800e réunion –20 et 24 juin 2002
Point 12.2
Stabilité démocratique par la coopération transfrontalière en Europe
Projet de réponse à la Recommandation 85 (2000) du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux de l’Europe
(REC_85 (2000) du CPLRE, CM/Del/Dec(2002)799/12.1)
Décision
Les Délégués adoptent la réponse suivante à la Recommandation 85 (2000) du CPLRE sur la stabilité démocratique par la coopération transfrontalière en Europe:
«Le Comité des Ministres a étudié avec intérêt la Recommandation 85 (2000) du CPLRE sur la stabilité démocratique par la coopération transfrontalière en Europe. Il partage pleinement l’opinion du Congrès selon laquelle la coopération transfrontalière joue un rôle très important dans la promotion de la stabilité démocratique en Europe. Le Comité des Ministres souhaite fournir au Congrès des réponses à ses recommandations point par point :
En ce qui concerne les paragraphes 29 et 34 de la recommandation, il convient de noter que le Conseil de l’Europe favorise le programme des Agences de la démocratie locale (ADL), en particulier dans l’Europe du Sud-Est, depuis 1993. La plupart de ces agences sont situées dans des zones frontalières et ont pour but de promouvoir des relations interethniques harmonieuses au sein d’un pays donné ou entre deux ou plusieurs pays voisins. Compte tenu de l’importance particulière de la contribution des ADL à la promotion de la coopération transfrontalière des autorités locales et des représentants de la société civile, le Conseil de l’Europe signera un accord de coopération avec l’Association des agences le 5 juin 2002.
Certains des projets des ADL sont financés par le Programme des mesures de confiance du Conseil de l’Europe. En 2002, treize des projets approuvés par le Groupe directeur de ce programme doivent être mis en œuvre dans un contexte transfrontalier, essentiellement en Europe du Sud-Est; un projet sera axé sur les pays de la région du Caucase (voir l’Annexe 1 à la présente réponse).
En ce qui concerne le paragraphe 30 de la recommandation, les « Principes directeurs pour le développement territorial durable du continent européen », adoptés par la Conférence européenne des ministres responsables de l’aménagement du territoire (CEMAT) (Hanovre, 7-8 septembre 2000) et par le Comité des Ministres par sa recommandation aux Etats membres sur le même sujet, représentent un document de référence pour de nombreuses mesures et initiatives relatives au développement territorial du continent européen, en particulier dans le domaine de la coopération transfrontalière.
Parmi les activités de suivi de la Conférence de Hanovre, le Conseil de l’Europe (Chambre des régions du CPLRE et CEMAT) a organisé les 15 et 16 mai 2002 à Dresde, en coopération avec le Land de Saxe, une Conférence européenne sur le rôle des pouvoirs locaux et régionaux dans la coopération transnationale en matière d’aménagement du territoire. La conférence avait pour principal objectif d’examiner l’expérience des collectivités locales et régionales relative à des projets de développement régional et leur mise en œuvre sur la base des principes directeurs de la CEMAT. La conférence a souligné l’importance politique de la coopération transnationale en Europe, aux niveaux local et régional, pour l’intégration économique et sociale.
En outre, un projet de coopération transfrontalière de la CEMAT sur un aménagement durable de la région du bassin de la Tisza/Tisa, associant la Hongrie, la Roumanie, la République slovaque, l’Ukraine et la République fédérale de Yougoslavie est en cours d’établissement par le biais de négociations.
En ce qui concerne le paragraphe 31 de la recommandation, le Conseil de l’Europe contribue activement aux nouvelles activités prioritaires de la Table de travail I (TTI) du Pacte de stabilité (pouvoirs locaux et coopération transfrontalière). Dans ce contexte, le Conseil de l’Europe préparera, pour la prochaine réunion de la TTI, qui doit avoir lieu à Istanbul les 12 et 13 juin 2002, une stratégie relative aux initiatives de coopération transfrontalière dans la région. D’autre part, le Secrétariat a signalé la proposition d’accord régional entre les pays d’Europe du Sud-Est sur la coopération transfrontalière entre pouvoirs locaux et régionaux à l’attention du Comité des conseillers sur le développement de la coopération transfrontalière en Europe centrale et orientale et du Comité d’experts sur la coopération transfrontalière. Le Secrétariat tirera parti de l’élan créé par des événements plus récents, tels que le Forum des villes et régions d’Europe du Sud-Est, tenu à Novi Sad (République fédérale de Yougoslavie) du 18 au 20 avril 2002, où cette proposition a été débattue également, pour continuer à en examiner la faisabilité et élaborer une plate-forme politique qui pourra servir de base à des entretiens visant la conclusion d’un accord.
En ce qui concerne les paragraphes 32 et 36 de la recommandation, le Comité des Ministres a attribué à son Comité directeur sur la démocratie locale et régionale (CDLR) un mandat occasionnel à exécuter avant le 30 juin 2002. Sur ce point, le Comité des Ministres signale à l’attention du Congrès la déclaration du CDLR sur l’« Etat de la coopération transfrontalière en Europe », reproduit à l’annexe 2 de la présente réponse. Le CDLR a en partie mené à bien son mandat et adopté le «Rapport sur l’état actuel du cadre administratif et juridique de la coopération transfrontalière en Europe » (Addendum 3 au CM(2002)10) et le « Rapport relatif à l’état de l’application de la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités locales ou autorités territoriales » (Addendum 4 au CM(2002)10). Les deux rapports sont publics.
Le second aspect du mandat, concernant les problèmes spécifiques des villes divisées par des frontières nationales, est en cours d’examen au sein du Comité d’experts sur la coopération transfrontalière (LR-CT), organe subsidiaire du CDLR.
S’agissant du paragraphe 33 de la recommandation, le Comité des Ministres a récemment approuvé le nouveau mandat du LR-CT, qui lui attribue notamment les tâches suivantes: mettre en œuvre le programme intergouvernemental dans le domaine de la coopération transfrontalière et proposer des activités de suivi en la matière; suivre l’application de la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière entre collectivités locales ou autorités territoriales et de ses protocoles; formuler des propositions, au niveau intergouvernemental, pour encourager et faciliter la coopération transfrontalière et interterritoriale.
Le Comité des Ministres a également procédé, sur la base du premier rapport annuel d’activité pour 2001 du Comité de conseillers sur le développement de la coopération transfrontalière en Europe centrale et orientale, à un échange de vues au cours duquel l’accent a été mis sur l’importance des activités de coopération transfrontalière et leur utilité pour la réalisation des objectifs du Conseil de l’Europe. D’autre part, les activités menées en 2002 sous l’autorité du LR-CT portent sur les questions suivantes: la coopération interterritoriale des collectivités locales, l’apprentissage de la langue du pays voisin dans les régions frontalières et la mobilité des élus et des personnels locaux dans le cadre de la coopération transfrontalière.
En ce qui concerne le paragraphe 35 de la recommandation, le Secrétariat a continué, avec l’appui du Comité des conseillers, à favoriser l’établissement d’eurorégions transfrontalières entre l’Albanie, la Grèce et « l’ex République yougoslave de Macédoine » (Ohrid-Prespa) ainsi qu’entre la Bulgarie, « l’ex-République yougoslave de Macédoine » et la Serbie (République fédérale de Yougoslavie) (région dite « triangle Sofia-Skopje-Niš »), tout en œuvrant également à la création d’une eurorégion qui comprendra des parties de la Croatie, de la Bosnie-Herzégovine et du Monténégro (République fédérale de Yougoslavie). S’agissant du Caucase, le Secrétariat prépare une conférence régionale sur la coopération transfrontalière, qui pourrait se tenir à Erevan en septembre 2002 et aurait pour thème les objectifs, les modalités et les mesures pratiques relatifs à l’établissement d’eurorégions dans cette zone. Les textes et instruments pertinents du Conseil de l’Europe sont habituellement traduits dans les langues du ou des pays intéressés.
Au sujet du paragraphe 37 de la recommandation, l’Union européenne est régulièrement associée à des activités de coopération transfrontalière impliquant des pays candidats à l’Union Européenne. Sur proposition du Comité des conseillers, le Secrétariat envisage l’organisation avec la Commission européenne d’une conférence sur le rôle et la place de la coopération transfrontalière dans la perspective de l’élargissement de l’Union européenne. Il y a lieu de noter que la Commission européenne a été représentée à deux séminaires sur la coopération transfrontalière organisés par le Conseil de l’Europe, à Kaliningrad les 11 et 12 octobre 2001, et à Vilnius les 22 et 23 novembre 2001. La Commission européenne participe en outre aux travaux de la CEMAT mentionnés au paragraphe 3 de la présente réponse.
En conclusion, le Comité des Ministres aimerait informer le Congrès qu’il a transmis la Recommandation 85 (2000) aux gouvernements des Etats membres, à la Commission européenne, à l’OSCE, au Comité des hauts fonctionnaires de la Conférence européenne des ministres responsables de l’aménagement du territoire (CEMAT), pour information, et au CDLR, pour action. »
Annexe 1
Projets financés au titre du Programme des mesures de confiance du Conseil de l’Europe (CBM)
A la 14e réunion du Comité de pilotage du Programme des mesures de confiance (CBM), 46 projets au total ont été approuvés pour l’année 2002, dont 30 pourront être financés dans le cadre du budget du Conseil de l’Europe, les 16 autres étant ouverts à des contributions volontaires.
En 2002, 13 des projets approuvés doivent être mis en œuvre dans un contexte transfrontalier, principalement en Europe du Sud-Est
Groupe A1 (projets financés dans le cadre du budget du Conseil de l’Europe)
CBM (2002) 05
Coopération interethnique entre personnes appartenant aux mêmes groupes professionnels dans une perspective transfrontalière (Arménie, Azerbaïdjan, Géorgie)
CBM (2002) 06
Sans frontières! – Programme de formation à l’intention d’animateurs d’ONG (Bélarus, Lituanie, Pologne)
CBM (2002) 12
Dialogue entre médias grecs, turcs, chypriotes grecs et chypriotes turcs (Chypre, Grèce, Turquie)
CBM (2002) 25
Mesures de stabilité et de confiance – Réconciliation et dialogue entre pays dans une nouvelle phase des relations régionales (Bosnie-Herzégovine, Croatie, République fédérale de Yougoslavie, Hongrie et Roumanie)
CBM (2002) 27
Etudes concernant les Roms – Stage d’été: identité et intégration des Roms (Albanie, Bosnie-Herzégovine, Bulgarie, Croatie, République fédérale de Yougoslavie, Grèce, Moldova, Roumanie, Slovénie et « l’ex République yougoslave de Macédoine »)
CBM (2002) 26
Ateliers de formation au patrimoine en Europe du Sud-Est (Bulgarie, République fédérale de Yougoslavie, Grèce, Moldova et « l’ex République yougoslave de Macédoine »)
CBM (2002) 28
Comment créer la confiance et la tolérance entre jeunes (Bosnie-Herzégovine, Croatie et la République fédérale de Yougoslavie)
CBM (2002) 29
Enseignement des droits des minorités nationales (Bosnie-Herzégovine, Croatie et la République fédérale de Yougoslavie)
CBM (2002) 30
Mesures de réconciliation et de confiance entre Niksic et Dubrovnik
(Croatie et République fédérale de Yougoslavie)
CBM (2002) 31
Dialogue par-delà les barricades (Croatie et République fédérale de Yougoslavie)
Groupe A2 (ouvert aux contributions volontaires):
CBM (2002) 41
Projet multinational de mesures de confiance (Croatie et République fédérale de Yougoslavie)
CBM (2002) 42
Ponts (Croatie et République fédérale de Yougoslavie)
CBM (2002) 43
Acteurs, et non pas auditoire (République fédérale de Yougoslavie, Hongrie et Roumanie)
Annexe 2
Etat de coopération transfrontalière en Europe
La coopération transfrontalière en Europe progresse à un rythme considérable comme en atteste le nombre croissant d’accords intergouvernementaux, d’arrangements régionaux ou locaux, ou de programmes et de projets mis en œuvre dans ce domaine.
Pour évaluer cette progression de façon quantitative et qualitative, le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe a chargé le Comité Directeur sur la démocratie locale et régionale (CDLR), avec l’aide du Comité restreint d’experts sur la coopération transfrontalière (LR-R-CT), d’analyser l’état actuel de la coopération transfrontalière entre ses Etats membres.
Pour ce faire, deux questionnaires ont été transmis pour le premier aux autorités centrales ou fédérales et pour le second aux pouvoirs locaux et régionaux concernés par ces actions de coopération.
Le premier questionnaire, dont le principe a été décidé lors de la 17e réunion du LR-R-CT du 12 octobre 1998, a eu notamment pour but de dresser un bilan des bases juridiques nationales respectives de la coopération transfrontalière des pouvoirs locaux et régionaux, d’évaluer la portée de ces accords intergouvernementaux et arrangements régionaux ou locaux et, enfin, de recenser les obstacles pratiques à la coopération transfrontalière et les moyens mis en œuvre pour les surmonter.
Le second questionnaire, relevant d’un mandat du Comité des Ministres au CDLR sur la base de la décision CM/719/06092000, a eu pour objectif de demander l’avis des pouvoirs locaux et régionaux sur les possibilités données par leur base juridique nationale, sur les obstacles pratiques rencontrés et les mesures prises pour les éliminer et, enfin, sur les perspectives et les tendances de la coopération transfrontalière mais également de la coopération interterritoriale.
Les réponses aux deux questionnaires ont été synthétisées par le Secrétariat du Conseil de l’Europe dont le premier traite de « l’état actuel du cadre administratif et juridique de la coopération transfrontalière en Europe » et le second de « l’état de l’application de la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales ».
La synthèse générale qui peut être faite de ces deux documents montre que la coopération transfrontalière, notamment des pouvoirs locaux et régionaux , est effectivement en forte croissance tant sur le plan quantitatif que sur le plan qualitatif, notamment dans le degré d’intégration des projets et programmes transfrontaliers mis en œuvre. Cette volonté de s’engager plus témoigne d’ailleurs d’une motivation quasi-unanime des responsables politiques de tous les niveaux publics de favoriser les activités de coopération transfrontalière. Cette volonté politique se traduit le plus souvent par la conclusion d’accords intergouvernementaux ou d’arrangements régionaux et locaux qui améliorent logiquement la base juridique, en fait le « droit à la coopération transfrontalière » des pouvoirs locaux et régionaux. Enfin, l’action du Conseil de l’Europe dans la promotion de la coopération transfrontalière est généralement reconnue, même si l’Organisation n’a pas les capacités de cofinancement de l’Union européenne par exemple. Cette synthèse générale relève toutefois des obstacles à la coopération transfrontalière des pouvoirs locaux et régionaux dont certains handicapent fortement son développement. Il s’agit parfois de la base juridique même de cette coopération qui n’est pas suffisamment souple ou permissive en raison, dans certains cas, d’une insuffisance de pouvoirs dévolus à ces autorités territoriales. Un autre problème souvent évoqué par les pouvoirs locaux et régionaux est celui de l’insuffisance de crédits affectés spécifiquement à ces activités de coopération ou des difficultés de gestion de ces fonds. La barrière linguistique, là où elle est présente, commence à s’estomper mais représente encore une des difficultés principales de communication et d’échange. Un grand besoin de formation et d’expertise dans ce domaine, mais également dans un grand nombre d’autres aspects (juridiques, techniques, financiers …) de la coopération transfrontalière, semble donc nécessaire. Enfin, de nombreuses difficultés pratiques (différences politico-administratives, formalités douanières, manque d’infrastructures, mésentente interculturelle …) restent vivaces et nécessitent la mise en œuvre de solutions concrètes et d’échanges de bonnes pratiques à l’échelle du continent européen.
La mission du Conseil de l’Europe dans le domaine de la coopération transfrontalière est donc d’accompagner cette évolution de la coopération transfrontalière en passant du stade de la promotion des instruments juridiques (notamment la Convention-cadre et ses protocoles additionnels) à celui d’un accompagnement concret et technique des programmes et projets transfrontaliers là où cela est possible et nécessaire.