Strasbourg, le 3 novembre 1998
Rapport sur les élections régionales et locales en Bosnie-Herzégovine (12-13 novembre 1998)
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Membres des délégations du Congrès :
M. MARTINI (Italie), M. GUERTS (Belgique), M. FRIEDRICH (France), M. RIVOLLIER (France), Mme MOLFETTA (Italie), M. VOLEK (Slovaquie), Mme KYLLER (Suède), M. HAEGI (Suisse), M. BULDANLI (Turquie), M. MORGAN (Royaume-Uni)
Adopté le 3 novembre 1998
par la Commission Permanente
Introduction
M. Chenard, président du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l'Europe (CPLRE), a reçu au nom du CPLRE une invitation adressée par M. CAMPARA, vice-président de la Chambre du peuple du Parlement de Bosnie-Herzégovine, lui demandant de désigner des membres du CPLRE pour aller en Bosnie-Herzégovine (B-H) observer le déroulement des élections prévues les 12 et 13 septembre 1998. Des membres du CPLRE avaient déjà observé les élections cantonales du 14 septembre 1996 ainsi que les élections locales du 13 et du 14 septembre 1997 en B-H. En outre, alors que la procédure devant permettre l'entrée de la B-H au sein du Conseil de l'Europe est en cours, le Bureau du CPLRE a décidé de préparer un rapport d'évaluation sur la démocratie régionale et locale dans ce pays. Les rapporteurs chargés de rédiger ce rapport ont été désignés lors de la réunion des trois présidents qui s'est tenue le 11 août 1998 ; il s'agit de Messieurs CLAUDE HAEGI (Suisse) et GIANFRANCO MARTINI (Italie).
Aux élections de 1998,
a) les citoyens de B-H devaient élire
• la présidence de la B-H, et
• la Chambre des représentants de l'Assemblée parlementaire
b) les citoyens de la Fédération de B-H1 devaient élire
• la Chambre des représentants du Parlement
• les assemblées cantonales, et
• les dix conseils municipaux et assemblées municipales nouvellement créés2
c) les citoyens de la Republika Srpska (RS) devaient élire
• le président et le vice-président
• l'Assemblée nationale, et
• les deux conseils municipaux et assemblées municipales nouvellement créés.
Tous les scrutins se sont déroulés selon le système de la représentation proportionnelle, sauf pour les membres de la présidence de B-H, qui devaient élus au scrutin uninominal direct.
De nouvelles élections municipales sont prévues pour 1999.
La mission d'observation du CPLRE a été répartie entre six équipes, à savoir :
BIHAC : M. BULDANLI (Turquie) et Mme MOLFETTA (Italie)
BRCKO : M. MORGAN (Royaume-Uni) et Mme DIMITRIEVA (secrétariat du CPLRE)
MOSTAR : M. VOLEK (Slovaquie) et M. FRIEDRICH (France)
LIVNO : Mme KYLLER (Suède) et M. RIVOLLIER (France)
SARAJEVO : M. HAEGI (Suisse), M. MUDRICH (secrétariat du CPLRE) et M. GUERTS (Belgique)
BANJA LUKA : M. MARTINI (Italie) et M. PELLICIARI (Italie)
Les membres de la mission ont observé le déroulement des élections dans environ 130 bureaux de vote situés dans les zones les plus sensibles des deux entités.
En outre, les rapporteurs ont eu l'occasion de rencontrer les principaux intéressés aussi bien dans la Fédération qu'en RS (cf. l'ordre du jour ci-joint), ainsi que les membres de la communauté internationale présents en B-H – ce qui leur a permis de se faire une image plus claire de la situation actuelle du pays.
II. Vue d'ensemble
Ces dernières élections ont été organisées dans un climat légèrement différent de celui ayant entouré les scrutins de 1996 et de 1997, qui avaient été marqués par de fortes tensions politiques. En premier lieu, la paix régnait depuis plus de deux ans. Au cours de cette période, des partis plus modérés ont vu le jour, favorables au dialogue plutôt qu'à la violence. Le nouveau drapeau de la B-H a été approuvé et l'hymne national est en cours de composition. Les membres de la délégation ont pu, dans les deux entités, payer avec les nouveaux marks bosniaques, qui s'échangent sur la base de 1 pour 1 contre le DEM3 . Il existe désormais des plaques d'immatriculation communes pour les deux entités. Il était toutefois encore possible de savoir si le propriétaire de la voiture était originaire de la Fédération ou de RS, les Bosniaques ayant pris l'habitude d'orner leur véhicule d'un autocollant marqué B-H (afin de bien faire comprendre qu'ils sont de Bosnie-Herzégovine) – ce qu'un Serbe n'aurait pas fait. Les télécommunications entre les deux entités fonctionnent mieux, mais il s'est avéré impossible de téléphoner de la RS (de certains endroits ou à certaines heures) dans la Fédération.
Les conditions formelles semblent plus ou mois exister pour permettre la libre circulation des personnes, des capitaux et de l'information entre les deux entités créées aux termes de l'accord de Dayton, pour autant cependant que la communauté internationale demeure activement impliquée. Dans la vie de tous les jours, toutefois, les choses se passent de façon relativement différente. En témoigne la lenteur avec laquelle se font le retour et la réintégration des réfugiés et des personnes déplacées dans leur lieux de résidence d'avant la guerre. Un grand nombre d'incidents et un sentiment de crainte tendent à saper la confiance entre les différentes communautés ethniques. On peut cependant espérer que le temps permettra de retrouver cette confiance.
La communauté internationale a consacré beaucoup d'efforts à reconstruire les maisons et à remettre sur pied la B-H. Cette présence de la communauté internationale n'est pas seulement bénéfique pour le processus de paix lui-même mais également pour l'économie, car elle contribue à réduire le taux élevé de chômage dans les deux entités, à instaurer la confiance et à préparer un avenir meilleur.
De nombreuses institutions nouvelles ont été créées conjointement entre les deux entités, comme la Commission pour la coopération juridique ou la Commission des médias indépendants, avec la participation de membres de la communauté internationale soucieux de contribuer au processus de "bosnisation", pour reprendre le terme d'un représentant de l'OSCE, qu'il faut entendre comme le contraire d'un processus de balkanisation. Il est cependant évident que la communauté internationale devra rester encore un certain temps en B-H avant que les institutions de ce pays ne puissent fonctionner sans aide extérieure.
Il est tout à fait frappant de constater le grand nombre d'églises et de mosquées qui se sont récemment bâties dans les zones habitées par des orthodoxes ou des musulmans. Notre chauffeur nous a fait remarquer qu'il vaudrait bien mieux construire des écoles ou d'autres établissements publics dans la mesure où, dans cette région, chaque construction d'un nouvel édifice religieux comporte toujours une part de provocation à l'égard de l'autre camp. Autre phénomène intéressant pour nous à découvrir, la présence dans toutes les écoles de la zone de Brcko d'icônes et d'armoiries serbes là où, auparavant, figurait habituellement la photo de Tito. Le fait que le statut de Brcko n'est pas encore été défini explique sûrement en partie cela ; la décision d'arbitrage devrait intervenir en mars 1999.
III. La logistique
Le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme (BIDDH) de l'OSCE était chargé d'organiser les élections et de s'occuper des Observateurs de courte durée (OCD) en leur fournissant logement4 , interprètes, moyens de transport et informations. Globalement, tout s'est bien passé du point de vue logistique en dépit de quelques problèmes liés au logement, les dispositions ayant changé du fait que la délégation du CPLRE a été confondue avec celle de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe.
La réunion d'information du 11 septembre comme celle consacrée au compte rendu, le 15 septembre, ont toutes deux été bien organisées, et les OCD ont reçu toutes les informations nécessaires concernant le climat politique du pays et leur propre sécurité. La réunion de compte rendu a permis aux observateurs internationaux d'échanger leurs expériences. Une conférence de presse a eu lieu, suivie d'une Déclaration du Parlement européen, de l'OSCE et de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (cf. annexe A). La délégation du CPLRE a publié un communiqué de presse distinct (cf. annexe B).
IV. Les élections
1. Les partis politiques
L'une des surprises de ces élections fut l'apparition sur la scène politique d'un nouveau parti croato-bosniaque baptisé Nouvelle initiative croate. Ce parti, dirigé par M. Zubak, qui est l'actuel président de B-H, a suscité certaines espérances au sein de la communauté internationale et parmi les citoyens de la Fédération. Toutefois, ainsi que nous en a informés M. JENNES, directeur adjoint spécial de la mission de l'OSCE, seulement 4% environ des suffrages se sont portés sur cette formation, d'après les premiers résultats disponibles.
2. Les Règles et règlements de 1998
Les électeurs pouvaient venir déposer leur bulletin en personne ou voter par correspondance5 pour la municipalité où ils étaient domiciliés en 1991. Ils avaient également la possibilité de demander à pouvoir voter dans une autre municipalité s'ils avaient l'intention d'aller y habiter.
Parmi les modifications apportées aux Règles et règlements de 1998 figure l'obligation pour les candidats des différents partis politiques de fournir des renseignements sur leurs biens, et pour les formations politiques d'accueillir des candidates sur leur liste. Grâce à ces changements, les élections sont apparues plus "civiques" et les partis ont été amenés à présenter de véritables programmes politiques.
L'article 7.10 des Règles et règlements de la CEP6 précise clairement que nul ne peut se présenter comme candidat s'il purge une peine prononcée par le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, s'il fait l'objet d'une inculpation par le Tribunal ou s'il a refusé de déférer à une ordonnance de comparution devant le Tribunal.
3. La campagne électorale
Nous avons appris lors de la réunion d'information que, durant la campagne électorale, des infractions aux règles avaient été relevées – intimidation des électeurs etc. –, imputables à certains partis politiques. En conséquence, certains candidats de ces partis ont été rayés de la liste conformément aux Règles et procédures de 1998 relatives aux élections.
La création d'une Commission d'experts des médias7 et la suppression des stations de radio nationalistes ont contribué à résoudre le problème posé par la partialité de certains médias, un problème qui avait fortement marqué les élections précédentes.
Le jour précédant les élections, on voyait encore un peu partout sur les murs et à l'intérieur des bureaux de vote et des bâtiments municipaux, y compris dans l'immeuble abritant la Commission électorale locale à Brsko, des affiches des différents partis politiques. Nous avons constaté que les habitants de l'endroit se servaient de ces affiches comme de repères afin de savoir où ils étaient censés aller voter. Toutefois, la plupart de ce type de matériel de campagne avait disparu le jour du scrutin.
4. Les deux journées d'élection
L'impression générale laissée par ces élections est qu'elles se sont déroulées dans le calme et sans incident. Les conditions de vote étaient normales et satisfaisantes, compte tenu de la complexité de la procédure électorale et de la situation politique en B-H. Chacun a pu franchir la ligne de démarcation pour aller voter dans l'autre entité, sans qu'il y ait d'incidents à déplorer. Des améliorations ont été apportées depuis les scrutins des années précédentes : ainsi, les listes ont été rédigées dans l'ordre alphabétique, et tous les bureaux de vote disposaient d'eau et d'électricité, même si certains d'entre eux se sont révélés vraiment exigus et étaient installés dans des maisons à moitié en ruine.
Les électeurs, les scrutateurs et les membres des comités électoraux étaient en général bien formés et bien informés, et ils ont respecté scrupuleusement la procédure à suivre. Dans un seul bureau de vote par correspondance seulement, situé dans une région isolée de la RS, il s'est trouvé que les membres du comité ne savait toujours pas la veille du scrutin que leur bureau était un bureau de vote par correspondance, et ils nous ont demandé des instructions. Le lendemain, cependant, tout s'est déroulé sans aucun problème. Le pourcentage élevé de participation (quelque 80% dans la Fédération et 70% en RS) a montré que la population n'était pas fatiguée des élections et avait confiance dans les résultats. Les électeurs se sont présentés tôt le matin au bureau de vote et ont attendu patiemment environ deux heures avant de glisser leur bulletin dans l'urne, en raison du fait que certains bureaux ont ouvert tard.
5. Les problèmes
– les listes électorales
Comme les années précédentes, le BIDDH de l'OSCE a rencontré d'énormes problèmes avec le matériel informatique, si bien que les listes électorales n'étaient pas prêtes et que certains bureaux de vote ne les ont pas reçues à temps. Elle ne sont même jamais parvenues à plusieurs bureaux (de la zone de Bihac), et les électeurs ont dû utiliser des bulletins spéciaux sous pli fermé, une procédure qui, à juste titre, ne leur inspirait guère confiance.
Les plus graves problèmes ont découlé du fait que les listes des électeurs votant par correspondance n'étaient pas non plus prêtes et n'ont pas été envoyées à temps. En conséquence, tous les électeurs qui auraient pu franchir pour la première fois la Ligne inter-entités ont attendu des heures avant de voter, certains bureaux de vote n'ayant ouvert qu'à deux heures de l'après-midi. Un incident a été relevé à Srebrenica, où des électeurs, après plusieurs heures d'attente, ont déclaré qu'ils étaient manipulés et sont devenus très énervés. Finalement, il a fallu l'intervention de la SFOR pour rétablir le calme. Un autre incident s'est produit à Banja Luca, où des personnes déplacées originaires de Drvar ont dû patienter des heures avant de pouvoir voter. Le pourcentage élevé de votes par bulletin spécial sous pli fermé, de votes par correspondance et de votes adressés par courrier de l'étranger8 (entre 10 et 15%) a malheureusement entamé la confiance des électeurs, le résultat du scrutin pouvant en être considérablement affecté.
– L'information à destination des électeurs
Dans certains cas, le bureau de vote où l'électeur pensait devoir se rendre pour voter ne correspondait pas avec ce qui figurait sur la liste électorale. Certains électeurs allaient donc d'un bureau de vote à l'autre en essayant de trouver la liste où leur nom était inscrit.
Dans d'autres cas, le lieu du vote avait changé et les électeurs n'en avaient pas été avertis ; eux aussi se lançaient donc à la recherche du bon bureau de vote pour pouvoir accomplir leur devoir d'électeurs.
On a relevé un grand nombre d'analphabètes, qui devaient faire appel à l'aide de membres de leur famille pour remplir les bulletins de vote, conformément à l'article 13.30 des Règles et règlements de 1998.
– les bulletins de vote
Les bulletins de vote étaient très compliqués. En fait, il y avait une grande feuille de papier sur laquelle étaient imprimés quatre bulletins, difficiles à lire par les personnes âgées. Nous ne pouvions nous défaire de l'impression qu'il aurait été bien plus facile d'avoir des bulletins séparés de différentes couleurs plutôt que d'obliger les membres de la commission électorale à découper soigneusement, pour ne pas les déchirer, les bulletins après le vote. Cela faisait perdre au moins une heure dans une procédure de dénombrement déjà longue et rigoureuse.
À l'avenir, il serait recommandé que les emblèmes des partis politiques figurent sur les bulletins, ce qui permettrait aux électeurs de reconnaître plus facilement le parti pour lequel ils souhaitent voter. En outre, les bulletins de vote par correspondance présentaient les partis serbes en cyrillique et les partis de la Fédération en caractères romains, ce qui était une une façon de mettre en évidence le profond fossé séparant les deux communautés.
De plus, il est arrivé que des électeurs votant par correspondance reçoivent les mauvais bulletins, ce qu'ils ont interprété comme un geste de provocation.
– le concept d'alliance
Ce concept, qui figure à l'article 7.135 des Règles et règlements de 1998, prévoit que deux – ou davantage – partis politiques, coalitions ou candidats indépendants dûment enregistrés et présentant des programmes similaires peuvent choisir de se regrouper au sein d'une alliance électorale dans le but d'additionner les suffrages qui se seront portés sur eux ; la répartition des mandats entre eux sera fonction du nombre des bulletins pris en compte que chaque membre de l'alliance aura récoltés. Cela a toutefois posé des problèmes, non seulement pour les électeurs mais également pour les partis politiques réunis au sein d'une alliance et pour les observateurs internationaux. Cette méthode, ainsi que nous l'ont confié les représentants de l'OSCE, ne devrait pas être retenue lors des prochaines élections.
6. Les irrégularités
La présence de la police locale a été observée dans certains bureaux de vote en RS. Les policiers ont quitté les lieux lorsqu'il leur a été signifié que leur présence n'était pas autorisée.
Dans un bureau de vote, un observateur politique appartenant à un parti radical faisait de la propagande active en faveur de sa formation. Le scrutateur a fait intervenir la police pour faire sortir cet homme du bureau de vote.
Le nombre de cas où les membres d'une même famille sont entrés ensemble dans l'isoloir a chuté notablement.
OBSERVATIONS FINALES
– L'impression d'ensemble fut que le véritable défi des élections de 1998 ne résidait pas dans le processus électoral en lui-même mais dans la mise en œuvre effective des résultats électoraux et l'instauration de dispositifs de nature à permettre le bon fonctionnement des institutions à tous les niveaux du gouvernement. La chose peut s'avérer difficile si les résultats officiels confirment la crainte d'une victoire des partis nationalistes.
– Eu égard aux élections proprement dites, la plupart des observateurs internationaux s'accordaient à dire que leur coût était très élevé et que la B-H n'avait pas les moyens d'en assurer seule le financement, non pas en raison d'une formation insuffisante mais bien du manque d'argent. La B-H telle que définie aux termes de l'accord de Dayton est un état complexe ; toutefois, si les aspects institutionnels de l'accord devaient faire l'objet d'une révision, cela entraînerait la révision d'autres points figurant dans cet accord, touchant par exemple à la création d'une troisième entité etc. Il apparaît donc impossible de procéder à une révision de l'accord de Dayton tant que le pays ne sera pas parvenu à la stabilité politique.
– Le problème des réfugiés et des personnes déplacées demeure un problème crucial pour l'avenir du pays. La règle de principe concernant le lieu de vote, selon les Règles et règlements de 1998, instituait comme référence le lieu de résidence des électeurs en 1991, cela afin d'empêcher tout processus de "ghettoïsation" dans le pays. La Fédération a changé les aspects restrictifs de sa législation concernant le retour des réfugiés et des personnes déplacées ; il reste à la RS à faire la même chose. Quoi qu'il en soit, nous avons constaté que la plupart des personnes que nous avons rencontrées souhaitaient revenir dans leur ancien lieu de résidence mais hésitaient à le faire en raison d'un sentiment de crainte, et par peur des difficultés qu'elles pourraient rencontrer si elles devaient s'y retrouver minoritaires9 . Conséquence de cela, les droits des minorités doivent être renforcés et intégralement appliqués.
– Le véritable élan vers l'unité et la stabilité politique du pays doit être donné au niveau de l'administration locale autonome, qui est la plus proche des citoyens. Il est donc nécessaire de créer toutes les conditions pour que l'autonomie locale commence à fonctionner dans les zones de population mixte. Le point de départ pourrait être Sarajevo, où, avant la guerre, cohabitaient 49% de Musulmans, 30% de Serbes, 15% de Yougoslaves et 6% de personnes appartenant à d'autres ethnies. À l'heure actuelle, on y trouve essentiellement des Bosniaques. Le taux de rapatriement à Sarajevo des réfugiés et des personnes déplacées pourrait croître si les représentants de la ville de Sarajevo étaient élus au suffrage direct et non nommés, et si la ville acquérait une véritable autonomie en matière de compétences et de financement au lieu d'être en grande partie dominée par le canton de Sarajevo.
– Quant aux autres municipalités mixtes, il semble qu'elles connaissent de nombreux problèmes concernant le fonctionnement de leurs organes élus – par exemple quand les réfugiés et les personnes déplacées votent pour élire leurs représentants mais ne reviennent jamais vivre dans leur ancien lieu de résidence. Leurs représentants locaux sont alors en butte à des manœuvres d'intimidation et craignent de revenir vivre dans l'endroit où ils ont été élus (ex. : Foca). Autre exemple, celui de Srebrenica, où le conseil local ne s'est jamais encore réuni. Il est un autre obstacle au bon fonctionnement des institutions démocratiques locales découlant d'une règle inscrite dans les constitutions cantonales, qui dispose que les membres des conseils municipaux doivent élire leur maire. Cela crée des difficultés dans les municipalités pluriethniques, où les conseillers ont beaucoup de mal à se mettre d'accord pour élire leur exécutif. Il pourrait s'avérer avantageux de modifier cette disposition afin de permettre aux maires d'être élus directement par les électeurs. Si les conseils municipaux arrivent à fonctionner normalement, ils pourront mettre en œuvre des programmes spécifiques concernant le retour des réfugiés et des personnes déplacées, car c'est eux qui sont responsables des questions touchant au logement, à la vie culturelle et sportive, etc.
Annexe A
PARLEMENT EUROPEEN
Délégation ad hoc pour l'observation des élections en Bosnie-Herzégovine
COMMUNIQUE DE PRESSE
14 septembre 1998
La Délégation du Parlement européen dirigée par Mme Doris Pack (Parti du peuple européen, Allemagne) s'est rendue en Bosnie-Herzégovine du 10 au 14 septembre pour observer le déroulement des élections générales, les secondes depuis la fin de la guerre.
Les membres de la Délégation se sont entretenus avec les représentants diplomatiques de la Présidence de l'Union européenne, d'autres États membres, de la Mission de surveillance de la Communauté européenne, de la Commission européenne, ainsi qu'avec le Chef de la mission de l'OSCE et avec les partis politiques au pouvoir et de l'opposition dans les deux entités. La Délégation a observé le déroulement du scrutin dans les municipalités de Jajce, Travnik, Sarajevo, Pale, Brcko, Orasje, Banja Luka, Derventa, Jablanica, Mostar, Prijedor, Drvar, Doboj et Tuzla.
L'Union européenne, qui apporte son soutien à la mise en œuvre de l'Accord de Dayton, a continué de jouer un rôle actif en cette année d'élections en contribuant notamment à hauteur de 5 millions d'ECU au budget de l'OSCE, chargée cette année encore d'organiser les élections en B-H. Depuis la fin de la guerre, le Parlement européen a observé le déroulement de toutes les élections les plus importantes dans le pays, et il suit de près le développement du pays dans les domaines politique et économique.
La Délégation du Parlement européen exprime son respect à l'égard de la population de Bosnie-Herzégovine pour la patience, la discipline et l'esprit de démocratie dont elle a fait preuve au cours des journées de vote. Elle déplore vivement que l'OSCE n'ait pas suffisamment tiré les leçons des expériences et des observations faites lors des élections de 1996 et de 1997. On ne peut justifier le fait que des problèmes similaires et parfois même plus graves se soient produits concernant l'inscription des électeurs, que des listes électorales soient parvenues en retard à certains bureaux de vote, que des noms manquaient ou ne figuraient pas sur les bonnes listes.
Il était également regrettable de constater que le nombre des électeurs dans les bureaux de vote par correspondance était, cette fois encore, bien trop important par rapport aux bureaux de vote ordinaires. La conséquence de tous ces problèmes, c'est que le nombre de bulletins spéciaux sous pli fermé était incroyablement élevé, et la patience des électeurs mise à très rude épreuve. Ce type de carence en matière d'organisation peut aisément finir par saper la confiance des électeurs et renforcer la relative méfiance de ceux obligés de voter par bulletin spécial sous pli fermé. La Délégation du Parlement européen espère donc que ces bulletins spéciaux sous pli fermé seront dépouillés avec soin. Elle demande de façon globale à l'OSCE d'améliorer son organisation afin d'éviter que ce type de problèmes ne se représentent à l'avenir.
La Délégation du Parlement européen considère que les élections de 1998 sont très importantes pour le développement futur de la Bosnie-Herzégovine. Elle espère que ces élections permettront de consolider la démocratie et l'état de droit dans ce pays et donc d'assurer une meilleure mise en œuvre de l'Accord de Dayton, notamment de son annexe 7, ainsi que des conclusions des deux conférences qui se sont tenues cette année à Sarajevo et à Banja Luka, concernant la question du retour des réfugiés et des personnes déplacées. La Délégation demande aux représentants récemment élus du peuple de Bosnie-Herzégovine et au Haut Représentant d'apporter tout leur soutien à ce processus.
Membres de la Délégation du Parlement européen :
Mme Doris Pack (PPE, Allemagne), Mme Magda Aelvoet (Groupe vert, Belgique), Mme Katerina Daskalaki (Union pour l'Europe, Grèce), M. Arie (PPE, Pays-Bas) et M. Johannes Swoboda (Parti des socialistes européens, Autriche).
Délégation ad hoc pour l'observation des élections en Bosnie-Herzégovine, Parlement européen, MON 205, rue Wiertz, B-1047 Bruxelles
Téléphone : (32-2) 284 6273 - Fax : (32-2) 230 1214
1 Ci-après dénommée la Fédération.2 À savoir Domaljevac-Samac, Doboj-Est, Doboj-Sud, Pale (Cantone 5), Ravno, Kostajnica, Teocak, Dobretici, Sapna, Foca (Cantone 5), Usora et Bosanski Novi.
3 En RS, la monnaie serbe est toujours en circulation.
4 En ce qui concerne la délégation du CPLRE, les seuls logements fournis par le BIDDH se trouvaient en dehors de Sarajevo.
5 Des bureaux spécialement réservés aux électeurs votant par correspondance ont été mis en place à l'intention des personnes se trouvant dans l'impossibilité de revenir voter dans les municipalités où ils résidaient en 1991.
6 Commission électorale provisoire.
7 Règles et règlements de 1998.
8 Article 2.66 des Règles et règlements de 1998.
9 Apparemment, le pourcentage de Bosniaques déplacés désireux de retrouver leur ancien domicile en RS était relativement plus élevé que celui de Serbes déplacés soucieux de revenir dans leur ancienne maison dans la Fédération. En témoignait le nombre important de personnes votant par correspondance en RS.