« Que pour les politiciens ? 

La société civile, l'argent et les activités politiques»

6-7 juin 2016, salle 5, Palais de l’Europe, Strasbourg

La démocratie d’un pays se mesure surtout par un dynamisme et une pluralité des ONG qui, par leur proximité avec les citoyens, engagent la communication entre les différents segments de la société et les institutions politiques. A ce titre, elles supervisent le respect et l’effectivité des droits individuels et les intérêts des groupes vulnérables. Leurs actions auprès des populations constituent un levier d’innovation. Elles veillent à la séparation des pouvoirs dans des Etats démocratiques et sont les principaux lanceurs d’alerte. Leurs actions de plaidoyer politique constituent une aide aux décideurs politiques.

Libertés inscrites dans la loi

La liberté d’association ne se limite pas à la création et à l’enregistrement d’ONG mais englobe la liberté de fonctionner et la liberté de conduire des actions. L’exercice de la liberté d’association « ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. » (Art. 11.2, Convention européenne des droits de l’homme)

La liberté d’association est aujourd’hui fragilisée, voire compromise, et nécessite une discussion substantielle visant à renforcer les capacités d’action des ONG en tant qu’acteurs démocratiques à part entière.

Activités politiques des ONG

Dans une démocratie, des ONG contribuent au débat politique et à l’élaboration de nouvelles normes au niveau opérationnel et politique. « Les ONG devraient être libres … de prendre position sur des questions relevant du débat public, que la position défendue soit conforme ou non à la politique du gouvernement, ou qu’elle exige une modification de la législation. » (Recommandation CM/Rec(2007)14 sur le statut juridique des ONG, paragraphe 12) 

Les activités d’ONG dans une démocratie exigent un niveau d’indépendance signifiant et la possibilité d’agir dans la sphère des politiques publiques. Ces activités mènent-elles à la prise de pouvoir par des ONG? Menacent-elles l’ordre public ?

Le Conseil d’experts sur le droit en matière d’ONG recommande de distinguer deux dimensions de l’engagement politique des ONG[1] : les « activités politiques », en termes d’engagement direct des ONG sur la scène politique comme désignation de candidats, de soutien financier aux partis politiques et candidats aux élections ; les « activités liées aux politiques publiques », en termes d’influence sur la législation, d’engagement dans le processus de prise de décision, de participation aux affaires publiques, de prises de position critiques sur les mesures des autorités publiques, de plaidoyer, d’observation des élections. 

Financement étranger

 « Les ONG devraient être libres de solliciter et de recevoir des contributions – dons en espèce ou en nature – non seulement des autorités publiques de leur propre Etat, mais aussi de donateurs institutionnels ou individuels, d'un autre Etat ou d'organismes multilatéraux ... » (CM/Rec(2007)14, paragraphe 50)

Les lois et mesures - dans certains pays interdisant aux ONG de financer leurs actions par des fonds provenant d’autres pays, de donateurs privés étrangers ou de fonds internationaux - réduisent considérablement le nombre d’ONG dans le pays concerné. Ceci est le cas en Fédération de Russie où, sur une échelle de trois ans (2012-2015), le nombre d’ONG a diminué de 33 % [2].

Le principe démocratique selon lequel l’accès libre aux ressources financières est un droit civique qui favorise la pleine participation et l’indépendance des ONG est aujourd’hui nié dans certains pays. L’expression « agent étranger » ou «  citoyens de la pire espèce » appartient au vocable discriminatoire et dangereux pour l’Etat de droit.

Constats

Parfois camouflées par un appel à une plus grande transparence, les mesures restrictives portent atteinte aux libertés précédemment citées.  La stabilité politique se voit être opposée à la démocratie, comme si ces deux étaient incompatibles.

Les effets des lois, des mesures et des décisions politiques allant à l’encontre des droits des ONG sont multiples. Il s’agit :

-          d’arrestations de défenseurs des droits de l'homme, d’obstruction au travail légitime des ONG; de harcèlement des militants;

-          de discours politiques visant à influencer l’opinion publique pour discriminer, stigmatiser et exclure certaines ONG de la sphère publique;

-          de dépendance financière des ONG aux fonds publics qui limite leur liberté d’expression et leur pouvoir d’influencer les politiques publiques;

-          de désavantages fiscaux et d’interdiction d’exercer la fonction d’observateur des élections.

Compte tenu de ce qui précède, la Conférence des OING du Conseil de l’Europe, préoccupée par cette situation, vous propose de prendre part au débat relatant la situation des ONG au regard de leurs activités politiques ou/et de leurs activités visant à participer et à introduire des changements dans des politiques publiques.

Dans ce contexte, quels sont les moyens politiques et financiers que les autorités nationales, les donateurs et les institutions internationales déploient pour favoriser le développement de la société civile organisée et la participation des ONG au processus décisionnel ?

Nous souhaitons que ce débat puisse se faire avec la participation d’ONG, d’autorités publiques, de donateurs et d’experts internationaux. Nous espérons que cet événement constituera une étape importante pour identifier les besoins de protection permettant de renforcer l’indépendance des ONG, leur développement et de faciliter la participation des ONG à la vie politique.

Ces questions relèvent de la coresponsabilité de tous les acteurs mentionnés. Je compte sur votre participation pour avancer ensemble vers un espace civil plus ouvert et florissant !

Anna Rurka

Présidente de la Conférence des OING du Conseil de l’Europe

Programme

6 juin 2016

7 juin 2016

12h00-13h00 : Ouverture

9h30-11h : Financement étranger

13h00-14h30 : Pause-déjeuner

11h00- 11h30 : Pause-café

14h30-16h00 : Liberté d’association

11h30 -13h00 : Conclusions et clôture

16h00-16h30 : Pause-café

16h30-18h00 : Activités politiques



[2] Propos d’Alexander Svinin, chef du projet Perspektiva, recueillis par la fondation Bellona.org http://bellona.org/news/russian-human-rights-issues/russian-ngo-law/2015-10-foreign-agent-law-has-put-33-percent-of-russias-ngos-out-of-business