Le … février 2017,

Questionnaire en vue de la préparation

de l’avis No. 12(2017 du CCPE :

 

« LES DROITS DES VICTIMES, des témoins et des personnes vulnerables »

1.      Définitions

1.1

La définition de la victime dans le droit pénal est toute personne qui subit personnellement et directement un préjudice (physique, moral ou matériel) causé par l’infraction.

Cette définition est doctrinale et n’est pas prévue par la loi.

Toutefois, l’article 2 du code de procédure pénale pose le principe selon lequel l’action pour la réparation du préjudice directement causé par un fait constituant une infraction appartient à tous ceux qui en ont personnellement souffert, et défini par là même indirectement le terme de victime. Il prévoit en outre que tous les dommages sont concernés, aussi bien matériels que corporels ou moraux.

En outre, l’article 73 du code pénal défini la partie civile, à savoir la personne lésée par un crime, un délit ou une contravention.

1.2

De manière générale, la procédure pénale est la même pour tous les types d’infractions.

Néanmoins, il existe une compétence générale des juridictions monégasques pour connaître des faits de tortures, au sens de la convention de New-York contre la torture et autres peines ou traitements inhumains ou dégradants, quel ait été leur lieu de commission (article 8 2° du code de procédure pénale).

Cette compétence générale existe également pour les infractions sexuelles commises sur des mineurs, si l’auteur est trouvé en Principauté de Monaco (article 8 3° du code de procédure pénale).

Par ailleurs, en matière de prescription, qui est en principe de 10 ans en matière criminelle, elle est portée à 30 ans révolus à compter de la majorité lorsqu’un mineur a été victime d’un crime (article 12 du code de procédure pénale).

1.3

Il n’existe pas de définition légale de la personne vulnérable.

Il est admis que la vulnérabilité d’une personne est due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique, à un état de grossesse.

2.      Les droits des victimes, des témoins et des personnes vulnérables

2.1

Oui

2.2

Certains oui

2.3

-          Pour les victimes :

Droit de porter plainte,

Droit d’être entendu,

Droit d’être assisté d’un avocat,

Droit d’accès à la procédure,

Droit de solliciter des actes de procédure,

Droit à indemnisation.

2.4

L’article 45 de la loi n° 1.382 du 20 juillet 2011 institue le droit à l’information et au conseil pour les victimes :

Ainsi, les officiers et agents de police doivent informer les victimes de leur droit à obtenir réparation, de se constituer partie civile ou de citer directement l’auteur ou de porter plainte devant le juge d’instruction, d’être aidées par les intervenants relevant de l’Etat ou par une association d’aide aux victimes.

Des plaquettes d’informations au sujet des droits des victimes doivent leur être remises et doivent être à dans les établissements d’hospitalisation et les cabinets médicaux.

Association d’aide aux victimes d’infractions pénales (AVIP)

A notamment pour mission de favoriser l’information des victimes 

Des plaquettes d’information au sujet de cette association sont disposition dans de nombreuses institutions monégasques (locaux de police, hôpital, direction de l’éducation nationale, services sociaux…) et un site internet est accessible.

Base de données en libre accès sur internet des codes et loi (Légimonaco) et des décisions publiées (Jurimonaco)

2.5

2.6

Il existe des droits spécifiques pour les mineurs et pour les majeurs protégés (en raison de leur âge ou de leur handicap) en tant que victimes.

Ils sont représentés en justice et peuvent se voir nommer un administrateur ad hoc s’ils ne sont pas suffisamment protégés par leurs représentants légaux naturels.

Les auditions des mineurs et des majeurs incapables sont encadrées par la loi.

2.7

Les décisions rendues en matière pénale affectant les mineurs sont notifiées à ses représentants légaux et, le cas échéant, du service éducatif en charge d’une mesure d’assistance éducative.

Les décisions rendues en matière pénale affectant les majeurs protégés sont notifiées à leurs administrateurs judiciaires.

Les décisions rendues en matière pénale affectant une situation conjugale sont portées à la connaissance du juge statuant sur la garde des enfants.

2.8

Les personnes vulnérables peuvent témoigner seules.

Néanmoins, toute victime (a fortiori vulnérable) peut être assistée d’un avocat pour la confrontation avec l’auteur des faits en garde à vue (article 60-9 bis du code de procédure pénale).

Les mineurs ou majeurs incapables victimes de menaces, violences ou atteintes sexuelles doivent être assistées d’un avocat lors de leur audition par le juge d’instruction (article 268-2 du code de procédure pénale).

Cette audition fait l’objet d’un enregistrement audiovisuel (article 268-3 du code de procédure pénale).

Au cours de l’enquête ou de l’information judiciaire, les auditions ou confrontations de mineurs victimes de menaces, violences ou viols, peuvent être réalisées en présence d’un psychologue, d’un médecin spécialisé de l’enfance ou d’un membre de la famille ou de l’administrateur ad hoc ; sur décision du Procureur général ou du Juge d’instruction, le cas échéant à la demande du mineur ou de son représentant légal.

Enfin, les mineurs en dessous de l’âge de 15 ans ne peuvent être entendus comme témoins qu’à titre de renseignement et sans prestation de serment (article 134 du code de procédure pénale).

2.9

Le refus de témoigner est possible mais peut entraîner des conséquences juridiques, voir des sanctions.

En phase d’instruction :

En cas de non comparution de tout témoin régulièrement cité, le juge d’instruction peut délivrer un mandat d’amener (article 128 alinéa 2 du code de procédure pénale).

Il peut en outre condamner le témoin, s’il ne comparaît pas, refuse de prêter serment ou de déposer, à l’amende prévue au chiffre 1 de l’article 26 du code pénal.

En phase de jugement :

Le tribunal correctionnel ou le tribunal criminel peut ordonner que le témoin cité qui ne comparaît pas soit immédiatement amené à la barre par la force publique (articles 322 et 389 du code de procédure pénale).

S’il ne comparaît pas ou refus de déposer sans en être légitiment empêché, ce qui relève de l’appréciation souveraine de la juridiction, il peut être condamné à une amende de 30 à 300 euros (article 323 du code de procédure pénale).

L’opportunité d’entendre un témoin et de le contraindre à témoigner relève de l’appréciation souveraine des juges du fond qui combinent les nécessités de manifestation de la vérité et de protection des témoins.

2.10

Lorsque des personnes vulnérables doivent être entendues en tant que victime ou témoin, il appartient à l’autorité en charge de la phase judiciaire (parquet, juge d’instruction, tribunal) d’apprécier le risque que cela leur fait encourir.

Pour ce faire, l’avis d’un expert peut être sollicité (généralement un expert psychologue) qui se prononcera sur l’opportunité notamment de confronter la victime ou le témoin vulnérable à l’auteur. L’expert se prononcera sur le risque pour sa santé (physique et psychique).

L’avis de la personne vulnérable est sollicité mais n’a pas de caractère contraignant.

L’article 37-2 du code de procédure pénale prévoit la possibilité pour le Procureur général, dès le stade de l’enquête, dans des affaires de violences et d’atteintes sexuelles, d’ordonner une expertise médico-psychologique de la victime, destinée à apprécier la nature du préjudice subi et à établir si celui-ci rend nécessaire des traitements ou des soins appropriés.

2.11

Lorsque l’intérêt du mineur victime de faits de menaces, violences ou atteintes sexuelles, le justifie, l’enregistrement de son audition par le juge d’instruction peut être uniquement sonore (article 268-3 du code de procédure pénale).

Une procédure de témoignage anonyme existe (article 147-1 du code de procédure pénale).

Elle se déroule durant la phase d’instruction.

Elle est prévue pour les infractions punies d’un emprisonnement au moins égale à cinq ans.  

Elle est mise en œuvre si l’audition est susceptible de mettre en danger la vie ou la sécurité physique du témoin ou celle des membres de sa famille ou de ses proches.

2.12

Afin d’éviter que les victimes ne subissent à nouveau des faits infractionnels de la part de leurs auteurs, il existe différents outils de protection.

La victime, ou une association de défense de victimes de violences avec l’accord de la victime, de faits de menaces, violences ou viol, peut solliciter du président du tribunal de première instance une ordonnance de mise sous protection qui interdit à l’auteur des faits d’entrer en relation avec la victime ou de paraître ou résider en certains lieux.

En outre, le juge peut autoriser la résidence séparée des époux ou attribuer le logement conjugal à la victime. (article 24-1 du code civil)

En phase d’enquête : (article 37-1 du code de procédure pénale)

Pour les victimes de menaces, violences ou viols, le Procureur peut interdire à l’auteur des faits d’entrer en contact avec la victime ou de résider ou de paraître en certains lieux. Il peut également mettre à disposition de la victime et des membres de son foyer une solution d’hébergement d’urgence de nature à assurer sa sécurité.

Ces mesures d’urgence doivent être confirmées dans les 24 heures par une ordonnance de protection du Président du tribunal de première instance (cf article 24-1 du code civil).

En phase d’instruction :

L’inculpé peut être placé en détention provisoire pour garantir la sécurité de la victime ou sous contrôle judiciaire avec interdiction d’entrer en relation avec sa victime ou de paraître en certains lieux.

Lors de la phase de jugement :

Le tribunal peut condamner l’auteur à une peine d’emprisonnement avec placement sous le régime de la liberté d’épreuve (article 396 du code pénal). Deux obligations de ce régime permettent d’éviter la réitération des faits : établir sa résidence dans un lieu déterminé et s’abstenir de recevoir ou d’héberger à son domicile certaines personnes, notamment la victime (ordonnance n° 3.960 du 12 février 1968).

Les coupables de faits de menaces, violences ou viols peuvent en outre être condamnés, à titre complémentaire, à l’interdiction d’entrer en relation avec la victime ou de paraître en certains lieux, et ce pendant une période déterminée, sous peine d’un emprisonnement de un à six mois et de l’amende prévue au chiffre 3 de l’article 26 (article 37-1 du code pénal).

2.13

Il n’existe pas de distinction dans les droits des personnes quant à leur nationalité.

3.      Rôle des procureurs dans la protection des droits des victimes, des témoins et des personnes vulnérables

3.1

Le paquet général de Monaco est composé de 5 magistrats (Procureur Général inclus). Un de ses membres est le référent victime et est en charge de leur protection.

Ce référent est en contact direct avec l’association d’aide aux victimes d’infractions pénales, il est notamment en charge de lui adresser les victimes qui ont besoin de son intervention.

3.2

Le procureur général reçoit les dénonciations et les plaintes et est chargé de la recherche et de la poursuite des infractions (article 34 du code de procédure pénale).

3.3

Dans la pratique le Procureur général dispose de pouvoirs d’enquête pour rechercher les infractions ou leurs auteurs et faire cesser le trouble.

Il peut mettre en œuvre des mesures de protection en urgence : ordonnance de protection pour les victimes (article 37-1 du code pénal), placement en urgence d’un mineur en danger ; qui doivent ensuite être entérinées par un juge.

Il peut saisir les juges pour la protection : des mineurs, requête en assistance éducative, des majeurs incapables, requête en mise sous protection judiciaire.

Le Procureur demeure constamment en lien étroit avec les services sociaux, de protection sociale, de l’éducation nationale.

3.4

Oui

Les victimes peuvent déposer plainte directement auprès du Parquet général.

Les personnes vulnérables peuvent demander leur mise sous protection judiciaire.

3.5

Oui.

Le parquet enquête sur tout fait porté à sa connaissance, même sans plainte.

Le parquet peut prendre d’office toutes les mesures de protection développées supra.

3.6

Les procureurs sont en lien permanents et étroits avec les services étatiques (services sociaux, éducation nationale) le centre hospitalier et l’association d’aide aux victime d’infractions pénales.

3.7

Les procureurs bénéficient d’une formation continue tout au long de leur carrière à raison, généralement, d’une formation par an. Le panel de formation proposé comprend la protection des victimes, des témoins et des personnes vulnérables.

L’article 46 de la loi n° 1.382 du 20 juillet 2011 impose qu’une formation régulière soit dispensée aux professionnels appelés à être en contact avec des victimes de violences. Cela concerne notamment les magistrats, les professionnels de santé, les agents et officiers de police judiciaire.

Depuis 2011, deux formations de ce type ont été organisées.

La mise en œuvre de cette formation est gérée par la Direction de la formation du gouvernement.