DÉLÉGUÉS DES MINISTRES |
Notes sur l'ordre du jour |
CM/Notes/1362/H46-13 |
5 décembre 2019 |
1362e réunion, 3-5 décembre 2019 (DH) Droits de l'homme
H46-13 Groupe McFarlane c. Irlande (Requête n° 31333/06) Surveillance de l’exécution des arrêts de la Cour européenne Documents de référence DH-DD(2018)1215, CM/ResDH(2018)352, CM/Del/Dec(2018)1324/H46-10 |
Requête |
Affaire |
Arrêt du |
Définitif le |
Critère de classification |
McFARLANE |
10/09/2010 |
Grande Chambre |
Problème complexe |
|
45580/16 |
O’LEARY |
14/02/2019 |
14/02/2019 |
Description des affaires
Ce groupe d’affaires concerne la durée excessive des procédures civiles et pénales et l’absence de recours effectif à cet égard (violations des articles 6 § 1 et 13). Les procédures en cause dans ces affaires se sont déroulées à différentes périodes entre 1987 et 2016.
Etat d’exécution
En réponse à la décision du Comité des Ministres adoptée lors de sa 1324e réunion (septembre 2018) (DH), les autorités irlandaises ont transmis un plan d’action mis à jour le 30 novembre 2018 (DH-DD(2018)1215) et une autre communication le 28 juin 2019 (DH-DD(2019)777).
Mesures individuelles
Lors de sa 1324e réunion, le Comité a décidé, sans préjudice de leur examen des mesures générales, de clore la surveillance des affaires répétitives C., O., T.H., Rooney et Healy. Il y a une nouvelle affaire dans ce groupe O’Leary. La satisfaction équitable a été payée et les procédures internes sont terminées également dans cette affaire.
Mesures générales
Violations de l’article 6 – durée excessive des procédures
Cet aspect du groupe est à rapprocher du groupe d’affaires Doran c. Irlande (Requête n° 50389/99), dont l’examen a été clos à la suite de l’adoption d’un certain nombre de mesures clé (pour plus de détails sur les mesures prises voir Résolution finale CM/ResDH(2011)224 et les Notes pour la 1288e réunion (juin 2017) (DH), CM/Notes/1288/H46-40). Il est rappelé que, lors de sa 1288e réunion (juin 2017) (DH), le Comité avait noté que la principale question en suspens dans le groupe McFarlane, appelant son attention, était l'absence de recours effectif contre la durée excessive des procédures, ainsi que détaillé ci-dessous.
Violation de l’article 13 :
Lors de sa 1288e réunion, le Comité a regretté que les autorités n’aient pas encore mis en place un tel recours effectif bien que la plus ancienne de ces affaires soit pendante devant le Comité depuis plus de six ans ; il les a vivement encouragés à prendre toutes les mesures nécessaires pour mener à bien rapidement son adoption et a décidé de transférer ce groupe d’affaires de la procédure standard à la procédure soutenue. Dans le même temps, le Comité a noté avec intérêt le travail entrepris pour explorer différentes possibilités en vue d’établir un recours effectif.
Après un examen approfondi des questions en jeu, les autorités irlandaises ont indiqué qu’elles avaient désormais pour objectif la mise en place d'un recours statutaire gracieux au titre de la durée excessive des procédures. Ce recours constituera une alternative aux procédures judiciaires formelles pour violation de l'article 6. Elles estiment qu'un tel recours sera plus facilement accessible aux personnes affectées et n’ajoutera rien en termes de retard judiciaire.
Lors de son dernier examen de ce groupe à la 1324e réunion, le Comité a noté avec intérêt cette décision mais a regretté toutefois que les autorités n’aient pas encore soumis suffisamment d’informations détaillées pour permettre une évaluation d’ensemble du recours proposé. Il a vivement encouragé les autorités à mettre en place rapidement le recours proposé, en conformité avec les principes de la Convention.
Depuis lors, le gouvernement a approuvé en priorité l’élaboration d’un projet de loi sur la Convention européenne des droits de l’homme (indemnisation pour les retards dans les procédures judiciaires). Le schéma général du projet de loi prévoyait un mécanisme d'indemnisation sous forme de recours non judiciaire. Un ou plusieurs assesseurs indépendants (un ou plusieurs anciens juges), nommés par le ministre de la Justice et de l'Égalité, formuleront des conclusions en ce qui concerne les manquements présumés et accorderont une indemnisation, le cas échéant. Un constat de manquement entraînera un constat de responsabilité seulement de État et ne constituera pas un constat de responsabilité du juge ou du tribunal. La demande peut être introduite soit à l’égard des procédures qui n’ont pas encore été clôturées, soit au plus tard 12 mois après leur clôture. Lorsqu’il s’agit de déterminer un manquement et d’accorder une indemnisation, l’assesseur prend en compte les critères établis par la jurisprudence de la Cour. Les indemnisations devront être conformes à celles octroyées par la Cour. Les indemnisations sont soumises à l'approbation de la Haute Cour dans un délai d'un mois et le plaignant disposera d'un mois à compter de la date de cette approbation pour l'accepter ou la refuser. L’indemnisation est susceptible de recours devant la High Court à l’initiative du Ministre ou du plaignant. Les plaignants peuvent recevoir une indemnisation en vertu de ce mécanisme mais conserver la possibilité d’obtenir des dommages-intérêts pour violation d’un droit constitutionnel, bien que la Cour ou l’assesseur puisse tenir compte de toute décision antérieure lorsqu’il en fixe le montant.
L’objectif était de publier le projet de loi d’ici à l’été 2019 et de le promulguer fin 2019. Toutefois, en mai 2019, à la suite d’un examen parlementaire du projet de schéma général du projet de loi mené dans le cadre d’une audience publique et de soumissions écrites, l’Oireachtas, Comité mixte (parlementaire) sur la justice et l'égalité a publié un rapport exposant ses conclusions et soulevant un certain nombre de questions sur lesquelles le gouvernement devait se pencher. Le Comité mixte s'est félicité de la tentative de mettre en place le recours mais n'a pas été convaincu que le modèle non judiciaire soit le moyen le plus efficace de le faire. Il a recommandé que le Ministre examine de manière plus approfondie la question de savoir s'il serait préférable de prévoir un recours juridique contentieux, inspiré de la loi de 2003 sur la Convention européenne des droits de l'homme.
Indépendamment de ce constat général, le Comité mixte a soulevé un certain nombre de problèmes pratiques et formulé des recommandations concernant le recours statutaire gracieux, tel que proposé dans le projet de schéma général, touchant, entre autres, l'accès à un avocat et à des conseils juridiques, les coûts d'établissement d'un nouveau mécanisme, le manque de clarté quant aux possibilités de faire appel du refus d'une indemnisation, les restrictions applicables à l'octroi d'indemnités, la redondance d’une approbation préalable de la Haute Cour, etc.
Le gouvernement examine actuellement les conclusions et les recommandations du Comité mixte avant de faire avancer le projet de loi.
Analyse du Secrétariat
Mesures individuelles
Le Comité pourrait souhaiter clore l’examen de l’affaire O'Leary dans la mesure où aucune autre mesure individuelle n'est nécessaire puisque la satisfaction équitable a été payée et que la procédure interne a pris fin.
Mesures générales
Le Comité surveille les affaires concernant un recours au titre de la durée excessive des procédures judiciaires en Irlande depuis 2010, date à laquelle le premier arrêt de ce groupe (McFarlane) a été rendu par la Cour. Les progrès ont à nouveau été ralentis car il n'y a pas de consensus définitif entre les parties prenantes nationales sur le modèle de recours suggéré dans le schéma général.
Comme il a été souligné lors du récent examen du groupe Gazsó c. Hongrie lors de la 1348e réunion du Comité (juin 2019) (DH), l'Azerbaïdjan, la Hongrie, l'Irlande et l'Ukraine font partie des très rares États membres à l’égard desquels la Cour a identifié ce problème et qui n’ont pas encore réagi et introduit un recours effectif[1]. Compte tenu du fait que plus de neuf ans se sont écoulés depuis l'arrêt de la Grande Chambre, il est essentiel que désormais les autorités irlandaises progressent sans plus tarder et s'accordent sur un calendrier précis pour la mise en place d'un recours conforme aux principes de la Convention. Si aucun progrès tangible n'est démontré d'ici à juin 2020, le Comité pourrait souhaiter charger le Secrétariat de préparer un projet de résolution intérimaire faisant état de ses préoccupations, pour adoption lors de sa 1383e réunion (septembre 2020) (DH).
En ce qui concerne le modèle de recours compensatoire proposé dans le schéma général présenté par les autorités irlandaises et les observations pertinentes du Comité mixte, il appartient bien entendu aux autorités de l'État de déterminer quel modèle est le plus approprié, compte tenu du contexte national spécifique, mais à la condition notamment que les demandes d’indemnisation soient entendues dans un délai raisonnable. C’est pour cette raison que la Cour a clairement indiqué qu’il pourrait être envisagé de soumettre l’examen de telles demandes à des règles spéciales qui diffèrent de celles qui régissent les demandes en dommages-intérêts ordinaires, afin d’éviter le risque que, si elles sont examinées selon les règles générales de procédure civile, le recours ne soit pas assez rapide[2]. En fait, le Comité a déjà accepté à plusieurs reprises l’ensemble des recours administratifs et judiciaires introduits au sein de différentes juridictions, en tant que recours effectifs au titre des procédures longues.
En ce qui concerne les divers éléments du modèle proposé, les autorités irlandaises devraient examiner plus avant un certain nombre de questions déjà soulevées lors de consultations bilatérales avec le Secrétariat, dont certaines ont également été soulignées dans les conclusions et recommandations du Comité mixte. Les principales questions en suspens qui doivent être résolues pour garantir l’effectivité du recours mis en place sont notamment les suivantes : l'absence apparente de possibilité pour un particulier de contester le refus d'une indemnisation ; pourquoi la Haute Cour doit-elle approuver les indemnisations alors que cette phase risque d’ajouter des retards ; l'accessibilité du recours, en particulier en termes de coûts qui doivent rester raisonnables ; veiller à ce que les indemnisations et les niveaux de compensation soient conformes aux exigences de la Convention. En particulier, il convient de garder à l’esprit que les principes régissant l’octroi ou non d’une indemnité dans une affaire donnée et le niveau de compensation à allouer ne doivent pas être déraisonnables par rapport aux indemnités accordées par la Cour dans des affaires similaires.
Enfin, il apparaît que le système juridique irlandais dispose d’un ensemble de mesures déjà disponibles ou en cours de mise en place pour accélérer les procédures civiles et pénales. Cependant, il serait utile que les informations sur toutes les mesures d'accélération soient soumises au Comité de manière consolidée dans le prochain plan d'action mis à jour.
Compte tenu des questions en suspens ci-dessus, le Comité pourrait souhaiter encourager les autorités irlandaises à poursuivre leur coopération active avec le Secrétariat afin de garantir le respect total des principes de la Convention dans le processus de rédaction de la législation et de la mise en place du recours.
Financement assuré : OUI |
[1] Voir pour plus de détails, les Notes de la 1348e réunion (juin 2019) (DH) pour le groupe Gazsó c. Hongrie, CM/Notes/1348/H46-10.
[2] Voir l’arrêt Finger c. Bulgarie, § 130 (anglais uniquement).