) Publication et diffusion : L’arrêt de la Cour européenne a été traduit et publié.

Des informations sont attendues sur la diffusion de l’arrêt.

Les Délégués,

1.             adoptent la Résolution intérimaire CM/ResDH(2008)35 telle qu’elle figure dans le Volume des Résolutions (voir Annexe ci-dessous) ;

2.             décident de reprendre l’examen de cette affaire :

- lors de leur 1035e réunion (16-18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures de caractère individuel, notamment sur les progrès de l’enquête relative aux instigateurs et organisateurs du meurtre du mari de la requérante ;

- au plus tard lors de leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures de caractère individuel aussi bien que sur les mesures de caractère général en suspens.

77703/01          Svyato-Mykhaylivska Parafiya, arrêt du 14/06/2007, définitif le 14/09/2007

L’affaire concerne la violation du droit de l’association requérante à la liberté de religion du fait du refus des autorités en 2000 d’enregistrer des amendements à son statut suite à une décision de l'organe directeur de l'association requérante de modifier sa dénomination (« Eglise orthodoxe ukrainienne du patriarcat de Kiev » au lieu d’« Eglise orthodoxe ukrainienne du patriarcat de Moscou »).

La Cour européenne a estimé que l’ingérence dans le droit de l’association requérante à la liberté de religion n’était pas justifiée car les arguments avancés par les autorités pour refuser d’enregistrer les modifications n’étaient ni pertinents ni « suffisants ».


De plus, la Cour européenne a considéré qu’il y avait un manque de cohérence et de prévisibilité dans la législation en cause, à savoir la loi sur la liberté de conscience et les organisations religieuses, et a également considéré que ces dispositions ne permettaient pas d’éviter des violations éventuelles par l’autorité chargée de l’enregistrement qui dispose de pouvoirs discrétionnaires en la matière (violation de l’article 9). En particulier, cette loi :

-           ne comportait aucune disposition législative énumérant en détail l'ensemble des raisons et motifs pouvant être invoqués pour refuser l'enregistrement des changements et modifications apportés au statut des associations religieuses ;

-           ne précisait pas jusqu'à quel point le refus d'enregistrer une organisation religieuse ou son statut devait être motivé ; et

-           ne définissait pas clairement les notions d’« organisation religieuse », de « groupes religieux », de « paroisse », de « groupe », d' « assemblée générale » et d’« assemblée paroissiale ».

Mesures de caractère individuel : Le 08/10/2007, les autorités ukrainiennes informé la requérante de la possibilité, selon la législation en vigueur, de former un recours en vue de rétablir ses droits violés.

• Informations fournies par les autorités ukrainiennes le 22/01/2008: Selon les informations du Service central des nationalités et des affaires religieuses de l’administration de la ville de Kiev, la requérante n’a pas déposé de recours devant l’administration de la ville de Kiev pour l’enregistrement des modifications de statut à la suite de l’arrêt de la Cour européenne. Parallèlement, les autorités ukrainiennes ont indiqué que le 15/09/2007, suite à l’arrêt de la Cour, le représentant de l’association avait déposé une demande en restitutio in integrum devant la Cour suprême de l’Ukraine. Le 9/01/2008 la Cour suprême de l’Ukraine a reconsidéré les conditions de l’appel et l’a accueilli. La procédure est pendante.

Des informations sont attendues sur l’état de la procédure devant la Cour suprême et sur toute autre mesure qui pourrait remédier à la violation.

Mesures de caractère général :

            1) Amendements législatifs: Un projet de loi relatif à la liberté de conscience et des organisations religieuses a été élaboré par un groupe de travail constitué de représentants du service de droit constitutionnel et du service juridique du Ministère de la Justice, des églises et des confessions enregistrées, d’ONG et d’universitaires.

La Commission de Venise a rendu son avis sur le projet de loi élaboré (Avis n°391/2006). Selon la Commission, bien que le projet de loi en général corresponde aux exigences des normes internationales en matière de la liberté de la religion, certains aspects ont besoin d’être développés. Notamment, l’enregistrement des organisations religieuses doit être clarifié et simplifié. Selon les autorités, les observations de la Commission de Venise ont été prises en considération. Les autorités ont également noté que l’Ukraine étant un pays pluriconfessionnel et plurireligieux, les discussions ultérieures sur le projet de loi amendé devaient recueillir le consensus de tous les participants au processus d’élaboration du projet de loi.

Des informations sont attendues sur l’état d’avancement de l’adoption du projet de loi. Des informations plus détaillées sont attendues sur les dispositions du projet de loi régissant les enregistrements. A cet égard, une copie de la version officielle du projet de loi serait utile.

Des informations sont également attendues sur les mesures intérimaires prises pour assurer le respect l’arrêt de la Cour européenne dans l’attente de l’adoption de ce projet de loi.

            2) Traduction, publication et diffusion de l’arrêt: L’arrêt a été traduit en ukrainien et publié au Journal officiel de l’Ukraine (n°81 11/2007). Un résumé de l’arrêt a été publié au Courrier du Gouvernement, n°190 du 16/10/2007.

Les autorités ukrainiennes on indiqué que l’arrêt avait été envoyé le 08/10/2007 à toutes les autorités compétentes, à savoir l’administration de la ville de Kiev et au Service central des nationalités et des affaires religieuses, accompagné de lettres des supérieurs hiérarchiques les invitant à prendre en compte les conclusions de la Cour européenne dans leur pratique.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

803/02              Intersplav, arrêt du 09/01/2007, définitif le 23/05/2007

L'affaire concerne la violation du droit de la société requérante au respect de ses biens dans la mesure où depuis 1998 le reversement de sommes dues au titre de la TVA a été constamment retardé du fait du manquement de l'administration fiscale de la ville de Sverdlovsk à son obligation de confirmer les montants concernés et de délivrer en temps utile les pièces justificatives à cet égard. En outre, la société requérante s'est vue refuser tout droit à indemnisation dans le cadre de plus de 140 procédures diligentées devant le tribunal commercial de Lugansk (violation de l'article 1 du Protocole n° 1).


La Cour européenne a estimé que les constants retards dans le reversement des sommes au titre de la TVA et dans l'indemnisation, combiné avec l'absence de recours effectif pour prévenir ou mettre un terme à cette pratique administrative, ainsi que l'incertitude quant aux dates de reversement de ces sommes, avaient rompu le juste équilibre entre l'intérêt public et la protection du droit au respect de ses biens et que la société requérante subissait toujours cette ingérence (voir §40 de l'arrêt).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a relevé que les actions judiciaires introduites par la société requérante n'avaient pas permis de mettre un terme à cette pratique continue de retard dans le reversement des sommes dues au titre de la TVA, alors même que des décisions judiciaires avaient été rendues en faveur de la société requérante (voir §39 de l'arrêt).

La Cour européenne a estimé que dans les circonstances de l'espèce la mesure la plus appropriée serait en principe d'éliminer cette pratique administrative jugée contraire à l'article 1 du Protocole n° 1 (voir §48 de l'arrêt). Voir ci-dessous, sous mesures générales.

La Cour européenne a octroyé à la société requérante une satisfaction équitable au titre du préjudice matériel.

Mesures de caractère général :

1) Mesures visant à éliminer la pratique administrative de retard dans le reversement de la TVA et à garantir une indemnisation efficace : Le 27/09/2007, les autorités ont informé le Secrétariat de l’entrée en vigueur, le 1/06/2005, d’une nouvelle réglementation sur le reversement de TVA. Selon les autorités, la nouvelle réglementation supprime le reversement automatique basé sur la restitution de la taxe, et introduit une vérification obligatoire par les autorités fiscales des montants réclamés.

Selon les informations fournies par la société requérante, le 30/01/2008 et le 15/05/2008, le reversement de la TVA continue d’être constamment retardé par les autorités fiscales. Plus de 600 décisions judiciaires confirmant le montant du reversement de TVA réclamé par la société requérante et ordonnant son paiement ont été rendus en faveur de la société requérante.

Ces informations sont évaluées par le Secrétariat.

2) Publication et diffusion de l’arrêt de la Cour européenne : L’arrêt a été traduit en ukrainien, publié sur le site Internet officiel du Ministère de la Justice et publié au journal officiel de l’Ukraine. Un résumé de l’arrêt a été publié au Courrier du Gouvernement.

Les conclusions de la Cour dans cet arrêt ont été portées à l’attention de l’Administration fiscale de l’Etat, de l’Administration fiscale de la Région de Lugansk, du Ministère des Finances et du Trésor. L’arrêt a été discuté lors des séminaires organisés par l’Agent du Gouvernement pour les juges des tribunaux administratifs et commerciaux.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16 18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles, à savoir l’élimination de la pratique administrative de retarder le reversement de sommes dues au titre de la TVA à l'égard de la société requérante, ainsi que sur les mesures générales.

38722/02          Afanasyev, arrêt du 05/04/2005, définitif le 05/07/2005

Cette affaire concerne le traitement inhumain et dégradant subi par le requérant pendant sa garde à vue en mars 2000 à un poste de police du district de Kharkiv, où des fonctionnaires de police lui auraient asséné des coups pour le contraindre à avouer. Un examen médical effectué quelques jours après cet incident a confirmé que ces blessures avaient été infligées pendant la période de détention du requérant (violation de l’article 3).

L’affaire concerne également une violation du droit à un recours effectif suite aux omissions graves de l’enquête, notamment le retard d’un an dans son ouverture, l’interrogation tardive des témoins, ainsi que le fait que certains témoins n’avaient pas été interrogés. La Cour européenne a également conclu que toute demande d’indemnisation aurait été inefficace en l’absence d’établissement des faits et des responsables dans le cadre de la procédure pénale pendante (violation de l’article 13).

Mesures de caractère individuel : Lorsque la Cour européenne a rendu son arrêt, l’enquête sur les mauvais traitements allégués par le requérant était pendante. A plusieurs reprises, les procédures pénales à l’encontre des policiers identifiés par le requérant ont été interrompues et les infractions requalifiées. Par conséquent, l’affaire a été à plusieurs reprises renvoyée de la police vers le bureau du procureur et vice versa. Le 31/10/2007, les autorités ont informé le Comité des Ministres qu’une procédure disciplinaire avait été initiée contre les policiers menant l’enquête et responsables des retards dans la procédure.

• Informations fournies par les autorités ukrainiennes le 11/04/02008 : les procédures pénales pour abus de pouvoir, à l’encontre des policiers identifiés par le requérant, sont pendantes devant le Bureau du procureur de la Ville de Kharkiv.

Des informations détaillées sont attendues sur l’état d’avancement de l’enquête sur les allégations du requérant concernant les mauvais traitements infligés par les policiers. Des informations seraient également utiles sur l’issue des procédures disciplinaires contre les responsables des retards de l’enquête.


Mesures de caractère général :

            1) Problèmes importants à résoudre : Le problème du défaut d’enquête efficace sur des allégations de mauvais traitement en prison a été soulevé devant le Comité des Ministres dans le cadre des affaires Poltoratskiy et Kuznetsov. L'affaire Afanasyev concerne ce problème dans le contexte de la détention par la police. Le 31/10/2007, les autorités ont informé le Comité des Ministres d’un certain nombre de dispositions statutaires garantissant les droits des personnes détenues, en particulier les articles 8, 29 et 55 de la Constitution, l’article 127 du Code pénal, l’article 5 de la loi sur la police, l’article 110 du Code de procédure pénale, l’article 12 de la loi sur le Parquet, l’article 14 de la loi sur les activités opérationnelles et d’enquête.

Un plan d’action est attendu depuis 2005 sur les mesures globales afin de combattre les abus durant la garde à vue et pour permettre des enquêtes efficaces sur les allégations de mauvais traitement.

Au vu du caractère et de la complexité des questions soulevées, le Secrétariat est en train de préparer un mémorandum résumant l’expérience des autres pays dans ce domaine afin de leur permettre d'examiner en profondeur les problèmes soulevés par cet arrêt.

            2) Mesures adoptées par les autorités ukrainiennes : Le 25/12/2005, le Conseil Public pour la protection des droits de l’homme « le Conseil »), organe rattaché au Ministère des Affaires intérieures, a été créé. Le Conseil est composé de représentants des ONGs œuvrant dans le domaine des droits de l’Homme et de fonctionnaires importants du Ministère des Affaires Intérieures de l’Ukraine. Il constitue un mécanisme de contrôle public du respect des droits fondamentaux par la police.

Les activités du Conseil englobent trois directions stratégiques : (a) le respect des droits civils et politiques ; (b) garantir les droits de l’homme lors de la détention ou pendant l’enquête ; (c) assurer les droits du personnel des affaires intérieures. Le 31/10/2007, les autorités ont en outre informé le Comité des Ministres de ce que le Conseil avait créé, à compter d’octobre 2007, des conseils publics pour le respect des droits de l’homme au niveau régional. En outre, le Ministère de l’Intérieur a attiré l’attention des responsables régionaux sur leur obligation de coopérer avec le Conseil et ses divisions régionales. Les groupes surveillant le respect des droits de l’homme par le biais de visites sur place, sont organisés avec la participation de membres du Ministère de l’Intérieur et des représentants de communauté. Ces groupes ont effectués 35 visites dans des centres de détention dans 11 régions. Depuis sa création, le Conseil Public a tenu 6 réunions et a lancé des projets pilotes en province.

Des informations complémentaires seraient utiles.sur les activités du Conseil, et notamment, sur ses résultats.

            3) Publication et diffusion : L’arrêt de la Cour européenne a été traduite en ukrainien et publié dans une revue trimestrielle spécialisée « La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. Arrêts. Commentaires » avec les commentaires de l’agent du gouvernement concernant son interprétation et son application dans la procédure judiciaire. Cette revue est distribuée à tous les tribunaux et autorités compétentes. L’arrêt a été également placé sur le site Internet du Ministère de la justice.

Les problèmes soulignés dans l’affaire Afanasyev ont été soulevés durant la formation des magistrats et des organes de la force publique, organisée par le bureau de l’agent du gouvernement et les ONGs et à l’Académie des procureurs de l’Ukraine.

Les Délégués :

1.             prient instamment les autorités ukrainiennes de fournir un plan d’action sur les mesures concrètes afin de combattre les abus durant la garde à vue et d’assurer des enquêtes efficaces sur les allégations de mauvais traitements infligés par la police ;

2.             décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures individuelles et générales.

11901/02          Panteleyenko, arrêt du 29/06/2006, définitif le 12/02/2007

L'affaire concerne en premier lieu une violation du droit du requérant au respect de son domicile en raison de la perquisition effectuée à l'office notarial du requérant en 1999 sans produire au préalable un mandat de perquisition au requérant, ainsi que requis par le Code de procédure pénale ukrainien, ainsi que de la saisie non sélective de documents et de biens personnels à son office (violation de l'article 8).

L'affaire concerne en second lieu la violation du droit du requérant au respect de sa vie privée en raison de la divulgation d'informations sur sa santé mentale par un tribunal, dans le cadre d'une procédure en diffamation. A cet égard, les informations fournies ont été lues à voix haute par un des juges lors d'une audience publique, en méconnaissance de la législation interne établissant un régime spécifique en matière de protection des données personnelles. La Cour européenne a estimé en outre que la demande d'informations sur la santé mentale du requérant, formulée par cette cour était redondante dans la mesure où elle n'avait aucune pertinence par rapport au litige et était par conséquente illégale (violations de l'article 8).


L'affaire concerne en troisième lieu l'atteinte à la présomption d'innocence du requérant dans la mesure où la décision de la cour prise en 2001 de mettre fin aux poursuites à l'encontre du requérant était rédigée en des termes qui ne laissait aucun doute sur la culpabilité du requérant. La Cour européenne a estimé que la rédaction employée par cette juridiction interne, ainsi que les motifs donnés, et confirmés en appel, combinés au rejet de la demande d'indemnisation sur la base des mêmes motifs, constituaient une atteinte à la présomption d'innocence du requérant (violation de l'article 6§2)

L'affaire concerne en dernier lieu une violation du droit du requérant à un recours effectif à l'égard des violations de l'article 8. Ainsi, le requérant n'était pas en mesure d'obtenir une indemnisation au titre de la violation de son droit au respect du domicile. Par ailleurs, bien que le requérant ait obtenu gain de cause en appel, le tribunal saisi n'avait pas mis fin pour autant à la divulgation des informations médicales dans le dossier ni octroyé une indemnisation au requérant (violation de l'article 13).

Mesures de caractère individuel : la Cour européenne a octroyé au requérant une satisfaction équitable au titre du préjudice matériel, subi en raison de la perquisition illégale de ses locaux, et du préjudice moral.

De plus, par lettre du 02/03/2007, les autorités ukrainiennes ont rappelé au requérant la possibilité de demander la réouverture de la procédure mise en cause, suite à l’arrêt de la Cour européenne. Selon les autorités, le requérant n’a introduit aucune demande en ce sens.

La Cour européenne a noté que bien que la divulgation des données confidentielles psychiatriques ait été jugée d’illégale par la Cour d’appel, cela n’a pas abouti à l’adoption de mesures pour supprimer ces informations du dossier du tribunal ni à l’octroi une indemnisation au requérant au titre de l’ingérence illégale dans sa vie privée.

Des informations sont attendues sur la question de savoir si les informations relatives au requérant ont été effacées du dossier du tribunal.

Mesures de caractère général :

            1) Violation de l’article 8

            a) Violation du droit au respect du domicile : Par lettre du 07/09/2007, les autorités ukrainiennes ont attiré l’attention des organes d’enquête impliqués dans l’enquête pénale (le Ministère de l’Intérieur et le Parquet général) sur les conclusions concernant la violation du droit du requérant au respect de son domicile. Par courrier du 20/09/2007, le Parquet général a indiqué que les responsables surveillant la légalité des enquêtes pénales avaient été informés des conclusions de la Cour dans cette affaire. Par lettre du 20/09/2007, le Ministère de l’Intérieur a indiqué que des formations sur les conclusions de la Cour dans cette affaire seraient organisées au niveau régional.

Des informations sont attendues sur les mesures de formation organisées par le Ministère de l’Intérieur au niveau régional.

            b) Violation du droit au respect de la vie familiale : La Cour d'appel a estimé que les juges des juridictions de première instance manquaient de formation dans le domaine de la protection des données à caractère personnel et a saisi le Centre régional des formations judiciaires sur la nécessité de remédier à cette lacune (voir §52 de l'arrêt).

Informations fournies par les autorités ukrainiennes (31/10/2007) : En décembre 2002, la Cour d’appel régionale de Chernihiv a organisé des formations pour les juges sur la législation en matière de compilation, utilisation et diffusion de données à caractère personnel

Des informations sont attendues sur d’autres mesures prises afin de prévenir ou mettre fin à la divulgation de données psychiatriques confidentielles. D’autres formations (particulièrement pour les juges des juridictions de première instance) seraient utiles à cet égard.

            2) Violation de la présomption d'innocence (article 6§2) :

Des informations sont attendues sur un plan d'action avec un calendrier de mise en œuvre et des mesures visant à accroître la sensibilisation des juridictions à tous les niveaux à leur obligation de respecter la présomption d'innocence, conformément à la jurisprudence de la Cour européenne.

2) Violation de la présomption d’innocence (Article 6§2)

• Informations fournies par les autorités ukrainiennes le 31/10/2007 : Par lettre du 07/09/2007, l’attention de la Cour Suprême de l’Ukraine et de ses juges a été attirée sur les conclusions de la Cour européenne dans cette affaire, notamment concernant l’obligation de respecter le principe de présomption d’innocence. Par lettre datée du 20/09/2007, la Cour Suprême a indiqué que l’arrêt avait été envoyé à l’Administration judiciaire de l’Etat pour diffusion auprès des cours d’appel et tribunaux locaux.

Des informations seraient utiles sur d’autres mesures, comme des formations spécialisées pour les juges (particulièrement pour les instances inférieures).

            3) Violations de l'article 13 :

Des informations sont attendues sur un plan d'action avec un calendrier de mise en œuvre et des mesures envisagées pour mettre en place un recours effectif à la disposition des personnes souhaitant contester la légalité des perquisitions et obtenir une indemnisation adéquate, notamment dans des circonstances similaires à la présente affaire.


            4) Traduction, publication et diffusion de l'arrêt de la Cour européenne : L’arrêt a été traduit en ukrainien et placé sur le site Internet du Ministère de la Justice. Il a également été publié au Journal Officiel, n° 19 du 26/03/2007 et un résumé a été publié dans le Courrier du gouvernement n° 44 du 13/03/2007.

L’arrêt, ainsi qu’une circulaire ont été envoyés à toutes les autorités concernées (voir ci-dessus).

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures individuelles et d’un plan d’action accompagné d’un calendrier pour la mise en œuvre des mesures générales.

15007/02          Ivanov, arrêt du 07/12/2006, définitif le 07/03/2007

L'affaire concerne la durée excessive d'une procédure pénale qui a débuté en septembre 1995 et était toujours pendante lorsque la Cour européenne a rendu son arrêt (plus de 9 ans relevant de la compétence ratione temporis de la Cour européenne) (violation de l'article 6§1) ainsi que l'absence de recours effectif pour s'en plaindre (violation de l'article 13).

L'affaire concerne en outre l'atteinte à la liberté de mouvement du requérant en raison des mesures prises à son encontre durant la procédure afin de garantir son engagement à ne pas s'enfuir, ceci pendant environ 10 ans et 4 mois (dont 8 ans et 8 mois relevant de compétence ratione temporis de la Cour européene (violation de l'article 2 du Protocole n° 4).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé au requérant une satisfaction équitable au titre du préjudice moral subi.

Informations fournies par les autorités ukrainiennes (31/10/2007) : La procédure diligentée contre le requérant est terminée. Le 22/05/2007, le Collège des juges aux affaires pénales a rejeté le recours en cassation du requérant. Par conséquent l’arrêt est définitif dans cette affaire.

Mesures de caractère général :

            1) Violation des articles 6§1 et 13 : Le problème de la durée des procédures pénales et de l'absence de recours effectif est examiné dans la cadre de l'affaire Merit (1007e réunion, octobre 2007, rubrique 4.2).

            2) Violation de l'article 2 du protocole n° 4 : La Cour européenne a relevé que la mise en œuvre de l'obligation de ne pas s'enfuir était prévue par la loi et poursuivait un but légitime. Par conséquent, il semble que cette violation découle plutôt de la durée excessive de la procédure pénale.

La Cour européenne a toutefois noté que la simple durée de ces mesures était suffisante pour conclure à leur caractère disproportionné par rapport au but poursuivi, d’autant plus que les charges retenues contres le requérant étaient prescrites en septembre 2000 tandis que des restrictions lui ont été imposées jusqu’à mai 2006.

• Informations fournies par les autorités ukrainiennes le 11/04/2008 : le Code de procédure pénale de l’Ukraine (articles 148, 165 et 165-1) dispose que les mesures préventives doivent être annulées par l’autorité compétente dès qu’elles cessent d’être nécessaires. La décision d’annulation doit être motivée et la personne concernée doit être immédiatement informée.

Evaluation : Les dispositions sur les mesures préventives ne semblent pas fixer de limite dans le temps pour les mesures visant à assurer l’obligation de ne pas se soustraire à la justice imposées. Elles ne prévoient pas davantage d’examens périodiques des restrictions imposées. Ainsi, il semblerait que le respect de la liberté de mouvement de la personne dépende en premier lieu de la diligence des autorités compétentes.

Des informations seraient utiles dans ces circonstances, sur l’existence d’un mécanisme de contrôle assurant que les autorités compétentes se conforment à leurs obligations basées sur la législation précitée et ainsi préviennent des violations à la liberté de mouvement des personnes. 

3) Traduction, publication et diffusion de l’arrêt:L‘arrêt de la Cour européenne a été traduit en ukrainien et placé sur le site Internet du Ministère de la Justice. Il a également été publié au Journal Officiel n° 23 du 10/04/2007. Un résumé de l’arrêt de la Cour a également été publié dans le Courrier du Gouvernement n° 58 du 31/03/2007.

Le 28/04/2007 l’arrêt de la Cour européenne, accompagné d’une note explicative, a été envoyé à la Cour Suprême et à toutes les autorités chargées des enquêtes, à savoir le Ministère des Affaires Internes de l’Ukraine, le Bureau du Procureur Général, le Service de Sécurité de l’Etat et le l’Administration fiscale de l’Etat, en attirant leur attention sur les conclusions de la Cour européenne et en les invitant à les prendre en compte dans leur pratique quotidienne afin d’éviter à l’avenir des violations semblables.

La Cour Suprême a également attiré l’attention des présidents des Cours d’appel sur les conclusions de la Cour européenne dans cette affaire et sur la nécessité de les prendre en compte dans leur jurisprudence.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard à leur 1043e réunion (2-4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales, à savoir sur la pratique actuelle relative à l’imposition de mesures en vue de garantir l’obligation de ne pas s’enfuir ainsi que sur toutes autres mesures prises ou envisagées.


63134/00          Kechko, arrêt du 08/11/2005, définitif le 08/02/2006

L’affaire concerne une violation du droit du requérant au respect de ses biens en raison de l’application rétroactive par les tribunaux internes d’un acte législatif dans une procédure engagée par le requérant. Le requérant, professeur de l’enseignement secondaire, demandait le paiement d’allocations qui lui étaient dues depuis 01/01/01999, se fondant sur la loi de 1996 sur l’éducation.

Lorsque sa demande a été examinée en 2000, les tribunaux internes l’ont rejetée au motif que les dispositions accordant les allocations dont il pouvait se prévaloir avaient été suspendues par la loi relative à l’enseignement secondaire entrée en vigueur le 23/06/1999 et ainsi au moment de l’examen de la demande il n’y avait pas de base légale pour octroyer les allocations.

La Cour européenne a noté que la loi sur l’enseignement secondaire n’était entrée en vigueur que le 23/06/1999 et ne contenait aucune disposition rétroactive. En conséquence, le refus des autorités concernant la période du 01/01/1999 au 23/06/1999 était arbitraire et n’était pas légalement fondé (violation de l’article 1 du Protocole n° 1).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé au requérant une satisfaction équitable couvrant les préjudices matériel et moral subis.

Mesures de caractère général :

Informations fournies par les autorités ukrainiennes : l’arrêt de la Cour européenne a été envoyé à toutes les autorités compétentes, accompagné de lettres de supérieurs hiérarchiques les invitant à prendre en compte les conclusions de la Cour européenne dans leur pratiques, i.e:

            - à la Cour Suprême de l’Ukraine, le 26/06/2006;

            - au Ministère de l’Education et des Sciences de l’Ukraine, le 04/03/2007;

La Cour Suprême a écrit aux présidents des Cours d’Appel afin d’attirer leur attention sur les conclusions de la Cour européenne dans cette affaire.

L’arrêt a été traduit en ukrainien et placé sur le site web officiel du Ministère de la Justice. Il a été publié dans la publication officielle du gouvernement, Journal officiel de l’Ukraine, n°12, 2006.

Les Délégués :

1.             décident de reprendre l’examen de ce point lors de leur 1035e réunion (16 18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             estiment que les autres mesures d’exécution requises ont déjà été adoptées.

6725/03            Lizanets, arrêt du 31/05/2007, définitif le 31/08/2007

L’affaire concerne l’annulation en 2002 d’un arrêt définitif du 17/05/2001 ayant octroyé au requérant une indemnisation pour le préjudice moral et matériel résultant de poursuites illégales. Cet arrêt a été annulé sur la base de nouvelles circonstances découlant de l’annulation par la Cour constitutionnelle d’une disposition de la loi de 2001 sur le budget de l’Etat. Bien que seule la source de paiement de cette indemnisation soit concernée, le tribunal a réexaminé sur le fond l’arrêt du 17/05/2001 en dépit du motif initial de réouverture de l’affaire (violation de l’article 6§1).

L’affaire concerne en outre la violation du droit du requérant à un procès équitable dans la mesure où le Trésor public n’avait pas exécuté l’arrêt du 17/05/2001 rendu en faveur du requérant (violation de l’article 6§1).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé une satisfaction équitable au titre du préjudice moral et matériel subi par le requérant, couvrant également l’indemnisation due en vertu de l’arrêt du 12/06/2002 ayant confirmé l’arrêt du 17/05/2001.

Evaluation : aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général :

            1) Réouverture de la procédure sur la base de nouvelles circonstances : La Cour européenne a relevé que le droit interne ne prévoyait aucune garantie contre une éventuelle atteinte au principe de sécurité juridique étant donné que le tribunal concerné disposait du pouvoir absolu de réexaminer sur le fond une affaire quelque soit le motif de réouverture de l’affaire (§33 de l’arrêt).

Des informations sont attendues sur les éventuelles mesures prises ou envisagées par les autorités pour prévenir de nouvelles violations similaires. Dans l’attente de l’adoption d’une éventuelle réforme législative, les tribunaux internes devraient mettre leur jurisprudence en conformité avec les conclusions de la Cour européenne étant donné l’effet direct de la Convention et des arrêts de la Cour européenne dans l’ordre juridique ukrainien. La confirmation des autorités relative à cette question serait particulièrement utile.

            2) Non-exécution d’un arrêt définitif : cette question est examinée dans le cadre du groupe Zhovner (rubrique 4.2)

Des informations sont attendues sur la publication et diffusion de l’arrêt de la Cour européenne, accompagné d’une note explicative sur les violations constatées, à l’attention des autorités concernées.

3) Publication et diffusion de l’arrêt: Les autorités ukrainiennes ont indiqué que l’arrêt de la Cour européenne avait été envoyé le 14/09/2007 à la Cour Suprême, afin que les conclusions de la Cour européenne soient prise en compte dans sa jurisprudence.


L’arrêt a également été traduit en ukrainien et publié dans le bulletin officiel du gouvernement, Le Journal Officiel de l’Ukraine No. 71/2007. Un résumé de l’arrêt en ukrainien a également été publié dans le Courrier du Gouvernement n° 177 du 27/09/2007.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point :

1.             lors de leur 1035e réunion (16‑18 septembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur le paiement de la satisfaction équitable, si nécessaire ;

2.             au plus tard à leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d'informations à fournir sur les mesures générales.

29458/04+        Sokurenko et Strygun, arrêt du 20/07/2006, définitif le 11/12/2006

L’affaire concerne la violation du droit des requérants à un procès équitable devant un tribunal établi par la loi. En effet, en 2004, dans une procédure relative à un litige d’ordre commerciale la Cour suprême, après avoir cassé une décision rendue par la Haute Cour commerciale, avait confirmé une décision de 2003 de la cour d’appel alors qu’un tel acte n’était prévu ni au Code de procédure commerciale ni dans aucun autre règlement.

La Cour européenne a estimé qu’en outrepassant ses compétences clairement prévues par le Code de procédure commerciale, la Cour suprême ne pouvait être considérée comme un « tribunal établi par la loi » (violation de l’article 6§1).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a octroyé aux requérants une satisfaction équitable au titre du préjudice moral subi.

Suite à l’arrêt de la Cour, le 28/12/2006, le gouvernement de l’Ukraine a informé les requérants de la possibilité prévue par l’article 10 de la loi ukrainienne relative à l’exécution des arrêts et de l’application de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme de demander la réouverture des procédures contestées. Selon les autorités ukrainiennes, les requérants ne se sont pas prévalus de cette voie de recours.

Mesures de caractère général : La Cour européenne a noté que selon le Code de procédure commerciale, la Cour Suprême pouvait, après avoir annulé la décision de la Haute Cour commerciale, soit renvoyer l’affaire pour un nouvel examen par une juridiction inférieure, soit invalider toute la procédure. Elle a cependant confirmé l’arrêt de la cour d’appel alors que ce n’était pas prévu par le Code de procédure commerciale. La Cour a également noté qu’il n’existait pas d’autre disposition étendant la compétence de la Cour à ce type de décisions. Ainsi, il apparaît que la source de la violation constatée réside dans la pratique spécifique de la Cour Suprême qui n’a pas de base légale suffisante dans la législation procédurale pertinente.

Compte tenu de l’effet direct de la Convention et des arrêts de la Cour dans l’ordre juridique ukrainien, la Cour Suprême devrait mettre sa jurisprudence en conformité avec les constatations de la Cour.

La confirmation par les autorités de cet aspect serait particulièrement utile.

Toutefois, il convient de relever que, ainsi qu’il résulte de l’arrêt de la Cour européenne, dans les affaires commerciales la Cour suprême a pour pratique courante d’annuler des décisions de la Haute Cour commerciale de l’Ukraine et de confirmer des décisions des juridictions de première et deuxième instance, bien que cette dernière possibilité ne soit pas prévue par le Code de procédure commerciale (§19 de l’arrêt).

Par conséquent, les autorités devraient envisager d’introduire des amendements appropriés à la législation concernée.

Dans cette affaire, des informations seraient utiles sur les mesures intérimaires prises afin d’assurer le respect de l’arrêt de la Cour, en attendant l’adoption d’éventuelles reformes législatives.

L’arrêt de la Cour européenne a été traduit en ukrainien et placé sur le site Internet officiel du Ministère de la Justice. Il a été publié dans le Official Herald de l’Ukraine, n° 1 du 19/01/2007. Un résumé a été publié dans le Government’s Currier n° 6, du 13/01/2007.

Par lettre du 28/12/2006 les autorités ont attiré l’attention de la Cour Suprême sur les conclusions de la Cour européenne dans cette affaire. L’Agent du gouvernement a également attiré l’attention sur cet arrêt dans le cadre de séminaires et de formations pour les juges.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations à fournir sur les mesures générales.


- 9 affaires contre le Royaume-Uni

46477/99          Edwards Paul et Audrey, arrêt du 14/03/02, définitif le 14/06/02

L'affaire concerne le manquement à l'obligation positive imposée aux autorités nationales de protéger la vie du fils des requérants, tué lors de sa détention provisoire par un autre détenu partageant sa cellule et considéré comme dangereux (novembre 1994). Le fait que les instances impliquées (la profession médicale, la police, le procureur, le tribunal) aient omis de transmettre aux autorités pénitentiaires des informations concernant le deuxième détenu, ainsi que le caractère insuffisant de l'évaluation de ce dernier lors de son arrivée en prison révèlent une violation de l'obligation positive qui incombait à l'Etat de protéger la vie du fils des requérants (violation de l'article 2).

L'affaire concerne également l'absence d'efficacité de l'enquête sur la mort du fils des requérants en raison de l'impossibilité de contraindre le personnel pénitentiaire à témoigner et de l'association insuffisante des requérants à la procédure d'enquête (violation de l'article 2). Enfin, elle concerne le manque de recours effectif à cet égard (violation de l'article 13).

Mesures de caractère individuel : Les autorités du Royaume-Uni ont informé le Comité des Ministres de ce que les services pénitentiaires avaient mené une enquête relative aux questions spécifiques qui préoccupaient encore les requérants. La portée de l'enquête, comprenant 35 questions, a été convenue avec les requérants qui ont également été associés à son déroulement. C'est un agent hautement gradé (avec rang de directeur d'établissement) qui a mené l'enquête et rendu son rapport, aussi bien aux requérants qu'aux autorités qui avaient fait procéder à l'enquête. L'ensemble du personnel des services pénitentiaires qui a été sollicité, a consenti à témoigner. Tous les documents détenus par le service pénitentiaire ont été mis à la disposition des requérants une fois l'enquête terminée et ces derniers ont participé à une réunion avec l'enquêteur. Une réunion s'est tenue avec des agents ayant été témoins directs des faits relatifs à trois questions restantes et une autre réunion a été prévue, concernant plus généralement des délinquants atteints de maladies mentales.

Les requérants ont indiqué en octobre 2004 que trois questions restaient à résoudre, suite à l'enquête menée par les services pénitentiaires, afin d'établir les responsabilités au sein des services pénitentiaires et de prévenir de nouvelles violations. Ils ont également souligné, d'une part, que plusieurs témoins n'avaient pas été entendus lors de cette enquête, et d'autre part qu'ils n'avaient pas été confrontés à certains témoins, vu notamment qu'ils n'avaient pas bénéficié de l'assistance d'un avocat lors de la rencontre et n'avaient pas rencontré tous les agents concernés. En conséquence, l'enquête menée par les services pénitentiaires n'avait pas, selon eux, résolu les deux principaux manquements identifiés par la Cour européenne à l'égard de la première enquête.

Le 07/12/2004, les autorités du Royaume-Uni ont indiqué que l'enquête menée par les services pénitentiaires n'était pas censée remplir à elle seule les obligations découlant de l'article 2 mais visait à remédier aux deux défauts identifiés par la Cour en ce qui concernait la première enquête. Elles ont souligné à cet égard que les deux agents qui avaient refusé de comparaître lors de la première enquête avaient témoigné lors de la deuxième enquête. Les requérants avaient pu consulter des procès-verbaux d'entretiens ; ils avaient en outre rencontré et interrogé directement l'agent des services pénitentiaire dont le témoignage, selon la Cour, aurait pu se révéler important. Non seulement les requérants avaient défini les questions qui avaient servi de mandat à la deuxième enquête mais un dialogue avait eu lieu avec les requérants. Dans ce cadre, des rapports d'étape leur ont été transmis et des réunions ont été organisées. Lors de l'une de ces réunions, les requérants ont pu rencontrer et interroger directement quatre agents qui avaient joué des rôles clés. Par conséquent, les autorités estimaient que l'enquête des services pénitentiaires avait remédié aux deux problèmes identifiés par la Cour par rapport à la première enquête, à savoir à l'absence de pouvoir de contraindre les témoins à comparaître et le caractère non public de la procédure. Les requérants avaient été exclus de cette procédure sauf lorsqu'ils avaient été amenés à témoigner.

En mai 2005, les requérants ont réitéré les critiques qu'ils avaient déjà formulés à l'égard de l'enquête.

Des contacts bilatéraux sont en cours à cet égard.

Mesures de caractère général : Les autorités du Royaume-Uni ont informé le Comité de ce que l'arrêt de la Cour européenne avait été diffusé à toutes les autorités concernées et qu'en outre il avait été publié dans les European Human Rights Reports sous la référence (2002) 35 EHRR 487.

            1) Violation matérielle de l'article 2 : Dans leur lettre du 07/12/2004, les autorités du Royaume-Uni se sont référées à, et dans leur lettre du 23/05/2005 ont fourni des clarifications sur, une série de mesures prises visant à prévenir de nouveaux décès similaires, notamment en améliorant la capacité des autorités concernées à identifier les détenus à risque et en améliorant la communication entre ces autorités.

Ces mesures prévoient :

-           les Rapports d'escorte de détenus, introduits en 2000 ; le nouveau Formulaire d'avertissement de risques de suicide ou d'automutilation, utilisé par toutes les autorités pénitentiaires depuis le 12/01/2004 ;

-           une étude pilote début 2004 sur l'emploi par la police d'une variante de ce formulaire et ayant conduit à l'adoption de ce système par les forces de police participant à cette étude, et à une réflexion sur une éventuelle utilisation plus large par les autres forces de police ;


-           l'examen de la question d'utiliser le Réseau informatique national de la police afin de permettre à la police d'identifier les personnes qui présentaient un danger pour elles-mêmes au début de leur détention, ceci soulève néanmoins des problèmes sérieux en matière de sécurité des informations et de protection des données ;

-           des mesures prévoient que les informations sur les détenus présentant des risques soient partagées avec le service de probation / la cellule sur les mineurs délinquants si nécessaire ;

-           le développement d'un nouveau processus d'évaluation dès l'arrivée des détenus sur leur lieu de détention, ce qui a permis de déceler davantage de problèmes sanitaires sérieux ou immédiats ;

-           la mise en place au niveau national en juin 2002 d'une évaluation des risques liés au partage d'une même cellule, cette évaluation doit être complétée pour chaque prisonnier dès la première nuit de leur arrivée et avant leur placement dans une cellule précise et se poursuivre par la suite en prenant en compte les meurtres dans les prisons de Leeds et Manchester, ainsi que la procédure suivie dans l'enquête sur l'affaire Mubarek ;

-           une stratégie de réduction de la violence lancée en mai 2004.

Le Secrétariat tient à la disposition des délégations intéressées le détail de ces mesures, ainsi que de plus amples informations sur la santé mentale dans le système pénitentiaire.

Autres informations fournies par les autorités du Royaume-Uni : Le gouvernement est satisfait du système en place concernant l'évaluation des risques liés au partage d'une même cellule (ERPC). Il note que l'ERPC fait partie intégrale de la stratégie pour la réduction de la violence (SRV), qui est soumise à une révision. Il n’est pas envisagé de modifier substantiellement le processus de l'ERPC. Cependant, suite aux recommandations contenues au rapport d'enquête dans l'affaire Mubarek (publié le 30/06/2006), il est proposé de modifier l'ERPC pour clarifier/re-souligner quelques aspects du processus, notamment pour :

-           que chaque détenu qui arrive dans une aile pénitentiaire sans copie du formulaire ERPC soit placé obligatoirement dans une cellule individuelle jusqu'à ce que le formulaire soit trouvé ou qu’un autre soit rempli ;

-           rappeler aux agents que le formulaire ERPC doit être utilisé pour la réévaluation d'un détenu si un événement significatif causant des problèmes intervient ;

-           rendre obligatoire la tenue d’un registre des détenus qui sont désignés comme détenus présentant des risques élevés ou moyens ; et

-           assurer que chaque établissement ait une stratégie de réduction de la violence clarifiant les responsabilités individuelles de chaque agent en vue de réduire la violence : cette stratégie doit faire l’objet d'un contrôle et d’une évaluation stricte pour mesurer les progrès, y compris les voies de fait graves.

Des informations complémentaires sont attendues sur la question de savoir si le Gouvernement a l’intention d’adopter d'autres mesures à la lumière des constats et recommandations Mubarek sur les rapports d'escorte de détenus, le processus d'évaluation dès l'arrivée des détenus sur leur lieu de détention et le flux d'informations.

            2) Violation procédurale de l'article 2 et violation de l'article 13 :

Informations fournies par les autorités:

            a) le Crown Prosecution Service (le CPS : « les procureurs ») : Les autorités ont fait référence à un rapport de juillet 2003 de l'Attorney General sur le rôle et les pratiques des procureurs (le CPS) dans les affaires de décès de détenus. Les autorités ont indiqué que certaines des mesures annoncées en juillet visant à améliorer le traitement par le CPS de cas de décès de détenus sont déjà en place et d'autres sont en cours.

            b) le médiateur pour les prisons et pour la libération conditionnelle : Le 27/09/2004, les autorités du Royaume-Uni ont indiqué que la compétence en matière d'enquête sur les décès de détenus avait été transférée des services pénitentiaires au médiateur pour les prisons et pour la libération conditionnelle (PPO) depuis le 01/04/2004. Toutefois, celui-ci est chargé principalement de l'assistance aux familles pendant l'enquête. Le 07/12/2004, les autorités ont indiqué que ce transfert avait été effectué uniquement sur une base administrative. Tant que le transfert n'aura pas été effectué sur une base législative, le PPO ne sera pas compétent pour contraindre les intéressés à témoigner.

            c) la réforme du système des Coroners :Le Royaume-Uni a indiqué que l'enquête judiciaire du Coroner demeurait le principal moyen pour l'Etat de répondre aux exigences de l'article 2 dans de tels cas.

Les autorités du Royaume-Uni se sont référées au rapport de juin 2003, « La Certification des décès et les enquêtes sur les décès en Angleterre, au Pays de Galles et en Irlande du Nord - le Rapport d'une étude détaillée, 2003 » qui a identifié certains points faibles dans le système actuellement en vigueur (y compris la nécessité de mieux définir et d'élargir le rôle du Coroner, de mieux former les coroners et leurs assistants et d'impliquer davantage et plus clairement les familles des disparus).

Le draft Coroner Reform Bill (avant projet de loi réformant le système desCoroners) a été publié le 12/06/2006.

Les amendements principaux concernant cette affaire comprennent :

- le devoir d'enquêter sur un décès lorsque le défunt était détenu en prison ou en garde à vue (partie I, l'article I).


- le cas échéant, afin d'éviter une violation des droits écoulant de la Convention dans le sens du Human Right Act 1998, l'objet de l'enquête sera étendu à l'établissement des circonstances dans lesquelles le défunt a trouvé le mort (partie I, article 10).

- Une charte pour les personnes endeuillées indiquant les droits de ces personnes dans le processus d'examen et d'enquête par un coroner sera élaboré (un projet de la charte est annexé au projet de loi).

- une catégorie de « personnes ayant droit » aura le droit de former un recours à l'encontre d'une décision du coroner dans le cadre de l'enquête (partie IV, article 60 et partie V, article 42).

- les coroners se verront octroyer des pouvoirs en vue d'obtenir des informations pertinentes pour les enquêtes, y compris le pouvoir de convoquer des témoins et de contraindre la production d'éléments de preuves dans le cadre de leurs enquêtes (partie III, article 42).

Le 01/08/2006, la House of Commons Constitutional Affairs Committee (commission parlementaire sur les affaires constitutionnelles) a émis son rapport sur l'avant projet du loi. Elle a reconnu que le Gouvernement avait introduit certaines reformes raisonnables concernant le processus d'examen et d'enquête dans les parties I et III de l'avant projet de loi. Elle s'est félicitée du projet de charte pour les personnes endeuillées mais elle a indiqué que le fait d'encourager les attentes des endeuillés risquait d'aboutir à grandes déceptions si le financement de la réforme du système de coroners s'avérait insuffisant. Tout en reconnaissant utile le droit pour les proches de personnes décédées de former un recours contre une décision prise par un coroner, elle a recommandé de restreindre la catégorie de « personnes ayant droit » et de limiter les décisions des coroners susceptibles de recours.

La réponse du Gouvernement à ce rapport a été publiée le 07/11/2006. La réponse du Gouvernement à la consultation publique élargie a été publiée le 27/02/2007. Aucune modification au projet de loi n'est envisagée, pour limiter, d une manière significative, les nouveaux droits proposés du plus proche parent, y compris de former un recours contre une décision prise par un coroner, dans le cas ou l'article 2 s'applique. Des modifications mineures ont été faites pour clarifier la procédure de recours, elles affecteront les membres de la famille qui ne sont pas les plus proches parents mais les «  personnes ayant droit » dans l'affaire. Le projet de loi sera introduit au Parlement dès que possible.

Des informations sont attendues sur l'état d'avancement de toutes ces réformes.

Informations reçues de la société civile: Il convient de remarquer que le 05/07/2006 un document d'information relatif à cette affaire, transmis par l'ONG Prison Advice Service qui est également le représentant des requérants, a été placé sur le site Internet du Comité des Ministres : (http://www.coe.int/T/CM/WCD/humanrights fr.asp#), conformément à la Règle 9.2.

• Des informations fournies par les autorités du Royaume-Uni sont en cours d’évaluation.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière des informations complémentaires fournies sur les mesures générales

27229/95          Keenan, arrêt du 03/04/01

L'affaire concerne les traitements inhumains et dégradants infligés en 1993 au fils de la requérante en raison de ses conditions de détention, notamment le fait d'infliger tardivement une sanction disciplinaire lourde (sept jours d'isolement et vingt-huit jours de détention supplémentaires, quelques jours seulement avant la date prévue pour sa sortie), ce qui n'était pas conforme au niveau de traitement requis pour un malade mental (violation de l'article 3).

L'affaire concerne également l'absence de recours effectif à la disposition du fils de la requérante pour contester les sanctions disciplinaires auxquelles il a été assujetti (violation de l'article 13), ainsi que l'absence de recours effectif à la disposition de la requérante, après le suicide de son fils, puisqu'elle ne pouvait demander une réparation et qu'elle ne disposait d'aucun recours permettant d'établir les responsabilités pour la mort de son fils (violation de l'article 13).

Mesures de caractère individuel: La Cour européenne a alloué à la requérante une satisfaction équitable au titre du préjudice moral subi par son fils décédé et au titre de son propre préjudice moral. 

Mesures de caractère général : L'arrêt de la Cour européenne a été publié dans le European Human Rights Reports, sous la référence (2001) 33 EHRR 38.

         1) Violation de l’article 3 : Une révision de la politique de détention en isolement dans les prisons (PSO 1700) que tous les établissements pénitentiaires sont tenus de suivre, a été approuvés par les directeurs en juillet 2003 et ont pris effet dans ces établissements le 17/11/2003.

Cette politique révisée prévoit en particulier :

- l'exigence que le personnel travaillant dans l'unité d'isolement soit suffisamment formé dans le domaine de la prévention du suicide et sensibilisé aux maladies mentales ;

- la nouvelle procédure préventive appliquée à tous les détenus placés en isolement, visant à assurer que leur état de santé mentale soit correctement évalué ;


- une fiche de suivi doit être établie à l'égard de chaque détenu placé en isolement, afin d'aider les agents des établissements pénitentiaires à identifier tout changement de comportement d'un détenu tendant à indiquer qu'il ne supporte pas le régime d'isolement.

- Par ailleurs, selon la nouvelle procédure mise en place, dans chaque cas où le personnel médical déconseille l'isolement pour des raisons de santé, le directeur de l'établissement, les agents concernés, le personnel soignant, un médecin ainsi qu'un psychiatre externe doivent se réunir afin de décider des suites à donner.

Enfin, le Statutory Instrument 2005 n° 3437 a révisé le règlement pénitentiaire de 1999 afin d'assurer la prise en compte cette nouvelle politique. L’article 14 qui modifie la Règle 58, dispose qu’avant de décider sur l’imposition d’une peine de détention en isolement, le directeur de l’établissement ou tout autre responsable chargé de la prise de la décision (adjudicator ou reviewer, voir ci-dessous) doit s’assurer auprès d’un médecin ou d’un infirmier ou d’une infirmière dûment qualifiés qu’il n’existe pas de raison médicale indiquant qu’une telle peine n’est pas appropriée et cet avis doit être pris en considération pour la prise de décision.

Premier bilan par les autorités du Royaume-Uni : Les autorités du Royaume-Uni ont indiqué que le document PSO 1700 et sa norme d’exécution étaient en cours de soumission à la procédure de révision, à laquelle tout document directif est soumis tous les 2 à 3 ans. Les autorités estiment néanmoins que les procédures de révision et d’exécution adoptées suite à l’arrêt garantissent la mise en œuvre rapide des changements et modifications de directives dans le système pénitentiaire.

Informations complémentaires fournies par les autorités du Royaume-Uni : Le processus de révision fait désormais partie d’un examen plus vaste englobant d’autres questions, telles que notamment un recours limité aux mesures d’isolement, des mesures alternatives et l’encadrement des détenus ayant des problèmes de santé mentale. Le rapport issu de cette étude devrait être disponible en automne 2007.

Des informations complémentaires attendues sur l’état d’avancement de la procédure de révision.

         2) Violation de l’article 13 (recours pour contester les sanctions disciplinaires) : l'instruction PSO 2510 a établi de nouvelles procédures de plaintes pour les détenus dès février 2002. Ainsi, dans toutes les ailes des prisons, une boîte confidentielle est mise à la disposition des détenus. Ils peuvent y retirer un formulaire de plainte et le déposer une fois rempli. La réponse doit dans la plupart des cas être rendue dans les trois jours ouvrables ; pour les plaintes concernant le personnel pénitentiaire, le délai est de dix jours ouvrables.

(a) Voies de recours relatives aux sanctions disciplinaires imposées par des adjudicateurs indépendants, notamment pour des jours ajoutés à la peine : En ce qui concerne la possibilité pour les détenus, dans le cadre de ces nouvelles procédures, de contester de manière efficace les sanctions disciplinaires qui leur sont imposées, les autorités du Royaume-Uni ont souligné que le règlement pénitentiaire avait été amendé en 2002 à la suite de l'arrêt Ezeh et Connors.

Elles ont notamment mis en avant les règles n° 53A, 54(3) et 55A qui régissent les nouvelles procédures à suivre devant un magistrat spécial, dans tous les cas où le détenu mis en cause encourt une peine de journées de détention supplémentaires, et donnent au détenu le droit d'être représenté par un défenseur.

Le Statutory Instrument 2005 No. 869 a révisé le règlement pénitentiaire de 1999 pour prévoir un contrôle judiciaire d’une peine imposée par un adjudicator. Le contrôle doit être initié dans les 14 jours suivant la réception de la demande, et le reviewer peut soit substituer une autre peine, soit l’annuler complètement. La demande de contrôle judiciaire d’une peine de jours supplémentaires n’a pas d’effet suspensif à l’égard de l’exécution de la peine.

Les normes sur les adjudications ont été révisées en juillet 2002 pour inclure l’obligation de mettre en place un système accéléré pour les contrôles urgents, dans chaque prison. Les demandes de contrôle des sanctions imposées par les adjudicators indépendants (qui sont désormais investis du pouvoir d’imposer les peines de journées de détention supplémentaire) sont examinées par le Juge de circonscription (Senior District Judge) ou son adjoint à un tribunal d’instance précis, à savoir la Horseferry Road Magistrates’ Court, et doivent être envoyées par fax en cas d’urgence. Le Senior District Judge examine ces demandes dans les 14 jours.

Informations complémentaires fournies par les autorités du Royaume-Uni : Dans des cas de figure semblables à ceux évoqués plus haut, dans les affaires urgentes, le juge doit rendre sa décision dans les 14 jours ; cependant il le fait normalement dans les 2 à 5 jours ouvrables. Lorsqu’un détenu est déjà en train de purger une peine de jours supplémentaires, le Service judiciaire traite le dossier le jour même et le transmet au juge compétent pour décision. Si le juge casse ou modifie la sanction disciplinaire, le Service judiciaire en informe la prison par fax et par téléphone. Si le détenu est représenté par un solicitor, le Service judiciaire le contacte par téléphone, lui transmet la décision par fax et lui propose de prendre contact avec la prison pour vérifier que la procédure de libération est mise en route. Si par contre le juge confirme la sanction disciplinaire, la notification à la prison et au détenu (et/ou son conseil juridique) est effectuée par courrier.

Evaluation : il apparaît ainsi que les détenus disposent d’un moyen leur permettant d’attaquer des sanctions disciplinaires imposées par les adjudicators indépendants.


(b) Voies de recours contre les sanctions imposées par les directeurs d’établissement, notamment les mesures d’isolement : Le règlement pénitentiaire a été révisé et republié en tant que document PSO 2000. Il est entré en vigueur le 23/01/2006. Il rend obligatoire dans chaque prison la mise en place d'un système accéléré pour les demandes urgentes de contrôles des adjudications qui ont été conduites par les directeurs de l'établissement, par exemple dans le cas où le détenu est en train de purger sa peine ou sur le point d'être libéré. Le document PSO 2000 prévoit que dans de telles situations, il peut s'avérer nécessaire d'envoyer les documents de l'adjudication par fax à l'entité qui traite les demandes de contrôles.

Tout détenu qui s’est vu infliger une peine d’isolement peut adresser une plainte au directeur de l’établissement. Cette plainte sera envoyée au Briefing and Casework Unit dans le Prison Service HQ pour que l’administrateur responsable pour le secteur puisse confirmer ou non la peine ou bien imposer une peine plus légère. Si le détenu n’est pas satisfait, il peut adresser une plainte au Médiateur des Prisons et du service de la Probation qui peut faire une recommandation au Directeur Général du Service de Prison. Cette recommandation est en général acceptée, mais elle ne lie pas le service de prison et pourrait être rejetée dans de rares cas. En outre, le Médiateur des Prisons et du service de la Probation est désormais compétent pour contrôler les procédures disciplinaires ainsi que le bien-fondé des décisions prises dans ce cadre (bien qu'il ne soit pas habilité à substituer sa propre décision à celle prise dans le cadre de la procédure elle-même). Si le Médiateur estime qu'une plainte est bien fondée, le Service pénitentiaire peut annuler la décision disciplinaire.

Des informations sont attendues sur le laps de temps entre la soumission de la plainte d’un détenu et la prise de décision par l’administrateur responsable.

Certaines questions en suspens à l’égard ces mesures seront clarifiées bilatéralement.

         3) Violation de l'article 13 (recours suite au suicide d’un prisonnier) : des questions similaires sont en cours d'examen dans le cadre de l'affaire Edwards (arrêt du 14/03/2002) (rubrique 4.2).

• Des informations fournies par les autorités du Royaume-Uni sont en cours d’évaluation.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de la 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière d’informations complémentaires à fournir sur les mesures générales.

28212/95          Benjamin et Wilson, arrêt du 26/09/02, définitif le 26/12/02

Les requérants ont été initialement condamnés à une peine discrétionnaire de réclusion à perpétuité mais ont par la suite obtenu le statut de condamnés « techniques » à perpétuité (forme de commutation de la peine accordée à un condamné à perpétuité dont il est reconnu qu’il était atteint d'un trouble mental ayant sérieusement influencé son comportement au moment de l'infraction sans que le tribunal ne l'ait condamné à un internement psychiatrique, et qui par conséquent doit être considéré comme un patient et non comme un prisonnier). L’affaire concerne le fait que les requérants, en tant que condamnés « techniques » à perpétuité, n'avaient pas été en mesure d'exercer leur droit d'introduire, devant un tribunal habilité à statuer sur la légalité de leur détention, un recours contre leur maintien en détention après l'expiration de la période punitive de leurs peines, conformément aux exigences de la Convention. Au moment des faits, les requérants étaient détenus à l'hôpital, or, selon les dispositions pertinentes du Mental Health Act 1983 (loi de 1983 sur la santé mentale), le tribunal compétent pour connaître des questions de santé mentale (Mental Health Review Tribunal - MHRT) pouvait recommander mais pas ordonner leur libération (violation de l'article 5§4).

Mesures de caractère individuel : Le premier requérant a été condamné en 1983. Sa peine comportait une période punitive de six ans qui a expiré en 1989. En octobre 1993, le Secrétaire d'Etat a déclaré le requérant « techniquement » condamné à perpétuité, puis l'a libéré sur recommandation du Tribunal le 09/01/2001.

Le second requérant a été condamné en 1977 ; la période punitive de sa peine, fixée à huit ans, a expiré en 1984. En juin 1993, il a été déclaré « techniquement » condamné à perpétuité. Il est actuellement détenu dans un hôpital psychiatrique sécurisé. Le 10/01/2006, le MHRT a contrôlé la détention de M. Wilson, et a constaté que les conditions statutaires pour sa détention continuent d'être remplies.

• Développements récents : Les informations fournies le 17/08/2006 et 08/02/2007 concernant les « condamnés techniques à perpétuité » s'appliquent au cas de M. Wilson (voir dessous : mesures de caractère général).

Evaluation : Le 30/08/2007, des clarifications ont été demandées sur la manière dont le contrôle de la détention dans des cas comme celui de M. Wilson remplit l'exigence de la Convention selon laquelle l’instance contrôlant le maintien en détention doit être habilité à statuer sur la légalité de la détention et à ordonner la libération si la détention est illégale.

Mesures de caractère général : Selon les conclusions de la Cour dans cette affaire (voir §§36-37 de l'arrêt), le MHRT n'a pas rempli les exigences de l'article 5§4 de la Convention car il ne pouvait qu'émettre des recommandations et n'avait pas le pouvoir de libérer les détenus.

• Informations fournies par les autorités du Royaume-Uni : L'arrêt a été publié dans les Européen Human Reght Reports sous la référence (2003) 36 EHRR 1.


De plus, depuis le 02/04/2005 seule la Commission de libération conditionnelle est compétente pour autoriser la libération de toute personne condamnée à la prison à perpétuité sous le régime du « life licence » (c'est à dire les conditions de libération spécifiquement applicables aux personnes condamnées à la perpétuité).

• Informations complémentaires fournies le 17/08/2006 et 08/02/2007 par les autorités du Royaume-Uni : Les personnes condamnées à perpétuité et détenus dans des hôpitaux (y compris le groupe de détenus restant qui ont vu leurs peines commuées en condamnations « techniques » à perpétuité) peuvent saisir le MHRT entre 6 mois et 12 mois suivant leur détention, et durant chaque période suivante de 12 mois. De plus, le Secrétaire d'Etat peut renvoyer à tout moment l'affaire devant le MHRT, et est obligé de le faire tous les trois ans. Suite à une demande ou un renvoi au MHRT, celui-ci notifie au Secrétaire d'Etat s'il estime que le détenu continue de remplir les conditions de détention dans un hôpital ou si le détenu peut être libéré définitivement ou libéré avec conditions.

            1) Détenus bénéficiant du statut de condamnés « techniques » à perpétuité : Les détenus qui ont vu leur peine commuée en condamnation « technique » à perpétuité (comme M. Wilson) sont traitées en tant que patients selon les articles 37 (hospital orders, ordonnances d'hospitalisation) et 41 (restriction orders, ordonnance de restriction) de la loi de 1983 sur la santé mentale (Mental Health Act 1983), et si le MHRT recommande leur libération, ces patients seront libérés sans renvoi devant la Commission de libération conditionnelle.

Il ressort des informations fournies le 08/02/2007 que le tribunal recommande la libération (soit absolue, soit conditionnelle) en application de l'article 74(1)(a) du Mental Health Act. Le Secrétaire d’Etat compétent accepte la recommandation. Bien qu'il ait le droit de refuser la libération, il n'a jamais en pratique refusé une libération. En vertu de l’article 74(3) du Mental Health Act, lorsque le tribunal informe le Secrétaire d’Etat compétent que le patient pourrait bénéficier d’une libération absolue ou conditionnelle et que le Secrétaire d’Etat ne l'accepte pas dans un délai de 90 jours, le patient doit être renvoyé en prison. Sa détention sera contrôlée par la Commission de libération conditionnelle en application de l'article 28 du Crime (Sentences) Act 1997. Il est alors traité comme un détenu n'ayant pas été, ou n'étant plus, hospitalisé.

Lorsque le tribunal recommande la libération en vertu de l'article 74(1)(b) du Mental Health Act mais en même temps recommande, en vertu de l’article 74(1)(b) de la loi que le patient demeure hospitalisé en cas de non-libération, et que le Secrétaire d’Etat n’ordonne pas la libération du détenu dans les 90 jours, l'affaire est renvoyée à la Commission de libération conditionnelle. Lorsque la Commission ordonne ou recommande que le patient est en droit d'être libéré (soit absolue soit conditionnelle) de la prison ou l'institution où il aurait été détenu s'il n'avait pas été hospitalisé, les restrictions prennent fin à partir du moment où il est en droit d'être libéré. Le patient est ensuite traité en tant que patient non soumis aux restrictions et peut être libéré par le médecin responsable ou le tribunal.

Evaluation : Il semblerait d’après ces informations que les détenus bénéficiant du statut de condamnés « techniques » à perpétuité ne soient toujours pas en mesure d'introduire un recours devant un tribunal habilité à statuer sur la légalité de leur détention, contre leur maintien en détention (il semblerait que le Secrétaire d’Etat ait toujours la possibilité de refuser leur libération une fois qu’elle a été recommandée par le MHRT). Des contacts bilatéraux sont en cours afin de clarifier ce point. 

            2) Les détenus condamnés à perpétuité « transférés » : Dans le cas d'un détenu condamné à perpétuité transféré (un détenu condamné à la prison à perpétuité qui n’a pas demandé, ou n’a pas pu demander, avant le 02/04/2005 de bénéficier du statut de condamné « technique » à perpétuité et qui est actuellement détenu dans un hôpital), le Ministre de l'intérieur renvoie l'affaire automatiquement au tribunal lorsque le tariff a expiré ou est sur le point d'expirer.

Le 29/08/2006, les autorités du Royaume-Uni ont indiqué que si le MHRT estime que le détenu ne remplit plus les conditions de détention dans un hôpital, il peut recommander, en application de l'article 74 de la loi de 1983 sur la santé mentale, que le détenu soit libéré, et que cette libération soit assortie ou non de certaines conditions. Le renvoi devant la Commission de libération conditionnelle est alors obligatoire. La Commission examinera si un tel détenu doit être libéré sous conditions.

Le 08/02/2007, les autorités du Royaume-Uni ont indiqué que si le tribunal recommande le libération absolue ou conditionnelle, le Ministre de l'intérieur peut soit accepter la libération du détenu dans un délai de 90 jours soit renvoyer l'affaire à la Commission de libération conditionnelle. Il convient de noter que quand le Ministre renvoie une telle affaire à la Commission, le contrôle a lieu dans le cadre d'une d'audience orale dans un délai de 55 jours ouvrés. Les circonstances particulières de l'affaire seront toujours prises en compte et le contrôle peut avoir lieu plus tôt. La Commission continue d'exercer ses compétences sur les affaires lorsqu'un tribunal MHR décide que le patient a droit à une libération absolue ou conditionnelle et que le Ministre n'accepte pas de le libérer.


•  Evaluation : Il est à noter que l’arrêt de la Cour européenne n’a pas remis en cause le système des condamnés « techniques » à perpétuité en tant que tel mais uniquement la manière dont la libération de ces détenus est décidée. Il semblerait que l’effet principal de l’abolition de la possibilité de demander à bénéficier de ce statut soit d’imposer de plus grandes restrictions à cette catégorie de détenus (qui semblerait ne plus pouvoir bénéficier d’une libération sans condition mais être dans tous les cas soumis à une libération conditionnelle).

Les autorités du Royaume-Uni ont été invitées le 30/08/2007 à formuler leurs observations concernant cette évaluation.

Des questions concernant la Commission de libération conditionnelle ont été examinées dans le cadre de la surveillance de l’exécution de l’affaire Stafford (rubrique 6.2).

Développement récent : par courrier du 10/04/2008, les autorités ont fourni des informations sur les mesures générales. Le Secrétariat est en train d’évaluer ces informations.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière de l’évaluation des informations fournies concernant les mesures générales ainsi que les mesures individuelles relatives à M. Wilson dont l'adoption est étroitement liée aux mesures générales.

36256/97          Thompson, arrêt du 15/06/2004, définitif le 15/09/2004

41534/98          Bell, arrêt du 16/01/2007, définitif le 16/04/2007

L'affaire Thomson concerne la détention et la procédure sommaire menée à l'encontre du requérant en 1997, conformément aux textes applicables avant l'entrée en vigueur de la loi de 1996 sur les forces armées, par son chef de corps de l'armée de terre, procédure ayant abouti à la condamnation du requérant pour absence sans autorisation. L’affaire Bell concerne le jugement du requérant et sa condamnation en 1997 pour insubordination, dans le cadre d’une procédure sommaire devant le chef de corps de l’armée en vertu de la nouvelle législation applicable après l’entrée en vigueur le 01/04/1997 de la loi sur les forces armées.

Dans l’affaire Thompson, la Cour européenne a relevé que les craintes du requérant quant à l'impartialité de la décision de son chef de corps sur la nécessité de le placer en détention provisoire pouvaient passer pour objectivement justifiées, puisque le chef de corps pouvait jouer un rôle central dans l'accusation et était également responsable de la discipline parmi ses subordonnés. Ainsi, il ne pouvait être considéré comme indépendant des parties à la procédure (violation de l'article 5§3). De plus, le requérant se trouvait dans l'impossibilité d'obtenir une réparation pour sa détention contraire à la Convention, puisque cette détention n'était pas illégale en droit interne (violation de l'article 5§5).

Dans les deux affaires la Cour européenne a estimé que, le chef de corps ayant à la fois joué un rôle central dans l'accusation et agi comme unique juge, les requérants n'avaient pas bénéficié d'un procès équitable devant un tribunal indépendant et impartial (violations de l'article 6§1). A cet égard la Cour a souligné que l'on ne pouvait considérer que les requérants, en choisissant une procédure sommaire plutôt qu'une cour martiale, aient renoncé à leurs droits découlant de la Convention.

Enfin, la Cour a conclu à une atteinte au droit des requérants à un procès équitable dans la mesure où l'exclusion de l'assistance d'un défenseur dans le cadre de la procédure sommaire n'était pas conforme aux exigences de la Convention selon lesquelles une personne accusée en vertu du droit pénal et qui ne souhaite pas se défendre elle-même doit pouvoir bénéficier de l'assistance d'un défenseur de son choix (violations de l'article 6§3c).

Mesures de caractère individuel : Dans l’affaire Thompson, le requérant a plaidé coupable et a été relâché après avoir été détenu 28 jours par l’armée. D’autres procédures contre le requérant ont été classées. Dans l’affaire Bell, le requérant a plaidé non coupable. Il a été condamné à 7 jours de détention et a purgé sa peine.

La Cour européenne a considéré dans les deux arrêts que les constats de violation de la Convention constituaient en eux-mêmes une satisfaction équitable suffisante pour tout dommage moral subi par les requérants.

Evaluation: Aucune mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général: L’arrêt a été publié dans l’European Human Rights Reports sous la référence (2005) 40 EHRR 11. L’arrêt Bell a été publié dans l’All England Digest sous la référence [2007] All ER (D) 62 (Jan). Le lien vers cet arrêt sur le site Internet de la Cour européenne a été envoyé aux autorités de poursuite des trois armées.

            1) Violation de l'article 5§3 :  Ces affaires sont à rapprocher de l'affaire Hood (arrêt du 18/02/99), close par la résolution ResDH(2000)82, suite notamment à l'introduction, en vertu des règles 20-24 du Règlement de 1997 sur les enquêtes et procédures sommaires menées par l'armée (Investigation and Summary Dealing (Army) Regulations 1997), de nouvelles garanties en matière de détention décidée par le chef de corps. Le 09/01/2006 les autorités britanniques ont fourni des informations complémentaires sur les changements significatifs apportés au règlement sur la détention dans l’armée, entrés en vigueur en 2000.


Ils prévoient des garanties supplémentaires pour les personnes détenues avant et après leur mise en accusation.

            2) Violation de l'article 5§5 : Ces affaires sont à rapprocher de l'affaire O'Hara (arrêt du 16/10/01), rubrique 6.2. Les mesures adoptées peuvent être résumées comme suit : Selon l'article 6(1) du Human Rights Act (HRA), il est illégal pour une autorité publique d'agir de manière incompatible avec un droit protégé par la Convention. Selon l'article 8 du HRA, lorsqu’un tribunal constate un tel acte illégal il a le pouvoir d'accorder une réparation à la personne lésée.

            3) Violations de l'article 6§1 et 6§3c :

• Informations fournies par les autorités du Royaume-Uni : Les problèmes constatés semblent différents de ceux soulevés dans le cadre des autres cas de procédures militaires, dans la mesure où il s'agit dans la présente affaire non d'une cour martiale mais d'une procédure sommaire.

Concernant la violation de l’article 6§1, les amendements introduits par la loi de 2000 sur les procédures disciplinaires dans les forces armées et entrés en vigueur le 02/10/2000 prévoient que :

- les peines qui peuvent être prononcées par une cour martiale sont limitées à celles qui peuvent être prononcées par le chef de corps pendant une procédure sommaire ;

- une fois la cour martiale saisie, le procureur ne peut amender, substituer ou prévoir d’autres chefs d’accusation sans l’autorisation écrite de l’accusé ou sans renvoyer les nouveaux chefs d’accusation au chef de corps pour examen préliminaire ;

- l’accusé aura la possibilité de demander l’examen par la cour martiale avant que le chef de corps ne commence la procédure sommaire (au lieu d’offrir cette possibilité à l’accusé seulement quand le chef de corps considère que l’accusé est coupable) ;

- il existe désormais un droit d’appel des procédures sommaires devant la Cour d’Appel (Summary Appeal Court SAC).

D’autres garanties ont été introduites afin de s’assurer que les militaires accusés soient informés de leurs droits statutaires et puissent en faire usage.

Dans l’affaire Baines [2005] EWHC 1399 (Admin) (23/06/2005), la High Court a indiqué que les soldats disposaient pleinement du droit de choisir d’être jugé par une cour martiale (§56). La High Court a en outre relevé que « l’enquête » menée par le Chef de corps en vertu de l’article 76 du Army Act de 1955 impliquait la prise en compte d’informations issues de l’enquête menée par les services de police de manière à permettre au Chef de corps de décider de classer ou non l’affaire sans audience préalable, de décider s’il est compétent en la matière, ou de la déférer à une autorité supérieure en vue de la transmettre à une cour martiale (§29).

Concernant la violation de l’article 6§3, il peut être noté que :

- un militaire a droit à l’assistance d’un défenseur et à l’assistance judiciaire pour la procédure en appel. Il a également le droit à l’assistance d’un avocat pour les audiences préliminaires.

- un militaire accusé n’a pas droit à un avocat lors d’une procédure sommaire, mais peut néanmoins obtenir l’assistance d’un avocat à ses frais, y compris pour décider du type de procès.

- Lors de la procédure sommaire, le militaire a droit à l’assistance du « conseiller de l’accusé ».

- au Royaume-Uni, les noms des cabinets d’avocats dans les villes de garnisons sont connus des militaires, et ces cabinets sont souvent contactés par les militaires.

- en dehors du Royaume-Uni, le personnel militaire peut obtenir des conseils juridiques gratuits provenant des avocats de la Royal Air Force.

Le 26/10/2007, les autorités ont fourni une copie du document « Information sur le droit de choisir la cour martiale » et le 07/11/2007, une copie de la version mise à jour en 2007 de la brochure « Les droits des soldats arrêtés ou accusés d’infraction en vertu de la loi sur l’armée de 1955 ».

• Le 14/05/2008, un courrier a été envoyé aux autorités du Royaume Uni en vue de demander la clarification de certaines questions.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ces points au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière des informations complémentaires à fournir sur les mesures générales.

45508/99          H.L., arrêt du 05/10/2004, définitif le 05/01/2005

Cette affaire concerne la détention du requérant en 1997 dans un hôpital psychiatrique. Le requérant, un autiste incapable de consentir à son admission et à son internement à l’hôpital mais ne s’y étant pas opposé, a été admis comme patient « informel », conformément à l’article 131(1) de la loi de 1983 sur la santé mentale, lui-même fondé sur la théorie de la nécessité en common law.


La Cour européenne a relevé que du fait de l’absence de réglementation ou de limites procédurales applicables aux patients informels, les professionnels médicaux de l’hôpital avaient assumé un contrôle total sur la liberté et le traitement d’une personne vulnérable et incapable, et ce uniquement en se fondant sur leurs propres évaluations cliniques, effectuées au moment où et de la façon qu’ils avaient jugés opportuns : ainsi, ils avaient un contrôle effectif et inconditionnel sur le requérant. Sans remettre en cause la bonne foi de ces professionnels ni le fait qu’ils aient agi conformément à ce qu’ils estimaient être l’intérêt supérieur du requérant, la Cour européenne a estimé qu’en raison de l’absence de garanties procédurales, les personnes dociles mais légalement incapables ne sont pas protégées contre des privations arbitraires de liberté fondées sur la nécessité et qu’en conséquence la finalité essentielle de l’article 5§1 n’est pas respectée (violation de l’article 5§1).

La Cour a également estimé qu’il n’avait pas été démontré que le requérant avait à sa disposition une procédure permettant de faire contrôler la régularité de sa détention par un tribunal conformément aux exigences de l’article 5§4. En effet, le contrôle juridictionnel n’aurait pas permis un examen adéquat des opinions médicales sur la persistance des troubles mentaux justifiant la détention, même si les principes de contrôle renforcé dans des cas soulevant des questions de droits de l’homme avant l’entrée en vigueur de la loi de 1998 sur les droits de l’homme avaient été appliqués (principes dits « super-Wednesbury ») ; de plus, il n’avait pas été démontré que les autres possibilités auxquelles s’est référé le Gouvernement auraient permis une telle évaluation (violation de l’article 5§4).

Mesures de caractère individuel : Aucune, le requérant a pu quitter l’hôpital le 12/12/1997.

Mesures de caractère général: L’arrêt de la Cour européenne a été publié dans the European Human Rights Reports:(2005) 40 E.H.R.R. 32 ; Butterworths Human Rights Cases: 17 B.H.R.C 418; (2005) Lloyd's Rep. Med. 169 ; Butterworths Medico-legal Reports: (2005) 81 B.M.L.R 131; et dans le Times le 19/10/2004.

Le 23/03/2005, en réponse à l’arrêt de la Cour européenne, le ministère de la Santé (Department of Health) a publié un document de consultation en vue de formuler des propositions de garanties procédurales appropriées. L’approche privilégiée par le document est celle d’une « attention préventive » (« preventive care »), reposant sur un nouveau système de procédures d’admission/détention de personnes devant être privées de leur liberté pour que des soins et traitements puissent leur être fournis au mieux de leurs intérêts. Dans un tel système, le pouvoir de priver une personne de sa liberté serait attribué à des individus ou organes spécifiques, dans des circonstances définies, sur la base de preuves médicales objectives. Il serait assorti de garanties, telles que : obligation de spécifier les motifs de la privation de liberté, limitation dans le temps, participation de proches, de personnels soignants et d’avocats, révision régulière et accès à un tribunal pour un contrôle de la légalité de la détention.

En septembre 2005, des consultations étaient en cours sur ces questions entre le ministère de la Santé et d’autres ministères et administrations, en vue de permettre l’entrée en vigueur d’une nouvelle législation d’ici avril 2007. Le ministère de la Santé a également établi des contacts avec l’exécutif écossais et les départements compétents en Irlande du Nord. Par ailleurs, en attendant l’adoption d’une législation, le ministère de la Santé a publié, le 10/12/2004, des conseils destinés aux autorités locales et aux personnes responsables des soins médicaux en Angleterre et au Pays de Galles, définissant des mesures intérimaires qui devraient être prises pour éviter de nouvelles violations de la Convention.

Résultats des diverses consultations :

- Pour ce qui est de l’Angleterre et la Pays de Galles, le gouvernement a proposé d’introduire un projet de loi sur la santé mentale (Mental Health Bill). Ce projet, introduit devant la Chambre des Lords, est déjà passé en première et seconde lectures devant la Chambres des Communes, où il fait actuellement l’objet d’un examen paragraphe par paragraphe devant une commission.

- En Irlande du Nord, des consultations sont en cours concernant le dernier rapport suite à l’étude sur la santé et l’incapacité mentales. Un rapport final sera soumis à l’examen du ministère de la Santé de l’Irlande, qui publiera par la suite ses propositions législatives.

- Le gouvernement écossais a indiqué qu’aucune modification de la loi concernée (Adults with Incapacity (Scotland) Act 2000) n’était requise. Il a pourtant amendé la loi écossaise sur l’assistance sociale (Social Work (Scotland) Act 1968) afin de clarifier le droit relatif aux prestations sociales proposées aux adultes frappés d’incapacité, par l’adoption d’une loi sur la protection et l’assistance des adultes (Adult Support and Protection (Scotland) Act) qui a reçu l’assentiment royal le 21/03/2007 et dont l’article 64 qui porte amendement de l’article 13 de la loi de 1968, est entré en vigueur le 22/03/2007.

Le 30/03/2007, le gouvernement écossais a diffusé un document intitulé « Directives aux pouvoirs territoriaux : prestations sociales aux adultes frappés d’incapacité ».

Informations complémentaires requises : sur les progrès réalisés dans l’adoption des réformes législatives annoncées en Irlande du Nord ainsi qu’en Angleterre et au Pays de Galles. Quant à l’Ecosse, une copie de l’article 13 de la loi de 1968 sur l’assistance sociale, ainsi que des autres articles évoqués dans les directives serait utile.

• Des informations fournies par les autorités du Royaume-Uni sont en cours d’évaluation.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière des informations fournies sur les mesures générales.


74025/01          Hirst n° 2, arrêt du 06/10/2005 - Grande Chambre

L’affaire concerne le fait que le requérant avait été privé de son droit de voter en raison de sa condamnation à une peine de réclusion criminelle (violation de l’article 3 du Protocole n°1).

La Cour européenne a relevé notamment que cette interdiction, imposée par la loi de 1983 sur la représentation du peuple, s’applique automatiquement aux détenus condamnés quelle que soit la durée de leur peine et indépendamment de la nature ou de la gravité de l’infraction commise ou de leur situation personnelle. La Cour a conclu qu’une telle restriction générale à l’exercice d’un droit d’une importance cruciale outrepassait la grande marge d’appréciation accordée aux Etats contractants en la matière et était incompatible avec la Convention.

Quant à l’existence ou non d’un consensus au sein des Etats contractants sur cette question, la Cour a noté qu’à ce jour seule une minorité d’Etats retirait totalement le droit de vote aux détenus condamnés ou ne prévoyait aucune disposition pour permettre aux détenus de voter.

Mesures de caractère individuel : Le 25/05/2004 le requérant a été libéré sous condition. Donc, il a le droit de vote.

Mesures de caractère général :

1) Plan d’action : Le 07/04/2006, les autorités britanniques ont fourni un plan d’action pour l’exécution de cette affaire. Les autorités se sont engagées à mener des consultations afin de déterminer les mesures requises (déclaration ministérielle écrite du 02/02/2006). Un document de consultation contenant les principes en cause, le contexte et les différentes options à étudier sera diffusé à différents interlocuteurs dont les commentaires devraient être recueillis d’ici septembre 2006. Entre septembre 2006 et février 2007, il est prévu d’analyser les réponses apportées à ce document, de mener si nécessaire des consultations complémentaires et de rédiger un second document présentant l’option préférée et le détail des questions liées à sa mise en œuvre. Si cela semble approprié, une analyse complémentaire et la publication d’un nouveau document pourrait être menées entre mars et juin 2007. Si des mesures législatives étaient retenues, la rédaction des dispositions aurait lieu à ce moment-là et la nouvelle législation devrait être introduite en octobre 2007, sous réserve des impératifs liés au calendrier et aux travaux parlementaires.

               a) Le premier document de consultation : Le document de consultation sur « le droit de vote des condamnés détenus au Royaume-Uni » a été publié le 01/12/2006. Ce document contient, inter alia, un résumé de l'arrêt de la Cour européenne, les documents internationaux pertinents, la pratique des Etats membres du Conseil de l'Europe et les propositions qui selon le Gouvernement, méritent une attention particulière:

            i) le maintien de l'interdiction (le document de consultation relève que c'est l'avis de quelques personnes et du Gouvernement, mais rappelle le constat de la Cour européenne selon lequel le maintien d'une telle interdiction dépasse la marge d'appréciation des Etats ; cependant, des commentaires sont attendus à cet égard) ;

            ii) l'octroi du droit de vote à tout détenu purgeant une peine inférieure à une durée spécifiée ;

            iii) reconnaître au juge le pouvoir de statuer sur la question ; et

            iv) l'octroi du droit de vote à tout détenu condamné à vie qui a purgé la partie punitive de sa peine (« tariff-expired life sentence prisoners »).

Le document de consultation ne présente pas l'octroi du droit de vote à tout détenu comme une option réaliste du fait que le Gouvernement y est opposé. Des propositions ont été faites spécifiquement pour des détenus condamnés pour des infractions électorales ainsi que pour des personnes condamnées ou non et détenues dans des hôpitaux psychiatriques.

            b) Informations fournies par la société civile : Il convient de noter que le 03/04/2007, le Comité des Ministres a reçu une communication d'une organisation non-gouvernementale, « AIRE Centre », en vertu de la Règle n° 9. Cette communication indique que bien que le Gouvernement ait indiqué qu'il s’engagerait dans un débat constructif, il a précisé dans son document de consultation qu'il demeurait complètement opposé à l'octroi du droit de vote à tout détenu. Bien que le document de consultation propose l'option du maintien de la restriction générale (et se réjouisse de prendre connaissance des avis des personnes partageant cette position), ce document exclue toute considération de l’éventuelle option de l'octroi du droit de vote à tout détenu.

            c) La réponse des autorités du Royaume-Uni : Le gouvernement du Royaume-Uni rappelle que bien que le document de consultation indique que les avis sur le maintien de la restriction générale soient les bienvenus, il est clair, tel que mentionné ci-dessus, que le maintien de la restriction générale dépasse la marge d'appréciation octroyée par la Convention, et pour cette raison, n'est pas une proposition concrète. En exprimant l’avis selon lequel une infraction suffisamment grave pour mériter une peine de prison avec une période punitive devrait également impliquer une perte du droit de vote pendant la détention, le Gouvernement a simplement réitéré sa position avant et après la procédure devant la Cour. Cependant, le Gouvernement reconnaît son obligation de se conformer à l'arrêt et à cette fin, il a proposé différentes options. Le gouvernement du Royaume-Uni n’interprète pas l’arrêt de la Cour comme impliquant un droit de vote à tout détenu, position pour laquelle il a déjà indiqué son opposition, c’est pourquoi elle ne figure pas sur la liste des options de changements éventuels dans le document de consultation.


Le gouvernement a indiqué qu’une loi-cadre sera nécessaire pour amender la législation du Royaume-Uni, et que des propositions et un projet de loi seront présentés, et sérieusement débattus au sein des deux chambres du Parlement. 

            2) Plan d'action modifié : Un plan d'action modifié qui comprend un calendrier révisé, a été transmis. S'il semble nécessaire de mener des consultations supplémentaires, ces consultations pourraient avoir lieu entre juillet et septembre 2007. Si des mesures législatives en tant que mesures d'exécution de l'arrêt étaient retenues, le projet de législation serait introduit dès mai 2008, sous réserve des impératifs liés au calendrier et aux travaux parlementaires.

La première phase de consultation s’est achevée le 07/03/2007 et une évaluation des réponses reçues est en cours. Il n'y a eu aucun retard par rapport au plan d'action modifié.

Le 25/10/2007, les autorités du Royaume-Uni ont indiqué que le gouvernement était toujours en train d’examiner les réponses fournies au document de consultation dans le cadre de la première phase.

Informations complémentaires attendues : des informations régulières sont requises sur l’état d’avancement de ce processus de consultation et sur les suites qui y seront données.

Développement récent : par courrier du 14/04/2008, les autorités ont fourni des informations complémentaires sur les mesures générales. Le Secrétariat est en train d’évaluer ces informations.

Les Délégués décident de reprendre l’examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière des informations déjà fournies sur les mesures générales.

66746/01          Connors, arrêt du 27/05/2004, définitif le 27/08/2004

L'affaire concerne l'atteinte à la vie privée et familiale et au domicile du requérant en raison de l'expulsion du requérant et de sa famille en août 2000 d'un site mis à la disposition des gens du voyage par l'autorité locale. La Cour européenne a constaté que leur expulsion n'avait pas été assortie des garanties procédurales requises, étant donné qu'aucune obligation n'incombait à l'autorité locale de justifier de manière appropriée la grave ingérence subie par le requérant. Partant, cette mesure ne saurait être considérée comme correspondant à un « besoin social impérieux » ou proportionnée au but légitime visé (violation de l'article 8).

Mesures de caractère individuel : La Cour européenne a indemnisé le préjudice moral subi par le requérant du fait qu'il avait été privé de la possibilité d'obtenir une décision judiciaire sur le bien-fondé de son allégation que l'expulsion n'était ni raisonnable ni justifiée.

Evaluation : dans ces conditions aucune autre mesure individuelle ne semble nécessaire.

Mesures de caractère général : Le gouvernement a l'intention d'assurer l'exécution de l'arrêt Connors par la voie législative, par le biais du projet de loi sur le logement et la réhabilitation (Housing and Regeneration Bill). Ce projet, soumis au Parlement en juillet 2007, est inclus dans le programme législatif pour la Session l'automne 2007 - été 2008 du Parlement

Le 17/05/2007, le gouvernement a publié, aux fins de consultation, un projet de lignes directrices sur la gestion des sites des Roms et gens du voyage, y compris des lignes directrices provisoires à l'attention des autorités locales sur la légitimation des situations de fait et la mise en œuvre de l'arrêt Connors. La période de consultation a expiré le 22/08/2007. Le projet recommande que les autorités évitent de faire prévaloir une légitimation des situations de fait et les encourage à fournir des protections supplémentaires aux gestionnaires de terrains. Le gouvernement espère publier la version définitive des lignes directrices d'ici fin 2007.

En plus des mesures envisagées ci-dessus, les autorités du Royaume-Uni ont déjà attiré l'attention d'une part sur la loi de 2004 sur le logement qui autorise les juges à suspendre l'exécution d'un arrêté d'expulsion imposé à des résidents d'un site, sous certaines conditions (par exemple la bonne conduite). D'autre part, elles ont indiqué que la nature du contrôle juridictionnel avait évolué depuis l'entrée en vigueur de la loi sur les droits de l'homme. En effet, la Cour d'appel a statué dans son arrêt R (Wilkinson) v Broadmoor Hospital RMO [2002] 1 WLR 419 que les témoins devaient être entendus afin de déterminer les faits contestés et que, par conséquent, la procédure de contrôle juridictionnel serait compatible avec l'article 6 de la Convention.

Des informations supplémentaires seraient utiles sur l'état d'avancement dans la mise en œuvre des mesures d'ordre général envisagées.

L'arrêt de la Cour européenne a été publié dans les European Human Rights Reports, sous la référence (2005) 40 EHRR 9.

Dernier développement : par courrier du 05/05/2008, les autorités ont fourni des informations complémentaires sur les mesures générales. Le Secrétariat est en train de les évaluer.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard lors de leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière des informations déjà fournies sur les mesures générales.


26494/95          J.T., arrêt du 30/03/00 - Règlement amiable

La requérante, placée d'office dans un hôpital psychiatrique jusqu'en 1996, s'est plainte de la législation (Mental Health Act 1983) aux termes de laquelle elle ne pouvait obtenir le changement de la personne désignée « parent le plus proche », en l'espèce sa mère avec laquelle elle était en conflit (grief tiré de l'article 8).

Mesures de caractère individuel: La requérante a été libérée de l'hôpital psychiatrique en 1996. Le règlement amiable ne contient aucun engagement au titre des mesures de caractère individuel.

Mesures de caractère général : Conformément aux termes du règlement amiable, le gouvernement a entrepris une réforme législative pour amender la législation en cause dans cette affaire (Mental Health Act 1983), afin de donner à la personne placée d'office la faculté de solliciter en justice le remplacement du « parent le plus proche » lorsque le patient soumet des objections raisonnables à ce qu'une personne donnée agisse en cette qualité.

       - Angleterre et Pays de Galles : Le Mental Health Bill a été adopté par le Parlement le 04/07/2007 et a reçu l'assentiment royal le 19/07/2007. Les articles 23 à 26 du Mental Health Act 2007 sont pertinents pour l'affaire J.T.. L'article 24 notamment permet au patient de saisir un tribunal afin d'obtenir une modification de la personne nommée le « parent le plus proche ». Le tribunal doit être de l'avis que la personne nommée est une personne « appropriée ».

Le Mental Health Act 2007 devrait entrer entièrement en vigueur d'ici avril 2008.

Des informations complémentaires sont attendues sur l'entrée en vigueur des articles du Mental Health Act 2007 concernant l'affaire J.T..

      - Irlande du Nord : Il convient de noter qu'en application des articles 36-37 du Mental Health (Northern Ireland) Order 1986) qui contient les dispositions analogues à celles des articles 29-30 du Mental Health Act 2003, un patient ne peut pas saisir un tribunal afin d'obtenir une modification de la personne nommée le « parent le plus proche ».

Suite au Review of Mental Health and Learning Disability, un rapport a été publié le 16/08/2007. Ce rapport sera soumis au Ministère de la Santé, des Services Sociaux et de la Sécurité Publique pour considération.

La partie du rapport concernant l'affaire J.T. (« A Comprehensive Legal Framework for Mental Health and Learning Disability ») énonce que le cadre législatif proposé devrait inclure l'introduction d'une « personne désignée » (nominated person) pour remplacer le « parent le plus proche » (article 6.6) ; par ailleurs, une personne doit pouvoir refuser l'implication de la dernière personne responsable en la matière, et dans de tels cas, la nomination d'une autre « personne désignée » doit être facilitée (article 6.35).

Des informations complémentaires sont attendues sur l'examen des articles du rapport concernant l'affaire J.T. par le Ministère de la Santé, des Services Sociaux et de la Sécurité Publique.

       - Ecosse : L'Ecosse a ses propres lois en la matière (The Adults with Incapacity (Scotland) Act 2000 et the Adult Support and Protection (Scotland) Act 2007). Selon l'évaluation du Secrétariat, ces lois ne devraient pas permettre la survenue de situations similaires à celles de l'affaire J.T..

Développement récent : par courrier du 10/03/2008, les autorités ont fourni des informations complémentaires sur les mesures générales. Le Secrétariat est en train d’évaluer ces informations.

Les Délégués décident de reprendre l'examen de ce point au plus tard à leur 1043e réunion (2‑4 décembre 2008) (DH), à la lumière des informations déjà fournies sur les mesures générales.


                      



[1] Les points marqués d’un astérisque * sont ceux qui ont été ajoutés après l’approbation de l’avant-projet d’ordre du jour (Liste préliminaire de points pour examen à la 1028e réunion), conformément aux Règles adoptées par le Comité des Ministres en vue de l’application de l’article 46 de la Convention européenne des Droits de l’Homme.

[2] Le Secrétariat propose de reporter l’examen de ce point à la 1035e réunion (16‑18 septembre 2008).

[3] Le Secrétariat propose de reporter l’examen de ce point à la 1035e réunion (16‑18 septembre 2008).

[4] Le Secrétariat propose de reporter l’examen de ce point à la 1035e réunion (16‑18 septembre 2008).

[5] Le Secrétariat propose de reporter l’examen de ces points à la 1035e réunion (16‑18 septembre 2008).

[6] Le Secrétariat propose de reporter l’examen de ces points à la 1035e réunion (16‑18 septembre 2008).

[7] Le Secrétariat propose de reporter l’examen de ces points à la 1035e réunion (16‑18 septembre 2008).

[8] Le Secrétariat propose de reporter l’examen de ces points à la 1035e réunion (16‑18 septembre 2008).

[9] Le Secrétariat propose de reporter l’examen de ce point à la 1035e réunion (16‑18 septembre 2008).

[10] Le Secrétariat propose de reporter l’examen de ce point à la 1035e réunion (16‑18 septembre 2008).

[11] Le Secrétariat propose de reporter l’examen de ce point à la 1035e réunion (16‑18 septembre 2008).

[12] Le Secrétariat propose de reporter l’examen de ces points à la 1035e réunion (16‑18 septembre 2008).

[13] Le Secrétariat propose de reporter l’examen de ce point au plus tard à la 1043e réunion (2‑4 décembre 2008).

[14] Le Secrétariat propose de reporter l’examen de ce point à la 1035e réunion (16‑18 septembre 2008).

[15] Le Secrétariat propose de reporter l’examen de ces points à la 1035e réunion (16‑18 septembre 2008).

[16] Le Secrétariat propose de reporter l’examen de ce point à la 1035e réunion (16‑18 septembre 2008).

[17] Le Secrétariat propose de reporter l’examen de ces points à la 1035e réunion (16‑18 septembre 2008).

[18] Le Secrétariat propose de reporter l’examen de ce point à la 1035e réunion (16‑18 septembre 2008).

[19] Le Secrétariat propose de reporter l’examen de ce point à la 1035e réunion (16‑18 septembre 2008).

[20] Le Secrétariat propose de reporter l’examen de ce point à la 1035e réunion (16‑18 septembre 2008).

[21]Certaines de ces affaires concernent également l’indépendance et l’impartialité des cours de sûreté de l’Etat (violations de l’article 6§1) et des mesures ont déjà été adoptées afin de résoudre ce problème, empêchant ainsi de nouvelles violations de ce type (voir Résolution DH(99)255 adoptée dans l’affaire Ciraklar).