Réponse du Comité des Ministres a la Recommandation n° 39 (1998) du CPLRE.-Comité des Ministres, Délégués des Ministres.- Décision, 678/9.1a (septembre 1999)

ANNEXE 6

(point 9.1a)

Réponse du Comité des Ministres

a la Recommandation n° 39 (1998) du CPLRE

sur "L'incorporation de la Charte européenne de l'autonomie locale dans les ordonnancements juridiques des Etats l'ayant ratifiée et sur la protection légale de l'autonomie locale"

 

Dans sa Recommandation n° 39 (1998) – qui fait suite à la Recommandation n° 2 (1994) et à la réponse du Comité des Ministres à cette recommandation – le Congrès des Pouvoirs Locaux et Régionaux de l’Europe (CPLRE) a invité le Comité des Ministres à transmettre aux Parties contractantes de la Charte européenne de l’autonomie locale (ci-après la Charte) le troisième rapport du Groupe de travail chargé du contrôle de l’application de la Charte.

Le CPLRE a également demandé au Comité des Ministres qu’il adresse à ces mêmes Parties contractantes une recommandation reprenant les propositions que le CPLRE formule au point 7, lettres a. à j., de sa Recommandation n° 39 (1998). Ces propositions soulèvent, en particulier, les questions suivantes :

Dans ce contexte, le Comité des Ministres a constaté l’existence de certains problèmes dans la mise en œuvre de la Charte, y compris quelques défaillances en ce qui concerne la législation applicable dans le domaine de l’autonomie locale. Il ne saurait pour autant pas se rallier à l’opinion, que semble défendre le CPLRE, selon laquelle l’incorporation de la Charte dans les ordonnancements juridiques des Etats membres qui l’ont ratifiée « est un acte formel et nécessaire conformément aux règles régissant la mise en application des traités internationaux ».

Le fait que la Charte n’ait pas été incorporée dans le droit interne de tous les Etats l’ayant ratifiée s’explique au motif que chaque ordre juridique régit de façon souveraine les rapports entre droit international et droit interne.

Un jugement de valeur sur la solution retenue à cet égard revient à mettre en cause la bonne foi des Etats qui assument des obligations en adhérant aux traités internationaux et l'efficacité du processus de ratification de tels traités.

Vu les différences d’approches dans ce domaine, l’élaboration d’une recommandation qui demanderait l’incorporation de la Charte à tous les Etats l’ayant ratifiée soulèverait donc des problèmes difficiles à résoudre et ne serait pas appropriée.

Par ailleurs, le fait que la ratification de la Charte ne soit pas accompagnée de son incorporation n’est pas, en soi, de nature à réduire le caractère effectif des obligations assumées par un Etat, même si, dans ce cas, aucune des dispositions de la Charte n’est directement applicable.

Quelle que soit la solution retenue, la ratification de la Charte engage l’Etat à vérifier s'il faut modifier les dispositions légales existantes ou en adopter de nouvelles pour rendre le droit – ainsi que la pratique – interne compatible avec les obligations internationales découlant de cette convention.

Pour cette raison, la ratification implique, dans la quasi-totalité des cas, une procédure parlementaire. Il peut s'avérer, après analyse, que le droit interne est compatible avec les obligations découlant de la convention et qu'aucun acte législatif supplémentaire n'est nécessaire.

Il convient également de rappeler que l’incorporation dans l’ordre juridique interne d’un instrument conventionnel n’entraîne pas automatiquement l’applicabilité directe de ses dispositions. A cet égard, la portée générale des dispositions de la Charte rend peu probable que l’on puisse s’en prévaloir utilement devant un tribunal.

Le fait d’indiquer dans une recommandation les dispositions de la Charte susceptibles d’être appliquées directement n’aurait pas de valeur contraignante et ne lierait pas les juridictions internes. En conséquence, une telle recommandation ne permettrait pas d’améliorer, en pratique, la protection juridique de l’autonomie locale. Même lorsqu’il s’agit des dispositions de la Charte dont le contenu est plus précis, les tribunaux nationaux resteraient libres d’estimer qu’ils ne sont pas en mesure de statuer sur cette seule base.

Par contre, les objectifs de la Charte sont atteints – et la protection de l’autonomie locale est effective – lorsque le droit national est pleinement compatible avec les dispositions de la Charte et comprend des normes claires qui pourront être invoquées devant les tribunaux par les collectivités locales.

Enfin, le Comité des Ministres rappelle qu’en l’absence d’un mécanisme judiciaire de contrôle, il appartient aux Etats qui ont ratifié la Charte d’interpréter et d’appliquer de bonne foi ses dispositions. L’attention que, non seulement le Comité des Ministres en tant qu’organe collégial, mais aussi les Etats membres individuellement accordent aux conclusions et remarques que le CPLRE formule dans le cadre de ses procédures de contrôle politique est un signe évident à la fois de l’efficacité de l’action du CPLRE et de la bonne foi de ces Etats.

En ligne avec la décision prise à l’égard du deuxième rapport du Groupe de travail chargé du contrôle de l’application de la Charte, le Comité des Ministres a décidé de transmettre le troisième rapport de ce Groupe ainsi que la Recommandation 39 (1998) du CPLRE à tous les Etats membres, afin qu’ils puissent tenir compte des analyses et propositions du CPLRE.