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4e Conférence internationale des femmes roms

17-18 septembre 2013, Helsinki

Rapport final

Introduction

Les 17 et 18 septembre 2013, le gouvernement finlandais a organisé à Helsinki la 4e Conférence internationale des femmes roms, en coopération avec le Conseil de l'Europe. Une centaine de femmes roms de différents pays européens se sont réunies pour dresser le bilan des initiatives adoptées et des développements intervenus sur le terrain politique et au niveau de la communauté rom, et contribuer à une Stratégie pour la promotion du statut des femmes roms en Europe.

La 4e Conférence internationale des femmes roms organisée en Finlande fait partie d’une série d’initiatives similaires facilitées et soutenues par le Conseil de l’Europe et plusieurs gouvernements depuis 2003. Dans le cadre de ces forums, les femmes roms ont pu faire part de leurs préoccupations, échanger leurs expériences et se mobiliser collectivement pour atteindre des objectifs communs. Elles ont également souligné à plusieurs reprises la nécessité de trouver des modes de coopération durables et d’agir en réseau sur différentes questions prioritaires ou menaces. Ainsi, après le 3e Congrès international des femmes roms, qui s’est tenu en Espagne en 2011, les femmes roms ont travaillé conjointement avec le Conseil de l’Europe et le gouvernement finlandais pour élaborer des mécanismes permettant une consultation plus large des femmes roms, qui ont fortement contribué à la préparation de l’ordre du jour de la 4e conférence internationale. Les femmes roms ayant participé à la conférence ont contribué à l’élaboration d’une Stratégie pour la promotion des femmes et des filles roms en Europe (2014-2020). En outre, une plateforme appelée Phenjalipe (« Sororité ») a été lancée lors de la conférence afin d’appuyer la mise en œuvre du document final stratégique et de faciliter les échanges d’informations et la coordination au niveau régional sur les questions liées aux femmes et aux filles roms.

Cette stratégie, qui est un document d’orientation basé sur les discussions et recommandations provenant de femmes roms lors de la conférence d’Helsinki et tenant compte de diverses initiatives internationales et des normes relatives aux droits de l’homme, se veut un outil mis à la disposition des femmes roms dans leur travail de sensibilisation et d’élaboration de politiques mené avec différents partenaires ; des gouvernements nationaux et des collectivités locales ; des organisations intergouvernementales et des autres acteurs compétents. La stratégie figurera en annexe au présent rapport.

Domaines prioritaires de la conférence d’Helsinki

La conférence a accueilli trois ateliers parallèles consacrés aux thèmes suivants : « L’éducation comme condition préalable pour la réalisation des droits des femmes roms », « L’avancement des droits et de l’égalité des genres pour les femmes roms dans la société et mobilisation de la communauté » et « Le développement de la citoyenneté active, de la participation et de la mise en réseau des femmes roms ».

I.                    Atelier « L’éducation comme condition préalable pour la réalisation des droits des femmes roms »

L’atelier sur l’éducation a porté sur un certain nombre d’obstacles à l’accès des femmes et des filles roms à l’éducation. Il a également donné lieu à des discussions sur l’importance d’intégrer plus efficacement les éléments de l’identité rom dans le programme d’enseignement de différentes matières tout en promouvant un système éducatif ouvert et inclusif qui autorise des formes d’éducation modernes voire pionnières, adaptées aux besoins éducatifs locaux des enfants, et notamment des filles.

En effet, l’accès des filles roms à l’éducation est gêné par de nombreux obstacles internes ou externes. La pauvreté et l’exclusion sociale sont de réels problèmes, qui nuisent à la scolarisation de beaucoup de filles roms. La pauvreté empêche les parents roms d’envoyer leurs enfants à l’école car ils n’ont pas les moyens de payer tous les coûts liés à l’éducation. L’impact de la pauvreté a souvent un impact disproportionné sur l’éducation des filles roms, car celles-ci sont plus susceptibles de rater l’école pour assumer des responsabilités à la maison ou en raison de valeurs et pratiques culturelles. La discrimination à l’égard des filles roms revêt de multiples formes : accès impossible à toute éducation ; harcèlement et brimades à l’école par des camarades non roms et le personnel de l’établissement ; mauvaise qualité des infrastructures scolaires et de l’éducation, qui se traduit par un faible niveau d'alphabétisation, de faibles résultats scolaires et un fort taux de décrochage scolaire ; formes plus graves de discrimination comme la ségrégation et le placement abusif de filles roms dans des écoles pour enfants atteints de problèmes mentaux.

Le mariage précoce des filles roms a été identifié comme un obstacle aux études supérieures dans les communautés roms traditionnelles. Quant aux autorités publiques, elles le tolèrent et ferment souvent les yeux, même si la jeune fille et peut-être même le garçon sont mineurs, au motif que « c’est leur tradition ». Un acte illégal est ainsi justifié au nom d’un « héritage culturel ». Le décrochage scolaire des filles mariées est considéré comme une conséquence « naturelle », qui n’entraîne généralement ni contestation ni punition.

Les outils juridiques et politiques qui existent au niveau national, y compris les actions ciblées sur l’éducation des Roms, ne sont pas efficaces pour lutter contre l’exclusion sociale et la discrimination systémique des filles et garçons roms dans le domaine scolaire. Les lois antidiscrimination instaurent des possibilités de recours pour les victimes de discrimination, mais les actes de discrimination comme la ségrégation scolaire ne relèvent pas d’un enseignant ni même d’une école ; ils résultent en outre d’une pratique plus systémique, qui ne peut être résolue en portant plainte contre une école ou même le ministère de l’Education.

La plupart des participants à la conférence d’Helsinki ont déploré que de nombreuses institutions qui s’occupent de l’éducation n’appliquent pas une méthodologie adaptée aux groupes multiethniques. De plus, il manque à l’acte d’enseignement une perspective sur l’identité des Roms, leur contribution à la société, leur langue et leurs valeurs et traditions culturelles.

L’une des conclusions de l’atelier est que pour faire réellement évoluer l’éducation des filles et des femmes roms, il faut une approche plurielle à long terme et un engagement des institutions éducatives et d’autres secteurs de l’Etat et de la société à différents niveaux, y compris au sein de la communauté rom, mais aussi un réexamen et un suivi de leur impact. Les femmes roms ont adressé un nombre important de recommandations aux gouvernements nationaux, aux collectivités locales et à d’autres parties prenantes et acteurs de l’éducation. Ces recommandations sont présentées ci-dessous.

·         Recommandations aux autorités nationales et locales

ü  Prendre des mesures pour encourager l’assiduité scolaire et réduire le taux de décrochage scolaire des filles. Adopter des mesures appropriées pour accroître l’alphabétisation des filles roms, lutter contre l’absentéisme et le décrochage scolaire des filles et des garçons roms et réintégrer ceux qui ont déjà abandonné leurs études ;

ü  prendre des mesures d’urgence pour mettre fin à la ségrégation dans les écoles accueillant des enfants roms et intégrer ces derniers dans des établissements et des classes ouverts à tous et dispensant un enseignement de qualité ;

ü  prendre des mesures pour prévenir et combattre les stéréotypes, les préjugés et la discrimination dont sont victimes les filles roms à l’école et veiller à ce que les enfants roms soient éduqués dans un cadre éducatif inclusif, sans discrimination ni harcèlement ;

ü  s’occuper du problème des enfants roms laissés seuls par leurs parents migrants, en veillant à ce qu’ils soient scolarisés, à ce qu’ils aillent à l’école et à ce qu’ils suivent des études et en leur apportant le soutien psychosocial, l’aide à la réintégration et tout autre accompagnement dont ils ont besoin ;

ü  supprimer les obstacles financiers, administratifs et autres qui entravent l’accès des filles roms à l’éducation et permettre ainsi à ces dernières de bénéficier d’un enseignement adéquat et financièrement abordable. Instaurer des quotas pour les enfants issus de minorités afin de garantir l’accès des filles roms à l’enseignement secondaire et supérieur ;

ü  identifier les filles roms des communautés marginalisées et les aider systématiquement en veillant à ce qu’elles commencent l’école au même âge que les autres enfants et poursuivent leurs études jusqu’au niveau qu’elles souhaiteront atteindre ;

ü  recruter et former des femmes roms aux métiers d’enseignant, d’assistant pédagogique ou de médiateur pour améliorer l’intégration scolaire des enfants roms et contribuer à l’augmentation du nombre de professionnels roms ;

ü  élaborer et adopter des programmes d’apprentissage tout au long de la vie pour les parents roms afin de faciliter l’intégration sociale des parents et des enfants ; développer la formation professionnelle des femmes roms adultes en s’appuyant sur les besoins réels ;

ü  revoir la formation des enseignants pour y inclure la lutte contre la discrimination, une sensibilisation à la situation respective des hommes et des femmes et une formation interculturelle. En outre, la formation pédagogique devrait présenter, le cas échéant, des outils modernes ou pionniers comme la formation avec supports visuels, la formation collective sur le terrain, des ateliers régionaux sur les méthodes d’enseignement, des programmes d’échange, etc. ;

ü  réviser les programmes scolaires pour y inclure des éléments de l’histoire, de la culture et des traditions roms, passées et présentes, aux fins de l’enseignement primaire, secondaire et supérieur ;

ü  compiler et diffuser des bonnes pratiques pour des approches inclusives, interculturelles et adaptées à la situation spécifique des femmes, en vue de former les enseignants ;

ü  réfléchir aux nouveaux moyens d’enseignement pour garantir l’accès de toutes les filles roms à l’éducation, quelle que soit leur situation, notamment grâce à la téléformation, l’apprentissage mobile et la formation à distance ;

ü  mettre en œuvre des mesures positives pour accroître le nombre d’enfants roms qui sortent diplômés de l’enseignement post-secondaire et universitaire ;

ü  prendre des mesures pour sensibiliser les parents roms à l’importance  de l’école maternelle, à la lutte contre le décrochage scolaire et à la nécessité de donner la priorité à l’éducation de leurs enfants ; mener des actions sur le terrain avec les parents roms pour combler les lacunes et remédier aux problèmes ;

ü  mobiliser davantage de ressources pour mettre en avant des modèles et les inclure dans les programmes scolaires ;

ü  collecter des données ventilées par sexe et par appartenance ethnique au sujet de l’alphabétisation des filles roms et de leur niveau de participation, en vue de garantir leur scolarisation effective et de prévenir leur décrochage scolaire, et évaluer l’impact des différentes difficultés sur l’éducation des filles roms par rapport à celle des garçons roms et des élèves non roms ;

ü  s’engager davantage à refléter les priorités éducatives concernant les questions de genre et les femmes et filles roms dans les stratégies nationales et locales d’intégration des Roms ;

ü  élaborer des systèmes d’évaluation et de suivi concernant la façon dont les questions de genre et les questions relatives aux femmes roms sont intégrées dans les politiques et mesures concernant les Roms, l’inclusion sociale et l’égalité entre les hommes et les femmes ;

ü  trouver et utiliser des fonds structurels pour promouvoir et soutenir l’éducation des filles roms ;

ü  améliorer la coopération avec les communautés roms ; adopter une approche positive pour faire évoluer les mentalités sur les communautés roms ;

ü  aider les femmes roms à développer des initiatives aux niveaux local et régional ;

ü  dispenser aux femmes et aux filles roms une éducation aux droits de l’homme pour leur donner les moyens de revendiquer et de défendre leurs droits.

·         Recommandations à l’Union européenne

L’éducation est une partie importante du cadre de développement global de l’UE après 2015, qui met particulièrement l’accent sur l’amélioration de l’équité et de la qualité. Dans le budget du développement, l’UE a pris un engagement ferme en faveur du développement humain et de l’inclusion sociale et a annoncé qu’elle allouerait 2,5 milliards EUR pour soutenir l’enseignement élémentaire ainsi que l’enseignement et la formation techniques et professionnels sur la période 2014-2020. Une enveloppe supplémentaire de 1,5 milliard EUR devrait être allouée pour soutenir la coopération européenne dans le domaine de l’enseignement supérieur et le programme de mobilité.

L’Union européenne devrait :

ü  faire en sorte que, d’ici à 2030, tous les enfants, y compris les filles roms, ait suivi au minimum un enseignement élémentaire et possède des compétences fondamentales en lecture, en écriture et en calcul ;

ü  travailler avec des pays partenaires et des partenaires pour le développement – ainsi que d’autres acteurs comme le secteur privé et les représentants des jeunes – pour garantir une approche coordonnée afin d’améliorer les résultats en matière d’éducation des filles roms et d’harmoniser le soutien avec les projets éducatifs nationaux. Cela suppose de continuer à soutenir le Partenariat mondial pour l’éducation et de travailler sur des stratégies concernant l’efficacité de l’aide internationale ;

ü  définir la ségrégation comme une discrimination illégale en vertu du droit communautaire et européen.

·         Recommandations au Conseil de l'Europe

ü  Travailler avec les gouvernements pour combattre les stéréotypes et les préjugés contre les filles roms dans le cadre de l’éducation ;

ü  soutenir les activités qui informent les parents, les enseignants et les élèves sur le génocide des Roms ;

ü  former le personnel éducatif/enseignant à la lutte contre la discrimination et à l’éducation inclusive pour prévenir la ségrégation, améliorer l’accès des filles roms à l’éducation, et favoriser un cadre scolaire inclusif ;

ü  faire en sorte que le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux et des initiatives internes facilitent l’élaboration de plans d’actions locaux sur l’intégration des Roms, qui tiennent compte des questions de genre, de la situation des filles roms et des effets de la pauvreté sur leur accès à l’éducation et leur parcours éducatif ;

ü  faire en sorte que le CAHROM conserve les questions relatives aux femmes roms dans son programme de travail, organise régulièrement des visites thématiques et publie régulièrement des rapports sur l’éducation des Roms, en mettant l’accent sur la situation des filles roms.

II.                  Atelier « Développement de la citoyenneté active, de la participation et de la mise en réseau des femmes roms »

Les participants à cet atelier ont globalement déploré que les femmes roms soient généralement exclues de la vie sociale, économique et politique en raison de la discrimination et de leur faible niveau d’instruction ou de formation, des stéréotypes de genre et des rôles traditionnels, de l’absence de garantie quant au maintien dans leur logement, de la ségrégation dans les domaines du logement et de l’éducation et du manque de pouvoir. La famille et la société en général n’accordent souvent aucune attention au fait que ce sont les femmes qui s’occupent du foyer et qui sont les gardiennes des valeurs et de l’héritage familial. Leur niveau de participation politique est extrêmement faible, avec une représentation minime au niveau local dans les conseils municipaux. Sur le plan de la mobilisation, des tentatives ont été faites pour créer une structure fédératrice, mais il n’existe actuellement aucun réseau opérationnel ou activité représentant les intérêts des femmes roms au niveau international. On trouve en revanche des ONG de femmes roms avec un ancrage local ou national. Ces organisations ne sont pas toujours guidées par une vision stratégique mais plutôt par un instinct de survie institutionnelle.

Il subsiste de nombreuses inégalités structurelles qui limitent la capacité des femmes roms à participer équitablement à la société. L’absence d’estime de soi, la rareté des modèles auxquels s’identifier, le manque de soutien des pairs et le fossé entre les femmes roms qui forment la base et celles qui occupent des postes plus élevés sont autant d’obstacles qui empêchent d’exercer des fonctions de pouvoir. Il faudrait par conséquent développer une citoyenneté plus active et plus engagée, en dialoguant, en sensibilisant aux questions sociales et en encourageant la participation des citoyens pour éclairer l’élaboration des politiques et des pratiques sociales et créer ce que bell hooks (2003) appelle une « communauté enseignante », au sein de laquelle les personnes peuvent véritablement participer, écouter et apprendre les unes des autres.

Promouvoir un comportement de citoyen actif peut soutenir les processus de cohésion sociale et contribuer à l’amélioration de la qualité de vie et du bien-être social. Etre un citoyen actif suppose d’avoir les outils pour gérer l’exercice de la culture démocratique et de sentir que l’on a un rôle à jouer dans sa communauté, que ce soit par choix ou par nécessité. Au final, la notion de citoyenneté active nécessite que les individus et les groupes aient un sentiment d’appartenance aux sociétés et aux communautés dont ils font théoriquement partie. Elle est par conséquent étroitement liée à la promotion de l’inclusion et la cohésion sociales et aux questions d’identité et de valeurs.

Dans le cas des femmes roms, pour comprendre la notion de citoyenneté active, il faut évaluer non seulement comment elles participent en tant que citoyennes, mais aussi pourquoi les problèmes qui ont une incidence principalement sur les femmes ont été systématiquement ignorés ou banalisés dans les discours sur la citoyenneté.

Les obstacles décrits par les femmes roms pendant la conférence d’Helsinki se situent au niveau local. Les tentatives d’améliorer les conditions de vie des Roms n’aboutiront que si les femmes roms participent en tant que citoyennes à part entière et sur un pied d’égalité.

Certaines conclusions tirées de l’atelier ont souligné la nécessité de mener des activités axées sur la formation, le soutien et la mobilisation de jeunes femmes (roms et non roms) sur le terrain. Les jeunes femmes roms ont le potentiel d’explorer divers moyens de combattre les stéréotypes ; elles devraient donc être soutenues pour dialoguer activement avec les collectivités locales et créer des partenariats tout en promouvant une gouvernance locale plus efficace et tenant davantage compte des femmes. Il est ainsi important d’encourager les jeunes femmes roms et de leur donner la confiance nécessaire pour jouer un rôle actif. Un accompagnement et un soutien permanents des jeunes femmes roms peuvent contribuer à mobiliser et à autonomiser les communautés, tout en soutenant et en garantissant l’épanouissement durable des individus et des communautés.

·         Recommandations aux autorités nationales et locales

ü  Revoir, modifier et corriger toute loi, politique ou pratique ayant un impact négatif disproportionné sur les femmes et les filles roms et instaurer des mécanismes adéquats pour prévenir et combattre la discrimination, y compris la discrimination causée par les multiples facteurs qui entravent l’accès des femmes roms à l’éducation, à l’emploi, aux soins de santé, à la protection sociale, au logement, etc. ;

ü  intégrer les préoccupations des femmes roms dans les politiques, les programmes et les initiatives concernant les questions de genre, les Roms et l’inclusion sociale, notamment en créant des commissions/groupes de travail sur les questions relatives aux femmes roms dans les gouvernements nationaux et les collectivités locales ;

ü  prendre des mesures concrètes pour permettre aux femmes et aux jeunes filles roms de participer activement au processus décisionnel et à l’élaboration des politiques qui les concernent aux niveaux local, régional et national et garantir ainsi leur participation effective à la vie sociale, économique, culturelle et politique ;

ü  élaborer des plans et des programmes visant à garantir la participation effective des femmes roms à la vie publique et politique. Ces projets devraient inclure l’adoption de mesures positives telles que des quotas, l’élaboration de programmes d’éducation et de formation destinés à renforcer la capacité des femmes et des jeunes filles roms, des mesures pour garantir la diversité et le multiculturalisme du personnel de l’administration publique et l’allocation de moyens suffisants pour atteindre les objectifs fixés. Il convient aussi de réfléchir à un programme national annuel en faveur de la participation politique des femmes roms ;

ü  créer un mécanisme pour suivre les progrès réalisés en vue d’accroître la participation des femmes et des jeunes filles roms et garantir leur représentation significative et égalitaire dans la vie publique et politique à tous les niveaux ;

ü  supprimer les obstacles qui empêchent la participation effective des femmes roms à la vie publique et politique en révisant ou en adoptant des lois, des politiques et des programmes ;

ü  les femmes roms qui deviennent responsables de leur communauté devraient être soutenues et encouragées pour servir d’exemples positifs dans leur communauté et dans la société en général ;

ü  promouvoir l’éducation des femmes roms adultes et l’apprentissage tout au long de la vie afin que ces femmes puissent participer activement à la société et acquérir leur autonomie ;

ü  associer les hommes roms et les responsables roms aux programmes et aux ateliers afin de faire évoluer les perceptions et pratiques traditionnelles et de mettre fin à la discrimination dont sont victimes les femmes roms au sein de leur propre communauté ;

ü  promouvoir et soutenir l’autonomisation des femmes et des filles roms en apportant un soutien aux mesures relatives à leur autonomisation économique et au respect de leurs droits en général ;

ü  veiller à ce que les femmes roms puissent exercer leurs droits économiques, en élaborant des politiques visant à renforcer leurs capacités et en créant des possibilités d’emploi pour qu’elles puissent échapper aux rôles traditionnels qui leur sont dévolus en tant que femmes ;

ü  soutenir les mesures comme la formation à la diversité, les initiatives commerciales ou les systèmes de quotas pour parvenir à la pleine participation des femmes roms à la société et garantir leur participation sur un pied d’égalité ;

ü  faciliter, en particulier au niveau local, l’accès des femmes roms aux microcrédits afin de permettre le lancement de petites entreprises et concevoir des programmes de formation à l’utilisation des microcrédits et à la gestion d’une entreprise ;

ü  en collaboration avec les organisations qui défendent les droits des Roms et des femmes, chercher à garantir pleinement les droits culturels des femmes roms, notamment par la promotion du dialogue interculturel et de l’éducation inclusive dans les programmes scolaires et par une coopération entre les institutions et les parties prenantes à différents niveaux ;

ü  encourager les ONG et les groupes de femmes roms à travailler avec les autorités locales et nationales pour élaborer des politiques, en représentant les intérêts des femmes et des filles roms et des communautés roms ;

ü  promouvoir et soutenir l’échange de bonnes pratiques sur la bonne gouvernance concernant l’intégration des questions de genre et des questions relatives aux femmes roms dans la politique et la pratique (comme le programme Socrate de 1994 sur l’éducation des adultes mené avec huit Etats membres[1]).

III.                Atelier « L’avancement des droits et de l’égalité des genres pour les femmes roms dans la société et mobilisation de la communauté »

Les participants à la conférence d’Helsinki ont souligné l’extrême pauvreté et l’exclusion sociale vécues par les femmes et les filles roms dans tous les pays européens. Leur expérience est sensiblement différente de celle des hommes roms et des femmes non roms. Elles se heurtent au problème supplémentaire du racisme et à la discrimination liée au genre, qui les relègue à la marge de la société. Le faible niveau d'études, les taux élevés d’absentéisme scolaire et de décrochage scolaire, le chômage important et le manque de possibilités d’emploi en particulier pour les femmes roms des zones rurales privent les femmes et les filles roms de moyens réalistes de s’intégrer et de participer pleinement à la société. La montée du racisme et de l’antitsiganisme dans le contexte de la crise économique mondiale et de la mobilité internationale des familles roms fait planer une menace sur la sécurité des femmes et des filles roms et les expose de plus en plus à l’exclusion sociale, à l’exploitation, à la traite et à la violence. Les rôles familiaux traditionnels que doivent assumer de nombreuses femmes roms sont des facteurs supplémentaires d’exclusion. Les mariages précoces et les mariages d’enfants demeurent fréquents dans les communautés roms traditionnelles. Si l’on constate une tendance à l’amélioration des relations entre les femmes roms et les hommes roms, il reste beaucoup à faire pour que les femmes roms deviennent autonomes et prennent conscience qu’elles peuvent faire des choix et échapper aux rôles qui leur sont assignés.

Les femmes roms se sentent souvent exclues des processus de consultation et de décision concernant les lois, les politiques et les programmes, y compris ceux qui visent spécifiquement à améliorer leur situation. De nombreuses femmes roms travaillant au niveau local déplorent que leurs connaissances et leur expertise sur les problèmes de droits de l’homme rencontrés par leur communauté soient négligées par les responsables politiques au niveau local comme national. Beaucoup sont découragées de constater que même lorsque leur communauté est consultée, c’est souvent par l’intermédiaire d’un responsable masculin qui n’est pas nécessairement sensibilisé ni informé de leur situation et de leur vécu particulier.

Les participants à la conférence ont souligné l’importance de tenir compte des préoccupations et des priorités des femmes roms. L’intégration des questions de genre et des préoccupations et priorités des femmes roms, à la fois dans la politique et dans la pratique, permettrait aux pouvoirs publics d’apporter des réponses pour faire progresser l’égalité et lutter contre la discrimination. La prise en compte des questions de genre introduit dans le processus d’élaboration des politiques publiques une culture de l’évaluation de l’impact, de suivi et de réexamen, ce qui améliore l’efficacité des politiques axées spécifiquement sur les femmes roms ; elle élimine également les obstacles auxquels sont confrontées les femmes roms victimes d’inégalités, réduit la pauvreté, stimule la croissance économique et renforce la citoyenneté. Cela crée les conditions pour l’émancipation et l’autonomie des femmes roms.

Les femmes roms ont discuté longuement de la nécessité d’accroître la mobilisation de leur communauté et de renforcer les capacités des ONG et des groupes de femmes roms, ainsi que du travail en réseau et du travail en partenariat avec les acteurs compétents. Elles ont insisté sur la nécessité de créer et développer les réseaux de femmes roms pour faire des questions qui les touchent une priorité pour les gouvernements nationaux et les collectivités locales, les organisations internationales, les institutions des droits de l’homme et les groupes de femmes. Elles ont également discuté de l’importance de donner des avis éclairés et des informations aux organes chargés de l’élaboration des politiques et des programmes et aux organes de suivi des droits de l’homme.

Les participants ont également débattu de la nécessité d’inclure et prendre en compte les multiples identités, expériences et appartenances des femmes roms (Gens du voyage, personnes déplacées ou réfugiées, LGBT, Sintés, Ashkali, Egyptiens, etc.) et de renforcer la solidarité et la coopération entre les différents groupes de femmes roms en Europe pour combler les écarts concernant l’engagement et la participation de ces groupes de femmes dans plusieurs pays.

Les femmes roms ayant participé à la conférence d’Helsinki ont conclu que le fait de soutenir la création d’une plateforme ou d’un réseau paneuropéen de femmes roms pourrait aider à mobiliser les femmes roms dans divers pays, à instaurer une solidarité et un partenariat pour remédier aux inégalités qui touchent les femmes roms, répondre aux défis et traiter les priorités aux niveaux national et international, et accroître la visibilité nationale et internationale des questions relatives aux femmes roms.

·         Recommandations aux autorités nationales et locales

ü  Intégrer les questions de genre et les préoccupations des femmes roms dans toutes les politiques et dans tous les programmes aux niveaux national et local. Allouer des ressources adéquates aux projets destinés à traiter les priorités des femmes roms. Les gouvernements dont le budget tient compte de la question du genre ou des minorités devraient veiller à ce que leur budget intègre et cible les femmes roms ;

ü  identifier et supprimer les obstacles qui empêchent la participation des femmes roms à la prise de décision en adoptant une approche systématique et cohérente ;

ü  promouvoir et soutenir la création ou le renforcement des associations locales, des groupes et des réseaux  de femmes roms qui puissent mobiliser et exprimer leur voix dans les forums appropriés et agir en tant que partenaires des autorités locales et nationales ;

ü  prendre des mesures pour développer la capacité des groupes et organisations locaux de femmes roms. Soutenir la formation, faciliter les possibilités de travailler en réseau, mobiliser les militantes et les jeunes au niveau local ;

ü  promouvoir et encourager la participation active des femmes roms aux activités des autorités locales, et notamment aux politiques locales (par exemple en s’inscrivant sur les listes électorales et en se présentant aux élections) ;

ü  l’administration publique à tous les niveaux (local, régional et national) devrait être encouragée à recruter des femmes roms pour garantir la diversité et la participation effective à la gouvernance locale et nationale ;

ü  investir dans l’autonomisation économique, éducative et politique des femmes roms ;

ü  élaborer des mécanismes permettant de travailler avec les parents roms pour remédier à la situation défavorisée des filles et des garçons roms dans le domaine de l’éducation en accordant une attention particulière aux obstacles culturels qui entravent l’éducation des filles roms dans certaines communautés roms ;

ü  soutenir les programmes de rattrapage scolaire et d’apprentissage tout au long de la vie pour les femmes roms ;

ü  accroître le nombre de filles et de femmes roms qui étudient au lycée et à l’université grâce à des dispositifs de bourses et à d’autres mesures positives ;

ü  accroître le nombre de femmes roms exerçant les fonctions de médiateur de santé, assistant pédagogique ou travailleur social et garantir la pérennité de leurs fonctions dans tous les pays où il existe de tels programmes, sans limiter leur accès à ces fonctions sur le marché du travail ;

ü  mettre en place des programmes axés sur la communauté et gérés par la communauté pour créer des possibilités d’emploi pour les femmes roms ;

ü  créer de nouvelles formes d’emploi et de travail indépendant pour les femmes roms ; promouvoir l’entrepreneuriat des femmes roms grâce à des fonds structurels ;

ü  élaborer des programmes encourageant les femmes roms des régions rurales à pratiquer l’agriculture.

·         Recommandations aux organisations intergouvernementales

ü  Intégrer les questions relatives aux femmes roms dans tous les mécanismes, objectifs et activités en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes ;

ü  soutenir et développer des approches sur l’intégration des questions de genre/ des questions relatives aux femmes roms dans les politiques et les programmes en remédiant aux inégalités et en traitant les préoccupations et les priorités des femmes et des filles roms ;

ü  soutenir le renforcement des capacités et l’autonomisation des militantes roms et des ONG de femmes roms par la formation, des ateliers, des programmes d’échange et des visites d’études ainsi qu’un soutien institutionnel, une aide à l’élaboration de programmes et des subventions ;

ü  soutenir les projets locaux sur les droits des femmes roms et leur autonomisation ;

ü  favoriser l’implication des femmes roms dans des initiatives locales sur les femmes, les Roms et/ou les femmes roms mises en œuvre en particulier par les collectivités locales ;

ü  soutenir la mise en réseau et la coopération des mouvements associatifs de femmes roms au niveau international ;

ü  développer et promouvoir les bonnes pratiques sur l’intégration des questions relatives aux femmes roms dans les politiques et les pratiques et l’autonomisation des femmes roms ;

ü  encourager la collecte de données ventilées par sexe et par appartenance ethnique en y incluant les femmes et les filles roms ;

ü  le Conseil de l’Europedevrait travailler avec les gouvernements et les médias pour faire connaître la culture et l'histoire roms, combattre les mythes et stéréotypes négatifs et rapprocher les communautés roms et non roms.

·         Recommandations aux ONG et réseaux de femmes roms

ü  Développer et/ou renforcer l’expertise sur l’intégration des questions de genre et des préoccupations et priorités des femmes roms dans la politique et la pratique en élaborant des indicateurs, en intégrant les approches dans des politiques sectorielles, etc. ;

ü  créer des partenariats durables pour intégrer les questions relatives aux femmes roms dans les politiques locales et nationales ;

ü  s’employer à autonomiser les femmes roms et les communautés au niveau local ;

ü  sensibiliser les femmes roms à leurs droits et obligations, promouvoir leurs capacités et faciliter leur accès aux services publics et au processus décisionnel au niveau local et/ou national ;

ü  soutenir la création de réseaux et forums nationaux et internationaux de femmes et de filles roms en veillant à faire participer des femmes et des filles roms de tous horizons et ayant toutes expériences.

Durant les discussions qui se sont tenues dans ces trois ateliers, les femmes roms ont mis en lumière leurs préoccupations et proposé des recommandations dans des domaines connexes. Le présent rapport contient donc aussi les recommandations formulées dans ces domaines.

EMPLOI

Au cours des trois ateliers, les femmes roms ont exprimé leurs préoccupations quant à la restriction de leur accès au marché du travail, à la discrimination dominante et au risque accru de chômage. Les femmes roms sont souvent les premières à perdre leur emploi en période de crise économique et sont souvent cantonnées à des emplois peu qualifiés, précaires et mal payés dans certains secteurs spécifiques et dans le secteur informel. Les obstacles à l’accès des femmes roms au marché du travail sont notamment le manque d’instruction, le manque d’informations sur les possibilités d’emploi, l’éloignement du lieu de travail, le manque d’infrastructures publiques pour la garde d’enfants, les traditions culturelles et les rôles sociétaux assignés aux femmes, la discrimination liée au genre et à l’appartenance ethnique concernant le recrutement, les promotions et le salaire. Sur le marché du travail informel, les femmes roms sont souvent privées de protection du travail élémentaire et travaillent dans des conditions non seulement médiocres mais aussi précaires, difficiles, préjudiciables voire dangereuses.

·         Recommandations aux autorités nationales et locales

ü  Allouer des ressources pour développer les possibilités d’emploi qui s’offrent aux femmes roms, notamment par l’éducation, l’alphabétisation, la formation professionnelle (y compris l’acquisition de compétences pour diriger des petites entreprises), l’accès au crédit et au marché pour exercer leurs droits économiques, et chercher et créer de nouvelles formes d’emploi au sein et en dehors de leur communauté ;

ü  faire en sorte que les femmes roms exercent leurs droits économiques, en élaborant des politiques destinées à renforcer leurs capacités et en créant des possibilités d’emploi pour qu’elles puissent échapper aux rôles traditionnels qui leur sont dévolus en tant que femmes ;

ü  mettre en place des programmes axés sur la communauté et gérés par la communauté pour créer des possibilités d’emploi pour les femmes roms ;

ü  créer de nouvelles formes d’emploi et de travail indépendant pour les femmes roms ; promouvoir l’entrepreneuriat des femmes roms grâce à des fonds structurels ;

ü  promouvoir et soutenir le recours à l'artisanat rom – en particulier celui pratiqué par des femmes – pour créer de petites entreprises ;

ü  élaborer des programmes encourageant les femmes roms des régions rurales à pratiquer l’agriculture ;

ü  Les administrations publiques à tous les niveaux devraient être encouragées à recruter des femmes rom

ü  l’administration publique à tous les niveaux (local, régional et national) devrait être encouragée à recruter des femmes roms.

SOINS DE SANTÉ

Les femmes roms sont préoccupées par les obstacles auxquels elles font face pour bénéficier de soins de santé. Elles reçoivent souvent des soins inadaptés ou de mauvaise qualité ou vivent dans des endroits dépourvus de services de santé. Les prestataires de soins de santé, dont les hôpitaux, devraient empêcher les pratiques discriminatoires à l’égard des femmes roms comme le refus de soin, la mise à l’écart dans des unités séparées ou les interventions médicales sans le consentement de la patiente, par exemple la stérilisation forcée.

·         Recommandations aux autorités nationales et locales

ü  Evaluer et, au besoin, améliorer l’accès des femmes roms à l’information sur l’offre de services, les services sociaux, les services de l’enfance et les soins santé ;

ü  faire en sorte que les services de santé soient adaptés autant que possible et accessibles aux familles itinérantes. Il faut examiner les bonnes pratiques existantes, comme le recrutement de femmes roms parmi le personnel médical et les médiateurs de santé pour travailler étroitement avec les communautés roms et contribuer ainsi à jeter des passerelles entre les femmes roms et les services sociaux et de santé ;

ü  réfléchir à la mise en œuvre d’activités visant à inspirer confiance aux prestataires de soins de santé et aux femmes roms ;

ü  faire en sorte que les familles roms, en particulier celles des campements isolés et des communautés itinérantes/migrantes, aient accès aux services de santé locaux, y compris aux services de proximité, aux structures itinérantes et aux services d'interprètes si nécessaire ;

ü  veiller à ce que les services de santé bénéficient aux femmes et aux enfants roms et incluent des soins préventifs, notamment la vaccination des jeunes enfants, et à ce que les informations sanitaires soient aisément accessibles.

LOGEMENT ET HÉBERGEMENT

Dans le contexte de l’augmentation du nombre d’expulsions, de retours forcés de Roms dans leur pays d’origine et du manque d’infrastructures pour les communautés des Gens du voyage, de nombreuses préoccupations relatives au logement et à l’hébergement ont été exprimées tout au long de la conférence d’Helsinki. Les femmes roms sont, davantage que les hommes roms, en butte à la pauvreté, aux préjugés, à la marginalisation et à des restrictions liées au genre, ce qui se traduit souvent par des difficultés accrues sur le plan du droit à un logement convenable. Dans les quartiers pauvres roms, les habitations sont souvent dépourvues de cuisine, de toilettes, de douche/bain ou d’électricité, ce qui pose de sérieux problèmes aux femmes et aux enfants roms, notamment pour la santé.

·         Recommandations aux autorités nationales et locales

ü  Cartographier et évaluer les difficultés liées au logement et à l’hébergement auxquelles se heurtent en particulier les femmes et les enfants roms, notamment leurs possibilités d’accès à l’eau, à la nourriture, aux soins de santé et à l’éducation ;

ü  élaborer des stratégies pour mettre fin à la ségrégation résidentielle des Roms, remplacer ou rénover les logements existants ou donner accès à des logements dotés de toutes les commodités de base (eau potable, évacuation des eaux usées, gaz, électricité, ramassage des ordures et routes pavées) afin de faciliter l'inclusion sociale ;

ü  veiller à ce que les familles itinérantes/migrantes puissent s'installer sur des sites convenables, dotés des commodités de base et bénéficiant d'une gestion efficace, et à ce qu'il y ait une concertation avec les résidents installés alentour afin de résoudre tout problème et de favoriser la cohésion sociale ;

ü  régulariser le droit des Roms d'occuper leur logement ou les terrains, éviter les expulsions forcées et mettre à leur disposition d'autres lieux d'hébergement respectant les normes minimales en matière de logement si des expulsions forcées sont inévitables ;

ü  identifier des terrains sur lesquels des logements temporaires de Roms pourraient être installés dans le respect de la réglementation environnementale et sanitaire.

VIOLENCE LIÉE AU GENRE ET TRAITE DES ÊTRES HUMAINS

La violence domestique envers les femmes et les filles roms est rarement débattue et dénoncée, par peur qu’elle ne stigmatise encore plus toute la communauté rom. De même, les femmes roms sont particulièrement exposées à la traite des êtres humains, en particulier lorsqu’elles vivent dans la pauvreté, dans des zones de conflit ou dans des régions isolées ou frontalières. Beaucoup sont piégées par de fausses promesses d’un avenir meilleur à l’étranger et se retrouvent dans des situations désespérées, loin de chez elles et de leur cercle de soutien. Les femmes et les filles roms défavorisées peuvent également être particulièrement vulnérables à d’autres formes d’esclavage moderne, notamment le travail forcé, la servitude pour dettes, le travail des enfants, la vente d’enfants, la prostitution forcée ainsi que le mariage forcé et précoce.

·         Recommandations aux autorités nationales et locales

ü  Mettre en place des mesures systématiques pour identifier les pratiques de violence et prendre des dispositions fermes pour mettre fin aux violations ;

ü  renforcer la coopération bilatérale, régionale et internationale visant à éliminer la traite, en ciblant les femmes et les enfants roms ;

ü  il faudrait créer des institutions régionales et les doter d’un plan d’action concret pour combattre et prévenir toutes les formes de violence/traite, en accordant une attention explicite aux femmes et aux filles roms ;

ü  élaborer et mettre en œuvre des programmes d’orientation et de soutien qui tiennent compte des spécificités culturelles et soient accessibles aux femmes roms ;

ü  les pratiques qui créent et/ou perpétuent des inégalités entre les hommes et les femmes et/ou qui violent les droits des femmes et des filles roms, notamment le mariage des enfants, doivent être combattues avec l’aide des communautés roms concernées et la participation effective des femmes roms ;

ü  les représentants gouvernementaux et les agents de la force publique, les travailleurs sociaux, les professionnels de la santé et les autres acteurs concernés devraient recevoir une formation sur l’égalité entre les femmes et les hommes, la non-discrimination et la violence à l’égard des femmes, y compris la violence domestique, et sur la situation particulière des femmes et des filles roms.

MÉDIAS ET LIBERTÉ D’EXPRESSION

Les médias privés et publics relayent souvent les idées reçues et les stéréotypes sur les femmes roms, en les présentant comme des incultes, seulement capables d’être des femmes au foyer, ou comme des objets sexuels. Les femmes roms s’inquiètent du phénomène croissant du discours de haine et de l’antitsiganisme, par lequel des acteurs publics incitent à la violence, à la haine ou à la discrimination et profèrent publiquement des insultes, des diffamations ou des menaces contre les Roms. Le discours de haine conduit souvent à des infractions motivées par la haine, qui causent des dommages irréversibles et des souffrances aux Roms, et en particulier aux femmes et aux filles roms.

·         Recommandations

ü  L’exercice du droit à la liberté d’expression devrait être limité dans le respect des normes juridiques internationales afin de lutter contre le racisme et de protéger la dignité humaine des femmes et des hommes roms ;

ü  les gouvernements devraient veiller à ce que des lois et des lignes directrices sensibilisent les médias à la non-discrimination et à l’utilisation de références et d’un langage appropriés ; il convient aussi de faire en sorte que ces textes soient mis en œuvre ;

ü  le travail des médias devrait être supervisé par des organes de suivi indépendants afin de veiller au respect des normes ; en cas de violation, des sanctions devraient être imposées ;

ü  les médias devraient évaluer et accroître la représentation des femmes roms dans leur personnel et à tous les niveaux ;

ü  il faudrait veiller à donner une image positive des femmes roms lors de la programmation des émissions. Cela suppose notamment de présenter les femmes roms de manière positive et de sensibiliser à la diversité de leurs perspectives et de leurs expériences personnelles.

LE BESOIN DE DONNÉES VENTILÉES

Si des efforts encourageants sont faits au niveau politique européen pour mettre en avant les besoins et les préoccupations des femmes roms[2], ces dernières soulignent que les initiatives en faveur des femmes et des filles roms pâtissent de l’absence de données fiables sur leur situation socioéconomique. Il est crucial d’avoir des données exactes, ventilés selon l’appartenance ethnique, le sexe et l’âge, pour mieux comprendre les problèmes des femmes et des filles roms et permettre des interventions ciblées. Cela peut nécessiter une reconnaissance explicite, de la part de certains gouvernements, que les Roms constituent un groupe ethnique sur leur territoire. La collecte des données, leur traitement et leur utilisation devraient être totalement transparents. Il est indispensable de s’appuyer sur des indicateurs concernant l’égalité des chances et la non-discrimination pour élaborer, suivre et évaluer régulièrement les programmes ciblés visant à améliorer la situation des femmes roms et à lutter contre la discrimination à leur égard.

·         Recommandations aux autorités nationales et locales

ü  Pour pouvoir planifier, concevoir, mettre en œuvre et suivre efficacement les politiques et les programmes spécifiques en faveur de l’intégration des Roms, en particulier des femmes et des filles, les gouvernements devraient lancer des collectes de données élaborées et menées en consultation avec les femmes roms ;

ü  la collecte de données ventilées devrait servir à évaluer la situation existante, à estimer les ressources disponibles, à examiner l’accès concret à ces ressources et leur utilisation, et à évaluer leurs résultats et leur impact ;

ü  la collecte de données devrait se faire en tenant compte des sensibilités culturelles et sur la base du volontariat, en respectant totalement la vie privée et l’anonymat des personnes concernées et en se conformant aux normes internationales relatives à la protection des données à caractère personnel. Il faudrait aussi réfléchir à l’élaboration de rapports nationaux ou de livres blancs sur le statut des femmes et des filles roms.

Suivi de la conférence d’Helsinki

La participante rom turque à la conférence d’Helsinki a indiqué que le gouvernement turc souhaitait accueillir la 5e Conférence internationale des femmes roms. En conséquence, le Conseil de l’Europe prévoit d’organiser, avec le nouveau réseau informel de femmes roms Phenjalipe, une réunion de réflexion en mars 2014 avec les autorités turques afin de discuter de la possibilité que la Turquie accueille la 5e Conférence internationale des femmes roms à Istanbul en 2015.

Avant l’approbation du présent rapport par les participants à la conférence et les membres de Phenjalipe (mars 2013), plusieurs activités de suivi supplémentaires ont eu lieu, dont certaines ont été facilitées par le Conseil de l’Europe avec le soutien financier du gouvernement finlandais.

Le 4 octobre 2013, Phenjalipe a assisté à sa première manifestation publique lors de la cérémonie de lancement de ROMACT et ROMED2 en Hongrie, qui a réuni 100 parties prenantes nationales et internationales.

Le 18 novembre 2013, Phenjalipe a organisé un événement sur l’« intégration des priorités des femmes roms » en marge de la Réunion supplémentaire de l'OSCE/BIDDH sur la dimension humaine à l’occasion du 10e anniversaire du Plan d’action visant à ameliorer la situation des Roms et des Sintis dans l’espace de l’OSCE.

Les 26 et 27 novembre 2013, le Conseil de l'Europe a organisé à Lisbonne, dans le cadre de son programme ROMED2 avec l’UE et en collaboration avec un groupe de femmes roms, la première rencontre de femmes roms au Portugal.

Le 17 février 2014, une réunion d’experts rassemblant des femmes roms s’est tenue au sein du Conseil de l’Europe afin de réviser le document final de la conférence d’Helsinki et la Stratégie pour la promotion des femmes et des filles roms 2014-2010 et d’élaborer un plan d’action biennal (2014-2016) pour atteindre les objectifs de la stratégie. Un Groupe de travail de femmes roms a été créé pour mettre en œuvre la stratégie. Cette réunion a été suivie d’une autre,  le 18 février 2014, qui était consacrée à l’« intégration des questions de genre dans les programmes ROMACT et ROMED2 du Conseil de l'Europe/de l’UE ».

Le 24 février 2014, le Conseil de l’Europe a organisé conjointement avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme en République de Moldova, ONU Femmes, le point de contact de l’OSCE pour les questions relatives aux Roms et aux Sintés et l’ONG rom moldave Tarnă Rom une table ronde sur « la participation politique des femmes roms aux niveaux national et local » à Chişinău. Le membre lituanien du CAHROM a assisté à cette réunion à titre d’observateur.

La Lituanie a d’ailleurs proposé de créer un groupe thématique du CAHROM sur l’autonomisation des femmes roms et la dimension de genre des politiques d’inclusion des Roms, et d’être le pays demandeur pour une visite thématique d’experts du CAHROM à Vilnius du 4 au 6 juin 2014. La Finlande et l’Espagne pourraient figurer parmi les pays partenaires de ce groupe thématique.

A l’occasion de la Journée internationale de la femme (12 mars 2014), Phenjalipe, le Forum européen des Roms et des Gens du voyage (FERV) et le Conseil de l’Europe dans le cadre de sa campagne Dosta! organiseront à Strasbourg une réunion sur le statut des femmes roms. Les objectifs sont de sensibiliser aux obstacles et défis auxquels se heurtent les femmes roms dans leur vie quotidienne, de faire le point sur les mesures positives au niveau politique et sur le terrain et d’encourager l’action du Conseil de l’Europe visant à promouvoir le statut des femmes et des filles roms. Les participants à la réunion débattront de la situation des femmes roms dans les Etats membres du Conseil de l’Europe et s’intéresseront à des questions spécifiques comme la surreprésentation des femmes et des filles roms parmi les victimes de la traite, les mariages précoces, la représentation des femmes roms dans les organes élus et l’administration publique et le rôle des femmes roms en tant qu’actrices de leur vie et de la vie de leurs proches.

Les conclusions de la conférence d’Helsinki, la Stratégie pour la promotion des femmes et des filles roms en Europe (2014-2020) et le plan d’action biennal pour la mise en œuvre de cette stratégie en 2014-2016 seront présentés et examinés lors de la 7e réunion du CAHROM qui se tiendra à Strasbourg du 14 au 16 mai 2014.



[1] Danemark, Espagne, France, Grèce, Irlande, Norvège, Portugal  et Royaume-Uni.

[2] Les conclusions du Conseil de l’UE de 2011 sur le Cadre de l’UE pour les stratégies nationales d'intégration des Roms soulignent qu’« il y a lieu de prêter une attention particulière aux intérêts et aux difficultés des femmes et des filles roms, qui risquent de subir des discriminations de plusieurs ordres, et il faut donc intégrer le souci d'équité entre les hommes et les femmes dans toutes les politiques et actions destinées à faire progresser l'intégration des Roms ».