Module 4 – PATHS/HELP Programme

Rabat, 27-28 novembre 2017

Tatiana TERMACIC

Mesdames, Messieurs,

C’est un immense plaisir de vous souhaiter la bienvenue à ce séminaire consacré à la présentation des outils de formation développés par le Programme de formation aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, plus connu sous le nom de HELP. J’espère que les deux journées qui vont suivre vous persuaderont d’adopter ces outils pour renforcer la capacité des juges, procureurs, fonctionnaires et avocats à mettre en œuvre concrètement les normes qui sont applicables dans vos pays respectifs.

Je remercie chaleureusement le Conseil National des Droits de l’Homme, son Directeur ainsi que son équipe, pour leur accueil.

Permettez-moi dans ces quelques mots d’introduction de rappeler l’importance des valeurs communes qui ont été édifiées en Europe et par-delà ses frontières. Dans ce contexte, il est important de toujours se rappeler que le Conseil de l’Europe est une organisation qui a été créée en 1949, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale avec comme devise « plus jamais ça ». Cette organisation intergouvernementale est assise sur trois piliers fondamentaux qui guident ses activités : droits de l’Homme, démocratie et État de droit. Le Conseil de l’Europe rassemble aujourd’hui 47 États membres et protège directement les droits de ceux et celles qui se trouvent sous leur juridiction, soit plus de 830 millions de personnes, par le biais de plus de 200 Conventions, instruments contraignants auxquels ont souscrits les Etats membres, dont le joyau de la couronne est la Convention européenne des droits de l’homme.

De l’Atlantique au Pacifique, de la Laponie jusqu’au Sud de la Méditerranée, les valeurs de l’Europe visent à une mondialisation plus juste et plus humaine, un ordre mondial respectueux des droits de l’Homme et des valeurs de la démocratie. La participation des pays du Sud de la Méditerranée dans des projets qui œuvrent à la protection des droits de l’Homme revêt une importance particulière. Il est vital pour l’Europe et les pays du Sud de la Méditerranée et le Moyen-Orient de s’ancrer davantage dans un socle partagé de valeurs communes, d’entretenir le ciment de notre unité et de construire ensemble une région méditerranéenne fondée sur la démocratie et de l’Etat de droit. Ce séminaire est donc une excellente opportunité pour renforcer les ponts entre l’Europe et le Sud de la Méditerranée. 

Car face aux enjeux contemporains que sont la menace terroriste grandissante, les drames des réfugiés et migrants économiques et les inégalités socio-économiques, il est essentiel de joindre nos forces et renforcer la coopération entre les institutions internationales telles que le Conseil de l’Europe et l’UE et les partenaires comme ceux représentés ici aujourd’hui : le Maroc, la Tunisie, l’Egypte, le Liban, la Jordanie et la Palestine. Nous avons besoin de réaffirmer nos valeurs de paix, de liberté et de solidarité afin d’éviter que l’Histoire des conflits ne se répète. Il faut toujours rester vigilant. Même en Europe, après plusieurs décennies de paix, on a souffert des dégâts et de pertes humaines lors de la guerre en ex-Yougoslavie, mais aussi lors de conflits plus récents comme celui entre la Russie et la Géorgie en 2008, ou encore plus récemment, en Ukraine. Il est donc indispensable de protéger et d’élargir les espaces géographiques et juridiques communs afin que les droits de l’Homme et l’Etat du droit soient préservés le plus possible.

Depuis 2011, la politique du voisinage du Conseil de l’Europe a pour objectif la promotion du dialogue et la coopération avec les pays et les régions situés à proximité de l’Europe qui expriment la volonté de coopérer avec le Conseil de l’Europe sur la base des valeurs communes de droits de l’Homme, de démocratie et d’Etat de droit.

Cette politique du voisinage fixe les trois objectifs suivants:

-           D’abord, faciliter la transition politique démocratique dans les pays concernés ;

-           Deuxièmement, contribuer à promouvoir une bonne gouvernance en se fondant sur la protection des droits de l’Homme et de l’Etat de droit; et

-           Finalement, consolider et étendre l’action régionale du Conseil de l’Europe en ce qui concerne la lutte contre les menaces transfrontalières et mondiales.

Cette politique de voisinage a été mise en œuvre en partenariat étroit avec l’Union européenne, en particulier ses deux composantes clés:

-           le dialogue de coopération avec le voisinage, effectué au niveau politique; et

-           les priorités de coopération avec le voisinage, qui définissent des activités spécifiques à mener dans les domaines des droits de l’Homme, de la démocratie et de l’État de droit.

Dans ce contexte, les Conventions du Conseil de l’Europe, dont certaines, de plus en plus nombreuses, sont ouvertes aux Etats non membres de l’Organisation, nous offrent un outil  essentiel pour élargir notre espace juridique commun. Mais les Conventions sans application réelle ne servent à rien. La mise en œuvre effective est encore plus importante que la ratification. Et c’est vous, juges, avocats procureurs, fonctionnaires, et autres professionnels du droit, marocains, tunisiens, égyptiens, jordaniens, palestiniens, libanais, qui êtes en première ligne pour assurer cette mise en œuvre au niveau national, et de ce fait, garantir la pérennité des valeurs universelles qui nous tiennent tous à cœur.

En effet, si vos Etats s’intéressent de plus en plus aux Conventions du Conseil de l’Europe (on pourrait à ce titre citer la Tunisie qui a ratifié la Convention pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel), c’est vous qui êtes les véritables gardiens de ces Conventions. Comme le Président français Macron l’a encore rappelé lors de son discours devant la Cour européenne des droits de l’homme il y a quelques semaines, ce sont les juges nationaux qui sont «  les premiers juges de la Convention européenne des droits de l’homme », et je voudrais ajouter aussi, des autres normes internationales.

La complémentarité entre les normes européennes et le droit national est au cœur même du programme HELP, que ma collègue Eva Pastrana vous présentera sous peu. HELP sera une composante importante dans la prochaine phase du Programme conjoint entre l’UE et le Conseil de l’Europe du Sud de la Méditerranée, visant à renforcer un espace juridique commun entre les pays ciblés. Aujourd’hui vous aurez la primeur de toutes les possibilités d’apprentissage et de partage de bonnes pratiques qui seront proposées.

Qu’est-ce que HELP ?

Tout d’abord, il s’agit d’un réseau rassemblant les écoles de la magistrature et les barreaux des 47 pays du Conseil de l’Europe, et offrant un espace unique de dialogue et d’échanges entre magistrats et professionnels de droit nationaux et professionnels du droit européens. Le Réseau HELP est ouvert à la participation d’observateurs et j’appelle de mes vœux la création de partenariats régionaux durables avec vos pays.

Ensuite, HELP développe des cours de formation en ligne sur des sujets relatifs aux droits de l’Homme aussi variés que les alternatives à la détention, la violence à l’égard des femmes, la protection des données ou l’anti-discrimination. Chaque cours est traduit et adapté à l’ordre juridique national du pays où il sera dispensé. Le but de ces cours est de permettre aux professionnels du droit de développer leurs compétences pour une bonne compréhension et mise en pratique des conventions et autres normes européennes relatives aux droits de l’Homme dans le contexte national.

J’espère que ces deux journées seront l’occasion d’envisager le lancement de cours HELP tant dans vos pays au niveau national qu’au niveau plurinational.

Mesdames et Messieurs,

La base de valeurs communes que constituent les droits de l’Homme et l’Etat de droit ne pourra se construire qu’au travers du dialogue et de la coopération rendue possible grâce aux programmes tels que HELP, la vocation du programme HELP dans le Sud de la Méditerranée étant de créer un pont reliant les deux continents. Ce programme offre aux professionnels du droit du Sud de la Méditerranée un raccourci vers les normes européennes et universelles et vers leurs pairs d’autres Etats, pour une meilleure mise en œuvre des normes des droits de l’Homme établies par les instruments du Conseil de l’Europe, à vocation universelle. Il renforce le cercle vertueux d’échange et de coopération qui a été construit au fil des décennies et qui maintenant s’élargit par-delà les frontières de l’Europe, pour faire de la Méditerranée, un havre unique des droits de l’Homme.

Merci pour votre attention.