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CM(2021)123-add2final |
20 octobre 2021 |
1415e réunion, 20 octobre 2021 10 Questions juridiques
10.3 Comité européen pour les problèmes criminels (CDPC) Recommandation CM/Rec(2021)6 du Comité des Ministres aux États membres concernant l'évaluation, la gestion et la réinsertion des personnes accusées ou reconnues coupables d'une infraction sexuelle – Exposé des motifs |
CONTEXTE
1. La Recommandation a été rédigée par le Conseil de coopération pénologique (PC‑CP) entre 2019 et 2020. Les membres élus du Groupe de travail du PC‑CP qui ont participé à ces travaux étaient Martina BARIĆ (Croatie), Nathalie BOISSOU (France), Annie DEVOS, Présidente du PC‑CP en 2020‑2021 (Belgique), Anna FERRARI (Italie), Robert FRIŠKOVEC (Slovénie), Vivian GEIRAN (Irlande), Attila JUHÁSZ, Vice‑Président du PC‑CP en 2018‑2019 (Hongrie), Manfred KOST (Allemagne), Nikolaos KOULOURIS (Grèce), Dominik LEHNER, Président du PC‑CP en 2018‑2019 (Suisse), Maria LINDSTRÖM (Suède), Laura NEGREDO LÓPEZ (Espagne) et Nadya RADKOVSKA, Vice‑Présidente du PC‑CP en 2020‑2021 (Bulgarie). Le PC‑CP était assisté de trois experts scientifiques : Kieran McCartan, Professeur en criminologie, Département de la santé et des sciences sociales, Université de l'Ouest de l'Angleterre (Royaume‑Uni), Marianne Fuglestved, Spécialiste en psychothérapie et sexologie clinique, psychologue, Direction du Service pénitentiaire et de probation (Danemark) et Harvey Slade, Consultant (Royaume‑Uni). Ont participé à ces réunions des représentants de la Confédération européenne de la probation (CEP) et de l'Organisation européenne des services pénitentiaires et correctionnels (EuroPris) et également Kresimir Kamber du Greffe de la Cour européenne des droits de l'homme et Hugh Chetwynd du Secrétariat du Comité pour la prévention de la torture (CPT).
INTRODUCTION
2. Les normes élaborées à l’échelon du Conseil de l’Europe figurent dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme et dans les rapports du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) ; elles portent sur divers aspects de la gestion des adultes accusés ou reconnus coupables d'une infraction sexuelle, notamment en matière de traitement et d’autres interventions. D'autres normes et principes directeurs se trouvent dans la Convention du Conseil de l'Europe sur la protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels (STCE n° 201) et dans la Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique (STCE n° 210), mais aucune de ces conventions n’aborde directement les questions de l'évaluation, de la gestion et du traitement des personnes accusées ou reconnues coupables d'une infraction sexuelle.
3. La présente Recommandation a été élaborée sur la base des travaux du Conseil de l'Europe et d'autres organisations compétentes, dont l'Union européenne, l’Organisation des Nations Unies, la Confédération européenne de la probation (CEP), EuroPris, l’Association internationale pour le traitement des délinquants sexuels (IATSO), l’Organisation nationale pour le traitement des délinquants sexuels (NOTA), les Centres ressources pour les intervenants auprès des auteurs de violences sexuelles (CRIAVS), l’antenne néerlandaise de l’Association pour le traitement des délinquants sexuels (NL‑ATSA) et l’Association pour le traitement des délinquants sexuels (ATSA).
4. Le Comité consultatif de la Convention pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatique des données à caractère personnel du Conseil de l’Europe (STCE n° 108) a également donné son avis sur le texte.
I. CHAMP D’APPLICATION ET DÉFINITIONS
5. Les infractions sexuelles sont préjudiciables à l’existence et au développement (psychologique, social et physique) des victimes ; leurs répercussions touchent plus largement leur entourage, les membres de leur famille et les diverses catégories sociales ainsi que les auteurs de ces actes. Cette Recommandation vise à apporter clarté et cohérence à la réaction de l’ensemble des États membres du Conseil de l’Europe face aux infractions sexuelles, afin de procéder à un traitement et à des interventions appropriées, qui privilégient la prévention de la récidive.
6. Des considérations supplémentaires, notamment le recours à des politiques et pratiques particulières, et les besoins propres aux enfants doivent en effet être pris en compte pour les mineurs, et c’est pour cette raison qu’ils n’entrent pas dans le champ d’application de la présente Recommandation et doivent faire l’objet d’une réglementation particulière distincte. Le terme « enfants » désigne les enfants de moins de 18 ans, conformément à l’article 1er de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant.
7. Il importe de reconnaître qu’une infraction sexuelle peut être motivée par un certain nombre de facteurs, parmi lesquels figure le désir sexuel, la motivation liée au pouvoir ou à l’agression envers l’autrui. Néanmoins la motivation première peut aussi être la recherche d’un profit économique, y compris dans le cadre du crime organisé et des réseaux criminels, comme dans le cas de certaines formes de traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle. Sont visés par la présente Recommandation les personnes adultes accusées ou reconnues coupables d’une infraction désignée comme sexuelle quel qu’en soit le motif. La présente recommandation énonce des principes directeurs concernant l’évaluation, le traitement et les interventions, ainsi que la gestion et la réinsertion sociale des personnes accusées ou déclarées coupables d’une infraction sexuelle.
8. L’objectif de la présente recommandation n’est pas de définir ce qui est considéré comme une infraction sexuelle car ceci est la prérogative de la législation des États membres du Conseil de l’Europe. Il est important de reconnaître que les technologies évoluent rapidement et que des crimes comme le cyberharcèlement, la pornographie de vengeance, les falsifications profondes et le matériel d’exploitation sexuelle des enfants et d’autres sont détectés de plus en plus souvent dans le monde entier et les autorités doivent actualiser leur compréhension de la question et leurs réponses, y compris la protection des victimes.
9. La présente Recommandation emploie l'expression « personne accusée ou reconnue coupable d'une infraction sexuelle » à la place du terme habituel de « délinquant sexuel ». Cette utilisation de langage met en avant la personne en tant qu’individu, se base sur des recherches, des politiques et des pratiques apparues en Europe et ailleurs, et permet de mettre l'accent sur la prise en charge de la personne et sur la prévention de nouveaux préjudices. Elle met également en évidence le fait que les personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle ne constituent pas un groupe homogène et que le succès du traitement, des interventions et de la prévention de futures infractions passe par un accompagnement de la personne concernée. La Recommandation vise avant tout la personne accusée ou reconnue coupable d'une infraction sexuelle, et non l'infraction en soi.
10 Il est important de noter que les traitements et les interventions pour les personnes accusées ou déclarées coupables d’une infraction sexuelle peuvent être fournis dans une prison (ou dans un autre lieu de détention comme un hôpital pénitentiaire, une aile psychiatrique dans un hôpital pénitentiaire ou une aile distincte dans une prison). La présente recommandation ne porte pas sur le traitement dans les établissements de santé mentale ordinaires ni sur le traitement médical ou psychiatrique en tant que tel. Il traite de la gestion et des interventions et du traitement général de personnes accusées ou condamnées qui sont sous la responsabilité des services pénitentiaires ou de probation, qui peut impliquer un travail multi-agences et la participation des professionnels de la santé et de la justice respectifs et de leur expertise.
11. L'inclusion des personnes « accusées » ou « reconnues coupables » dans le champ d'application de la Recommandation est importante, car dans certains États membres du Conseil de l'Europe, les personnes accusées d'une infraction sexuelle sont parfois placées en détention provisoire pendant une longue durée, ce qui peut leur permettre d’avoir accès à un traitement et à des interventions et/ou de faire l'objet de programmes de gestion des risques pendant cette période.
12. Le domaine de la délinquance sexuelle présente des difficultés particulières sur le plan juridique et politique. Dans de nombreux pays, la législation ou la politique ne vise pas spécifiquement l'abus sexuel des enfants par exemple ; les auteurs de tels actes sont alors poursuivis au titre de la législation plus générale sur les violences sur mineurs ou de la législation sur la négligence à l’égard des enfants, y compris la législation générale sur les infractions sexuelles. Les différents aspects des actes ou des comportements répréhensibles sont incriminés ou non de diverses manières dans les États membres du Conseil de l'Europe.
13. La volonté de faire face à la délinquance sexuelle et aux comportements répréhensibles à caractère sexuel se heurte à une autre difficulté : les pulsions, d'une part, et les actions, d'autre part, ne sont pas nécessairement synonymes. Un individu peut être diagnostiqué comme pédophile, mais n’a jamais commis d’infraction sexuelle de contact. De même, un membre d’un gang peut avoir commis un délit sexuel pour diverses raisons, notamment de manière plus large à cause de comportements antisociaux et problématiques et peut‑être même à cause de la coercition exercée par d'autres personnes. Ce constat souligne combien la personne accusée ou reconnue coupable d'une infraction sexuelle doit être prise en compte en tant qu’individu.
14. D'autres considérations pertinentes entrent en ligne de compte pour remédier aux infractions sexuelles. Il importe d’admettre que prévenir la récidive représente un procédé en plusieurs étapes, la première est d’arrêter la commission des nouveaux crimes en reconnaissant en même temps que la désistance totale est un processus beaucoup plus long qui demande une assistance ainsi que des traitements et des interventions pendant un certain temps. C'est pourquoi l'évaluation et la gestion doivent être personnalisées, être conçues pour un contexte précis et tenir compte de la globalité des besoins de l'individu ‑ notamment de ses besoins biologiques, psychologiques et sociaux. L'évaluation des risques a pour but de cerner le risque et d'éclairer le choix et la mise en œuvre du traitement et/ou des interventions, et pas nécessairement d'apporter un changement de comportement à proprement dire.
II. PRINCIPES FONDAMENTAUX
Règle 1
15. Les services pénitentiaires et de probation ont pour mission d'exécuter les sanctions et mesures pénales, ainsi que d’assurer la gestion et la réinsertion des personnes en fonction du risque qu'elles représentent et des besoins d'intervention qui sont les leurs. Cette règle doit être interprétée à la lumière de la règle 2, qui admet que les personnes accusées ou reconnues coupables d'une infraction sexuelle ont des besoins particuliers, qui exigent une gestion personnalisée ; cette règle souligne que cette gestion doit privilégier la prise en compte des risques propres à une personne donnée plutôt que les risques perçus comme découlant d'une catégorie désignée d’infractions commises. L'exécution d'une peine doit être juste, proportionnée et équilibrée, basée sur le risque que l'intéressé présente de causer un préjudice supplémentaire. Ceci demande d'évaluer les individus en fonction du risque qu'ils présentent et de déterminer ce qui est nécessaire afin de réduire ce risque, ainsi que d'évaluer les types d'environnements et les interventions qui permettraient de prévenir au mieux la récidive.
16. L'accès au traitement et aux interventions des personnes accusées ou reconnues coupables d'une infraction sexuelle ne devrait pas dépendre de la reconnaissance de leur culpabilité. Ceci est particulièrement important pour les personnes accusées d'une infraction sexuelle, mais qui n’ont pas encore été condamnées pour ces faits, lorsqu'elles pourraient avoir accès à un traitement ou à des interventions pendant leur détention provisoire. Néanmoins, le traitement ou les interventions liés aux infractions sexuelles devraient nécessiter la coopération de la personne en question ‑ voir la règle 6.
17. La gestion des risques suppose parfois, dans certaines juridictions, un placement en détention préventive. En cas de placement en détention préventive, celle‑ci doit être conforme aux politiques et pratiques nationales, respecter rigoureusement le principe d'évaluation des risques et devrait s'appuyer sur des outils d'évaluation des risques fondés sur des données probantes qui utilisent des facteurs dynamiques et sur une culture professionnelle solide, inspirée des meilleures pratiques. Si le niveau de risque évalué d’une personne change, une révision de son plan de gestion des risques devrait être déclenchée.
18. La Cour européenne des droits de l'homme estime que la détention préventive pouvait se justifier en fonction de la dangerosité d'une personne. Le fait qu’un individu ne bénéficie pas d’interventions et/ou de traitements appropriés pendant sa peine ne rend pas en soi sa détention préventive ultérieure illégale, dès lors que les autorités ont suffisamment cherché à lui assurer ces interventions et/ou traitements[1]. Lorsqu'une personne fait l'objet d'une détention préventive, les autorités sont tenues de prendre toutes les initiatives appropriées pour qu’elle bénéficie des interventions et/ou des traitements adéquats[2]. La Cour européenne des droits de l'homme considère que la détention indéfinie ou prolongée dans un environnement carcéral sans traitement approprié et sans perspective de réinsertion dans la société peut s’apparenter à un traitement dégradant constitutif d’une violation de l'article 3 de la CEDH[3]. Elle a en outre déclaré que, lorsqu'une personne est soumise à une détention préventive liée à des troubles mentaux en vertu de l'article 5, paragraphe 1, point e), de la CEDH, cette détention doit « se dérouler dans un établissement adapté aux malades mentaux » (paragraphe 164). Pour que cette détention soit légale, il faut également démontrer que la privation de liberté était nécessaire au vu des circonstances (169) ‑ une nécessité qui peut inclure des considérations de sécurité publique[4].
19. Le CPT a souligné que « le fait d'exiger des personnes placées en détention préventive qu'elles renoncent à la plupart de leurs droits autrement prévus par la loi pour bénéficier d'un programme de traitement spécialisé semble disproportionné. La restriction de ces droits devrait uniquement intervenir, avec le consentement éclairé de la personne concernée, dans la mesure où elle est strictement nécessaire pour la création d'un environnement thérapeutique et l’application effective de mesures de traitement[5] ».
Règle 2
20. Cette règle reconnaît l’existence de circonstances dans lesquelles les personnes accusées ou reconnues coupables d'une infraction sexuelle doivent faire l’objet d’une détention ou d’une gestion distincte personnalisée, y compris notamment afin d’assurer leur sécurité ou de réduire le risque qu’elles causent un préjudice. Elle peut prendre la forme d'une détention dans des quartiers spéciaux de la prison ou de l'affectation d'un personnel pénitentiaire ou de probation spécialement formé. Cette règle doit être interprétée à la lumière de la règle 1 ; il importe de mettre systématiquement l'accent sur les besoins et les caractéristiques propres à un individu, ce qui exige d’apporter des solutions distinctes, et non sur le type d'infraction qu'il a commise en soi.
21 Cela ne doit pas empêcher les personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle de participer à certaines activités avec le reste des autres personnes y compris d'utiliser les espaces communs au sein de la prison. Dans cette optique, le CPT a souligné l'importance des activités pratiquées hors du quartier de détention, auxquelles les personnes accusées ou reconnues coupables d'une infraction sexuelle ont parfois moins accès pendant leur détention[6]. Cependant, si on estime qu’il s’agit de personnes vulnérables ou qui ont besoin d'une protection supplémentaire pendant leur séjour en prison, il convient d'en tenir compte et de les détenir séparément. La décision d’un placement en détention séparée doit systématiquement être prise à titre individuel, et non faire l’objet d’une mesure générale appliquée à des catégories de personnes accusées ou reconnues coupables d'une infraction sexuelle. En outre, toute personne détenue séparément devrait avoir la possibilité de bénéficier d’au moins deux heures de véritable contact humain par jour, afin que sa séparation n'équivaille pas à un isolement cellulaire (voir la règle 53 A.1 des Règles pénitentiaires européennes).
Règle 3
22. La gestion efficace des risques aide à assurer la protection des citoyens. Les personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle présentent souvent des caractéristiques complexes, ce qui nécessite un encadrement et une gestion qui doivent être interinstitutionnels pour être pleinement efficaces. L’efficacité de cette réponse devrait donc inclure l’implication d’une variété de professionnels, y compris la police, les services pénitentiaires, de probation, de logement, d'éducation, de justice restaurative et de soins de santé dès le début du processus de justice pénale et tout au long de celui‑ci. Cette réponse devrait également s’appuyer sur les services de tels professionnels comme des psychiatres et des psychologues et d’autres professionnels ayant une formation reconnue et une expérience dans le domaine de l’évaluation du risque, de la gestion du risque d’intervention auprès des personnes qui ont commis des infractions sexuelles.
Règle 4
23. Les raisons derrière les infractions sexuelles et leur étiologie sont donc complexes et peuvent comporter des facteurs biologiques, comportementaux, cliniques, culturels, développementaux, sanitaires, sociaux et neurologiques. Cela signifie que pour comprendre les infractions sexuelles, les institutions doivent appréhender individuellement les auteurs d’une infraction sexuelle, les examiner de manière globale et apporter une réponse équilibrée et appropriée. L'étiologie des infractions sexuelles est déterminée par le parcours de vie et le développement de l'individu. Un tel moyen de prévenir les infractions sexuelles et d’y remédier devrait être intégré et devrait se fonder sur la santé afin de permettre une prévention réussie des infractions sexuelles et y apporter une réponse efficace.
Règle 5
24. Cette règle souligne que seuls les interventions et les traitements fondés sur des données probantes doivent être appliqués aux personnes accusées ou reconnues coupables d'une infraction sexuelle. Les personnes chargées de la mise en œuvre de ces interventions et/ou traitements doivent tenir compte des recherches les plus récentes dans ce domaine, afin de garantir que seuls les interventions et/ou traitements ayant une chance de succès soient utilisés et qu'ils ne soient pas disproportionnés pour l'individu en question. Cela signifie que le traitement ou l’intervention appropriés pour un individu à haut risque ne doivent pas être utilisés dans le cas des personnes à faible risque, en particulier lorsque des éléments de preuve suggèrent qu'une personne à faible risque peut être plus susceptible de récidiver à la suite d'un tel traitement ou d'une telle intervention.
25. Les interventions et/ou les traitements doivent systématiquement faire partie d'une méthode globale, que la personne accusée ou reconnue coupable d'une infraction sexuelle soit appréhendée individuellement ou en tant que membre d'un groupe. Il importe de toujours mettre l’accent sur l'aide à apporter aux individus pour qu'ils puissent remédier à leurs comportements délictueux et changer leur état d'esprit sur le plan cognitif en question.
26. Une intervention et/ou un traitement inhumain ou dégradant ne sera en aucun cas proportionné. Le CPT a indiqué dans plusieurs de ses rapports que le recours à la castration chirurgicale, qui représente une « intervention mutilante et irréversible », peut constituer un traitement dégradant et « ne peut être considérée comme une nécessité médicale » pour le traitement des personnes reconnues coupables d'une infraction sexuelle. Le CPT a donc appelé les États membres à « mettre définitivement fin » à son utilisation[7]. La Cour européenne des droits de l'homme a estimé que si un traitement sexologique protecteur et les restrictions qu'il implique peuvent causer un désagrément, ils peuvent néanmoins se justifier par l'état de santé et le comportement de l'intéressé[8].
27. La Cour européenne des droits de l'homme a déclaré que, pour être conforme à l'article 5 de la CEDH, « plus un internement continu en hôpital psychiatrique dure longtemps, plus sa proportionnalité doit être particulièrement contrôlée », l'intérêt de sa remise en liberté pour l’intéressé devant être mis en balance avec l'intérêt de la sécurité publique. La décision de poursuivre cet internement ne doit pas non plus être arbitraire[9].
28. En ce qui concerne la castration chimique (traitement anti‑androgène), le CPT a clairement indiqué que celle‑ci devait être pratiquée uniquement de manière « exclusivement volontaire », sur la base d’une « évaluation psychiatrique et médicale individuelle approfondie » (voir plus loin le commentaire de la règle 6). Il a souligné qu’en cas d'administration d'un tel traitement, celui‑ci « devrait être associé à une psychothérapie et à d'autres formes de conseil, afin de réduire le risque de récidive ». La Cour européenne des droits de l'homme a estimé que la castration chimique pouvait se justifier en cas de nécessité thérapeutique. En outre, la Cour a admis qu'une personne puisse prendre part volontairement à un tel traitement. À cet égard, la Cour note qu’il peut être utile d'établir un formulaire spécifique qui précise le consentement de l'intéressé, l'informe de son droit de rétractation à tout moment et lui indique les avantages et les effets secondaires du traitement, bien que l’absence de cette procédure ne suffise pas en soi à constituer un traitement médical forcé et une violation de l'article 3 de la CEDH[10].
29. En ce qui concerne les tests de préférence sexuelle (y compris les tests biomédicaux) qui mesurent l’érection suite à un comportement sexuel illégal effectués dans le cadre du traitement, la Cour européenne des droits de l'homme a reconnu que la participation à ces tests pouvait être humiliante pour les intéressés. Elle a toutefois admis que les autorités puissent raisonnablement juger ces évaluations nécessaires pour définir un futur traitement thérapeutique adéquat et une planification appropriée des peines, ainsi que des programmes de réinsertion. Dans ce cas, ces évaluations ne constituent pas un traitement dégradant au sens de l'article 3 de la CEDH. Un critère déterminant peut permettre d’établir si ces évaluations s’imposent : tant que le comportement de l’intéressé ne démontre pas la nécessité d’une « analyse plus précise » réalisée par un test de préférence sexuelle, on peut se contenter de recourir à des « formes alternatives et moins invasives d'évaluation[11]».
Règle 6
30. Cette règle reconnaît que la relation entre la personne accusée ou reconnue coupable d'une infraction sexuelle, et les professionnels et les services avec lesquels elle est en contact, qu'il s'agisse du tribunal, du service pénitentiaire, de la police, du service de probation ou d'une autre institution, est essentielle pour élaborer des programmes d'évaluation, de gestion et de réinsertion efficaces. Sans confiance ni respect entre les parties concernées, le processus est voué le plus souvent à l’échec. Il importe de bien comprendre que la coopération ne signifie pas nécessairement que l’intéressé admette sa culpabilité, mais plutôt qu'il est pleinement associé à l'évaluation des risques et à tout traitement ou intervention qui en découle. Le CPT a déjà souligné combien il était essentiel d'élaborer ou de réviser les programmes de traitement personnalisés en consultant l’intéressé[12]. Cette règle doit s’interpréter à la lumière des règles 1 et 3, mais il figure au cœur de toutes les règles fondamentales ici énoncées.
31. En cas de castration chimique, le consentement libre et éclairé de la personne, exprimé formellement, doit être obtenu. Le CPT a souligné que « le consentement écrit, libre et éclairé du patient concerné doit être obtenu avant le début du traitement anti‑androgène (castration chimique), étant entendu que le consentement peut être retiré à tout moment ; en outre, le patient doit être pleinement informé de tous les effets et effets secondaires possibles du traitement, ainsi que des conséquences du refus de subir ce traitement. Aucun patient ne doit être soumis à des pressions pour accepter un traitement anti‑androgène[13]». Celui‑ci doit « systématiquement se fonder sur une évaluation psychiatrique et médicale individuelle approfondie et [...] être administré de manière exclusivement volontaire[14]».
Règle 7
32. Cette règle est conforme à la règle 103 des Règles pénitentiaires européennes (Rec(2006)2-rev) et aux règles 72-75 des Règles de probation du Conseil de l’Europe (CM/Rec(2010)1). Elle renforce la Règle 6, soulignant que la participation et l’engagement avec l’auteur de l’infraction sont essentiels. Cette règle vise à faire en sorte que la voix de l’auteur de l’infraction soit entendue et que le plan de gestion, même s’il est réalisable du point de vue de la justice pénale, soit réalisable également du point de vue de la personne en question ainsi s’assurant de l’équité procédurale. De plus, cette règle vise à établir des directives claires pour assurer l’information de la personne concernée et la possibilité pour elle de poser des questions et de déposer des plaintes.
33. Le parcours d'une personne dans le système de justice pénale doit être fluide, rationalisé et bien organisé ; sa gestion et sa prise en charge doivent y être clairement définies et conséquentes. C’est d’autant plus important au vu des difficultés particulières auxquelles sont confrontées les personnes accusées ou reconnues coupables d'une infraction sexuelle (voir la règle 1). Une prise en charge claire et rationalisée nécessite une communication au sein des institutions et entre elles, une action et des objectifs interinstitutionnels consentis (voir la règle 19), ainsi qu'une procédure clairement définie tout au long du processus de justice pénale et en lien avec le projet individualisé d’exécution de la peine. La nécessité d'une prise en charge complète et claire est particulièrement marquée dans les situations de transition, que ce soit d'un service à l'autre (par exemple le passage de la police à la prison et de la prison à la probation) ou au sein d'un même service (changement de cellule, d'agent de probation ou déménagement dans une autre partie du pays). Pendant ces périodes de changement, il est essentiel de réfléchir à la mise à jour du projet individualisé d’exécution de la peine en fonction de la modification de l’environnement de l’intéressé. Dans certains cas, en particulier pour les personnes les plus difficiles, les allers et retours entre la prison et la probation peuvent se répéter plusieurs fois. La prise en charge d'un individu peut, lorsqu’elle n'est pas gérée de manière appropriée, entraîner des retards ou des interruptions dans les interventions et/ou les traitements, ainsi que l’établissement de mauvaises relations entre l’intéressé et le système ; tous ces éléments peuvent avoir un impact sur la réinsertion.
Règle 8
34. Cette règle vient renforcer les règles 3 et 5, en soulignant qu’une coopération interinstitutionnelle efficace s’impose pour l'évaluation, la gestion et la réinsertion d'une personne accusée ou reconnue coupable d'une infraction sexuelle. Les organismes responsables de la gestion des personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle peuvent changer au fil du temps. Ils peuvent comprendre la police, les services pénitentiaires, les services de probation ou, le cas échéant, les organismes de justice restaurative (pour de plus amples renseignements, voir la Recommandation CM/Rec(2018)8 concernant la justice restaurative en matière pénale, ainsi que la règle 33). Lorsque le partage de données est prévu, il importe que cette démarche s’appuie sur une politique précise, visant à garantir le droit à la protection des données ainsi que la sécurité des informations relatives aux personnes accusées ou reconnues coupables d'une infraction sexuelle. Il est essentiel que le partage des données se fasse dans le respect scrupuleux de la confidentialité et soit plus largement conforme aux exigences en matière de protection des données prévues par la Convention du Conseil de l’Europe pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel ; (STCE n°108), telle qu'amendée par le Protocole STCE n° 223 (Convention 108 modernisée) ainsi que par la Recommandation (87)15 du Comité des Ministres visant à réglementer l'utilisation de données à caractère personnel dans le secteur de la police et par son exposé des motifs et plus particulièrement par le Guide pratique sur l’utilisation de données à caractère personnel dans le secteur de la police (document T‑PD(2018)01).
35. Cette coopération interinstitutionnelle doit être attentive aux modes de communication et de partage des informations avec la collectivité au sens large, afin de veiller à ce que la protection des citoyens et la protection des droits de la personne soient toujours respectées de manière équilibrée. Plus généralement, le partage de l'information doit toujours tenir compte du droit de chaque personne au respect de sa vie privée et familiale, comme le garantit l'article 8 de la CEDH et la Convention 108 modernisée.
Règle 9
36. Cette règle stipule que les personnes sous probation doivent bénéficier d’un projet d’exécution de la peine comportant des dispositions claires en matière de transition lors du passage d’un service à l’autre (par exemple de la prison à la probation et vice versa). Elle souligne l'importance de la transition du milieu fermé vers le milieu ouvert, de la prise en charge et de la coopération interinstitutionnelle, de la communication, des processus partagés, de l’emploi d’une terminologie commune et d'une vision commune de la prise en charge des délinquants. Un plan de transition efficace exige le partage de toutes les informations pertinentes entre les services pénitentiaires et de probation, la police, les services de santé ainsi que d’autres services, dans le respect des dispositions relatives à la protection des données.
37. Cette règle doit être interprétée à la lumière de la règle 7, qui vise à assurer la continuité du projet d’exécution de la peine d'un individu entre les différents intervenants, à chaque étape du processus de justice pénale, ainsi qu'à la lumière de la règle 8, qui exige une coordination étroite entre, d’une part, des organismes qui gèrent les personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle et, d’autre part, les services et les collectivités locales. Cet outil peut être déterminant pour le succès de cette transition et de la gestion de chaque dossier. Comme la transition ultime se fait vers la collectivité locale, leur participation dès le début offre à l’intéressé le meilleur moyen de renoncer à la délinquance à long terme. Les projets d’exécution de la peine doivent être communiqués aux services locaux dont dispose l’individu à sa libération, de manière à ce qu'il puisse se voir proposer ou être placé dans une zone d’accès aux interventions les plus appropriées, afin de permettre une gestion efficace des risques. En outre, il convient de ne pas subordonner la libération d’un individu à une intervention s’il ne peut y avoir accès, le fait de ne pas se présenter peut être considéré comme un manquement aux conditions de libération. De plus, l’obligation de se déplacer sur de longues distances pour participer à des interventions peut nuire à l’intégration d’une personne dans sa propre collectivité et peut potentiellement causer des difficultés financières.
38. Comme indiqué dans la règle 7, le projet d’exécution de la peine doit se fonder sur une évaluation individuelle des risques. Tout plan de gestion des risques doit mettre l’accent sur la prise en compte des risques, de la protection de la population et de la coopération interinstitutionnelle. Un travail interinstitutionnel efficace n’exige pas de partager toutes les informations, mais plutôt toutes les informations pertinentes sur la personne en question, afin que les professionnels puissent prendre des décisions éclairées sur la prise en charge en milieu ouvert de ces personnes.
39. L'élaboration d'un plan de gestion des risques pour la période de probation doit comprendre : (1) l'évaluation continue des risques, des besoins et des capacités de l'individu ; (2) l’identification des traitements et/ou interventions pertinents par rapport aux besoins de l’individu ; (3) l’identification et l’implication à un stade précoce d'un personnel compétent et responsable ; (4) la coordination du programme de traitement et/ou d'intervention par le service de probation concerné ; (5) le respect constant des politiques pertinentes notamment en matière d'enregistrement, de communication des informations, de logement, d'emploi et d'accès à internet ; et (6) l’assurance d’une prise en compte de la victime et de sa protection. L'accent est ici mis sur le fait qu'aucun service ne doit abandonner le dossier d'un individu avant qu'un autre ne le prenne en charge, ce qui permet de garantir à tout moment l’exécution de la peine avec un niveau approprié d’encadrement et de suivi.
Règle 10
40 Cette règle reconnaît l’importance de l’existence systématique d’une communication et d’un partage d'informations efficaces dans le cadre de la coopération internationale et transnationale entre les services de police, d'enquête et d’autres institutions de la justice pénale ainsi qu’avec les services de contrôle aux frontières, soit directement, soit par l'intermédiaire de tiers (c'est‑à‑dire Interpol, Europol) et si un niveau approprié de protection des données personnelles est garanti comme prévu par l’article 14 de la Convention 108 modernisée. Mais il ne saurait aboutir à la méconnaissance de la règle 1, dans la mesure où, lorsque les personnes ont purgé leur peine et ne sont pas soumises aux exigences d’une libération conditionnelle, ces informations ne devraient pas être transmises, sauf si elles sont essentielles et si des garanties ont été mises en place afin de faciliter la protection publique et la prévention de la victimisation. Le but de cette règle est de favoriser la protection de la société, de la personne concernées et de leurs droits, et non de pénaliser davantage ces dernières.
III. ÉVALUATION DES RISQUES ET DES BESOINS
41 L'évaluation des risques identifie les facteurs de risque et de besoin de la personne ainsi que ses ressources et ses points forts. Les ressources et les points forts sont des facteurs de protection qui, avec les interventions proposées, contribuent au développement positif de la personne et à la réduction ultérieure des facteurs de risque et de besoin.
42. Les outils d’évaluation des risques sont recommandés pour déterminer les dispositions de gestion des risques et peuvent également contribuer à éclairer la détermination de la peine, la planification de l’exécution de celle‑ci et les interventions appropriées pour réduire la probabilité de récidive. L’évaluation et la gestion des risques devraient toujours tenir compte des circonstances individuelles du cas, ce qui comprend l’évaluation de la gravité du crime et de la thérapie suivie. « Les personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle » est une catégorie assez large et les personnes de cette catégorie présentent une variété de caractéristiques qui devraient être prises en compte, notamment les caractéristiques personnelles particulières et les raisons sous‑jacentes de leur comportement délictueux, ainsi que les facteurs de risque généraux (comme les antécédents criminels, l'éducation et l'emploi ou la consommation abusive de drogues) et les facteurs de risque spécifiques (comme l’intérêt pour les fantasmes sexuels ou la détresse mentale associée aux actes sexuels délinquants).
43. Il importe que l'évaluation des risques soit un élément clé de la gestion en prison et en probation et qu’elle soit effectuée par un personnel formé à cette fin.
44. L’examen du risque laisse penser que ces individus présenteront toujours un risque de récidive et que ce risque n’évolue pas. Les recherches et la pratique professionnelle montrent pourtant que ce n'est pas le cas, car ce risque est évolutif et individualisé, ce qui signifie que le risque de récidive d'une personne peut changer et même diminuer avec le temps, plus particulièrement si la personne est très motivée et gérée et que des interventions appropriées sont assurées.
Règle 11
45. Cette règle souligne la nécessité d'une procédure d'évaluation des risques prévue et fondée sur des données probantes, qui peut comprendre un examen médico‑légal psychiatrique, psychologique ou social, pour permettre la prise de décisions dans le choix du type de mesure ou de peine dont fait l’objet l’individu reconnu coupable d'une infraction sexuelle. L'objectif est d'établir un projet d’exécution de la peine et d'intervention permettant aux personnes reconnues coupables d’une infraction sexuelle et condamnées à des peines plus ou moins longues de bénéficier d'un traitement en fonction de leurs besoins.
46. Le tribunal peut décider de prononcer une peine assortie d’un traitement ‑ ou une peine assortie de sursis et subordonnée à une condition de traitement lorsqu’on estime que l'individu présente un niveau de risque et de besoin peu élevé et qu’il est motivé pour une surveillance au sein de la collectivité et un traitement.
47. Les outils validés de gestion des risques devraient faire partie d'une approche professionnelle de l'évaluation des risques fondée sur la recherche. La précision de l'estimation des risques augmente lorsque les évaluateurs utilisent des instruments structurés, empiriques et, si possible validés, qui visent à analyser les risques et les besoins évolutifs et statiques. Ces instruments permettent de s'assurer que le professionnel examine en priorité les domaines clés de la prise en compte des risques sur la base de données probantes.
Règle 12
48. Cette règle préconise l’application d’une procédure d'évaluation des risques continue et exhaustive dès le début de la procédure pénale, pendant la détention et lors du suivi probatoire. La mise à jour des évaluations des risques consiste habituellement à effectuer des évaluations répétées à intervalles réguliers. Les personnes accusées ou reconnues coupables d'une infraction sexuelle et considérées comme représentant un faible risque de récidive peuvent faire l’objet d’un traitement et d’une gestion au sein de la collectivité, ce qui peut augmenter leurs chances de réinsertion sociale. Au contraire, celles qui présentent un risque moyen ou élevé de récidive peuvent avoir besoin d'interventions spécifiques dans des environnements sécurisés, tels que les prisons et les hôpitaux spécialisés. Cette double approche vise à réduire la probabilité de la commission de nouvelles infractions sexuelles. Voir également la règle 7 sur les projets d’exécution de la peine.
Règle 13
49. Cette règle reconnaît que les comportements d'abus sexuels peuvent coexister avec des maladies et troubles psychiatriques. Comme les fantasmes sexuels et les comportements délictueux peuvent être une forme de gestion des émotions négatives ou des états d'âme associés aux troubles psychologiques ou psychiatriques d'un individu, il est essentiel de comprendre les antécédents médico‑légaux d'un individu pour prendre des décisions relatives à son traitement et à la détermination de sa peine. L'appréciation des antécédents médico‑légaux et psychiatriques ainsi que l’historique du développement personnel d'une personne contribue à une estimation cohérente de ses risques et besoins ; il importe qu’elle soit effectuée par des experts reconnus et ordonnée par le juge ou une autre autorité ou institution compétente. Avant qu'une évaluation des risques liés à l'infraction puisse commencer, l'état mental de l'individu doit être stabilisé autant que possible.
Règle 14
50. L'impartialité et l'objectivité font partie intégrante de l'éthique et de la pratique professionnelle. Lorsqu'il évalue le risque que présente une personne accusée ou reconnue coupable d'une infraction sexuelle, l'évaluateur doit être conscient des possibles implications de leur évaluation pour la sécurité de la collectivité quant à la limitation de la liberté de l’intéressé. La gestion des risques exige inévitablement certaines restrictions de liberté, mais celles‑ci doivent être proportionnées et se justifier, elles doivent également être dynamiques afin de s’adapter aux niveaux changeant de risque et de besoins. Dès lors que l’évaluateur est dûment formé et indépendant, comme l'énonce la présente règle, ces exigences sont, le plus souvent, satisfaites. Les principaux décideurs doivent prendre des décisions impartiales à tous les stades du processus d'évaluation des risques ; ils ne doivent pas être impliqués eux‑mêmes à l'évaluation des risques afin de préserver leur impartialité.
IV. GESTION, INTERVENTIONS ET TRAITEMENT EN PRISON
51. Dans les États membres du Conseil de l'Europe, la prison est le principal moyen de gestion des personnes reconnues coupables d'une infraction sexuelle, en particulier pour les infractions sexuelles de contact. Un objectif important de la prison est la prévention de la récidive et d'aider les auteurs d’infractions à mener une vie sociale significative, sans qu’ils ne commettent de nouvelles infractions. La prison devrait donc s’efforcer d’être un environnement de réinsertion de réintégration qui facilite les changements positifs.
Règle 15
52. Cette règle est liée à la règle 12. Un plan global de gestion des risques et de l’exécution de la peine doit être mis en place tout au long du processus de justice pénale. Comme le souligne la règle 12, celui‑ci devra être actualisé à intervalles réguliers ‑ car le risque que présente un individu (pour autrui et pour lui‑même) et les autres caractéristiques pertinentes d’une personne évoluent invariablement avec le temps. Les personnes accusées ou reconnues coupables d'une infraction sexuelle peuvent être en contact avec diverses institutions et divers individus dans leur processus de justice pénale, notamment dans le cadre des services pénitentiaires et de probation. Il arrive qu’ils soient en contact avec ces institutions à plusieurs reprises : un individu peut, par exemple, quitter la prison en bénéficiant d’une libération conditionnelle, être géré par le service de probation, ne pas respecter les conditions de sa libération et être renvoyé en prison ; puis, à l’occasion d’une nouvelle libération conditionnelle, relever à nouveau de la charge du service de probation. Il arrive également qu’une personne soit soumise à une période de probation avant d'entrer en contact avec la prison. L’établissement pénitentiaire doit en avoir conscience et veiller lui‑même à ce que l'évaluation des risques soit complète et mentionne les évaluations précédentes, afin que celles‑ci puissent servir de support aux évaluations des risques actualisées. Cette démarche globale peut également impliquer une collaboration
étroite avec le service de probation, de manière à assurer la continuité entre les prestataires ‑ voir plus loin la règle 18. L’évaluation pertinente effectuée au stade de la détermination de la peine devrait être mise à la disposition des services pénitentiaires dès que possible lorsqu’une personne reçoit une peine d’emprisonnement.
53. La réalisation d’une évaluation efficace des risques dans les prisons empêche la mise en œuvre de régimes inappropriés (par exemple, plus stricts que nécessaire), qui peuvent entraver la réinsertion du détenu et la préparation à sa libération. Elle doit être menée par une équipe interdisciplinaire de personnel spécialement formé, qui établit avec le détenu des contacts et des relations professionnels caractérisés par une confiance et un respect mutuel, empathie et coopération, sans minimiser l'infraction commise. L'évaluation des risques impose de vérifier la stabilité de la motivation à changer du détenu, ainsi que l'adéquation des différentes options d'intervention.
54. Certaines personnes peuvent continuer de présenter un risque de récidive pendant leur détention, notamment en utilisant des moyens numériques illicites. Il est important d’attirer l’attention sur cette question afin d’évaluer correctement le risque que ces personnes peuvent poser et de relever les défis en matière de sécurité tout en évaluant leurs besoins et en facilitant leurs interventions et/ou traitements ainsi que leur réinsertion sociale.
55. Le personnel pénitentiaire devrait prendre part à ce processus d'évaluation et à la motivation des détenus, car il est en contact quotidien avec eux. L'objectif est de faire progresser le passage du détenu de la prison à un suivi en milieu ouvert.
56. Le CPT s’est déjà inquiété dans ses rapports du fait que « les détenus nouvellement arrivés et condamnés pour des infractions sexuelles étaient maltraités par d'autres détenus dans le quartier d'admission ». Pour remédier à ces problèmes, il a souligné l'importance d'une évaluation individualisée des risques et des besoins[15]. Lorsque le risque que présente un individu est tel qu'il justifie des mesures spéciales de haute sécurité ou de sûreté, les Règles pénitentiaires européennes précisent, à la règle 53.8, que ces mesures doivent uniquement être fondées sur le risque que présente le détenu actuellement, doivent être proportionnées à ce risque et ne doivent pas entraîner plus de restrictions que nécessaire pour écarter ce risque.
57. La Cour européenne des droits de l'homme a estimé que la détention prolongée dans un établissement mal adapté à l'état d'un individu (par exemple dans le quartier psychiatrique d'une prison, uniquement par manque structurel d’autres solutions) était contraire à l'article 5, paragraphe 1, point e), de la CEDH[16].
Règle 16
58. La réhabilitation et la réintégration sociale devraient être les principaux objectifs de toute sanction ou mesure. Cette règle met l'accent sur la diversité des personnes accusées ou reconnues coupables d'une infraction sexuelle et accorde une attention particulière aux multiples causes profondes du comportement délictueux à caractère sexuel, aux différents niveaux de risque et aux besoins de traitement individuels qui doivent être pris en compte, afin de réduire le risque de récidive de l’intéressé.
59. Lorsque le maintien en détention d'un individu est justifié par le risque qu'il représente pour les citoyens, attesté par un outil d'évaluation des risques validé, les États membres devraient néanmoins faciliter l'accès aux programmes visant à améliorer la réhabilitation et réduire les risques. Toutefois, la Cour européenne des droits de l'homme a déclaré qu'un retard dans l'accès aux évaluations et aux programmes de réhabilitation ne rend pas en soi le maintien en prison illégal au titre de l'article 5 de la CEDH[17], tant qu'un tel retard n'est pas déraisonnable et qu'une réelle possibilité de réhabilitation est offerte.
Règle 17
60. La stigmatisation qu’elles subissent de la part des autres détenus et du personnel pénitentiaire augmente la probabilité que les personnes accusées ou reconnues coupables d'une infraction sexuelle soient sur la défensive et dans le déni de l'infraction commise. Il existe un risque qu’un détenu accusé ou reconnu coupable d'une infraction sexuelle occulte les problèmes liés à son propre comportement et nie la nécessité d'une intervention pour ne pas être étiqueté, par exemple, comme pédophile.
61. Cette situation peut atténuer la motivation des personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle à accepter un traitement et, par conséquent, peut entraver les mesures visant à réduire leur risque de récidive. Le déni d'une infraction est une forme courante de manque de réceptivité de l’intéressé, qui nuit à sa relation avec le personnel, à sa motivation et à sa capacité à changer.
62. Cette règle met l'accent sur le droit du détenu à une détention sûre, sans risque de préjudice physique ou psychologique. Il arrive que l’intéressé représente un risque de préjudice pour lui‑même. Les mesures de protection peuvent être utiles à l'observation et au renforcement de la motivation d'un individu à entamer un traitement et/ou des interventions.
63. Les détenus accusés ou reconnus coupables d'une infraction sexuelle sont souvent particulièrement exposés à la violence entre détenus. La Cour européenne des droits de l'homme a déclaré que les autorités pénitentiaires « ont l'obligation de prendre toutes les mesures raisonnablement attendues d’elles pour prévenir les risques réels et immédiats pour l'intégrité physique des détenus dont elles avaient ou auraient dû avoir connaissance ». Elle considère que, pour qu'un mécanisme de prévention soit efficace, « il doit permettre aux autorités concernées de réagir de manière particulièrement urgente et proportionnée au risque constaté auquel l’intéressé est confronté ». L'absence d'une telle mesure peut conduire l’intéressé à ressentir « longuement la crainte et l’angoisse » de subir de façon imminente des mauvais traitements et aboutir à une violation de l'article 3 de la CEDH[18].
64. La mise en œuvre de mesures de protection peut consister à séparer un individu du reste de la population carcérale. Le CPT considère que toute forme de séparation d’un détenu doit se justifier. Il souligne que toute séparation doit être « proportionnée », « légale », « justifiable », « nécessaire » et « non discriminatoire[19]». C'est le cas même lorsque la séparation est volontaire et constitue une mesure de protection. Comme le souligne la règle 53A.4 des Règles pénitentiaires européennes, les détenus séparés des autres ne doivent pas être soumis à des restrictions supérieures à celles qui sont nécessaires pour atteindre le but déclaré de cette séparation. En cas de séparation à des fins de protection, les restrictions importantes ont bien moins de chances de se justifier, car l'intention est ici d'éloigner un détenu d'une situation qui peut lui être préjudiciable, et non de l'empêcher de causer un préjudice à autrui. Si la séparation peut contribuer à réduire ce risque de préjudice, l'isolement constitue en soi un risque de préjudice distinct, qui doit être surveillé et atténué en conséquence. La règle 53A des Règles pénitentiaires européennes fournit de plus amples détails sur les exigences relatives aux détenus séparés.
65. Il est donc important que la personne accusée ou reconnue coupable d'une infraction sexuelle ne soit pas indûment isolée des autres détenus ni empêchée, si cela n’est pas nécessaire, de prendre part à certaines activités avec d'autres détenus. Comme le souligne la règle 53A des Règles pénitentiaires européennes, toute personne placée à l’isolement devrait bénéficier d’au moins deux heures par jour de véritable contact humain. Lorsqu'une personne est séparée pendant une longue période au titre d’une mesure de protection, le CPT a souligné que des dispositions particulières devraient être prises pour améliorer son régime pénitentiaire[20].
66. La Cour européenne des droits de l'homme a estimé que « le fait d'éloigner un détenu d'une cellule dans laquelle il a été menacé constituerait sans aucun doute une mesure appropriée et, au moins à court terme, adéquate ». Toutefois, la Cour a souligné que « si de tels transferts ont lieu fréquemment et régulièrement sans but clairement défini », cette situation semble contraire au principe qui veut que les détenus vulnérables soient protégés de la population carcérale générale. En tout état de cause, l'application des mesures spéciales de protection ne devrait pas s’apparenter à un isolement cellulaire injustifié et prolongé[21].
Règle 18
67. Cette règle souligne que le travail de soutien et de désistance devraient commencer le plus tôt possible par un projet d’exécution de la peine (voir la règle 7 pour plus de détails), dans lequel (1) les risques, les besoins et les capacités des individus sont évalués ; (2) des interventions sont disponibles (en prison et/ou en milieu ouvert) ; (3) un personnel compétent et responsable est défini et associé à un stade précoce ; (4) le programme de traitement/d’intervention est coordonné avec le service de probation concerné ; et (5) aucun prestataire de service ne cesse son action avant qu'un autre n'ait repris le travail de prévention en garantissant les droits de l’intéressé.
68. Le fait que l’intéressé admette sa culpabilité ne doit pas nécessairement être une condition préalable de sa participation à un traitement et/ou à une intervention (voir la règle 6). Le déni est fréquent chez les personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle, en partie en raison de leur stigmatisation. La capacité d’un individu à tirer des enseignements d'une intervention et/ou d'un traitement doit être optimisée en adaptant l'intervention et/ou le traitement au mode d'apprentissage, à la motivation, aux capacités et aux atouts de l’intéressé. L’atténuation du déni et la promotion de la responsabilité sont autant d'objectifs thérapeutiques qu’il convient de poursuivre.
69. Les traitements et/ou interventions doivent être planifiés en fonction du niveau de risque établi pour l’intéressé, les programmes plus intensifs ne devant être appliqués qu'aux personnes à haut risque (voir la règle 5). Les interventions doivent correspondre aux risques et aux besoins de l'individu.
70. Les traitements et/ou interventions doivent être fondés sur des données probantes, être proportionnés et ne jamais être inhumains ou dégradants (voir la règle 5). Si l'achèvement d’un traitement et/ou d’une intervention doivent être pris en compte dans les décisions de libération anticipée, comme le souligne cette règle, le CPT a en outre rappelé que l'achèvement d’un traitement de castration chimique « ne doit pas être une condition générale de libération des délinquants sexuels, mais [...] être administré à des personnes sélectionnées sur la base d'une évaluation individuelle[22]».
V. GESTION, INTERVENTIONS ET TRAITEMENT EN PÉRIODE DE PROBATION
71. Les personnes reconnues coupables d'une infraction sexuelle ne sont pas toutes condamnées immédiatement à une peine d'emprisonnement. Certaines d’entre elles sont uniquement prises en charge en milieu ouvert par les services de probation ou un service équivalent. Même lorsqu’une personne purge une peine d’emprisonnement, une telle période peut être suivie d’une période de surveillance dans la collectivité. Dans certains États membres, les services de probation assurent également le suivi et l’assistance de personnes qui n’ont pas encore été condamnées. Le rôle de la probation reste le même indépendamment du fait que les personnes en fassent l’objet après une détention ou non.
72. Une personne reconnue coupable d'une infraction sexuelle et prise en charge dans le cadre d'une probation peut faire l'objet d'une sanction ou mesure en milieu ouvert, sans emprisonnement préalable, ou peut avoir tout d’abord fait l'objet d'une peine de prison. Le rôle du service de probation, ou de services équivalents, est d’assurer le suivi des personnes reconnues coupables d'une infraction sexuelle, d’aider à favoriser l’adoption par celles‑ci d’un comportement prosocial et de les réinsérer dans la société, plus particulièrement si elles ont été condamnées à une peine d’emprisonnement. La probation joue donc à la fois un rôle de protection de la société et de prise en charge des délinquants. Des traitements et/ou des interventions sont un moyen important de réduire le risque de récidive, ainsi que d'améliorer la réinsertion sociale des personnes reconnues coupables d’une infraction sexuelle. Les personnes reconnues coupables d’une infraction sexuelle sont potentiellement susceptibles de commettre des infractions non‑sexuelles et sexuelles, et les services de probation qui gèrent ces personnes ont donc un rôle actif à jouer pour recommander et faciliter les traitements et/ou les interventions appropriés, fondés sur les besoins individuels et répondant à ceux‑ci, pour permettre à ces personnes de renoncer à la criminalité.
Règle 19
73. La règle 19 s’applique conjointement avec la règle 18, ce qui souligne combien il importe d'élaborer des plans de gestion des risques dans le cadre de la législation et de la politique pertinentes, afin que la personne sous probation n’enfreigne pas accidentellement les conditions auxquelles elle est soumise et ne soit pas réincarcérée pour manquement. L'objectif est ici de s'assurer que les plans de gestion des risques des individus les placent dans la meilleure situation possible pour vivre sans commettre d’infraction. Le fait de tenir compte des restrictions existantes suppose notamment d’être attentif à la réglementation qui limite ou restreint la circulation, l'emploi ou le logement d'une personne reconnue coupable d'une infraction sexuelle, en tenant dûment compte de la victime afin d'éviter une victimisation continue. Ceci est tout particulièrement important à la fin de la peine d’emprisonnement d’un individu, car les services de probation ont un rôle clé à jouer pour aider à préparer l’intéressé à une transition vers le milieu ouvert qui peut être délicate, et qui peut être fortement conditionnée par les services locaux disponibles pour l'individu. Cette règle doit être interprétée à la lumière de la règle 7 sur les projets individuels d’exécution de la peine.
74. Les activités interinstitutionnelles exercées au sein de la collectivité auprès des personnes reconnues coupables d'une infraction sexuelle exigent la mise en place de politiques appropriées, de canaux de communication et de chaînes de responsabilité. Les activités exercées auprès de personnes présentant différents niveaux de risque doivent se fonder sur des normes codifiées, car l'intensité et l'ampleur de l’action interinstitutionnelle en dépendent. Il s’agit de mettre l'accent sur les règles 3, 5, 16 et 17, en reconnaissant que toutes les autorités compétentes et les tiers doivent mettre en place des politiques appropriées, des canaux de communication et des chaînes de responsabilité. L'intensité et l'ampleur de l’action interinstitutionnelle dépendent du niveau de risque de chaque individu ; il convient que le travail des équipes interinstitutionnelles auprès d’individus qui présentent différents niveaux de risque repose sur des normes codifiées, qui emploie des terminologies communes définissant notamment l’objet des entretiens, la durée du suivi commun, l'autorité compétente/principale et les plans de sécurité en cas d'échec. Toutes ces normes et terminologies utilisées doivent être élaborées en collaboration, faire l'objet d'un accord, être consignées par écrit, ainsi qu’être accessibles et rendues publiques dans la juridiction concernée.
Règle 20
75. Cette règle souligne la responsabilité des personnes qui supervisent la gestion des risques d'un individu. En cas de changement du personnel de probation et/ou si la personne en probation déménage pour vivre ailleurs, il doit y avoir un transfert des informations et des documents pour assurer l’efficacité de la chaîne de responsabilité. Il s'agit là d'une bonne pratique qui devrait s’exercer conformément aux lignes directrices en vigueur en matière pénitentiaire et de probation. Cette règle met également l’accent sur l'importance de l'équipe interinstitutionnelle qui accompagne l’intéressé et qui peut comprendre des services de justice pénale, des organismes d'aide et de protection sociale, des organisations de santé et des associations bénévoles.
76. L’objectif de cette règle est également de souligner l’importance de la pratique professionnelle et opportune dans le travail avec les personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle. Les personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle devraient être assujetties aux mêmes procédures et traitées avec les mêmes soins que les autres personnes sous l’assistance ou la surveillance du service de probation. Il devrait y avoir, comme pour toutes les personnes sous l’assistance du personnel de probation, des lignes directrices claires sur les procédures, l’étiquette et des lignes directrices indiquant comment réagir lors de réunions ou face à des clients difficiles.
Règle 21
77. Cette règle fait référence à la disponibilité des interventions et/ou des traitements dans la collectivité et est liée à la règle 18, qui traite de l’accès aux interventions et/ou aux traitements dans les prisons. La règle 18 énonce cinq principes clés à cet égard, qui s’appliquent également ici. Dans tous les cas, les personnes devraient être informées de la façon dont les interventions et/ou les traitements fonctionnent, afin de prendre une décision éclairée quant à savoir si elles aimeraient participer à de tels programmes. Une intervention qui pourrait être possible est la justice restaurative, laquelle est détaillée à la règle 33. Comme il est discuté à la règle 33, la justice restaurative peut ne pas être disponible ou appropriée dans certaines circonstances et exige le consentement éclairé de la victime ainsi que de l’auteur d’infraction et le soutien du service de probation ou de tout autre organisme pertinent.
Règle 22
78. Cette règle prolonge et amplifie la règle 6, en précisant que la personne placée sous probation doit être informée de toutes les politiques et pratiques qui la concernent pendant toute la durée de sa prise en charge (ou plus longtemps si nécessaire), notamment l'enregistrement des personnes condamnées pour une infraction sexuelle, la divulgation éventuelle d’informations à son sujet et toute restriction de logement ou d'emploi liée à sa situation.
79. La Cour européenne des droits de l'homme a précédemment admis que, si les mesures d'enregistrement peuvent sembler répressives pour les personnes qui y sont soumises, cela ne suffit pas en soi à établir que l’obligation d'enregistrement a un caractère ou un but « répressif » au point de constituer une peine au sens de l'article 7 de la CEDH. Cela vaut également pour les cas où le non‑respect des exigences d'enregistrement constitue une infraction pénale. La Cour européenne des droits de l'homme a souligné que l'objectif premier des exigences d'enregistrement était de prévenir la récidive, notamment en permettant à la police de retrouver les personnes soupçonnées de récidive[23]. Elle a estimé que l’obligation d'enregistrement a un « but préventif et dissuasif et ne peut être regardée comme ayant un caractère répressif et comme constituant une sanction ». L'obligation de justifier son adresse « tous les six mois et de déclarer ses changements d’adresse au plus tard dans un délai de quinze jours », même pour une durée de trente ans, « n’atteint pas une gravité telle que l’on puisse l’analyser en une « peine » » au sens de l'article 7 de la CEDH[24].
80. Les mesures d'enregistrement et les obligations déclaratives peuvent constituer une ingérence dans la vie privée d'un individu au sens de l'article 8, paragraphe 1 de la CEDH. Toutefois, toute ingérence doit être appréciée au regard des objectifs de ces mesures et peut se justifier par l’obligation faite aux États membres de protéger les personnes contre les graves préjudices causés par les infractions sexuelles, à condition qu'il s'agisse d'une réponse proportionnée[25]. Ces exigences peuvent être justifiées au titre de l'article 8, paragraphe 2 de la CEDH, à condition qu'elles soient prévues par la loi, qu'elles poursuivent un but légitime et qu'elles soient nécessaires dans une société démocratique. La Cour européenne des droits de l'homme a estimé que les obligations déclaratives à durée indéterminée peuvent se justifier lorsqu'elles sont proportionnées au but poursuivi[26]. Elle a par ailleurs considéré que la conservation de données à caractère personnel à des fins d’enregistrement « pourrait poser un problème sous l’angle de l’article 8 de la Convention », mais qu’elle peut être proportionnée si l’intéressé a la « possibilité concrète » d’obtenir la suppression de ces données lorsque leur conservation n’est plus nécessaire[27].
81. Il convient d'indiquer clairement à l'intéressé quelles données doivent être partagées dans le cadre de son plan de gestion du risque. Il doit être informé de ses droits liés aux données personnelles et de la procédure de recours relative au partage des données s’il souhaite exercer son droit d’en déposer une. En outre, une politique de protection des données devrait être mise en place, laquelle pourra inclure des garanties claires quant à la protection de la personne enregistrée, de sa famille et des victimes et doit faire l’objet de garanties claires, compte tenu de la nature de l'intérêt et des préoccupations des citoyens et des médias à l’égard des infractions sexuelles ; une procédure doit être clairement définie pour faire face aux infractions en matière d'enregistrement des données et enquêter sur celles‑ci.
Règle 23
82. Cette règle décrit l’étape finale du suivi légal et de la libération conditionnelle en milieu ouvert ; il s’agit de bonnes pratiques qui doivent être appliquées conformément à la législation et aux pratiques nationales. Toutefois, si certains aspects de la gestion des risques des intéressés subsistent après la fin du suivi (par exemple, l'inscription au registre ou l'utilisation de leurs données lors de vérifications du casier judiciaire), ils doivent en être informés selon le cas, conformément aux normes nationales et être prévenus lorsqu'ils ont atteint la fin de cette période.
VI. COLLECTE DES DONNÉES, PARTAGE D’INFORMATIONS ET TRAVAIL EN PARTENARIAT
Règle 24
83. Aucune donnée inutile ne doit être traitée à propos d’une personne accusée ou reconnue coupable d’une infraction sexuelle. Seules doivent être collectées les données utilisées par les tribunaux, la police ou les services pénitentiaires et de probation pour l'évaluation, la gestion et la réinsertion de l’intéressé. Le terme « données » peut ici désigner les données à caractère personnel, les données d'évaluation et les données d’interventions et/ou de traitement. En outre, les données collectées par les organisations partenaires doivent uniquement être partagées conformément aux principes et règles généraux de protection des données décrits ci‑dessous et, en outre, uniquement si cela est nécessaire ; les données ne devraient pas être partagées de manière inappropriée ou sans fondement légitime et seulement lorsque cela est nécessaire, soit afin de réduire le risque de récidive, soit pour assurer une gestion efficace de la réinsertion d'une personne dans la société, soit pour protéger les citoyens. La collecte et le partage des données doivent être conformes à la réglementation relative à la protection des données et intervenir dans l'intérêt de la protection des citoyens, de la sécurité de la collectivité et d’une gestion efficace des risques. Lors de la rédaction et de la mise en œuvre du projet d’exécution de la peine, l’opinion et la coopération de la personne sous probation devraient être sollicitées autant que possible afin de créer une vision partagée concernant sa réinsertion sociale.
84. Cette règle renforce la règle 6, qui souligne que la participation et l'engagement avec la personne sous probation sont essentiels. Cette règle vise à garantir que la voix de la personne est écoutée et que le plan de gestion, qui peut être exécuté du point de vue de la justice pénale, est également atteignable par la personne en question et que par conséquent, l’équité de la procédure est garantie. En outre, la règle vise à encourager une guidance claire en ce qui concerne les éventuelles observations, questions et plaintes venant de la personne qui utilise le service.
85. Cette règle porte sur le fait que le traitement des données doit être adapté conformément à la Convention 108 modernisée ainsi qu’à la Recommandation (87)15 visant à réglementer l'utilisation de données à caractère personnel dans le secteur de la police et par son exposé des motifs et plus particulièrement par le Guide pratique sur l’utilisation de données à caractère personnel dans le secteur de la police (document T‑PD(2018)01). Tout traitement de données doit respecter les principes de nécessité, de proportionnalité et de limitation de finalité. Cela implique que le traitement des données à caractère personnel devrait être fondé sur des finalités prédéfinies, spécifiques, claires et légitimes énoncées dans la loi ; il devrait être nécessaire et proportionné à ces finalités légitimes et ne devrait pas être traité d’une manière incompatible avec ces finalités. Le traitement des données devrait être effectué de manière licite, équitable et transparente. Les données à caractère personnel devraient en outre être adéquates, pertinentes et non excessives par rapport aux finalités. Enfin, elles doivent être exactes et à jour pour en assurer la meilleure qualité possible.
Règle 25
86. Cette règle s’appuie sur la nécessité, dans les États membres du Conseil de l’Europe pour les organisations appliquant la loi, de respecter les normes élevées de traitement des données établies par la Convention 108 modernisée. Dans ce document, d’autres instruments normatifs, tels que la Recommandation (87)15 visant à réglementer l'utilisation de données à caractère personnel dans le secteur de la police, son exposé des motifs et, plus particulièrement, le Guide pratique sur l’utilisation de données à caractère personnel dans le secteur de la police (document T‑PD(2018)01) peuvent contribuer à renforcer l'efficacité du travail interinstitutionnel souligné tout au long de cette Recommandation. Aucune donnée concernant un individu accusé ou reconnu coupable d’une infraction sexuelle ne devrait être partagée inutilement et toutes les données détenues par les organisations privées devraient faire l’objet de la même rigueur que les données partagées par et avec des organismes publics. Cela vaut également pour l'utilisation et le partage de ces données par des organismes privés chargés du suivi de personnes en détention et dans la société.
Règle 26
87. Toutes les organisations et institutions devraient définir clairement, au titre des bonnes pratiques, les mesures à prendre par étapes face à la mauvaise gestion des données et aux infractions. Ce cadre devrait comporter des lignes directrices internes, des formations, des mesures disciplinaires et des mécanismes visant à réduire les répercussions de la mauvaise utilisation des données. En outre, ces politiques et ces cadres doivent être expliqués au personnel dès son entrée dans l'organisation et mis à sa disposition de manière systématique. Si les politiques et les cadres sont actualisés ou modifiés, le personnel, ainsi que les institutions partenaires, doivent en être informés.
Règle 27
88. Cette règle souligne l'importance de l’existence d’une politique bien définie en matière de conservation et de destruction des données. Elle doit être clairement indiquée à l’intéressé au début de la procédure pénale, à la fin de celle‑ci et lors de la destruction des données. Ces dispositions et politiques devraient être appliquées à tous les services dont les activités concernent les personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle, et pas seulement aux services pénitentiaires et de probation. Cette règle doit être associée aux directives nationales pertinentes définies à propos des casiers judiciaires et devrait comprendre une révision périodique de la conservation des données. Comme l’indique par ailleurs la présente Recommandation, la participation des utilisateurs de services est importante pour leur évaluation, leur traitement et leur réinsertion sociale (règle 6) et il convient de les informer de la manière dont leurs données sont utilisées et du moment où elles sont détruites (règles 25 et 26), conformément à la Convention 108 modernisée et à la réglementation en vigueur en matière de protection des données.
Règle 28
89. L'objectif de cette règle n'est pas de préconiser un système d'enregistrement ou de divulgation d’informations applicable aux personnes reconnues coupables d’une infraction sexuelle. Il est ici recommandé aux décideurs politiques de s'appuyer sur les données probantes lors de leur prise de décisions. Les dispositions et pratiques en matière d'enregistrement et de signalement diffèrent d'un pays à l'autre, mais il est important que les pays respectent leur législation nationale et mettent en œuvre leurs systèmes existants de manière cohérente entre et à travers les différentes catégories de personnes accusées ou reconnues coupables des différentes infractions.
90. Si un pays dispose d'un système d'enregistrement et/ou de signalement de personnes reconnues coupables d’une infraction sexuelle, il doit appliquer ces procédures de manière cohérente, former le personnel et les institutions concernées, informer les personnes qui en font l’objet et s'assurer que cette politique contribue à la protection du public, tout en protégeant les intéressés et en les aidant à se réinsérer socialement et à éviter de commettre de nouvelles infractions sexuelles. Il importe que, lorsque de tels systèmes existent, les intéressés soient informés précisément des personnes et structures qui ont accès aux informations, de l’usage qu’elles peuvent en faire et des raisons pour lesquelles elles doivent y avoir accès.
Règle 29
91. Cette règle vient renforcer les règles 3, 8, 10 et 25. Les recherches mettent en lumière des situations de partage des données entre pays qui peuvent poser problèmes pour la gestion des risques et la prévention des abus sexuels. Par conséquent, les pays doivent s’efforcer de coopérer pour que le partage de ces données soit facilité, le cas échéant et conformément à la réglementation en vigueur. Le but du partage de ces données devrait être de protéger le public, l’individu et de sauvegarder et maintenir les plans de gestion des risques existants.
VII. VICTIMES ET SOUTIEN DE LA COLLECTIVITÉ
Règle 30
92. Les droits des victimes doivent être respectés dans la gestion et la réinsertion sociale des personnes reconnues coupables d’une infraction sexuelle. Cette règle a pour but de continuer à protéger et à préserver les victimes conformément aux normes de protection des données établies par la Convention 108 modernisée et aux politiques de protection des citoyens et des droits des victimes. Toute communication à la victime d’informations concernant la personne accusée ou reconnue coupable d’une infraction sexuelle doit être faite de manière sûre, sécurisée et empreinte d'empathie par un professionnel formé à cet effet.
93. Cette règle ne doit pas conduire à porter atteinte aux droits de toute personne reconnue coupable d'une infraction sexuelle. La mise en place de garanties complémentaires ou de restrictions supplémentaires de la communication d'informations devrait être considérée comme faisant partie du plan de gestion des risques et approuvée par un haut responsable. Compte tenu de la nature des infractions sexuelles, ce point est d’autant plus important qu’il existe souvent une relation entre la victime et l'auteur (c'est‑à‑dire un membre de la famille, un ami, un collègue ou un confrère) et il est réaliste de prévoir qu'ils puissent, directement ou indirectement, se rencontrer.
94. Il convient de préciser que l'objectif de cette règle est de dispenser un soutien aux victimes. Il n'a pas pour but de permettre aux victimes d'influer sur le parcours pénal de la personne reconnue coupable d'une infraction sexuelle. Son application ne se limite pas à la libération définitive de l'individu, mais peut également concerner une permission de sortie, la fin d’une libération conditionnelle, une libération pour raisons professionnelles ou un changement de lieu de détention (par exemple le passage d'une prison fermée et sécurisée à un lieu de détention ouvert ou à un foyer).
Règle 31
95. Cette règle vient renforcer les règles 8 et 32. En soulignant que le service de probation et les autres services concernés devraient coopérer avec les services d'aide aux victimes de façon appropriée et professionnelle pour préserver et protéger les droits des victimes. Ceci est particulièrement important lorsqu’elle fait partie d’un groupe vulnérable ou protégé ou est en rapport direct ou indirect constant avec la personne accusée ou reconnue coupable d'une infraction sexuelle. Comme souligné dans la règle 30, il est important de soutenir le parcours des victimes, et non de leur permettre d'influencer la condamnation ou la libération de la personne reconnue coupable d'une infraction sexuelle. La victime peut demander l’application d’une intervention motivée par des considérations de justice restaurative si celle‑ci fait partie de la série de mesures prévues à son intention au moment de la condamnation ou après celle‑ci.
Règle 32
96. La gestion des risques est du ressort de professionnels dûment formés. Cependant, des programmes de réinsertion sociale auxquels participent des citoyens formés (cercles de soutien et de responsabilisation, programme ou intervention de justice restaurative, voir la règle 33) peuvent également être utilisés si des mesures de protection appropriées sont en place.
97. De tels programmes de réinsertion animés par des citoyens ont pour but de renforcer l’action des autorités compétentes et non de les remplacer ; ils doivent donc fonctionner en association et en parallèle avec elles. Il convient de mettre en place des directives politiques nationales claires, des lignes directrices de coopération interinstitutionnelle, des codes de pratique et des stratégies de communication clairs. Toutes les personnes libérées et réinsérées dans la société à l'aide de ces mécanismes devraient faire l'objet d'une évaluation appropriée des risques et d'une gestion des risques adéquate. Les institutions responsables (notamment la police et les services de probation) devraient coopérer afin d’assurer la sécurité publique et la protection de la société.
Règle 33
98. Le terme « justice restaurative » désigne tout processus permettant aux personnes qui ont subi un préjudice résultant d’une infraction et aux responsables de ce préjudice de participer activement, s’ils y consentent librement, au règlement des problèmes résultant de l’infraction, avec l’aide d’un tiers qualifié et impartial. La justice restaurative prend souvent la forme d’un dialogue (qu’il soit direct ou indirect) entre la victime et l’auteur de l’infraction, auquel peuvent aussi participer, le cas échéant, d’autres personnes touchées directement ou indirectement par cette infraction. Il peut s’agir notamment de personnes soutenant les victimes ou les auteurs de l’infraction, de professionnels compétents et de membres ou de représentants des communautés concernées (voir pour plus des détails les règles 3 et 4 de la Recommandation CM/Rec(2018)8 relative à la justice restaurative en matière pénale et leur commentaire).
99. La justice restaurative peut ne pas être disponible dans tous les cas ou peut ne pas être appropriée. Lorsqu’elle est mise à disposition, il est essentiel d’intégrer une perspective fondée sur le genre et de faire en sorte que les droits des victimes soient primordiaux. La décision de procéder ou non à une telle intervention incombe à l’organisme qui s’occupe d’une personne reconnue coupable d’une infraction sexuelle et devrait tenir compte du moment et du contexte appropriés dans le processus de réadaptation et de désistance de la personne.
100. La justice restaurative se caractérise généralement par un dialogue entre les parties, mais dans de nombreux cas, des interventions qui n'impliquent pas de dialogue direct entre la victime et la personne qui a commis l'infraction peuvent être conçues et délivrées d'une manière qui respecte étroitement les principes de la justice restaurative. Cela comprend une variété d'approches innovantes en matière de réparation, de rétablissement des victimes et de réinsertion sociale des personnes accusées ou reconnues coupables d'une infraction sexuelle, si elles sont entreprises conformément aux principes de base de la justice restaurative (voir la règle 59 de la Recommandation CM/Rec(2018)8 relative à la justice restaurative en matière pénale).
101. Lorsque les victimes souhaitent participer à des interventions de justice restaurative, suite à la prise de décisions éclairées, l'accès à ces interventions devrait être facilité. Dans de tels cas, les renvois aux interventions de la justice restaurative peuvent être effectués par les autorités judiciaires, par les services de justice pénale ainsi que par les services d'aide aux victimes et de justice restaurative ‑ ou par le biais d’auto‑renvoi. Pour que de telles interventions aient lieu, la participation éclairée de la personne condamnée pour une infraction sexuelle est également requise. Toutes les parties devraient être correctement préparées à de telles interventions par des professionnels de la justice restaurative formés, et le résultat de ces interventions devrait être pris en compte dans les projets de réinsertion des personnes condamnées pour des infractions sexuelles.
VIII. SÉLECTION ET FORMATION DU PERSONNEL
Règle 34
102. L’évaluation, la gestion, les interventions et le traitement des personnes accusées ou reconnues coupables d'une infraction sexuelle dépendent de la qualité du personnel qui les assure. Cette règle souligne qu’il incombe aux autorités compétentes de sélectionner et de recruter un personnel en nombre suffisant et de la meilleure qualité possible, de veiller à ce qu'il reçoive une formation adéquate et de faciliter son développement professionnel pour lui permettre de travailler dans le respect d'une éthique exigeante, afin de fournir aux personnes accusées ou condamnées un suivi équitable et efficace, une prise en charge et une assistance concrètes, susceptibles d'améliorer leurs perspectives de réinsertion et d'inclusion sociale, dont dépend généralement le renoncement à commettre de nouvelles infractions.
103. La sélection, la formation et le soutien du personnel sont essentiels et on peut avoir recours à une procédure de recrutement spécifique qui évalue les connaissances, les performances et les attitudes envers les personnes accusées ou reconnues coupables d'une infraction sexuelle, ainsi que les caractéristiques personnelles propices à la résilience. D'autres dispositions relatives au recrutement, à la sélection, la formation et au développement professionnel du personnel des services pénitentiaires et de probation, y compris les niveaux d'études pertinents, la publication des postes vacants et les procédures d'évaluation d'entrée, sont détaillées dans les directives du Conseil de l’Europe concernant le recrutement, la sélection, l'éducation, la formation et le développement professionnel du personnel pénitentiaire et de probation (CM(2019)111‑add).
Règle 35
104. Cette règle souligne que les personnes accusées reconnues coupables d'une infraction sexuelle doivent bénéficier d'une gestion et d'un traitement fondés sur des données probantes. La recherche sur les modèles fondés sur des données probantes de réinsertion et de réintégration sociale évolue avec le temps et il est important que les services pénitentiaires et de probation soient attachés à l’utilisation cette connaissance dans leur travail. Les directives concernant le recrutement, la sélection, l'éducation, la formation et le développement professionnel des personnels pénitentiaires et de probation (CM(2019)111‑add) soulignent l'importance pour le personnel pénitentiaire et de probation de faciliter la réinsertion et la réintégration sociale, en indiquant dans ses principes clés que « la mission du personnel des services pénitentiaires et des agences de probation est de contribuer de manière significative à la sécurité publique en assurant une gestion sûre, sécurisée et humaine des suspects et des délinquants tout en offrant des possibilités de réinsertion et de réintégration ».
Règle 36
105. En raison de la complexité et de la nature potentiellement traumatisante des informations et des données à évaluer, un encadrement et un soutien par d’autres professionnels, y compris le soutien de leurs pairs, s’imposent lors de l'évaluation des risques. Une supervision continue est également nécessaire pour garantir qu'il existe une chaîne de responsabilité afin de maintenir la compétence du travail des membres du personnel. Il est également important que les professionnels qui supervisent ce travail soient suffisamment qualifiés. Cette supervision devrait être assurée par des professionnels, y compris des psychologues, des psychiatres, des pédagogues sociaux, des travailleurs sociaux et des sexologues ayant une connaissance approfondie de la théorie et de la pratique du traitement des personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle. Cette règle reconnaît que la mise en place ou l’application d’une intervention et/ou d’un traitement spécifique aux personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle exige des qualifications professionnelles (voir la règle 37 pour plus de détails).
Règle 37
106. Il est essentiel, dans tous les domaines qui impliquent un contact avec des personnes accusées ou reconnues coupables d'une infraction sexuelle, que le personnel reçoive une formation adéquate, afin de garantir la compétence de son travail, qui est essentielle pour assurer la gestion efficace, la réadaptation et la réinsertion dans la société de ces personnes. L’existence d’une formation continue et régulière permet au personnel de s’informer des évolutions récentes et donc d’être mieux à même d’assumer sa mission (voir également la règle 13 sur l'évaluation des risques). Dans tous les cas, la gestion, le traitement et la réinsertion sociale des personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle sont des domaines exigeant une formation spécifique concernant la dynamique cachée derrière les actes sexuels délictueux.
107. Des dispositions détaillées sur l'éducation et la formation du personnel pénitentiaire et de probation sont contenues dans les Directives concernant le recrutement, la sélection, l'éducation, la formation et le développement professionnel du personnel pénitentiaire et de probation (CM(2019)111‑add).
108. Des dispositions détaillées sur le fonctionnement des services de justice restaurative, y compris l’élaboration de procédures concernant la sélection, la formation, le soutien et l’évaluation des facilitateurs de justice restaurative sont contenues dans la section VI de la Recommandation CM/Rec(2018)8 relative à la justice restaurative en matière pénale. La règle 42 de cette recommandation exige plus spécifiquement que « En ce qui concerne les affaires sensibles, complexes ou graves, les facilitateurs devraient être expérimentés et bénéficier d’une formation approfondie avant d’exercer la justice restaurative ». Cette règle s’applique également aux infractions sexuelles (voir pour plus de détails le commentaire à la règle 42 de cette Recommandation).
109. L'apprentissage peut se faire dans le cadre de cours de formation formels ou d'un modèle type d’apprentissage et peut être dispensé en interne ou nécessiter l'assistance d'experts d'autres institutions compétentes. La formation du personnel doit se focaliser sur la recherche et la pratique les plus récentes, basées sur des données probantes. Ceci exige de consulter régulièrement les publications et les recherches par exemple sur la récidive et l'évaluation des risques, afin de mettre en œuvre la procédure d'évaluation la plus pertinente. Dans cette optique, le CPT a souligné dans ses rapports consacrés aux différents pays combien il importait de dispenser au personnel « la formation initiale et spécialisée requise tout au long de sa carrière ». Les professionnels travaillant avec des personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle, devraient être informés des nouveaux outils et des progrès dans ce domaine, y compris la recherche contemporaine, et disposer d'une formation et d'une expertise suffisantes. Pour être satisfaisante, cette formation exige une bonne compréhension théorique de la nature, des causes et de la gestion des abus et violences sexuels.
Règle 38
110. Cette règle reconnaît que le personnel pénitentiaire et de probation travaillant auprès de personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle peut être stigmatisé ou rejeté par ses collègues et par la société en général. Le fait de travailler avec ce groupe d’individus peut être considéré comme une « activité professionnelle sensible », qui comporte un risque accru d’être confronté à des événements traumatiques. Les informations à charge émotionnelle concernent à la fois les infractions dont les agents ont connaissance ainsi que leur effet sur les victimes, le parcours de vie des personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle et le traitement psychologique pratiqué au cours des thérapies de groupe. À cet égard, les Lignes directrices pour le recrutement, la sélection, l'éducation, la formation et le développement professionnel du personnel pénitentiaire et de probation (CM(2019)111‑add) soulignent qu'une partie importante du développement professionnel comprend la garantie d'un soutien et d'une supervision du personnel pour les aider dans leur rôle (ligne directrice 11).
111. La nature du travail peut engendrer un traumatisme secondaire en réaction à une exposition indirecte à un traumatisme, dont les symptômes peuvent témoigner d’un syndrome de stress post‑traumatique, un sentiment de vulnérabilité, une confiance amoindrie envers les autres, une vigilance excessive, une inquiétude constante, des changements de comportement avec les enfants, un durcissement émotionnel et des images intrusives qui affectent la santé sexuelle, un sentiment de honte vis‑à‑vis du sexe, une usure de la compassion et l'épuisement professionnel (burnout).
112. Les services qui dispensent un traitement aux personnes reconnues coupables d'une infraction sexuelle ont pour tâche de prévenir tout risque d’effet négatif sur le personnel. Il convient de proposer un encadrement qui permette aux agents de réfléchir à leur travail, de faire le point sur leurs entretiens récents avec les auteurs d’infractions et de développer leurs compétences. Cet encadrement devrait être facilité par un thérapeute expérimenté qui peut former, modéliser et développer la pratique de ses collègues. L’encadrement représente la principale source de perfectionnement professionnel pour les professionnels qui évaluent le risque ou qui s’occupent du traitement et/ou des interventions, mais il devrait également être proposé au personnel pénitentiaire et de probation, qui entretient des contacts quotidiens avec les individus accusés ou reconnus coupables d’une infraction sexuelle.
IX. STRATÉGIE DE COMMUNICATION ET DE RELATIONS AVEC LES MÉDIAS
Règle 39
113. Cette règle énonce que toutes les institutions de justice pénale qui s’occupent des personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle devraient rendre publiques leurs politiques de gestion des risques par les canaux existants et agréés, notamment sous forme de documents en ligne et imprimés.
114. Les politiques, y compris celles qui sont liées à l'évaluation, à la détermination de la peine, au traitement et/ou aux interventions, à la gestion des prisons, à la gestion en période de probation, aux politiques connexes de gestion publique (autrement dit les politiques d'enregistrement, de divulgation d’informations, de signalement public, de logement, d'emploi et de santé) et aux politiques ou codes de pratique applicables au personnel devraient être disponibles en ligne ou sur demande. Cette mesure permet au public, aux professionnels et aux autres parties concernées de connaître et de comprendre les outils d'évaluation des risques, les procédures et les politiques de gestion des risques, ainsi que les traitements et/ou les interventions utilisés. Cette transparence est importante car elle améliore la coopération des utilisateurs des services (règle 6), les activités interinstitutionnelles (règle 3), les relations avec les médias (règles 40, 41 et 42) et renforce la confiance du public.
Règle 40
115. Cette règle précise que les établissements pénitentiaires et les services de probation doivent présenter une stratégie claire de communication et de relations avec les médias. La hiérarchisation des priorités en matière de communication doit être définie clairement et s’accompagner notamment, mais sans s’y limiter, d’une équipe chargée des relations avec les médias et des relations publiques, ainsi que d’un porte‑parole bien identifié. Le but de cette règle est de souligner l’importance d’une stratégie de communication claire à l’égard des infractions sexuelles, qui tienne compte des réactions du public, de la couverture médiatique de ces questions et de la nécessité de respecter les droits des personnes accusées ou reconnues coupables de ces infractions. De telles stratégies de communication doivent être en conformité avec les normes de protection des données telles qu’énoncées en Chapitre VI.
116. Même si toutes les communications officielles avec les médias devraient être effectuées par des personnes spécialement désignées en tant que porte‑parole et formées pour ce faire, il importe que les relations avec les médias soient intégrées dans le développement et la formation de tous les membres clés du personnel, y compris du porte‑parole. Le rôle du personnel chargé de la communication et des relations avec les médias doit être clairement défini dans son contrat et il doit être formé dans ce domaine. Tous les autres membres du personnel pénitentiaire et de probation doivent être informés des agents nommés à ces postes, de leur rôle et de leurs coordonnées.
Règle 41
117. Cette règle est le pendant de la règle 40, qui souligne combien il est important que les services pénitentiaires et de probation disposent d'un porte‑parole clé pour traiter des questions relatives aux médias, ainsi que d'une stratégie de communication. Il vise à garantir que les éléments de la règle 40 ne soient pas remis en cause par des membres du personnel, bien intentionnés ou non, qui s’entretiennent avec les médias. Au moment de décider s’il est approprié de communiquer avec les médias, les droits et les intérêts de la personne accusée ou reconnue coupable d’une infraction sexuelle et ceux de la victime devraient être pris en considération. C’est particulièrement important pour les affaires d'infractions sexuelles très médiatisées et en cours, y compris, mais sans s'y limiter, les infractions sexuelles extrêmement violentes, les infractions sexuelles en milieu professionnel ou les affaires qui font l'objet d'une attention importante de la part des médias (à propos de la victime ou de l'auteur) et les grands réseaux criminels ; il est en effet très probable que ces affaires aient un retentissement public et fassent par conséquent l'objet d’une couverture médiatique importante.
118. Tous les agents devraient connaître les procédures et les directives de leur institution applicables aux rapports avec le public, y compris la presse, sur les questions relatives à l'évaluation, la gestion et la réinsertion sociale des personnes ayant commis des infractions sexuelles, ainsi que les conséquences du non‑respect de ces procédures. Le droit du personnel de divulguer les pratiques inappropriées ou illégales liées au traitement, aux interventions ou à la gestion des personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle devrait être protégé par le droit national.
Règle 42
119. Le public et les médias s'intéressent énormément aux infractions sexuelles, ce qui doit être pris en compte dans la gestion des personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle. Pour les personnes « à haut risque », ainsi que pour les personnes ou les dossiers très en vue, la stratégie médiatique correspondante doit être élaborée à l'avance. Dans de tels cas, elle doit faire partie intégrante du plan de gestion des risques de ces personnes et doit être développée tout au long de leur relation avec les services pénitentiaires et de probation. La stratégie médiatique doit donc être élaborée dans une perspective interinstitutionnelle par l'institution principale. Elle doit prendre en compte tous les aspects de l'évaluation, de la gestion et de la réinsertion sociale de l'intéressé ; elle doit être régulièrement revue et mise à jour. L'élaboration de cette stratégie médiatique devrait prendre en compte la gestion des risques, la protection des citoyens et la sauvegarde des droits de la victime, de l'auteur de l’infraction et du personnel.
X. RECHERCHE, ÉVALUATION ET DÉVELOPPEMENT
Règle 43
120. Cette règle a pour but de garantir que des enseignements soient tirés et des évaluations réalisées en vue d'améliorer les pratiques et les politiques dans tous les domaines de la gestion des personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle et de leur réinsertion sociale. Ces évaluations doivent être effectuées régulièrement, afin que les bonnes pratiques établies puissent être définies à partir de données probantes solides.
121. Cette règle reconnaît que la recherche et l'évaluation doivent être un élément central des activités exercées par les services pénitentiaires et de probation, ainsi que d'autres institutions, auprès des personnes accusées ou reconnues coupables d’une infraction sexuelle. Les services pénitentiaires et de probation doivent élaborer leur propre base de données probantes sur les politiques et pratiques efficaces, afin de pouvoir revoir, adapter et mettre à jour ces dernières si nécessaire. Cette recherche et cette évaluation doivent donc être considérées comme faisant partie intégrante de l'activité principale de ces services et être dotées de ressources à ce titre.
122. La recherche et l'évaluation doivent être effectuées par un personnel formé qui dispose du temps, de l'espace, de l'accès et des ressources nécessaires pour effectuer ce travail correctement ; dans certains cas, cette recherche peut être interinstitutionnelle et des accords de partage des données doivent donc être conclus au préalable. Les résultats de ces recherches doivent être examinés et intégrés dans les cycles de planification des institutions, les plans de gestion des risques pertinents, la formation du personnel, le travail interinstitutionnel, ainsi que la communication et les relations avec les médias. En outre, les nouveaux outils d'évaluation, les interventions et/ou les stratégies de gestion des risques devraient être évalués systématiquement.
123. Les services pénitentiaires et de probation, ainsi que les autres agences qui travaillent avec les personnes accusées ou reconnues coupables d’une d’infraction sexuelle, devraient élaborer une stratégie de recherche et d'évaluation. Celle‑ci devrait comprendre l'élaboration d'un calendrier de recherche, la création et la gestion d'une bonne pratique d'éthique, une stratégie d'évaluation par les pairs (interne et externe), ainsi qu'une stratégie de publication et devrait accorder une attention particulière aux considérations relatives à la protection des données. Tous les rapports de recherche et d’évaluation devraient être conformes aux principes et règles de protection des données et devraient être accessibles sur les sites internet pertinents ou mis à disposition sur demande.
124. La recherche et l'évaluation devraient être axées sur les résultats et devraient tenir compte : du succès des interventions, du changement de comportement, du renoncement à commettre de nouvelles infractions et de la réduction de la récidive. Cela signifie qu'il n'existe pas de méthodologie unique, mais que la question traitée détermine la méthode de recherche. Une approche claire et cohérente de la collecte de données s’impose tout au long de la période des rapports que l'intéressé entretient avec le système de justice pénale. Ces données devraient être traitées en stricte conformité avec la section VI de la présente Recommandation. Étant donné la complexité de l'évaluation, de la gestion et de la réinsertion sociale de cette population, il importe de disposer d’éléments de données et d'un outil de collecte de données précis et solides.
125. Les données pertinentes devraient être anonymisées et devraient inclure :
- les données démographiques ;
- les données sur les infractions (y compris le type d'infraction, la ou les victimes, le choix de la peine) ;
- les données d'évaluation des risques, initiales et en cours ;
- les données sur les résultats du traitement, y compris avant, pendant et après ;
- les données relatives à une nouvelle condamnation, à une infraction et à une réincarcération ;
- les données relatives au temps passé en prison et en probation ;
- les données relatives à la sortie de l’intéressé du système de justice pénale.
126. Cette liste n'est pas exhaustive, mais elle donne une indication du type et du champ d’application des données nécessaires pour mener à bien des travaux de recherche fructueux et évaluer les progrès accomplis, au sein du système de justice pénale, pour travailler avec les personnes accusées ou reconnues coupables d'une infraction sexuelle. Dans la mesure du possible, chaque juridiction devrait collecter les mêmes données, ou des données équivalentes, afin de pouvoir procéder à des comparaisons. Les rapports de recherche et d'évaluation peuvent être partagés dans le cadre des organisations nationales et internationales. Le partage et la publication des rapports en la matière doivent respecter les politiques de protection des données énoncées à la section VI.
Règle 44
127. Il est important d’effectuer des travaux de recherche et d'évaluation sur les personnes accusées ou reconnues coupables d'une infraction sexuelle détenues en prison et soumises à probation, comme le prévoit la règle 43. Pour atteindre cet objectif, ces services devraient recueillir des données pertinentes et appropriées et devraient mettre en place des garde‑fous afin de protéger ces données, comme détaillé dans la Convention 108 modernisée. La recherche et l'évaluation contribueront à l'élaboration d'une base de données solide sur les infractions sexuelles, le traitement et la gestion des intéressés ; elles seront également très utiles en cas de déplacement des personnes ayant commis des infractions d’une institution à une autre et/ou d’un pays à un autre. Le cas échéant, les services pénitentiaires, de probation et de police devraient mener des recherches avec des partenaires externes reconnus.
[1] De Schepper c. Belgique, n° 27428/07, 13 octobre 2009.
[2] De Schepper c. Belgique, n° 27428/07, 13 octobre 2009 ; Swennen c. Belgique, n° 53448/10, 10 janvier 2013.
[3] W.D.c. Belgique, n° 73548/13, 6 septembre 2016.
[4] Ilnseherc. Allemagne [GC], n° 10211/12 et 27505/14, 4 décembre 2018. Paragraphes 164, 169.
[5] CPT, Allemagne : Visite 2013. [CPT/Inf (2014) 23]. Para 21.
[6] CPT, Turquie : Visite 2013. [CPT/Inf (2015) 6]. Paragraphes 61, 62.
[7] Comité européen pour la prévention de la torture (CPT), République tchèque, Visite 2018. [CPT/Inf (2019) 23]. Par. 135‑6 ; CPT, Allemagne : Visite 2015. [CPT/Inf (2017) 13]. Par. 131‑2 ; CPT, République tchèque : Visite 2014. [CPT/Inf (2015) 18]. Par. 181‑4 ; CPT, Allemagne : Visite 2013. [CPT/Inf (2014) 23]. Par. 49‑51.
[8] Dvořáčekc. République tchèque, n° 12927/13, 6 novembre 2014.
[9] Bäckerc. Allemagne, n°44183/12, 21 octobre 2014. Par. 35‑38.
[10] Dvořáčekc. République tchèque, n° 12927/13, 6 novembre 2014.
[11] Toomeyc. Royaume‑Uni, n° 37231/97, 14 septembre 1999.
[12] CPT, Allemagne : Visite 2015. [CPT/Inf (2017) 13]. Par. 97.
[13] CPT, Allemagne : Visite 2015. [CPT/Inf (2017) 13]. Par. 97.
[14] CPT, Autriche : Visite 2015. [CPT/Inf (2015) 34]. Par. 113 ; voir également CPT, République tchèque : Visite 2014. [CPT/Inf (2015) 18]. Par. 158.
[15] CPT, « L’ex‑République yougoslave de Macédoine » : Visite 2016. [CPT/Inf (2017) 30]. Par. 9, 11.
[16] W.D.c. Belgique, n° 73548/13, 6 septembre 2016.
[17] David Thomas c. Royaume‑Uni, n° 55863/11, 4 novembre 2014. Par. 54‑55.
[18] D.F. c. Lettonie, n° 11160/07, 29 octobre 2013. Par. 84, 91, 95.
[19] 21e Rapport général d’activités du CPT [CPT/Inf (2011) 28], paragraphe 55.
[20] 21e Rapport général d’activités du CPT [CPT/Inf (2011) 28], paragraphe 61.
[21] D.F. c. Lettonie, n° 11160/07, 29 octobre 2013. Par. 87.
[22] CPT, Autriche : Visite 2015. [CPT/Inf (2015) 34]. Par. 113.
[23] Adamsonc. Royaume‑Uni, n° 42293/98, 26 janvier 1999.
[24] Gardel c. France, n° 16428/05, 17 décembre 2009. Par. 43.
[25] Adamsonc. Royaume‑Uni, n° 42293/98, 26 janvier 1999.
[26] Minterc. Royaume‑Uni, n°62964/14, 2 mai 2017.
[27] Gardel c. France, n° 16428/05, 17 décembre 2009. Par. 68‑71.